Le texte de Michel Roché publié ici reprend et amplifie un texte antérieur, qui a circulé à partir de 2017 mais n’a jamais été publié (Roché, 2017). Pourquoi faire précéder le présent texte d’une note liminaire visant à fournir des repères au lecteur ? Parce que le texte en question présente ou reprend des idées très intéressantes pour la morphologie mais que leur présentation reste par endroits incomplète ou imprécise, ce qui ne permet pas de bien saisir ce qui est proposé non plus que les enjeux qui se cachent derrière les traitements esquissés.
C’est par exemple le cas du premier paragraphe, qui traite de la distinction entre famille de mots fondée sur l’étymologie et sur la dérivation. Du point de vue de l’étymologie, la famille s’organise à partir de l’étymon le plus ancien et forme un arbre, sur le modèle d’une famille généalogique. En morphologie dérivationnelle en revanche, les relations entre les mots sont d’ordre synchronique et se situent à l’intérieur d’une langue. Ainsi
Ponceau ne sera pas « “[hérité] du latin ponticellus” mais dérivé de pont. Absentéisme ne sera pas “emprunté à l’anglais absenteeism” mais construit sur absent. […] Mais on ne peut pas éliminer ces mots sous prétexte qu’ils n’ont pas été formés en français. Ils sont bien présents dans la langue et motivés par rapport à un autre mot apparenté par la forme. Dans la famille dérivationnelle telle qu’elle fonctionne aujourd’hui, un ponceau est un petit pont et l’absentéisme la propension à être absent.
Mais Michel Roché ne précise pas de quoi ces mots ne peuvent être éliminés. Si l’on utilise la distinction terminologique introduite par Hathout (2011) entre ‘famille dérivationnelle lexicale’ et ‘famille dérivationnelle morphologique’, il n’y a rien à éliminer. Ponceau et absentéisme font chacun partie de la famille dérivationnelle lexicale (pont, ponceau, pontonnier, apponter ; absent, s’absenter, absence, absentéisme), mais pas de la famille dérivationnelle morphologique, précisément parce que ces mots n’ont pas été construits en français mais sont, respectivement, un héritage du latin et un emprunt à l’anglais comme cela est dit dans la citation. Il est dommage que l’auteur n’ait pas été plus précis sur ce point car cela nous prive d’outils descriptifs bien utiles.
L’idée directrice de l’auteur est que la morphologie dérivationnelle se place à l’articulation du sens et de la forme. Elle ne s’occupe des mots qu’en tant qu’ils sont construits (point de vue sémasiologique). Si elle ne part pas, à proprement parler, des sens pour voir comment ils s’incarnent dans les mots (point de vue onomasiologique), la morphologie dérivationnelle est tout de même une morphologie du lexique, au sens où elle fonde les relations qu’elle met au jour dans le lexique.
Pour apprécier les propositions faites par Michel Roché, il faut avoir une idée de la conception de la morphologie qui existait dans les années 1970-1980 et celles qui ont suivi, quand le courant génératif découvrait que la morphologie dérivationnelle constituait un domaine à part entière et que les approches transformationnelles traitaient la dérivation par la syntaxe (Gross, 1977 ; Dubois & Dubois-Charlier, 1999). Le texte de Michel Roché est, en grande partie, une réaction au traitement de faits morphologiques dérivationnels qu’on proposait alors, en France notamment, sachant que celle-ci était l’un des rares pays où l’on entreprenait de décrire des phénomènes dérivationnels de manière exhaustive1, pour eux-mêmes, et non simplement pour fournir des arguments à telle ou telle théorie. On peut exhumer au moins trois points de vue que les travaux de Michel Roché sont venus contrebattre sans répit.
A. Les régularités observées en dérivation peuvent être adéquatement décrites par des modèles basés sur des règles. Celles-ci ont une formulation unique, la dérivation est orientée et s’accorde souvent avec la diachronie. La citation suivante résume ce point de vue :
On a tendance à voir les familles dérivationnelles comme les familles de mots étymologiques, des familles de mots dont on aurait simplement éliminé certains éléments et où la racine serait remplacée par le primitif. Donc comme des arborescences à orientation unique. Cette conception est évidemment confortée par l’idée que la construction des lexèmes serait commandée par des règles, des règles orientées toujours dans le même sens, d’un input – la base – vers un output – le dérivé.
B. Le traitement des phénomènes dérivationnels doit être unifié : on doit s’efforcer de postuler une seule règle pour tous les cas ou du moins un traitement unique pour le phénomène étudié. Les arguments en faveur de cette vision des choses découlent essentiellement des postulats théoriques adoptés à l’époque : le traitement sera plus simple, un affixe donné s’attache à une seule catégorie lexicale (hypothèse de la base unique), etc. L’article Corbin & Corbin (1991) constitue l’exemple le plus abouti d’un traitement unifié tenté sur un phénomène particulièrement complexe, la dérivation en ‑ier du français.
C. On s’intéresse avant tout aux phénomènes réguliers, ceux qui sont centraux pour un type de dérivation donné et qui sont clairement formulables. Cette opinion n’est pas revendiquée en tant que telle, mais elle peut se déduire des descriptions morphologiques qui se pratiquaient alors dans les travaux internationaux : ils avaient tendance à laisser de côté le détail des phénomènes quand ils devenaient trop complexes.
L’article de Michel Roché s’oppose frontalement au point de vue A et de manière plus incidente aux points de vue B et C. Avant de développer sur le point A, je dirai un mot des deux derniers.
La question du traitement unifié (point B) a fait l’objet d’une critique serrée dans plusieurs articles (Roché, 1998, 2006, 2011) auxquels je renvoie. Ces travaux montrent de manière convaincante qu’un tel traitement augmente la complexité des analyses car il conduit à postuler des étapes dérivationnelles ad hoc ou injustifiées. Le point de vue C pouvant difficilement faire l’objet d’une critique frontale, c’est en décrivant des procédés dérivationnels peu réguliers (parmi lesquels les dérivés en ‑ier (Roché, 1998)), ou non conventionnels (Roché, 2008), que Michel Roché a montré qu’il existait aussi des phénomènes dérivationnels présentant une régularité éclatée, difficile à saisir, qui rentrent pourtant de droit dans le champ de la morphologie. La manière de rendre compte adéquatement de ces phénomènes n’a guère progressé car il y a eu peu d’études les concernant et aucune proposant des modèles qui décriraient ce qui se passe. Tout reste à faire pour le moment.
Pour ce qui concerne les problèmes posés par le point de vue A, ils visent à être réglés par l’introduction du concept de réseau à la présentation duquel le reste de l’article est consacré.
L’objectif du réseau est de capter de manière holistique des régularités existant entre des unités apparentées, qu’on exprimait antérieurement par des relations terme à terme. Le concept n’est pas totalement nouveau puisqu’il a déjà été introduit en morphologie sous l’appellation de « paradigme dérivationnel » (Bauer, 1997 ; Štekauer, 2014) et invoqué dans certaines approches depuis longtemps (Dokulil, 1994). Des travaux récents permettent néanmoins de préciser les choses. Formellement, les réseaux, comme les paradigmes, sont des graphes ; une définition précise des paradigmes a été proposée par Bonami & Strnadová (2018), auquel je renvoie. Il nous suffit ici de savoir qu’un paradigme est une collection de familles morphologiques structurées par le même système d’oppositions de contenu, une famille morphologique étant définie comme un n-uplet de mots tel que chaque membre wj de la famille est morphologiquement relié à n’importe quel autre membre wk. Les mots en question occupent les cases du paradigme, qui sont les équivalents des nœuds du réseau. Il est crucial que les relations d’alignement entre les membres du paradigme soient maintenues constantes.
Michel Roché présente les deux réseaux fondamentaux qu’il avait introduits dans son travail de 2017, le réseau activité et le réseau action, en mettant toutefois plus d’emphase sur le premier que sur le second. La distinction entre ces deux réseaux se justifie par le fait que le second est centré sur le verbe, qui dénote une action exécutée par un agent, alors que le premier est centré sur le nom d’activité, le verbe correspondant pouvant ne pas exister comme verbe simple. J’ai montré (Fradin, 2021)2 qu’il était fondé de distinguer ces deux réseaux et que les travaux sur l’aspect verbal et nominal fournissaient des critères permettant, d’une part, de discriminer les nœuds ayant une fonction cruciale dans chacun des réseaux et, d’autre part, de prédire quels membres d’une famille dérivationnelle pouvaient figurer dans chaque réseau. Ainsi, les noms d’activité (jardinage, danse, journalisme, judo) ont-ils les propriétés des noms massiques (Huyghe, 2011) et les verbes d’activité qui leur correspondent s’incarnent-ils généralement dans l’expression verbale faire (de la | du) N-activité, ex. faire de la danse, faire du journalisme. De leur côté, les verbes du réseau action sont des verbes dénotant un accomplissement ou une activité au sens vendlérien.
Introduire un réseau suppose qu’on définisse une structure, en l’occurrence qu’on spécifie le nombre de nœuds (ou de cases du paradigme) qu’aura le réseau, qu’on justifie ces nœuds et qu’on en précise la nature. Pour le réseau activité, Michel Roché se sert d’une structure à trois cases Objet, N-activité, N-humain (ex. journal, journalisme, journaliste) dans presque tout l’article, sauf à la fin où il propose le schéma 1 à quatre cases, qui reprend celui donné dans Roché (2017). Mais, le schéma du réseau action n’est pas donné. Sur la base de ce qui en est dit dans le travail examiné ici, dans Roché (2017) et dans Fradin (2021), je propose le schéma 2 pour le réseau action, illustré par les familles morphologiques (incomplètes) données en (1). Le nombre de cases du réseau action est variable parce que la présence des nœuds instrument (ins), moyen (mns) et résultat (rslt) dépend du nombre d’actants qu’aura la construction régie par le verbe ; par exemple, il faut un verbe d’accomplissement pour avoir un nœud « résultat ». Le cœur de ce réseau sont les nœuds Verbe, N-action et N-agent.
Objet |
|
N-activité |
N-humain |
V-activité |
Schéma . Réseau activité
Verbe |
||||
N-action |
N-agt |
N-ins |
N-mns |
N-rslt |
Schéma . Réseau action
(1) |
a. |
riveter, rivetage1, riveteur, riveteuse, rivet, rivetage2 |
b. |
balayer, balayage, balayeur, balai, —, balayure |
Le premier intérêt des réseaux est qu’ils nous permettent de nous débarrasser de la question de l’orientation des dérivations. La question de savoir si journaliste dérive de journalisme (‘personne qui pratique le journalisme’) ou l’inverse (journalisme ‘activité du journaliste’) disparaît. Les cas où l’orientation est indécidable (médecin, médecine) ne constituent plus un problème. L’autre intérêt est de montrer que les familles dérivationnelles peuvent s’organiser en sous-familles, ce qui ouvre des perspectives sur l’organisation du lexique. Michel Roché énonce, à juste titre, que « Nage est un nom d’action, natation un nom d’activité », ce qui laisse prévoir les instanciations données en (2a) et (2b) pour les réseaux activité et action respectivement.
(2) |
a. |
—, natation, nageur, faire de la natation / nager |
b. |
nager, nage, nageur, —, —, — |
Mais les choses sont plus compliquées, car nage ne passe pas très bien les tests linguistiques permettant de déceler qu’un N est un nom d’action (Fradin, 2021 ; Dowty, 1979 ; Verkuyl, 1993 ; Rothstein, 2007).
(3) |
a. |
(le balayage | la course | le rivetage | ?*la nage) a duré 10 mn |
b. |
c’est arrivé pendant (le balayage | la course | le rivetage | ?*la nage) |
Ce comportement découle du fait que nage dénote une manière de nager. Dire « en compétition, il existe quatre nages », c’est dire qu’il existe quatre manières de nager (papillon, dos, brasse, crawl) et non qu’il existe quatre actions de nager3.
Cette organisation en sous-famille se voit très bien avec la famille dérivationnelle construite sur parachute (Fradin, 2021). Les deux réseaux, activité (4) et action (5), ont parachute en commun (je renvoie à l’article cité pour le détail de la discussion).
(4) |
a. |
objet, N-activité, N-humain, V-activité |
b. |
parachute, parachutisme, parachutiste, faire du parachutisme |
|
(5) |
a. |
V, N-action, N-agent, N-instrument |
b. |
parachuter, parachutage, parachuteur, parachute |
Notons qu’on rencontre très peu d’attestations de parachutiste au sens de ‘personne qui fait du parachutisme’ (ou mieux encore qui ‘fait du parachute’). FrWaC n’en contient qu’une poignée, qui apparaissaient dans un contexte sportif4. Cette situation fait que parachutiste dénotant un militaire n’entre dans aucun de ces deux réseaux, alors même qu’il s’agit du sens le plus attesté pour ce mot. En effet, un parachutiste militaire ne fait pas du parachutisme mais est parachuté dans les zones d’opérations. Il ne parachute rien non plus. On doit donc conclure que les réseaux dérivationnels n’incluent pas forcément tous les membres d’une famille dérivationnelle donnée.
Michel Roché discute longuement du nœud « Objet » dans le réseau activité. Les mots qui figurent sous ce nœud dénotent, en gros, ce qui motive l’activité ex. journal pour journalisme ; il reprend même la définition donnée par le Grand Robert pour objet : « ce pour quoi une entreprise est faite ». Comme le note Michel Roché, une partie des mots qu’il serait fondé de mettre dans la case objet, si l’on s’en tient aux corrélations formelles qui structurent la famille dérivationnelle, apparaissent totalement inadéquats du point de vue sémantique. C’est le cas de ébène pour ébénisterie ou carrosse pour carrosserie2. Il faut raconter une histoire pour comprendre qu’ils aient pu servir d’origine à la famille en question (Corbin & Corbin, 1991 ; Corbin et al., 1993). Je propose de reformuler les propositions de Michel Roché sous la forme (6b) et (6c).
(6) |
a. |
objet, N-activité, N-humain, V-activité |
b. |
ébène:H | meubles, ébénisterie, ébéniste, faire des meubles |
|
c. |
carrosse:H | carrosserie1, carrosserie2, carrossier , réparer les carrosseries1 |
Le H indique qu’historiquement, le mot en question a servi de base formelle à la famille, mais qu’il est aujourd’hui déconnecté de celle-ci. Le mot placé de l’autre côté du trait fournit le nom qui dénote l’objet du réseau dans la langue actuelle : ce nom se retrouve dans l’expression verbale qui sert de verbe d’activité au réseau ; l’ébéniste fait (ou fabrique) des meubles et le carrossier répare des carrosseries1 de voitures. On notera que les verbes d’activité de ces réseaux ne peuvent prendre la forme faire de la N-activité comme le montre (7a-b) ou encore (7c-d) discutés dans Fradin (2021). Cette agrammaticalité était mise sur le compte du fait que l’activité en question produit des objets concrets d’une seule espèce (kind), dénotée par un nom qui subsume tous les objets produits. Fromage, chapeau sont des noms de ce type, et meubles, carrosseries1 aussi. C’est pourquoi les formulations (8) constituent des expressions verbales qui décrivent correctement l’activité associée aux réseaux de ce type.
(7) |
a. |
*faire de l’ébénisterie |
b. |
*faire de la carrosserie2 |
|
c. |
*faire de la fromagerie |
|
d. |
*faire de la chapellerie |
|
(8) |
a. |
(faire | fabriquer) des meubles |
b. |
(faire | réparer) des carrosseries1 |
|
c. |
(faire | fabriquer) des fromages |
|
d. |
(faire | fabriquer) des chapeaux |
Le réseau qui inclut quincallerie, quincallier se coule dans le modèle donné en (6), la seule différence étant que quincaille n’est plus un mot existant dans la langue actuelle. On aurait donc : †quincaille:H | quincaillerie1, quincaillerie2, quincailler , vendre de la quincaillerie1.
Dans certains réseaux, Michel Roché associe le nœud « objet » à des contenus qui semblent plus problématiques. Ainsi, à côté de chirurgie, chirurgien trouve-t-on ‑chir‑, ‑urg‑, ou encore ‑péd‑, ‑iatr‑ pour pédiatrie, pédiatre. Se pose alors la question de savoir comment ces éléments non autonomes sont obtenus. Cette question est identique à celle que posait la délimitation des morphèmes dans l’approche structuraliste. Existe-t-il des procédures réglées pour les obtenir ? Pourquoi chercher à couper en morceaux les unités linguistiques quand une mise en corrélation directe des mots/lexèmes permet d’éviter les problèmes tout en permettant de construire les paradigmes (Ackerman, Blevins & Malouf, 2009; Blevins, 2016) ? Ces questions ne sont pas abordées. Au plan empirique, il serait judicieux de reprendre cette question à partir de ce qu’on sait des créations mettant en jeu des composés ou des dérivés savants (Namer, 2007; Namer & Villoing, 2007).
Notons que Michel Roché admet que « dans plusieurs des exemples rencontrés (enseignement/enseignant, vente/vendeur, danse/danseur, écriture/écrivain) l’objet de l’activité est représenté par un verbe (enseigner, vendre, danser, écrire), qui a donc clairement sa place dans le réseau activité ». Mais si l’on reprend la définition du Grand Robert donnée plus haut, cela voudrait dire que « vendre est ce pour quoi la vente est faite » ou « enseigner est ce pour quoi l’enseignement est fait ». On constate que ces formulations sont fortement pléonastiques et ne rendent pas compte du sens de ces verbes. Dans les cas en question, il serait donc préférable de laisser vide le nœud « objet ».
Ainsi que le note Michel Roché et comme l’illustre (2a), pour le réseau activité le V-activité peut être instancié à la fois par l’expression verbale faire (de la | du) N-activité (faire de la natation) et par un verbe simple (nager). Ces deux contenus ne sont toutefois pas équivalents, car si faire de la natation implique nager, nager n’implique pas que l’on fasse de la natation. Il s’ensuit que seul le verbe simple peut figurer aussi dans le réseau action.
Dans la suite de l’article, Michel Roché passe en revue un certain nombre d’autres corrélations entre dérivés qu’il présente comme des réseaux. Les deux premiers qu’il donne mettent en jeu des adjectifs et des verbes. En fait, il s’agit d’adjectifs et de verbes formés sur des noms (ébénistique, espionner) plutôt que de réseaux dont l’origine serait un verbe ou un adjectif non dérivé. Comme réseau fondé sur un verbe, seul le réseau activité semble exister. En revanche, aucun n’a jamais été proposé dont l’origine serait des adjectifs simples.
Le reste de l’article est consacré à la présentation de plusieurs autres réseaux, dont certains avaient déjà fait l’objet d’études publiées. Sont mentionnés le réseau basé sur un nom d’instrument (canot, canoter, canotage, canotier), celui basé sur un nom de personne (pion, pionner, pionnicat), le réseau statut (évêque, épiscopat, évêché), le réseau axiologique (proudhon, proudhonien, proudhoniste, proudhonisme), le réseau ethnique et gentilé (Malais, malais, Malaisie, malaisien), le réseau événement (fête, fêtard, fêter). Si très peu d’exemples sont fournis pour illustrer ces réseaux et si la justification des nœuds qu’ils comportent (et leur nombre) n’est généralement pas donnée, la discussion n’en demeure pas moins intéressante et éclairante, bien qu’elle sollicite parfois des cas relativement spécifiques (maçon/maçonner, maquereau/maquereller) et que l’on se demande quels sont les dérivés réguliers qui pourraient illustrer les réseaux en question.
Il est normal que les réseaux tirés au clair dans le travail de Michel Roché prennent de la substance et deviennent plus perceptibles au fur et à mesure que des exemples sont ajoutés et discutés. Dans la perspective d’une poursuite de ce travail, il serait souhaitable de proposer des batteries de tests qui permettent de formuler des jugements d’acceptabilité visant à établir l’existence et la configuration des réseaux en question. En effet, seuls de tels jugements montrent que ces réseaux ne sont pas des créations discursives, mais sont fondés dans un possible/impossible de langue (qui doit être évalué par des travaux quantitatifs). Ce fondement ne peut être établi que par les linguistes.