La mobilité est au cœur des enjeux pour rendre les villes durables. D'un point de vue environnemental, les déplacements urbains sont une des sources majeures de pollution locale et d'émissions de gaz à effet de serre (GES). D'un point de vue économique, la qualité de desserte des territoires est un facteur de leur attractivité et de leur dynamisme. D'un point de vue social, l'offre de transports conditionne l'accessibilité des habitants aussi bien à l'emploi qu'aux services et commerces ou aux loisirs. Les Plans de Déplacements Urbains (PDU) sont l'outil principal dont disposent les collectivités locales pour une meilleure maîtrise de la mobilité. Les objectifs en termes énergétiques et d'émissions ont été renforcés par le grenelle de l'environnement. L'évaluation des PDU est maintenant obligatoire, ainsi que leurs incidences environnementales.
Le séminaire « Évaluation environnementale des Plans de Déplacements Urbains » (Nantes, 26-28 juin 2012) visait à présenter les résultats du projet de recherche Eval-PDU (Mestayer et al., 2012), et à faire un état des lieux et ouvrir les discussions sur l’évaluation environnementale des PDU, notamment au travers d’interventions invitées et de tables rondes1.
1. Le projet Eval-PDU
Dans le cadre du programme « Villes Durables » de l’agence Nationale de la recherche et d’échanges entre Nantes Métropole et l'Institut de recherche en Sciences et techniques de la Ville (IRSTV), le projet Eval-PDU traitait de l’évaluation des impacts environnementaux multifactoriels d'un PDU et de leurs conséquences socio-économiques2 Il comportait un volet recherche sur le développement de la méthodologie d’évaluation, et un volet applicatif sur le cas du PDU nantais 2000-2010 (Nantes Métropole réalisant par ailleurs ses propres évaluations).
L’approche, basée sur une cascade de modèles dont chaque étage alimente en données les étages suivants, a été présentée par les chercheurs du projet. Les flux de trafic (Jacques Bougnol, CETE de l'ouest) sont traduits en impacts associés : d’une part, consommations et émissions de polluants des véhicules (Michel André, IFSTTAR Lyon) puis concentrations de polluants atmosphériques réglementés (Thierry Schmidt, air Pays de la Loire), et d’autre part indices de nuisance sonore (Judicaël Picaut, IFSTTAR Nantes). Ces données environnementales constituent ensuite des entrées d’un modèle de prix hédoniques pour en étudier les conséquences socio-économiques (Bernard Fritsch, ESO Nantes). En parallèle, les calculs d'émissions servent à renseigner un indicateur d’impacts sanitaires (Robert Joumard, IFSTTAR Lyon). La gestion des données alimentant les différents modèles et transitant entre eux est facilitée par l'infrastructure de données spatiales CartoPolis appuyée sur le système d’information géographique collaboratif de l’IRSTV OrbisGIS (Erwan Bocher, IRSTV).
L'évaluation est réalisée via des scénarios alternatifs (Bernard Bourges, EMN-École des Mines de Nantes). Ils sont définis suite à des échanges entre les équipes modélisatrices et les acteurs opérationnels. Le recours à des scénarios rappelle qu’un impact environnemental est relatif à la différence entre deux situations représentatives des objectifs d’évaluation. En parallèle, des analyses de sensibilité ont été sélectionnées dans le souci de tester des situations menant à des impacts significatifs (contrastes suffisants) et/ou à se rapprocher des limites de pertinence des modèles.
Le programme comportait des études complémentaires sur les comportements des usagers (Serge Karsenty, DCS univ. Nantes), sur des méthodes d'évaluation simplifiées d'actions spécifiques (Laurent Fouillé, EMN) et sur l'environnementalisation de la gouvernance locale (Jacques Fialaire, DCS). Un retour d'expérience final, incluant ce séminaire, visait à préciser les limites des méthodes mises en œuvre et testées sur des scénarios nantais, et à proposer des améliorations en vue d'évaluations performantes.
Les deux premières journées du séminaire ont été consacrées aux questions de recherche soulevées par le programme EvalPDU, tandis que la troisième portait principalement sur les questions d'application opérationnelle. on présente ici principalement les conférences invitées et les débats des tables rondes, en se focalisant sur le contexte et les pratiques d’évaluation environnementale de PDU, et sur les modélisations liées à la qualité de l’air3.
2. Contexte de l’évaluation environnementale des PDU
Odile Heddebaut (IFSTTAR Lille) a rappelé le contexte de l’évaluation des politiques publiques de transport, soulignant la difficile articulation entre les différents échelons institutionnels. Au niveau local, les objectifs d’évaluation des PDU ont évolué avec l’élargissement des cibles fixées par les lois successives (LOTI, LAURE, SRU). Les exigences d’évaluation environnementale ont été renforcées par la Directive européenne 2001/42/CE. Cette évaluation est obligatoire pour tous les nouveaux PDU ou révisions de PDU depuis 2005 (cf. ordonnance n°2004-489 du 3 juin 2004).
Laurence Rouïl (INERIS) a fait le point sur les enjeux réglementaires liés à la Directive européenne 2008/50/CE sur la qualité de l’air. La France fait face à deux points noirs : le No2 et les particules (PM10). Ces émissions viennent très largement des trafics routiers, d’où des actions spécifiques comme les Zones d'actions Prioritaires pour l'air (ZAPA). L’évaluation est indispensable pour s’assurer de l’efficacité de ces plans d’action, et seule la modélisation peut répondre à ce questionnement, notamment pour l’analyse spatiale et les études de scénarios.
Mohamed Ouba (ADEME) a noté que les pratiques d’évaluation restent insuffisantes. L’effet réel des actions est donc mal connu. Une combinaison d’actions est nécessaire pour atteindre les objectifs sanitaires. Une des difficultés est de différencier les contributions aux émissions (de fond, locale, etc.) et d’analyser l’efficacité des politiques mises en œuvre (aux échelles européenne, nationale, locale).
Fabien Leurent (université Paris-Est) a présenté les méthodes d’évaluation des politiques de transport. Jusqu'à récemment, l’approche dominante visait la construction d’un indicateur économique de synthèse, intégrant les coûts et bénéfices pour les différents acteurs. L’évaluation environnementale amène une remise en cause du schéma d’évaluation économique classique. L’apport vient notamment des approches de type analyse de cycle de Vie (ACV) et causalité envisageant les interactions. Ces approches, encore peu appliquées pour les transports, seraient à investiguer (cf. bonnes pratiques identifiées en Nouvelle-Zélande et en Autriche).
3. Objectifs et pratiques des collectivités
Joël Garreau (Nantes Métropole) a souligné l’importance de l’évaluation pour les collectivités pour comprendre les mécanismes associés aux actions et pour en mesurer les effets.
Fabienne Marseille et Nicolas Merle (CERTU) ont présenté un retour d’expérience de 14 évaluations environnementales de PDU4 Compte tenu du contexte réglementaire de ces premières évaluations, celles-ci ont été plutôt subies qu’agréées. Les démarches étaient souvent tardives avec un manque d’itération entre la définition du PDU et son évaluation environnementale. Celle-ci restait cantonnée à la comparaison de deux ou trois scénarios dont la définition comportait intrinsèquement les conclusions. La partie de l’analyse de l’état initial était la mieux traitée, alors que les évolutions au fil du temps étaient souvent insuffisamment analysées. Un défaut d’utilisation d’outils adaptés (modèles, outils cartographiques, etc.) explique un manque de spatialisation et d’analyses territoriales des impacts. Une autre raison des limites observées est la temporalité longue de préparation des PDU : l'obligation d’évaluation avait été imposée alors que ces premiers PDU étaient déjà fortement avancés dans leur préparation.
L’étude a aussi mis en avant les bonnes pratiques d’une deuxième génération d’évaluations mieux anticipées : cartographie multithématique des enjeux et hiérarchisation (PDU de Lille), analyses de la qualité de l’air et de l’exposition des populations via la modélisation des imissions de polluants (PDU de Toulouse). L’approche DEEM (Diagnostic Énergie Émissions Mobilité), utilisée sur plusieurs cas depuis les années 1990 (Lille, Bordeaux, Paris, Grenoble) est basée sur une exploitation d’Enquêtes Ménages Déplacements (EMD). La prochaine étape de capitalisation d’expérience par le CERTU sera la publication d’un guide d’assistance à Maître d’ouvrage pour la modélisation, avec notamment des éléments de coûts sur les méthodes disponibles.
Amélie Ranty (Nantes Métropole) a présenté l’évaluation environnementale ex-ante du PDU de Nantes Métropole « 2012-2015-perspectives 2030 ». La démarche a été itérative, avec le souhait de suivre les évolutions dans le temps. La méthode repose sur une approche concertée définissant progressivement les choix du PDU, ce qui n’est pas forcément compatible avec une logique d’évaluation de scénarios. Une des difficultés est liée au besoin d’anticiper les changements de comportement et leur ampleur (comment les inciter, les amplifier).
Lamia rouleau-Tiraoui (Nantes Métropole) a rappelé l’écart entre les besoins d’analyse et les conditions pratiques de l’évaluation (cf. contraintes de coûts et de temps). Les acteurs préfèrent les outils simples et rapides, permettant de relativiser les conclusions (importance de l’analyse critique constructive). En parallèle, l’expertise des acteurs est un point important, à croiser avec le suivi des indicateurs et autres études.
Selon Yves Gouriten (Nantes Métropole), la quantification (via la modélisation) permet une certaine démystification. Les discussions entre modélisateurs et acteurs sur les méthodes de calcul sont essentielles à une utilisation pertinente des résultats. Les chiffres prêtent à contestation mais sont une bonne base de discussion et permettent d’éluder des a priori portant sur des phénomènes marginaux.
Jean-François Retière (Nantes Métropole) a relevé des difficultés concrètes dans la réalisation de l’évaluation : trouver des points de repères comparables sur des échelles de dix ans ou plus, prendre en compte l’évolution des objectifs. L’attention portée aux parts modales est réductrice et difficile à comprendre pour le public. L’évaluation des impacts environnementaux ajoute de la subjectivité, par la perception (cf. bruit) et les différences de points de vue (cf. usagers des transports versus riverains). Il est donc important de disposer d’indicateurs fiables pour objectiver les enjeux des PDU. Ces problématiques sont complexes. Les travaux de recherche comme Eval-PDU apportent des éléments de connaissance et des outils devant conduire à des méthodes opérationnelles pour les acteurs.
4. Sur la modélisation des émissions et des concentrations de polluants
Laurence Rouïl a analysé les principales sources d’incertitudes à prendre en compte pour l’interprétation des résultats : incertitudes liées aux inventaires et aux facteurs d’émission, aux données issues des modèles de trafic, à la variabilité spatiale et temporelle des sources, à la re-suspension (pour les particules), à la description des processus dynamiques et chimiques, à la sensibilité aux conditions, aux limites (cf. contributions régionales). Il est donc important d’évaluer les capacités effectives des modèles (cf. forum FAIRMODE par exemple). De manière générale, la fiabilité des modèles est bien établie, avec un bon niveau de confiance des décideurs lorsqu’ils disposent de l’expertise requise.
La modélisation à l’échelle urbaine (voire plus locale encore) est un point clé, car c’est à cette échelle que se produit la plupart des dépassements de seuils pour certains polluants (pour le dioxyde d’azote en particulier). Trois catégories d’outils sont disponibles : modèles « de rue » (facilité de mise en œuvre, par ex. SIRANE pour les rues canyon), modèles urbains intégrés (prédiction de la qualité de l’air, par ex. ADMS-Urban), modèles 3D dédiés à une représentation fine de phénomènes (CFD) et plutôt orientés vers la recherche.
Une piste prometteuse est le couplage avec les mesures pour mieux qualifier les points chauds et corriger les inventaires d’émission. La représentation cartographique des résultats est aussi importante pour la communication et l’analyse.
Michel André (IFSTTAR) a analysé les contraintes et les limites de la modélisation utilisée (Circul’air, CopCETE et ADMS-Urban). La quantité de données d’entrée, la nécessité d’interventions manuelles pour certaines étapes et des temps de calcul conséquents pour d’autres (cf. dispersion des polluants) restreignent le nombre de simulations.
Les principes des calculs d’émission sont cadrés par des guides européens de référence comme COPERT IV. La difficulté provient principalement du grand nombre de polluants pour lesquels les connaissances sont inégales, avec des lacunes sur les polluants à enjeux sanitaires forts.
Pour les cas d’étude d’Eval-PDU, trois hypothèses critiques sont relevées : l’utilisation de statistiques nationales pour les parcs automobiles, le découpage en quatre périodes d’une journée type pour le trafic, et le calcul des émissions à froid.
Il serait nécessaire de disposer de données caractérisant les parcs locaux, du fait de l’influence forte de cette variable sur les résultats. Concernant le découpage en périodes, la modélisation des émissions requiert un pas de temps horaire sur toute l’année. Thierry Schmidt (Air Pays de la Loire) a expliqué que les données du modèle de trafic sont complétées par une analyse statistique des comptages routiers pour déterminer des profils types horaires et journaliers en fonction d’une typologie de voirie. Pour les émissions à froid, se pose la question de la spatialisation des surémissions et de leur affection dans le temps.
L’équipe du projet Eval-PDU a présenté les résultats obtenus sur les émissions pour le cas nantais, confirmant l’influence prépondérante des caractéristiques techniques des véhicules. Viennent ensuite les conditions de vitesse et d’autres paramètres d’utilisation (charge, trajets, etc.). Le trafic routier reste la source majoritaire de la plupart des polluants.
Selon les situations modélisées, la représentation cartographique montre un effet sur la distribution spatiale des émissions. Par exemple, la mise en place d’un bus à haut niveau de service entraîne une diminution des émissions sur l’axe concerné et de légères surémissions sur des itinéraires de contournement en lien avec des reports de trafic.
Thierry Schmidt a souligné que, pour la modélisation des concentrations, les limites proviennent du territoire à couvrir, très étendu (1 000 km2) et hétérogène (espaces urbains denses, périurbains et ruraux), de données d’entrée à ajuster, du nombre restreint de points de mesure (pour le calage et la validation du modèle), de l’interpolation spatiale et de la méthodologie de calcul de l’exposition de la population.
Des alternatives ont été explorées pour réduire les temps de calcul en passant d’un pas horaire sur toute l’année à une journée type ou à un pas tri-horaire (une heure sur trois). La première option n’apparaît pas fiable, la seconde introduit des biais variables selon les zones.
5. La question des données
Erwan Bocher (IRSTV) a rappelé que la méthodologie d’évaluation implique l’utilisation et la mise en cohérence d’une multitude de données très diverses (en quantités, origines, échelles, formes et formats), pour lesquelles le recours à un système d’information géographique (SIG) devient indispensable. Eval-PDU a soulevé une problématique nouvelle de partage et mise en commun plus large des données et connaissances.
Cela a induit un travail important sur les données, notamment pour uniformiser les formats et documenter les données afin de faciliter leur utilisation, ainsi que pour le développement de méthodes d’analyse spatiale et de représentation cartographique. L’infrastructure de données spatiales CartoPolis constitue la colonne vertébrale de la cascade de modèles et facilite sa mise en œuvre et la production de sorties cartographiques.
Bernard Bourges (EMN) a pointé que la validation des modèles est complexe en raison des très grandes quantités de données nécessaires aux modèles. Pour Fabien Leurent, des gisements d’information existent (comptage, suivi par GPS, téléphones mobiles, billettique, statistiques de mobilité, etc.), mais leur exploitation nécessiterait des moyens considérables, et la « privatisation » progressive de ces données risque de compromettre cette utilisation. Au final, toutes les données techniquement disponibles ne sont pas exploitées.
La mise à jour de ces grandes quantités de données, et le couplage de la modélisation avec des observations mesurées (pour une évaluation dans la durée) rejoignent cette préoccupation et les recommandations issues d’Eval-PDU.
6. Conclusions sur le projet Eval-PDU
Bernard Bourges et ses collègues ont rappelé que le travail méthodologique d’Eval-PDU a permis de mieux cerner les apports et limites des modèles (trafic, émission, dispersion). L’approche proposée est la seule permettant actuellement des estimations quantitatives et relatives par le recours à des scénarios.
Le potentiel de la modélisation est peut-être plus fort pour l’aide à la décision (par ex. conception de PDU) que pour l’évaluation quantitative au sens normatif. Elle permet de simuler des alternatives sans recourir à l’expérimentation, souvent délicate.
L’application sur le cas nantais a montré l’intérêt opérationnel de la comparaison de scénarios, de l’analyse de mesures à portée locale, et des représentations cartographiques. L’analyse des résultats5 fait ressortir la complexité de certains effets et interactions (cf. reports d’itinéraires, effets de masque pour le bruit, dilution des pollutions).
Eval-PDU était un projet de recherche méthodologique, mais la présentation des résultats a déjà soulevé des questions compte tenu de la complexité des analyses. cela montre la nécessité de contextualiser en rappelant les hypothèses et limites de la modélisation. Cet enjeu est important car, pour les PDU à venir, le public sera associé à la procédure d’enquête publique.
Les outils informatiques permettent de produire des résultats qui peuvent donner une illusion de précision. Il est primordial de documenter les incertitudes et domaines de pertinence. L’autre écueil est de concentrer les efforts d’analyse sur les aspects les plus facilement observables et non sur les plus déterminants. Le coût de la quantification est à mettre en rapport avec le niveau de détail, d’incertitude et l’utilité en termes d’aide à la décision.
Le travail d’évaluation doit s’inscrire dans une perspective de long terme, avec une capitalisation en expertise et compétences. L’investissement dans les démarches d’évaluation est un choix important pour l’organisation des politiques publiques. Il faut à la fois des approches sophistiquées de moyen ou long terme, et des approches simplifiées plus adaptées au court terme. Les quantités de données nécessaires et leur mise à jour requièrent des efforts pérennes et non ponctuels.
Toutes les communautés urbaines n'ont pas vocation à se lancer dans une démarche complète. Mais une capitalisation sur quelques expériences de ce type peut être un véritable pas en avant. Si les résultats pour Nantes ou Toulouse ne sont pas extrapolables immédiatement à Lyon, leur confrontation pourrait dégager des enseignements plus généraux. Les suites d’Eval-PDU sont à envisager dans cet esprit. Une étude de cas d'évaluation en situation réelle, avec un commanditaire motivé, en serait la première étape, en s'appuyant sur un réseau des communautés urbaines pilotes motivées par cette démarche.
7. Perspectives pour l’évaluation environnementale des PDU
Deux obstacles majeurs sont identifiés par l’ensemble des intervenants : le coût (direct, indirect et en temps) et les risques de rejet ou d’instrumentalisation par les parties prenantes. La question des interactions entre les modélisateurs et les acteurs est ainsi centrale.
Sur l’intégration de l’évaluation environnementale dans le processus des PDU, odile Heddebaut a souligné que l’obligation réglementaire crée l’opportunité de réaliser ces études, mais aussi de travailler sur la façon dont les citoyens s’emparent de ces questions. L’expérience du débat public sur la politique de transport et d’environnement pour la vallée du Rhône et l’arc languedocien est citée en exemple, notamment pour la phase préalable d’information des participants. Élisabeth Guist’hau (Nantes Métropole) a confirmé que les approches participatives nécessitent la construction d’une expertise citoyenne, pour un questionnement indépendant, auquel les élus auront à répondre tout en conservant le pouvoir de décision.
8. Perspectives pour la dimension environnementale des PDU
La mobilité urbaine porte aussi (voire surtout) des enjeux économiques et sociaux. D’autre part, certains impacts environnementaux sont globaux et d’autres locaux. Ces éléments sont essentiels aux réflexions sur l’ambition environnementale des PDU.
Florence Albert (ADEME) a insisté sur le fait qu’il n’y a pas de réponse unique sur les leviers d’action. Au niveau national, des efforts conséquents portent sur les technologies (R&D, expérimentation), et les aspects incitatifs et réglementaires (cas des ZAPA). Au niveau local, les efforts s’orientent sur les actions comportementales et les pratiques de transport. Un travail d’accompagnement est aussi nécessaire pour les exercices de planification.
Les scénarios usuels de PDU correspondent à des combinaisons d’actions ne permettant que des effets limités par rapport aux enjeux, mais avec des effets redistributifs (spatiaux) parfois importants. En parallèle, les travaux existants (dont Eval-PDU) convergent sur la prépondérance de l’effet de l’évolution des parcs automobiles.
Nicolas Merle a fait observer que dans les années 1980 et 1990, les PDU accordaient une forte priorité aux infrastructures (TC et routières). Depuis les années 2000, les approches se font plus contraignantes (stationnement et circulation), avec un risque politique plus important. Il existe des mesures à moindre coût pouvant apporter des gains significatifs. Les PDU récents mettent de fait l’accent sur l’articulation transport/urbanisme et sur des solutions alternatives aux investissements lourds. Mais il existe un risque de faire des « PDU de centre-ville » qui s’attaquent peu aux problèmes du périurbain, ce qui soulève des questions de gouvernance, d’articulation et de cohérence des documents de planification et des territoires (PPA, PDU, etc.).
Fabienne Marseille a ajouté qu’il ne faut pas opposer technologie et comportement, mais combiner les mesures en tenant compte de leurs temporalités propres, avec la difficulté que les bénéfices ne sont pas immédiats.
Élisabeth Guist’hau a confirmé la nécessité d’une pluralité de solutions, et de leur suivi et adaptation au besoin, tout en tenant compte des contraintes économiques, de gestion de l’espace, etc. Il n’est pas possible de tout prévoir à tout moment. Mais il est utile d’avoir une démarche évolutive, progressive.
En clôture, Philippe Marest (Nantes Métropole) a rappelé que les déplacements urbains étaient l’une des politiques publiques majeures des agglomérations, et que leur mise en œuvre demandait un engagement sur la durée pour en voir les fruits. Le cas de Nantes est ainsi exemplaire avec le choix de lignes de tramway structurantes dès les années 1980. L’expérience acquise permet d’avoir du recul mais n’est pas suffisante pour faire face aux défis à venir. Les visions complémentaires telles que le projet Eval-PDU ou les interventions invitées permettent d’enrichir la connaissance collective. Les résultats concrets comme la modélisation des déplacements à l’échelle de l’aire urbaine sont des outils importants pour l’aide à la décision. De même, l’évaluation des politiques publiques est fondamentale pour éclairer et guider l’action publique, en particulier sur des questions complexes comme celles liées à la mobilité. La disponibilité de méthodologies éprouvées est essentielle à l’amélioration des pratiques dans ce domaine.