La qualité de l’air au Québec : Évolution spatio-temporelle de l’ozone troposphérique (O3 : 1974‑2015) et des particules fines (PM2.5 : 1997‑2015)

  • Air quality in the province of Québec: Spatio-temporal evolution of tropospheric ozone (O3: 1974‑2015) and fine particles (PM2.5: 1997‑2015)

DOI : 10.4267/pollution-atmospherique.6789

Abstracts

La pollution de l’air au Québec fait l’objet d’un suivi quotidien pour répondre aux enjeux de la santé publique. Cependant, peu d’analyses concernent les tendances à long terme des polluants et la majorité des études ont une couverture spatiale relativement restreinte.
Notre étude porte sur les tendances globales et journalières, au cours des dernières décennies, de l’O3 troposphérique et des PM2.5, en plus de s’intéresser au transport atmosphérique longue distance de ces deux polluants.
Seuls les PM2.5 présentent une diminution des concentrations au Québec sur la période d’analyse. Quant à l’O3, il montre une augmentation au cours de la période d’étude, particulièrement vers la fin des années 80. Par ailleurs, on observe que les patrons de concentrations varient en fonction du jour de la semaine. Pour le transport longue distance de l’O3, on remarque que, lorsque les concentrations sont élevées, les rétrotrajectoires proviennent de l’extrême nord du Québec ainsi que du secteur des Grands Lacs. Alors que le transport longue distance des PM2.5 provient essentiellement du secteur des Grands Lacs.

Air pollution in the province of Québec, Canada is daily monitored to answer public health issues. However, there are few studies concerning the long-term trend of pollutants and these studies always has a small study area.
Our study are on global and daily trends during the last decades for tropospheric O3 and PM2.5. Furthermore, the study lingers on the longue atmospheric transport of these two pollutants.
For these two pollutants, only the PM2.5 shows a diminution of the total concentration in the province of Québec. O3 shown an increase during the study period, especially in the late 80s. The concentrations patterns also depend on the day of the week. For the great distances traveled by O3, the sources of the back-trajectories associate with the high concentration comes from the extreme north of the Québec province and from the Greats Lakes. For the PM2.5, the sources of the back-trajectories associated with the high concentration essentially comes from the Greats Lakes.

Outline

Text

1. Introduction

La pollution atmosphérique est un phénomène largement documenté par la communauté scientifique (Watkins et al., 2013), particulièrement en ce qui concerne les diverses sources de pollution, ainsi que leurs impacts (Anav et al., 2011 ; Mohapatra et al., 2014). Au Québec, les études sur l’ozone (O3) et les particules fines (PM2.5) remontent à plusieurs années, mais font rarement l’objet d’une portée temporelle très longue. Le dernier bilan de la qualité de l’air au Québec a été réalisé en 2008 (Lebel et al., 2012) et la dernière étude qui combine les rétrotrajectoires à la pollution atmosphérique au Québec remonte à 2005. L’intérêt principal d’intégrer les données de pollution atmosphérique et les rétrotrajectoires est de déterminer la contribution des sources éloignées, aux polluants mesurés localement (Hondula et al., 2010).

L’objectif premier de cette étude est de mettre à jour le bilan de la qualité de l’air au Québec, plus particulièrement, pour l’O3 (1974‑2015) et les PM2.5 (1997‑2015). Le second objectif vise à identifier l’origine de la pollution longue distance grâce à la méthodologie des rétrotrajectoires. Une rétrotrajectoire se définit comme étant le parcours inverse d’une parcelle d’air depuis son point d’arrivée jusqu’à son point d’origine. Des résultats plus détaillés de l’évolution spatiotemporelle des polluants sont disponibles dans Gilbert (2018).

2. Données

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Figure 1. Carte de la localisation des stations du réseau de qualité de l’air.
Map of the localisation of sampling stations.

Les concentrations d’O3 et de PM2.5, ont été fournies par le ministère du Développement Durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les Changements Climatiques du Québec (MDDELCC). Les concentrations sont disponibles sur une base horaire pour 45 stations d’échantillonnages réparties sur le territoire (figure 1). Par ailleurs, les photographies prises par le MDDELCC lors de l’installation des stations, ont permis la catégorisation des types d’environnement de chacune d’elles (Tableau I). Par la suite, cette catégorisation a été analysée et validée avec les images satellitaires de Google Earth. Comme l’indique le Tableau I, la majorité des stations d’échantillonnages se retrouve en milieu urbain, et l’évaluation de la pollution atmosphérique se trouve être essentiellement une évaluation de la pollution atmosphérique des milieux habités.

Une validation des données a été faite en éliminant toute journée qui ne disposait pas de 75 % des données horaires pour une station. Chaque station qui ne contenait pas un minimum de 9 années consécutives de données a été rejetée. Ceci est une procédure semblable à la procédure standard du MDDELCC.

Tableau I. Définition des catégories.
Definition of the categories.

Catégorie

Code

Polluant mesuré dans la catégorie et (nombre de stations)

Agricole

A

O3 (16), PM2.5 (11)

Aéroport

AE

O3 (1), PM2.5 (1)

Commerciale

C

O3 (4), PM2.5 (3)

Forêt

F

O3 (16), PM2.5 (11)

Industriel

I

O3 (2), PM2.5 (2)

Espace vert/Milieux urbains

EVMU

O3 (2)

Résidentiel

R

O3 (19), PM2.5 (15)

Les fichiers des rétrotrajectoires proviennent d’Environnement et Changement Climatique Canada (ECCC) et représentent les rétrotrajectoires pour huit points d’arrivée pour la période entre 2006 et 2015. Ces huit points d’arrivée des parcelles d’air correspondent à des stations d’échantillonnages de la qualité de l’air mesurant les deux polluants à l’étude (figure 2), lesquels sont la station Auclair (1810) (catégorie « F »), Pemonca (2610) (catégorie « F »), Primevères (3021) (catégorie « R »), Deschambault (3200) (catégorie « A »), Stukeley (5800) (catégorie « F »), Sainte-Anne-de-Bellevue (6099) (catégorie « A »), La Pêche (7400) (catégorie « F ») et Bell (8450) (catégorie « F »). Ces stations ont été choisies pour leurs emplacements qui représentent bien l’ensemble du territoire à l’étude.

Les données relatives des rétrotrajectoires proviennent du modèle canadien de trajectoire hémisphérique (HTM) 18 (Brook et al., 2002). Les calculs sont faits pour les huit points d’arrivée des rétrotrajectoires à partir de 18 GMT. Les coordonnées des parcelles et leur altitude sont disponibles toutes les 6 h jusqu’à -36 h. À cette échéance, les parcelles sont localisées dans une grille de 190 km par 190 km de résolution et cette cellule de grille est identifiée comme le lieu d’origine de la parcelle, qui est disponible une fois par jour. Par la suite, ces données ont été jointes aux moyennes journalières de l’O3 et des PM2.5. Pour faire le lien entre l’O3 et les PM2.5, on classe les données en percentile selon la distribution des données quotidiennes pour chacune des stations d’échantillonnage. Ainsi on obtient, pour chaque station, un lieu d’origine que l’on divise en trois catégories. La première catégorie correspond aux moyennes quotidiennes en dessous du 33e percentile, la seconde qui correspond aux moyennes quotidiennes entre le 33e percentile et le 66e percentile et la dernière catégorie qui correspond aux moyennes quotidiennes pour le 66e percentile et plus. Le tout est cartographié pour une meilleure représentation de la provenance des rétrotrajectoires.

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Figure 2. Répartition des stations d’échantillonnages servant aux rétrotrajectoires.
Repartition of the sampling station for back-trajectories.

Afin de prendre en compte la saisonnalité du signal, une régression de Kendall fut appliquée, plutôt qu’une régression linéaire, à chacun des polluants pour déterminer l’évolution temporelle des concentrations atmosphériques en O3 et PM2.5 .

3. Résultats et discussion : Ozone troposphérique (O3)

3.1 Évolution pluriannuelle

La figure 3 montre qu’il y a une tendance générale à la hausse des concentrations d’O3 entre 1974 et 2015. De plus, il y a une augmentation des concentrations d’O3 vers la fin des années 80, passant d’une moyenne globale de 13,1 ppbv en 1987 à 20,3 ppbv en 1989. Après 1989, les concentrations augmentent graduellement en fluctuant d’année en année, mais, toujours en augmentant jusqu’en 2015, où elle est à son maximum à 26,8 ppbv. La variance (± 1σ) diminue avec les années. La différence entre les concentrations de 1975 et 2015 est statistiquement significative (valeur de P <0.0001).). L’hypothèse avancée pour expliquer cette augmentation est la diminution des concentrations de NO. Les concentrations de NO ont connu une diminution importante au moment même où les concentrations d’O3 ont augmenté, passant de 75 ppbv en 1978 à environ 5 ppbv en 2009 (Lebel et al., 2012).

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Figure 3. Moyennes annuelles des stations selon l’année, O3.
Annual means of the stations by years, O3.

La diminution de NO est l’hypothèse qui pourrait expliquer l’augmentation de l’O3 durant la même période de temps. Les concentrations de NO restent faibles à partir de 1991 (entre 5 et 15 ppbv) et les concentrations d’O3 demeurent élevées à partir de 1990 (Lebel et al., 2012).

3.2 Tendance horaire

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Figure 4. Cycle journalier de l’O3 selon les jours de la semaine.
Daily cycle of O3 by the day of the week.

Dans la figure 4, les cycles journaliers pour les jours de semaine (sauf le lundi) sont presque identiques. Ces cycles de semaine débutent avec des moyennes vacillant autour de 20 ppbv vers 1 h, puis les concentrations diminuent pour atteindre leur minimum autour de 16 ppbv vers 7 h. Les concentrations augmentent par la suite jusqu’à 30 ppbv vers 14 h, où elles atteignent leur maximum. Les cycles journaliers de samedi, dimanche et lundi sont quelque peu différents. Le lundi, les concentrations suivent le même patron de concentration que les autres jours de la semaine sauf qu’elles demeurent un peu plus élevées que les autres jours de la semaine. Pour ce qui est de la fin de semaine, il n’y a pas le minimum entre 6 h et 7 h du matin visible pour les autres jours. Les concentrations demeurent autour de 20 ppbv à 7 h. De plus, leurs concentrations de la fin de semaine sont plus élevées que les autres jours et la différence n’est pas statistiquement significative. Les maximum journaliers ont lieu durant le jour, vers la fin de l’après-midi. Ce phénomène s’explique d’abord par l’augmentation graduelle du rayonnement solaire et des températures qui favorise la production d’ozone. Plus la journée avance, plus les concentrations diminuent avec la baisse de l’intensité du rayonnement lumineux. Néanmoins, les concentrations demeurent plus élevées à la fin du cycle qu’au début du cycle, puisque les émissions de NO sont aussi en diminution, ce qui pourrait s’expliquer par la réduction du flux routier. L’importance du réseau routier est visible aussi avec les jours de la fin de semaine (samedi et dimanche), où les concentrations y sont plus élevées.

3.3 Cycle saisonnier

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Figure 5. Évolution des concentrations d’O3 selon les saisons.
Evolution of the concentration of O3 by the season.

La figure 5 montre qu’entre 1974 et 1990, les concentrations maximales sont observées en été (27,5 ppbv) et au printemps (35,4 ppbv), tandis que les concentrations minimales sont observées en hiver (7,4 ppbv) et à l’automne (8 ppbv). À partir de 1990, les concentrations printanières sont les plus élevées, tandis que les données en automne demeurent les plus basses. Les concentrations au printemps et en été sont statistiquement différentes des autres saisons. La circulation Brewer-Dobson pourrait être une première hypothèse pour expliquer les concentrations plus élevées au printemps. Il s’agit d’une circulation stratosphérique débutant à l’équateur et s’étalant jusqu’aux pôles, avec des zones de descente autour du 50e parallèle. De manière naturelle, cette circulation s’intensifie déjà à partir de l’hiver, ce qui favorise les transferts de l’ozone entre la stratosphère et la troposphère (Neu et al., 2014). Cette hypothèse est appuyée par l’étude des rétrotrajectoires (figures 6 A et B). Une seconde hypothèse pouvant expliquer les concentrations plus élevées au printemps est la formation naturelle d’O3 par la végétation (Berner et al., 2012). En effet, en divisant les stations selon les catégories du Tableau I, la catégorie ayant les concentrations les plus élevées est la catégorie forestière et les maximums se retrouvent au printemps (Gilbert, 2018). La végétation de la portion nord est constituée principalement de tourbière, d’épinettes noires et blanches ainsi que de peupliers baumiers, en plus des milliers de lacs qui recoupent la végétation (Berteaux et al., 2014). Cette hypothèse est aussi appuyée par l’étude des rétrotrajectoires. Pour ce qui est des hautes concentrations en été, l’hypothèse la plus probable est une augmentation des conditions météorologiques favorables jumelées aux rayonnements UV plus importants à cette période de l’année au Québec. Des études plus approfondies sont nécessaires pour identifier avec précision les sources d’O3 selon les saisons.

3.4 Rétrotrajectoires

Les figures 6 A et B présentent les deux possibilités en ce qui concerne les rétrajectoires sur le territoire à l’étude. Le nombre d’occurrences représente le nombre de fois (en pourcentage) où une parcelle d’air provient d’un secteur en particulier pour l’ensemble de la période d’étude. Dans la figure 6 A, qui présente les résultats de la station Pemonca, le déplacement des masses d’air varie de l’ouest du Québec vers le centre du Québec lorsque les concentrations d’ozone augmentent. Lorsque les concentrations sont élevées (troisième division de la figure 6 A), les rétrotrajectoires proviennent majoritairement du nord du Canada. Dans la figure 6 B, qui présente les résultats de la station Stukeley, lorsque les concentrations d’O3 sont élevées, les rétrotrajectoires proviennent du secteur des Grands Lacs. Les rétrotrajectoires de la figure 6 A permettent de déterminer que, lorsque les parcelles d’air proviennent du nord du Québec et au-dessus de la Baie James/Hudson, les concentrations enregistrées aux huit stations sont plus élevées. Pour la figure 6 A, les hypothèses apportées précédemment concernant les cycles printaniers (section 3.3) peuvent aussi s’appliquer ici. Pour la figure 6 B, les rétrotrajectoires associées aux hautes concentrations se retrouvent davantage au-dessus des Grands Lacs. La région des Grands Lacs est hautement industrialisée, comportant de nombreux types d’industrie, dont l’industrie automobile, papetière, chimique et sidérurgique, en plus d’être très habitée (Beauchemin, 2015). Ces industries émettent des précurseurs de l’ozone (Masclet, 2005). De plus, les Grands Lacs abritent certains taxons de cyanobactéries qui émettent des composés organiques volatils d’origine biologique (BCOV) (Environnement et changement climatique Canada et Environmental Protection Agency, 2017). Ces deux facteurs combinés sont l’hypothèse émise pour expliquer les hautes concentrations d’ozone dans les parcelles d’air qui proviennent des secteurs des Grands Lacs, en plus d’avoir des températures moyennes un peu plus chaudes.

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Figure 6. Source des rétrotrajectoires entre 2006-2015 de 36 h selon la concentration de l’O3 station A) Pemonca et B) Stukeley.
Source of the back-trajectories between 2006-2016 for 36h by the concentration of O3, A) Pemonca’s station and B) Stukeley’s station.

4 Résultats et Discussion : Particules fines (PM2.5)

4.1 Évolution pluriannuelle

La figure 7 montre qu’il y a peu de variation des concentrations moyennes selon les années, comparativement aux moyennes annuelles d’O3. Entre 2000 et 2006, les moyennes varient de 8,5 µg/m3 pour atteindre un niveau minimum en 2006 à 7,7 µg/m3. Entre 2013 et 2015, les concentrations moyennes diminuent de nouveau, passant de 8,73 µg/m3 à 7,83 µg/m3. La tendance de Kendall montre une diminution des concentrations. De plus, on note une légère diminution de la variance (±1σ) avec les années. Par ailleurs, le test de Student montre qu’il y a une différence statistiquement significative entre les concentrations de 1997 et les concentrations de 2015 (valeur de P <0.0001). Nos résultats vont dans le même sens que Lebel et al. (2012). Selon Lebel et al. (2012), les émissions atmosphériques anthropiques des PM2.5 au Québec sont produites en majorité par le chauffage au bois (42,7 %) et les industries (41 %), alors que les sources naturelles sont les feux de forêt et les poussières d’érosion. Ces résultats concordent aussi avec les résultats obtenus dans notre étude (figure 9) et qui seront détaillés dans le prochain paragraphe. De plus, le fait que le parc automobile soit en constante augmentation depuis 1974, mais que les concentrations des particules n’augmentent pas, suppose que les voitures n’occupent qu’une fraction des émissions, soit 15,3 % (Paradis, 2011).

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Figure 7. Moyennes annuelles des stations selon les années, PM2.5.
Annual means of the stations by years, PM2.5.

4.2 Tendance horaire

Dans la figure 8, tous les jours en semaine suivent à peu près le même cycle. Les jours ouvrables présentent deux maximum dans la journée, soit un entre 5 h (8,8 µg/m3) et 10 h (9,5 µg/m3) et un second entre 16 h (9,2 µg/m3) et 4 h (9,5 µg/m3). Le samedi et le dimanche ont des cycles différents aux jours de semaine. Le maximum du matin est très inférieur aux autres jours de la semaine (soit 8,1 µg/m3 pour le samedi et 8,3 µg/m3 pour le dimanche). De plus, le minimum est aussi inférieur (7,5 et 7,4 µg/m3) aux autres jours de la semaine. Il n’y a pas de différence statistiquement significative entre les concentrations les jours de la semaine et les jours de la fin de semaine. L’augmentation des concentrations des PM2.5 les matins de semaines peut être causée par l’augmentation du flux des voitures sur le réseau routier durant cette période (Rattigan et al., 2010). Il est bien important de spécifier que, sur un court laps de temps, l’automobile a un impact sur les concentrations de PM2.5, mais cet impact n’est pas statistiquement significatif (section 4.1). Cependant, pour un laps de temps plus important (soit mensuel, saisonnier ou annuel), nos résultats indiquent que l’impact de l’automobile diminue en importance comme source de PM2.5 (résultats non présentés). Les jours de fin de semaine ne montrent pas le même écart entre le minimum des concentrations et le maximum des concentrations. Durant le jour, à mesure que la couche d’inversion prend de l’altitude, les polluants se dispersent, diminuant ainsi les concentrations. Le deuxième maximum en soirée pourrait être attribuable à la couche d’inversion qui revient plus près du sol, jumelé avec les émissions provenant des bâtiments pour le chauffage en hiver (Rattigan et al., 2010).

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Figure 8. Cycle journalier des PM2.5 selon les jours de la semaine.
Daily cycle of PM2.5 by the day of the week.

Le phénomène de la destruction de l’inversion thermique nocturne est aussi responsable de l’augmentation des concentrations matinales de particules fines. En divisant les résultats de la figure 8 selon les saisons (résultats non présentés), il est possible de voir que l’augmentation des concentrations débute 1h plus tôt en été qu’en hiver. Puisque le soleil se lève plus tôt en été, il provoque un brassage par convection plus tôt dans la journée, ce qui remet les polluants en suspension dans l’atmosphère. Ce phénomène persiste jusqu’à ce que l’inversion thermique soit détruite (Rattigan et al., 2010).

4.3 Cycle saisonnier

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Figure 9. Évolution des concentrations des PM2.5 selon les saisons.
Evolution of the concentration of PM2.5 by the season.

La figure 9 représente la moyenne de toutes les stations pour chacune des saisons. D’abord, les concentrations maximales s’observent en alternance en été (10,6 µg/m3) et en hiver (10,1 µg/m3). Les concentrations en été ont une tendance à la diminution, tout comme celles du printemps alors que les autres saisons semblent demeurer plus stables. Pour ce qui est des concentrations minimales tout au long de la série temporelle, on observe une alternance entre l’automne (6,8 µg/m3) et le printemps (6,6 µg/m3). Les concentrations en été et en hiver sont statistiquement différentes des concentrations d’automne et de printemps. L’hypothèse du chauffage avancée par Lebel et al. (2012), est la plus probable pour expliquer les concentrations hivernales, en plus des conditions météorologiques favorables à l’accumulation des polluants près de la surface. Pour les concentrations d’été, l’hypothèse la plus probable pour ces hautes concentrations est celle de la contribution probable des feux de forêt. Les feux de forêt sont importants pour l’écosystème de la forêt boréale du Québec (MFFP, 2017), et sont une source importante de PM2.5 (Ikemori et al., 2015). Les concentrations en été diminuent depuis 2013, alors que le nombre de feux et le nombre d’hectares brûlés ont aussi diminué depuis 2013 (MFFP, 2014, 2017).

4.4 Rétrotrajectoires

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Figure 10. Source des rétrotrajectoires entre 2006-2015 de 36 h selon la concentration des PM2.5 station Deschambault.
Source of the back-trajectories between 2006-2016 for 36h by the concentration of PM2.5, Deschambault’s station.

La figure 10 présente le patron de déplacement des rétrotrajectoires pour la station Deschambault. Toutes les stations à l’étude ont des rétrotrajectoires qui sont semblables à Deschambault. Dans la première division, lorsque les concentrations des PM2.5 sont basses, les rétrotrajectoires proviennent du nord du Québec ainsi que de la baie d’Hudson. Puis, pour la dernière division, les rétrotrajectoires se déplacent vers le sud du Québec, plus particulièrement au-dessus des Grands Lacs, avec des cellules dont le nombre d’occurrences est très important au-dessus du lac Huron et du lac Ontario. Comme mentionné précédemment dans la section 3.4, le secteur des Grands Lacs est hautement industrialisé. Comme les industries sont l’une des sources des particules fines (Berner et al., 2012), il est possible d’émettre l’hypothèse que le secteur des Grands Lacs est contributoire aux épisodes de hautes concentrations des particules fines pour le territoire québécois.

5. Conclusion

Les concentrations d’ozone sont en augmentation sur le territoire du Québec alors que les PM2.5 diminuent lentement. Les rétrotrajectoires montrent que, sur les longues distances, l’ozone provient soit du bassin des Grands Lacs, soit du nord du Québec. Pour les PM2.5, les rétrotrajectoires montrent que les particules proviennent des Grands Lacs. La qualité de l’air ambiante demeure un enjeu important pour la santé des populations sur le territoire québécois. Cette étude fait partie d’une étude plus vaste sur le bilan d’une dizaine de polluants au Québec entre 1974 et 2015 (Gilbert, 2018). Des études plus approfondies sont nécessaires pour bien comprendre les sources des polluants, particulièrement les sources d’O3 dans le nord du Québec.

Nous désirons remercier le MDDELCC, division qualité de l’air et ainsi qu’ECCC pour avoir fourni les données nécessaires pour ce projet.

Bibliography

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Illustrations

References

Electronic reference

Jean-Philippe Gilbert, Richard Leduc and Nathalie Barrette, « La qualité de l’air au Québec : Évolution spatio-temporelle de l’ozone troposphérique (O3 : 1974‑2015) et des particules fines (PM2.5 : 1997‑2015) », Pollution atmosphérique [Online], 239 | 2019, Online since 19 février 2019, connection on 14 janvier 2025. URL : http://www.peren-revues.fr/pollutionatmospherique/6789

Authors

Jean-Philippe Gilbert

Université Laval, Département de géographie, Québec
Jean-philippe.gilbert.5[at]ulaval.ca

Richard Leduc

AirMet Science, Québec
rleduc[at]airmetscience.com

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Nathalie Barrette

Université Laval, Département de géographie, Québec
Nathalie.Barrette[at]ggr.ulaval.ca

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