1. Objectifs de l’étude
Les questions auxquelles cette étude se proposait de répondre sont les suivantes :
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Quels sont les niveaux d’exposition actuellement atteints dans les différents modes de locomotion utilisés par les Franciliens ?
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Les niveaux de pollution renseignés par les stations fixes du réseau de surveillance de la qualité de l’air en région parisienne sont-ils représentatifs de l’exposition réelle des citadins au cours de leurs déplacements ?
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Quelle a été l’évolution des niveaux d’exposition des citadins qui se déplacent en région parisienne en dix ans ?
Pour évaluer l’exposition globale du citadin aux polluants atmosphériques au cours de sa journée, une des approches consiste à déterminer la part attribuable à chacune de ses activités dans les lieux de vie qu’il fréquente. La présente étude vise à établir les niveaux d’exposition auxquels sont soumis les Franciliens lorsqu’ils se déplacent en région parisienne entre domicile et lieu de travail, aux heures de pointe, en utilisant les principaux modes de locomotion.
La caractérisation de l’exposition des citadins lors de leurs déplacements avait déjà fait l’objet d’investigations réalisées en région parisienne au cours de la période 1996-1998 [1]. Il était intéressant de réactualiser une telle étude dix ans après, en raison de la modification de nombreux paramètres environnementaux. En milieu urbain, la qualité de l’air s’est globalement améliorée du fait notamment de l’évolution de la structure du parc automobile et de la diminution des émissions unitaires de polluants en application des directives européennes depuis 1989.
Par ailleurs, depuis plusieurs années, la municipalité parisienne a engagé une série d’actions qui modifient sensiblement les conditions de déplacement dans Paris et incitent les Franciliens à changer de comportement : aménagements de couloirs pour les bus et les taxis, de pistes cyclables, de quartiers verts, création d’une ligne de tramway, mise en place du système « Velib », mais également, diminution de l’offre de stationnement et limitation de vitesse, etc.
Un nombre significatif de situations contrastées a été retenu et les paramètres mesurés systématiquement sont les polluants principalement émis par les transports routiers et ayant des effets sanitaires reconnus. La pluralité des situations considérées et le panel d’indicateurs mesurés permettent ainsi de dresser un tableau plus exhaustif que ceux relatés dans la majorité des études actuellement publiées.
2. Méthodologie
2.1. Trajets
Vingt trajets sur des itinéraires contrastés ont été parcourus selon les modes de locomotion qu’utilisent principalement les Franciliens pour se rendre sur leur lieu de travail : véhicule particulier, transports en commun (dont le bus, le tramway, le métro et le RER), vélo et marche.
Quatre trajets en véhicule particulier, dont le boulevard périphérique (VPBP), une portion de l’autoroute A6 au sud de Paris (VP autoroute), deux trajets traversant Paris du nord au sud par l’est et par l’ouest (VP Est et VP Ouest) ; deux trajets sur des lignes de bus dont une circulant en couloirs protégés (bus 91) et l’autre au milieu de la circulation (bus 56) ; deux trajets en vélo dans Paris dont un dans la circulation (vélo Paris) et l’autre sur piste cyclable (vélo Paris couloir) ; trois trajets à pied dont un le long du parcours du bus 91 (piéton 91), un marchant dans Paris (piéton Paris) et le troisième en quartier piétonnier (piéton Halles) ; trois trajets en métro dont deux sur des lignes entièrement souterraines (L14 et L1) et l’autre à 45 % aérienne (L6) et deux trajets en RER dont un sur un tronçon de ligne entièrement souterrain (RER A) et l’autre sur un tronçon à 80 % aérien (RER B).
Un parcours particulier a été étudié sur le boulevard circulaire dans la partie sud de Paris par 4 modes de locomotion qui l’empruntaient simultanément. Sur ce large boulevard circulent sur des voies séparées un tramway en partie centrale (T3), deux voies de part et d’autre pour les voitures (VPBC), puis une piste cyclable (vélo BC) et enfin les piétons sur les trottoirs (piéton BC).
Chaque trajet était reproduit 30 fois lors de 15 allers et retours.
2.2 Indicateurs mesurés. Méthodes de prélèvement et analyse
Les indicateurs choisis ciblent les polluants d’origines automobile et ferroviaire. Plusieurs critères ont été considérés : l’intérêt de se référer à des paramètres qui bénéficient d’une antériorité de mesure (campagne de 1996-98), l’évolution des normes d’émission et/ou des valeurs guides, ou le besoin de documenter l’exposition de la population vis-à-vis d’espèces chimiques dont les effets sanitaires sont reconnus comme indésirables. Le choix a tenu compte de contraintes métrologiques imposées par les conditions de déplacement (moyens de prélèvements ou de mesures portables et autonomes, techniques suffisamment sensibles pour quantifier une exposition correspondant à une durée de déplacement limitée à 1 heure).
Les polluants gazeux mesurés sont le monoxyde de carbone (CO), le dioxyde d’azote (NO2), les hydrocarbures aromatiques monocycliques (HAM), le formaldéhyde, l’acétaldéhyde et l’acétone.
Pour la phase particulaire, les indicateurs retenus ont été la concentration pondérale des particules de diamètre aérodynamique médian inférieur à 2,5 μm (PM2,5) et le coefficient d’absorption de ces particules qui reflète leur charge en carbone suie (indicateur de la contamination atmosphérique en particules issues de la combustion et notamment des émissions des véhicules à moteur Diesel). En complément, sur un échantillon plus réduit de trajets, un programme complémentaire a été mis en œuvre afin de caractériser la distribution granulométrique de la concentration numérique des particules de diamètre optique supérieur à 0,3 μm.
Il s’agit donc essentiellement de polluants traceurs des émissions du trafic routier par les véhicules à moteurs essence ou de type Diesel (oxydes de carbone et d’azote, hydrocarbures, aldéhydes, particules fines et suies), sauf pour l’acétone dont les niveaux sont en lien avec la présence humaine et les émissions de matériaux à l’intérieur d’un espace clos. S’agissant des aldéhydes et des hydrocarbures aromatiques autres que le benzène, la contribution des émissions des matériaux et revêtements dans les habitacles des voitures particulières et des transports en commun s’ajoute également aux émissions de combustion.
Les teneurs en monoxyde de carbone sont enregistrées en continu sur un pas de temps de 1 minute sur toute la durée du trajet. Les teneurs minimales, maximales et moyennes sont calculées pour chaque aller-retour.
Les autres indicateurs sont prélevés par pompage sur un support adéquat ; sur filtre (pour les particules), sur support imprégné (pour les aldéhydes, l’acétone et le dioxyde d’azote), sur adsorbant (pour les HAM) pendant 2 heures, correspondant à un aller-retour, puis analysés en différé au laboratoire.
Les pompes de prélèvement sont placées à l’intérieur d’un sac à dos ; l’analyseur de CO, l’impacteur PM2,5, les tubes ou cassettes (pour piéger les HAM, les composés carbonylés et le NO2) sont fixés à l’extérieur du sac, de manière à ce que les têtes de prélèvements soient situées dans la zone respiratoire de la personne en charge des prélèvements. Dans les véhicules automobiles, l’ensemble de l’appareillage est placé sur le siège du passager, les têtes de prélèvement étant à hauteur des voies respiratoires du conducteur.
Les méthodes de prélèvement et d’analyse et les limites de quantification associées sont rassemblées dans le tableau 1.
Tableau 1.Méthodes de prélèvement et d’analyse
Sampling and analytical methods
Indicateur |
Méthode de prélèvement (P) et analyse (A) |
Limite de quantification |
CO |
Détection électrochimique en continu |
1 cm3/m3 |
BTEX |
selon norme NF EN ISO 16 017 (P) Actif en absorbant carboné (A) DT CG – FID/SM |
1 μg/m3 |
Aldéhydes |
selon norme NF ISO 16 000-3 (P) Actif sur cartouche de silice imprégnée de 2,4DNPH (A) HPLC – UV |
3 μg/m3 pour formaldéhyde |
PM2.5 |
(P) Actif sur filtre téflon (A) gravimétrie |
40 μg/m3 |
Coefficient d’absorption des PM2.5 |
(P) Actif sur le filtre téflon (A) réflectométrie |
10 10-6.m-1 |
Quel protocole expérimental
Prélèvements effectués par des volontaires qui ne fument pas pendant les trajets.
Chaque trajet réalisé 30 fois ; soit 600 déplacements
Parcouru en période de pointe du matin (entre 7 h et 9 h 30) et du soir (entre 16 h 30 et 19 h).
Durée de chaque trajet : 1 heure, simulant de façon réaliste l’exposition des Franciliens pendant leur temps de parcours moyen mis pour se rendre sur leur lieu de travail.
Trajets en véhicule particulier motorisé diesel.
Campagne de mesure en période hivernale 2007-2009 pendant les jours ouvrés.
Analyse sur 2 heures de prélèvement, soit 300 analyses.
Au total exploitation de 4 200 résultats.
Il a été vérifié que, pour chaque type de trajet, les dates auxquelles les déplacements ont été planifiés étaient représentatives en termes de niveaux de pollution et de conditions météorologiques de l’ensemble des jours de la période de campagne des mesures.
3. Résultats
3.1. Niveaux d’exposition obtenus dans les différents modes de locomotion
Les résultats sont illustrés sous forme d’histogrammes (figures 1 à 3) pour les indicateurs suivants : NO2, CO, benzène, formaldéhyde, acétone et concentration pondérale des particules PM2,5.
En abscisse, sont représentés les modes de déplacement toujours classés dans le même ordre, et en ordonnée, les teneurs associées à plusieurs paramètres des distributions : moyenne, médiane, percentile 25, 75 et 90 (les barres représentent les valeurs médianes). Les concentrations exprimées se rapportent au cumul des deux heures d’exposition du soir et du matin.
L’usager de la voiture est le plus exposé aux polluants atmosphériques gazeux rejetés par les échappements des véhicules automobiles. Aux heures de pointe, le niveau médian de dioxyde d’azote (NO2) dans l’habitacle d’une voiture roulant dans Paris est de 130 μg/m3 ; il est de 150 μg/m3 sur l’autoroute et atteint 218 μg/m3 sur le boulevard périphérique. Sur ce dernier trajet, 57 % des teneurs mesurées (sur la moyenne de 2 heures) excèdent la valeur horaire de 200 μg/m3 préconisée par le Conseil supérieur d’Hygiène Publique de France et l’OMS [2].
Le niveau de benzène dans le véhicule particulier est également le plus élevé. La teneur médiane calculée sur l’ensemble des trajets est de 7,5 μg/m3, et atteint 10 μg/m3 sur le boulevard périphérique. Les niveaux des autres hydrocarbures aromatiques sont également les plus élevés dans la voiture. Pour le toluène, les teneurs médianes sont assez homogènes quel que soit le trajet, entre 28 et 39 μg/m3. À l’échelle horaire, il n’existe pas de valeur guide ou réglementaire à respecter pour ces polluants.
Le monoxyde de carbone n’a été détecté de façon significative par les capteurs électrochimiques que dans les voitures. Les niveaux relevés le matin sont plus élevés que ceux du soir, avec des teneurs médianes des mesures horaires respectivement de 2,8 et 1,6 ppm. Le maximum horaire est de 8,4 ppm (soit 9,9 mg/m3), valeur bien inférieure à la limite préconisée par l’OMS de 30 mg/m3 pour 1 heure d’exposition [2].
L’indicateur de carbone suie mesuré par le coefficient d’absorption des filtres de PM2,5 montre que les niveaux médians les plus élevés sont rencontrés dans les voitures (230.10-6 m-1) et plus particulièrement sur le boulevard périphérique (377.10-6 m-1).
La méthode d’analyse de la concentration massique des particules PM2,5 utilisée dans cette étude ne permet pas de quantifier les niveaux qui sont inférieurs à 40 μg/m3 en médiane, sauf pour le trajet sur le boulevard périphérique pour lequel la teneur médiane est de 52 μg/m3. Il n’existe pas de valeur de référence à l’échelle horaire pour ce polluant.
La voiture est également le lieu où les niveaux de formaldéhyde sont les plus élevés : 12 μg/m3 en teneur médiane sur l’ensemble des trajets en voiture, avec une valeur atteignant 18 μg/m3 sur le boulevard périphérique. Ces niveaux restent toutefois bien inférieurs à la valeur guide pour la qualité de l’air intérieur de 50 μg/m3 applicable sur 2 heures fixée par l’AFSSET en 2007. Pour ce polluant, il est probable que les sources sont à la fois les échappements des véhicules mais également les divers revêtements qui équipent l’habitacle de la voiture.
Le niveau d’acétone, en voiture, est de 12 μg/m3 en médiane avec un parcours où la teneur est sensiblement plus élevée atteignant 19 μg/m3
Les passagers de bus sont soumis à une exposition à la pollution atmosphérique proche de celle des usagers des véhicules particuliers pour trois polluants : NO2, PM2,5 et formaldéhyde.
Le niveau médian de NO2 est de 140 μg/m3 et 38 % des teneurs mesurées dans les bus de la ligne 91 ont dépassé la valeur horaire de 200 μg/m3 préconisée par le Conseil supérieur d’Hygiène Publique de France et l’OMS.
Les niveaux de particules PM2,5 sont globalement plus élevés qu’en voiture : la teneur médiane est de 54 μg/m3. Le niveau de formaldéhyde est de 10,2 μg/m3 en valeur médiane, mais peut atteindre 45 μg/m3 dans les bus de la ligne 91, teneur proche de la valeur guide de qualité d’air intérieur fixée à 50 μg/m3 pour 2 heures d’exposition.
Les niveaux de benzène et de monoxyde de carbone sont nettement inférieurs à ceux mesurés dans la voiture. Le niveau médian de benzène est de 3,7 μg/m3, les teneurs mesurées dans les bus roulant dans le couloir dédié étant plus faibles d’une manière générale pour l’ensemble des hydrocarbures aromatiques monocycliques. Le niveau médian de monoxyde de carbone est de 1,2 ppm.
Le niveau d’acétone en bus est élevé : 22 μg/m3 en médiane, niveau caractéristique de tous les transports en commun. Le coefficient d’absorption des particules est de 102.10-6 m-1 en valeur médiane.
L’exposition en vélo se situe en troisième position avec des niveaux d’exposition intermédiaires pour tous les polluants. Malgré sa proximité géographique au trafic automobile, la configuration « à l’air libre » dans laquelle se trouve le cycliste, contrairement aux deux premiers modes de transport, conduit à une diminution assez nette des niveaux de la plupart des polluants.
Les niveaux médians sont de 71 μg/m3 pour le NO2, 2,6 μg/m3 pour le benzène, 7,4 μg/m3 pour le formaldéhyde.
Figure 3.Distribution des concentrations en acétone et PM2,5.
Distribution of aceton and PM2,5 mass levels.
Les niveaux de particules fines sont proches de ceux mesurés dans le bus aussi bien en masse (57 μg/m3) qu’en noirceur avec un coefficient d’absorption de 103.10-6 m-1.
L’exposition dans le métro et le RER est caractérisée par l’existence d’une source spécifique de pollution particulaire liée à l’émission de particules fines des matériels roulants durant les freinages.
Les concentrations pondérales de PM2,5 y sont les plus élevées parmi les modes de transport étudiés avec une médiane de 102 μg/m3.
Très logiquement, il apparaît des niveaux en particules beaucoup plus élevés sur les lignes à dominante souterraine (ligne 1, ligne 14 et RER A) avec des niveaux médians de 128 μg/m3 en concentration massique et 164.10-6 m-1 en coefficient d’absorption. Sur les lignes plutôt aériennes (ligne 6 et RER B), les niveaux de ces mêmes paramètres sont nettement plus faibles avec un niveau médian inférieur à 40 μg/m3 en concentration massique et 61.10-6 m-1 en coefficient d’absorption. Bien que les valeurs de référence soient fixées pour une durée d’exposition de 24 heures au minimum, notamment celle de l’OMS fixée à 25 μg/m3, rendant la comparaison délicate, il peut être noté, à titre indicatif, que cette valeur est nettement dépassée dans les rames des lignes à dominante souterraine.
Le niveau de formaldéhyde, 8,3 μg/m3 en valeur médiane, est du même ordre de grandeur que ceux trouvés dans tous les transports en commun.
Pour les autres polluants gazeux, qui sont issus du trafic automobile, les niveaux en métro et RER sont parmi les plus bas : 54 μg/m3 en NO2 et 2,2 μg/m3 en benzène.
L’importante densité de voyageurs dans les rames de métro et RER en périodes de pointe se traduit par des niveaux d’acétone les plus élevés (23 μg/m3 en valeur médiane).
Le tramway est un des modes de transport les moins exposés à la pollution atmosphérique.
Seul le niveau de formaldéhyde est comparable à ceux des autres modes cités ci-dessus avec une médiane à 8,2 μg/m3. L’émission par les mobiliers intérieurs du tramway peut expliquer en partie ces niveaux.
Les concentrations des autres polluants sont relativement faibles en médiane : 61 μg/m3 en NO2, 2,3 μg/m3 en benzène, inférieur à 40 μg/m3 en PM2,5 et un coefficient d’absorption sur les PM2,5. de 60.10-6 m-1.
Le niveau d’acétone est identique à ceux mesurés dans les autres transports en commun (22 μg/m3).
Le piéton est globalement le moins exposé à la pollution atmosphérique pendant les heures de trajet domicile-travail. L’exposition varie toutefois en fonction de la distance de son cheminement à la voie de circulation automobile. Ainsi, l’exposition du piéton marchant dans le quartier des Halles, interdit à la circulation, se distingue des autres trajets longeant les voies de circulation, par des niveaux nettement inférieurs.
Le long des axes de circulation, les niveaux médians sont de 79 μg/m3 pour le NO2, 2,5 μg/m3 pour le benzène, 5,6 μg/m3 pour le formaldéhyde, inférieurs à 40 μg/m3 pour la concentration massique de PM2,5 et de 81.10-6 m-1 pour son coefficient d’absorption.
À l’écart de tout trafic automobile, les niveaux médians mesurés dans le quartier des Halles sont de 56 μg/m3 en NO2, 1,4 μg/m3 en benzène, 3,8 μg/m3 en formaldéhyde et inférieurs à 40 μg/m3 en concentration massique de PM2,5.
3.2. Cas particulier de trajets en parallèle sur le boulevard circulaire
Quatre modes de locomotion ont été étudiés en parallèle. Un usager du tramway, un conducteur de véhicule particulier, un cycliste et un piéton empruntaient en même temps, le même jour, le boulevard circulaire pendant 1 heure.
Figure 4.Schéma de la configuration du boulevard circulaire au sud de Paris.
View of a ring road in the south of Paris.
Dans cette configuration, la variabilité d’un jour à l’autre des paramètres de trafic et de conditions météorologiques était évitée.
Les niveaux d’exposition sont regroupés dans le tableau 2.
Tableau 2.Niveaux d’exposition en CO, NO2, benzène et formaldéhyde dans quatre modes de locomotion sur le même itinéraire.
CO, NO2, benzene and formaldehyde exposure levels with 4 transport means on the same road.
Exposition du piéton |
Exposition du conducteur de véhicule |
Exposition de l’usager du tramway |
Exposition du cycliste |
|
CO cm3/m3 |
<1 |
1,7 |
<1 |
<1 |
NO2 μg/m3 |
61 |
120 |
61 |
87 |
Benzène μg/m3 |
2,3 |
6,6 |
2,3 |
3,0 |
Formaldehyde μg/m3 |
12 |
12 |
8,2 |
5,5 |
3.3. Comparaison avec les teneurs enregistrées sur les stations du réseau de surveillance en région parisienne (réseau Airparif)
Les graphes (figures 5 à 8) présentent l’ensemble des 20 trajets regroupés par type de locomotion. Les valeurs moyennes enregistrées sur les stations sont indiquées sous forme de lignes horizontales calculées sur l’ensemble des dates correspondant à tous les déplacements durant les mêmes plages horaires du matin et du soir.
Les stations Victor Basch, Auteuil et Autoroute A1 sont des stations très proches des voies de circulation et caractérisent des voiries à fort trafic ; les stations Paris 18 et Paris Les Halles ne sont pas directement influencées par une source locale identifiée et permettent une mesure d’ambiance générale de la pollution urbaine, dite de fond.
Dioxyde d’azote
La comparaison des valeurs de NO2 mesurées aux stations Porte d’Auteuil, Paris Les Halles et Place Victor Basch montre que les niveaux d’exposition, pour chaque mode de locomotion, sont intermédiaires entre ceux de sites en proximité de trafic (Porte d’Auteuil, Place Victor Basch) et celui du site de Paris Les Halles, éloigné des sources de pollution (figure 5).
Figure 5.Comparaison des niveaux d’exposition en NO2 par mode de déplacement avec les données des stations AIRPARIF.
Comparison between NO2 levels according to different transport means and results provided by Parisian air quality survey network.
Benzène
Seul le site Porte d’Auteuil fournit des valeurs horaires en benzène. Les stations de la place Victor Basch et de Paris les Halles enregistrent seulement des valeurs moyennes journalières qui, à l’évidence, sont inférieures aux teneurs horaires aux heures de pointe.
Le niveau moyen d’exposition dans le véhicule particulier est le seul à dépasser le niveau obtenu sur le site de la Porte d’Auteuil (figure 6).
Figure 6.Comparaison des niveaux d’exposition en benzène par mode de déplacement avec les données des stations AIRPARIF.
Comparison between benzene levels according to different transport means and results provided by Parisian air quality survey network.
Monoxyde de carbone
La figure 7 ne présente que les niveaux d’exposition des 5 trajets effectués dans les véhicules, car les autres trajets enregistrent des niveaux trop faibles. Ils sont comparés aux teneurs relevées sur les quatre stations AIRPARIF mesurant le monoxyde de carbone.
Les niveaux sur les différentes stations AIRPARIF calculés sur l’ensemble des dates correspondant aux déplacements des 5 véhicules varient très faiblement de 0,5 à 1,75 mg/m3. Pour les trajets dans les véhicules particuliers sur l’autoroute, sur le boulevard périphérique et sur les secteurs Paris Ouest et Paris Est, les niveaux moyens d’exposition dépassent les valeurs observées sur les sites trafic.
Les teneurs relevées dans le véhicule circulant sur le boulevard circulaire sont du même ordre de grandeur que celles enregistrées sur les sites trafic.
Figure 7. Comparaison des niveaux d’exposition en CO par mode de déplacement avec les données des stations AIRPARIF.
Comparison between CO levels according to different transport means and results provided by Parisian air quality survey network.
PM2,5
Les niveaux d’exposition des 20 trajets sont comparés à ceux obtenus sur les deux sites AIRPARIF qui mesurent les particules PM2,5 : stations Porte d’Auteuil (trafic) et Forum des Halles (fond urbain).
Les niveaux sur les deux stations AIRPARIF, calculés sur l’ensemble des dates correspondant aux 20 trajets, sont de 20 et 35 μg/m3.
Les valeurs d’exposition aux PM2,5 du passager dans l’habitacle automobile et du piéton sont du même ordre de grandeur que celles relevées sur le site trafic de la Porte d’Auteuil. Les cyclistes et les usagers des bus présentent des niveaux d’exposition supérieurs ; les usagers des métros et RER subissent des niveaux d’exposition nettement supérieurs (figure 8).
Figure 11. Évolution des niveaux d’exposition en toluène entre 1998 et 2008.
Evolution of toluene levels in the decade 1998-2008.
3.4. Évolution sur 10 ans des niveaux d’exposition en monoxyde de carbone, benzène et toluène lors des déplacements
Une étude similaire [1] avait été menée en 1996- 1998 sur l’exposition des citadins aux polluants d’origine automobile lors de leurs déplacements en région parisienne.
La comparaison des niveaux obtenus concerne les mêmes trajets et les indicateurs mesurés selon la même méthode de prélèvement et d’analyse.
Ainsi, la comparaison a été réalisée sur les teneurs médianes obtenues en monoxyde de carbone, benzène et toluène lors de 11 des 20 trajets parcourus (figures 9 à 11).
Une baisse globale de 68 % en monoxyde de carbone est obtenue, tous modes de déplacement confondus ; la baisse la plus importante étant enregistrée pour les conducteurs de véhicules particuliers (79 %).
Celle en benzène et toluène est de l’ordre de 89 %, le pourcentage d’abaissement variant très peu d’un trajet à l’autre, que ce soit à proximité ou en situation éloignée du trafic automobile.
Cette baisse est essentiellement expliquée par l’amélioration de la qualité de l’air générale suite aux normes Euro limitant les émissions de polluants des véhicules neufs (hydrocarbures, CO, NOx et particules) qui ont contribué à une forte réduction des émissions polluantes locales. La norme Euro 3 entrée en vigueur en 2000 a pour la première fois permis de limiter les émissions d’hydrocarbures des véhicules à essence. Elle a été renforcée par la norme Euro 4 entrée en vigueur en 2005 qui a permis de diviser par deux les émissions des véhicules soumis à la norme Euro 3. Ces normes Euro correspondent à l’arrivée de technologies améliorant l’émission des voitures à essence et de type Diesel (pots catalytiques, filtres à particules).
Il convient également de mentionner la réglementation européenne entrée en vigueur en janvier 2000 qui limite à 1 % en volume la teneur en benzène des essences. Avant cette date, la teneur limite réglementaire était de 5 %.
L’évolution de la structure du parc automobile et la diminution des émissions unitaires de polluants associées à une série d’actions engagées par la municipalité parisienne (notamment une modification des conditions de déplacement dans Paris et une incitation des Franciliens à changer de comportement en matière de choix de transport) se traduisent par une amélioration de la qualité de l’air à Paris pour les polluants cités. C’est ainsi qu’en dix ans, le réseau de surveillance AIRPARIF a enregistré un abaissement très net des niveaux moyens annuels dans l’agglomération de 74 % pour le benzène en sites urbains, et respectivement de 68 % et 89 % pour le monoxyde de carbone et le benzène à proximité du trafic automobile.
Conclusions
Il convient de souligner que ces mesures restent des valeurs d’exposition externe et que l’inhalation des polluants dépend non seulement des concentrations ainsi mesurées mais également du temps d’exposition (les trajets en voiture sont en général plus longs que ceux effectués à pied) ainsi que du débit ventilatoire de la personne qui est en lien avec l’effort physique qui, par exemple, est plus important pour le cycliste que pour les autres modes.
Les résultats obtenus dans ce travail s’inscrivent de manière cohérente dans ceux des campagnes d’études françaises et internationales menées récemment sur le même thème. La présente étude se distingue particulièrement par le nombre important d’indicateurs de pollution pris en compte simultanément ainsi que par le grand nombre de moyens de locomotion étudiés, couvrant de manière quasi exhaustive l’ensemble des modes de locomotion utilisés par les habitants de l’agglomération parisienne. Ces données contribueront à mieux estimer la contribution des différents modes de transport dans l’évaluation de l’exposition globale du Francilien au cours de sa journée.
La réalisation des Plans de Déplacement en milieu urbain vise à favoriser l’utilisation des modes de transports alternatifs (marche à pied, vélo et transports collectifs) au détriment de l’usage du véhicule particulier.
Cette étude apporte des arguments pour conforter cet objectif d’évolution des comportements. Elle met en exergue que, particules exceptées, les niveaux d’exposition les plus élevés sont obtenus dans les véhicules particuliers et les niveaux les plus bas sont observés dans le tramway circulant sur le boulevard circulaire ainsi que lors des déplacements à pied en quartier piétonnier au cœur de Paris.
Par contre, pour d’autres modes de transport ayant bénéficié d’aménagements spécifiques de la voirie (autobus de la ligne 91 roulant en couloir protégé, cyclistes empruntant des pistes cyclables), les résultats ne sont pas aussi satisfaisants qu’escomptés. De nouvelles études devraient donc être conduites pour comprendre quels aménagements urbains complémentaires ou modifications sur les matériels roulants sont à promouvoir pour réduire les expositions.