caillou https://www.peren-revues.fr/demeter/848 Entrées d’index fr 0 Le caillou, mythologie matérielle de l'Art Brut https://www.peren-revues.fr/demeter/845 Jean Dubuffet, en inventant le concept d'art brut et en initiant une aventure collective au sortir de la Seconde Guerre mondiale, prétend remettre en question non seulement les codes esthétiques mais aussi idéologiques de son temps. En prenant pour appui des œuvres réalisées dans les circuits non officiels de l'art, le discours sur l'art brut véhicule un imaginaire « anti-moderne » où la nature, le peu, le non élaboré, la trouvaille occupent une large part. Chacune de ces notions constitue autant de mythes qui se surajoutent à la matérialité des œuvres pour contrer la notion d’« arts culturels » inventée par Dubuffet. Le caillou est une de ces mythologies matérielles. Trouvé au sol, ne requérant aucune transformation, seulement celle de l'imagination, il n'est pas coûteux à la différence du marbre. Les œuvres en caillou s'opposent aux sculptures académiques. Leur collecte relève d’un modèle agraire – celui de la « récolte » – et non du savoir-faire développé en atelier. Leur caractère informe se prête aux plaisirs de l'imagination. Offert par la nature, il est le symbole d'une beauté simple, naturelle, qui nous invite à être attentif à ce qui est à nos pieds, au moment présent. À partir d'exemples concrets tirés de la Collection de l'Art Brut, rassemblés entre 1945 et 1970 – les silex de Juva, en particulier –, cet article montre que le caillou est transformé par les compagnons de l'Art Brut en objet porteur de valeurs « anti-culturelles », voire d'une idéologie qui replace la nature au centre de la vie et de l'art. Jean Dubuffet, by inventing the concept of art brut and initiating a collective adventure at the end of the Second World War, claims to question not only the aesthetic but also the ideological codes of his time. By taking as support works produced in the unofficial circuits of art, the discourse on art brut conveys an “anti-modern” imaginary where nature, the little, the unelaborate, the trouvaille occupy a large part. Each of these notions constitutes myths which are superimposed on the materiality of the works to counter the notion of “cultural arts” invented by Dubuffet. The pebble is one of these material mythologies. Found on the ground, requiring no transformation, only that of the imagination, it is cheap unlike marble. Pebbles contrast with academic sculptures. Their collection is based on an agrarian model – that of "harvesting" – and not on the know-how developed in the artist studio. Their formless character lends itself to the pleasures of the imagination. Offered by nature, it is the symbol of a simple, natural beauty, which invites us to be attentive to what is at our feet and to the present moment. Based on concrete examples taken from the Art Brut Collection, gathered between 1945 and 1970 – the flints of Juva, in particular –, this article shows that the pebble is transformed by the companions of Art Brut into an object carrying "anti-cultural" values and an ideology that puts nature back at the center of life and art. lun., 12 sept. 2022 08:54:47 +0200 lun., 23 janv. 2023 15:03:53 +0100 https://www.peren-revues.fr/demeter/845