Les données enregistrées par le Réseau national d'observation des polluants atmosphériques (NABEL) témoignent d'une politique efficace.
La qualité de l'air s'améliore régulièrement dans le pays. Les mesures d'immissions effectuées en permanence montrent que la politique suisse de lutte contre la pollution atmosphérique a donné des résultats remarquables, ces dernières années. Mais Il est encore trop tôt pour se relâcher ! Le dioxyde d'azote, l'ozone et les poussières respirables provoquent encore des nuisances excessives, tout comme les pluies acides et azotées dans des écosystèmes sensibles. Pas question donc de baisser les bras face à ces polluants qui menacent notre santé et notre environnement.
Généralement, on s'attaque à la pollution de l'air en intervenant à la source - donc aux émissions. Mais pour savoir comment cette pollution agit sur l'être humain et les écosystèmes, ce sont les immissions qu'il faut observer. Le lieu d'impact peut être très proche ou très éloigné de la source, et les polluants atmosphériques se diluent et se transforment en cours de route - produisant entre autres des polluants « secondaires » comme l'ozone.
Pour protéger l'homme et la nature, la loi fédérale sur la protection de l'environnement (LPE) exige que l'on fixe des valeurs limites d'immission. La qualité de l'air est considérée comme bonne lorsque ces valeurs ne sont pas dépassées. Ces normes s'appliquent à des polluants indicateurs d'effets déterminés, généralement émis en quantités importantes par des sources nombreuses et diverses. L'ordonnance sur la protection de l'air (OPair), en vigueur depuis mars 1986, fixe ces valeurs limites ; elle définit aussi la manière de déterminer les immissions et attribue le Réseau national d'observation des polluants atmosphériques (NABEL) à l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage (OFEFP).
Les stations NABEL : mesurer les situations les plus importantes
La pollution atmosphérique varie beaucoup d'un coin à l'autre du pays. Des mesures systématiques et à grande échelle seraient trop coûteuses.
Les seize stations du réseau NABEL déterminent donc le niveau de pollution affectant certains emplacements typiques, représentatifs de situations courantes (voir Figure 1). Le NABEL distingue sept types d'emplacement (voir tableau 1).
Figure 1. Emplacements des stations du réseau NABEL.
Tableau 1. Stations du réseau NABEL.
Type d'emplacement |
Lieu |
N° |
Centre-ville, |
Berne |
2 |
au bord d'une rue |
Lausanne |
9 |
Centre-ville |
Lugano |
10 |
dans un parc |
Zurich |
16 |
Agglomération |
Dübendorf |
5 |
Bâle-Binningen |
1 |
|
Zone rurale, le long |
Härkinger |
6 |
d'une autoroute |
Sion |
14 |
Zone rurale, |
Lägeren |
8 |
moins de 1 000 m |
Magadino |
11 |
d'altitude |
Payeme |
12 |
Tänikon |
15 |
|
Zone rurale, |
Chaumont |
3 |
plus de 1 000 m |
Davos |
4 |
d'altitude |
Rigi-Seeboden |
13 |
Haute montagne |
Jungfraujoch |
7 |
Le réseau NABEL est complété par une centaine de stations cantonales qui couvrent les besoins locaux des cantons et des villes. Les valeurs enregistrées aux emplacements types indiquent comment la pollution a évolué ces dernières années (voir Figure 2). Bien que basées exclusivement sur les mesures du réseau NABEL, les situations évoquées ci-après sont représentatives de l'ensemble de la Suisse.
Dioxyde de soufre : un succès
Le dioxyde de soufre (SO2) était, durant les années 70 et 80, un des polluants les plus néfastes. Diverses interventions - en particulier la réduction par étapes de la teneur en soufre des huiles de chauffage - ont permis de diminuer sa charge polluante de deux tiers au cours des dix dernières années. Elle est actuellement inférieure à la valeur limite d'immission dans tout le pays (voir Figure 2).
Le dioxyde d'azote reste un problème en ville
Provoquée à 60 % par le trafic routier, la pollution par le dioxyde d'azote (NO2) n'a diminué, elle, que modestement : d'un quart depuis dix ans. La réduction a été relativement forte entre 1989 et 1993, puis s'est ralentie. Les centres urbains enregistrent encore des valeurs qui dépassent - largement parfois - la limite officielle. Les concentrations se situent au niveau des valeurs limites à la périphérie des agglomérations , et bien au-dessous dans les zones rurales, à l'écart des axes routiers (voir Figure 2).
L'ozone résiste
Figure 2. Évolution de la pollution 1988-1997 selon les mesures des stations NABEL. données représentatives pour l'ensemble de la Suisse.
L'ozone (O3) est le polluant gazeux qui a le moins diminué ces dernières années. La figure 2, présente les moyennes horaires maximales de trois stations urbaines et d'autant de stations rurales situées au nord des Alpes. On observe un léger recul des concentrations rurales, tandis que les valeurs de pointe n'ont guère changé en ville. Cela s'explique par les processus chimiques en cause. Seule une diminution de 70 à 80 % de ses précurseurs (oxydes d'azote et composés organiques volatils), par rapport aux émissions du milieu des années 80, permettrait d'abaisser nettement la pollution par l'ozone. Il faudrait en outre que ces polluants diminuent de 50 % à l'échelle européenne pour réduire réellement les concentrations de fond, elles-mêmes excessives. Mais on est encore loin d'agir aussi efficacement sur les émissions.
Les concentrations d'ozone sont plus élevées au sud qu'au nord des Alpes ; les valeurs maximales y ont également diminué, mais avec de telles fluctuations d'une année à l'autre qu'on ne peut pas encore parler d'une tendance évidente à la baisse.
Les poussières en suspension restent dangereuses
Plusieurs études récentes démontrent que les poussières atmosphériques portent atteinte à la santé humaine. Auparavant on mesurait les poussières totales (TSP : particules totales en suspension). Depuis peu, ce sont les fines particules respirables (PM10) qui servent d'indicateur (voir Encadré « Poussières fines respirables [PM10] » p. 60). Les données sur de longues périodes sont donc exprimées en TSP (voir Figure 2) ; mais comme celles-ci comprennent 70 à 80 % de particules respirables, leur évolution reflète bien celle du nouvel indicateur (PM10). Les réductions des poussières en suspension réalisées jusqu' à aujourd'hui sont insuffisantes.
La pollution par le plomb a fortement diminué
Des principaux polluants atmosphériques, c'est le plomb qui a le plus diminué. On doit cette évolution positive à la réduction progressive du plomb dans l'essence normale et le super, ainsi qu'à l'introduction de l'essence normale sans plomb en 1985. Ce résultat constitue une véritable victoire pour la politique suisse de lutte contre la pollution de l'air (voir Figure 2).
L'effort doit être poursuivi
Le tableau 2, page suivante, répertorie et juge tous les polluants pour lesquels l'OPair prévoit des valeurs limites d'immission. Cette liste témoigne des remarquables succès remportés ces dernières années. La qualité de l'air s'améliore donc, mais les concentrations restent excessives pour le dioxyde d'azote, l'ozone, les poussières respirables, ainsi que pour les retombées acides et azotées sur des écosystèmes sensibles. Il sera ainsi indispensable de poursuivre une action systématique et efficace pour maîtriser les immissions qui dépassent encore les limites admissibles.
Contrôler les résultats d'après les émissions
Le travail de protection de l'air commence par une étude des sources de pollution, afin de mettre en évidence les émissions qui souillent l'atmosphère. D'un autre côté, on évalue l'impact des substances polluantes en mesurant leurs immissions ; celles-ci ne donnent pas de renseignements directs sur les quantités émises. Les chiffres enregistrés côté émissions et côté immissions se complètent ainsi mutuellement. Les premiers servent également à contrôler les résultats obtenus. La figure 3 présente l'évolution des oxydes d'azote et des composés organiques volatils, précurseurs de l'ozone.
Figure 3. Évolution des émissions d'oxydes d'azote (NOx, en haut) et de composés organiques volatils sans le méthane (COVNM, en bas) 1900-2010, en 1 000 t/an.
Le conseil fédéral a fixé en 1986, dans sa Stratégie de lutte entre la pollution de l'air (SLPA), des objectifs minimaux portant notamment sur les émissions de COV et de NOx. La figure 3 montre que les mesures adoptées jusqu'en 1995 n'ont pas permis de les atteindre. Il faudra donc encore réduire les émissions, notamment en renforçant les valeurs limites des NOx dans les gaz d'échappement des véhicules à moteur (prescriptions EURO3 et EURO4). Le Conseil fédéral a d'autre part décidé d'instaurer une taxe d'incitation sur les COV ; entrée en vigueur le 1er janvier 1998, l'ordonnance correspondante devrait résorber durablement les quelques 27 000 tonnes/an de COV émis en trop.
Poussières fines respirables (PM10)
La révision de l'OPair, entrée en vigueur le 1er mars 1998, remplace les valeurs limites d'immission portant sur les poussières totales en suspension (TSP) par celles des fines particules respirables (PM10). La moyenne annuelle de PM10 ne doit pas dépasser 20 microgrammes par mètre cube d'air (µ.g/m3), la moyenne journalière ne pouvant dépasser la barre des 50 µg/m3 qu'une fois par an au maximum. Le réseau NABEL fournit des données systématiques sur les PM10 depuis 1997 ; ces informations confirment les dépassements c : les valeurs limites dans une grande partie du pays (Figure 4). Ces nouvelles mesures permettront de vérifier le succès des efforts futurs de lutte contre les particules fines en suspension dans l'air.
Figure 4. Charge de PM10 en 1997 aux emplacements types, moyenne annuelle en µg/m3.