Pour une lecture politique et juridique de la mise en prose bourguignonne de Florence de Rome : les rapports texte-image dans le manuscrit Chantilly, Musée Condé, 652

  • For a Political and Juridical Reading of the Burgundian Prose Reworking of Florence de Rome: Text-Image Relations in Chantilly, Musée Condé, ms. 652

DOI : 10.54563/bdba.234

p. 195-214

Résumés

La mise en prose bourguignonne de Florence de Rome s’éloigne notamment de sa source dans les parties où l’héroïne est persécutée et condamnée à mort avant d’être condamnée à l’exil et enfin réhabilitée grâce à ses pouvoirs de guérisseuse. Faisant preuve d’une résilience et d’une éloquence remarquables, la Florence bourguignonne est loin d’être la victime passive des agressions multiples des hommes ; qui plus est, la vertu principale qu’elle semble incarner ici est la justice, qu’elle revendique pour elle-même et qu’elle exerce sur ses persécuteurs. Dans le témoin du récit enluminé par l’artiste surnommé le « Maître de Wavrin » (Chantilly, Musée Condé, ms 652), texte et images offrent une image de l’héroïne non seulement comme parangon de chasteté et de loyauté, mais aussi comme fontaine de justice, livrant ainsi une leçon politique et juridique pour le moins inattendue à son lectorat d’hommes et de femmes nobles à la cour de Bourgogne.

The Burgundian prose reworking of Florence de Rome differs markedly from its source in those sections where the heroine is persecuted and condemned to death before sent into exile and finally rehabilitated thanks to her powers as a healer. Demonstrating extraordinary resilience and remarkable eloquence, the Burgundian Florence is far from being the passive victim of multiple assaults at the hands of various male characters ; indeed, the principal virtue that she is made to exemplify in this version is justice, which she demands in her own case and which she exercises over her persecutors. In the version of the text illuminated by the artist known as the “Wavrin Master (Chantilly, Musée Condé, ms. 652), text and images depict a heroine who is not only a paragon of virtues such as chastity and loyalty, but also a fountain of justice, offering in this way a political and juridical lesson which may have come as some surprise to its intended audience of noble men and women at the court of Burgundy.

Texte

Les historiens de la Bourgogne ont longtemps insisté sur la justice comme vertu princière dont se vantaient les ducs afin de légitimer l’union personnelle entre eux et les divers territoires qui constituaient l’état bourguignon1. Dans une monographie récente, j’ai tâché de démontrer que les romans en prose bourguignons illustrés par l’artiste surnommé le « Maître de Wavrin » d’après son mécène principal, Jean de Wavrin2, apportent une attention très particulière aux questions de justice qui intéressaient les nobles hommes et femmes à la cour ducale3. En particulier, parmi ce corpus de dix manuscrits qui abondent en épisodes de crimes (adultères, meurtres et viols) et de réponses judiciaires à ceux-ci (gages de bataille, procès et supplices), les romans mettant en scène les femmes persécutées véhiculent au niveau textuel et visuel des leçons incisives sur le bon gouvernement et le rôle de la justice dans ce domaine4.

Dans la présente étude, je me concentrerai sur la mise en prose bourguignonne de Florence de Rome, femme persécutée par excellence, afin de montrer combien celle-ci renchérit sur sa source, un roman en alexandrins monorimés du quatorzième siècle, pour ce qui est de sa portée politique et juridique5. Loin d’être la victime passive des agressions multiples des hommes, Florence, dans la version dérimée de son histoire, surtout telle qu’elle est préservée dans le manuscrit enluminé par le Maître de Wavrin (Chantilly, Musée Condé, ms. 6526), incarne non seulement la chasteté et la loyauté, comme dans le texte-source, mais aussi la justice, qu’elle revendique pour elle-même et qu’elle exerce sur ses persécuteurs.

La mise en prose de Florence de Rome, qui date de 1454, constitue le deuxième volet du remaniement du Roman d’Othovien qui fait de l’héroïne l’arrière petite-fille d’Othovien, empereur de Rome7. Conservée dans quatre manuscrits existants8, elle fut créée à la demande de Jean V de Créquy, grand bibliophile et proche du duc bourguignon Philippe le Bon, dont le nom paraît dans la dédicace9. Le manuscrit de Chantilly porte les armes de la famille de Croÿ dans la première initiale du texte10 : probablement destiné à Jean II de Croÿ, autre grand bibliophile de l’époque11, il fut peut-être commandé par Jean de Wavrin qui lui en fit cadeau12. Ce manuscrit consacre 85 enluminures à l’histoire d’Othovien et 40 à celle de Florence13.

Le remaniement bourguignon suit de près la structure du texte-source qui se divise effectivement en trois parties dans chacune desquelles l’héroïne joue un rôle différent. D’abord héritière d’Othon, empereur de Rome, Florence doit ménager ses propres désirs en matière de mariage avec son devoir vis-à-vis de son père et ses sujets quand ses conseillers lui demandent de prendre un mari capable de défendre l’empire contre l’empereur de Grèce, soupirant refusé de Florence, qui s’est attaqué au pays. Ensuite, fiancée d’Esmeré, fils du roi de Hongrie, Florence est rapidement privée de la protection de celui-ci à cause des machinations de son frère Milon, lui-même épris de Florence, qui l’enlève, tente de la violer et l’abandonne, ce qui provoque les errances de l’héroïne, errances lors desquelles elle est agressée sexuellement par d’autres hommes et accusée de meurtre dans une affaire truquée. Enfin, exilée et réfugiée à l’abbaye de Beau-Repaire, Florence découvre son talent de guérisseuse, ce qui l’amène à affronter tous les hommes l’ayant autrefois persécutée quand ils se rendent, horriblement malades, à l’abbaye pour chercher la guérison ; retrouvant là-bas son fiancé, Esmeré, elle retourne en majesté à Rome.

La mise en prose s’éloigne pourtant de sa source surtout dans deux épisodes concernant des procès, celui de Florence faussement accusée de meurtre et celui de ses propres persécuteurs, qui feront à tour de rôle l’objet de la discussion qui suit.

Abandonnée dans une forêt par son beau-frère, Milon, quand il rate sa tentative de la violer, Florence est recueillie par un homme noble, Therry, qui l’emmène chez lui et l’installe comme compagne de sa fille, Englentine14. Makaire, chevalier dans l’entourage de Therry, s’éprend de Florence mais, repoussé par elle, s’en venge en tuant Englentine, qui partage un lit avec l’héroïne, afin de l’inculper de son meurtre. Le lendemain, une fois le crime découvert, Makaire essaie de convaincre Therry de condamner aussitôt Florence au bûcher. Dans le traitement du procès de Florence que fournit le texte-source, l’héroïne prouve son innocence grâce surtout à sa longue prière du plus grand péril15 qui attendrit le cœur de son juge, alors que la mise en prose met davantage l’accent sur ses plaidoyers éloquents et raisonnés qui lui permettent de se tirer d’affaire. Et le Maître de Wavrin de souligner fortement l’aspect plus juridique que pathétique de cet épisode dans les trois miniatures très originales qu’il y consacre16.

Quand Therry, le père de la jeune fille assassinée éveille Florence et l’accuse du crime, sa première réaction est de courir vers elle pour la frapper de son épée, mais ses propres hommes l’empêchent de rendre une justice aussi expéditive. Dans le texte-source, ceux-ci disent qu’une telle action de sa part porterait atteinte à son honneur :

« Sire, ne l’aiés pas ferue n’adezee,
Mais faittes qu’elle soit en prison menee,
Et puis si soit demain et arsse et embrazee ;
Plus sera vostre honneur que d’iestre ensi alee
17 »

Dans la mise en prose, en revanche, les hommes de Therry l’en dissuadent car cette action porterait atteinte à la justice elle-même :

Ha, sire, gardés que jamais ne soyez homicide de vous meismez et ne touchiés vo serve, mais le traittiés par justice. Faittes qu’elle soit mise en forte prison affin qu’elle ne s’en saille, puis quant le jour sera venus commandés que le feu soit alumé ouquel le ferés ardoir ; et n’en serés en riens chargiez de vostre conscience18.

Les termes homicide, justice, chargiez et conscience font référence ici à la notion de la culpabilité de sang, qui retomberait sur celui qui juge dans un état passionné au lieu d’évaluer le cas selon les preuves, et qui en ferait un meurtrier aux yeux de Dieu, notion qui fait partie intégrante des textes juridiques de l’époque19. L’importance accordée dans le remaniement de Florence de Rome à cet argument est attestée par le fait qu’il revient à plusieurs reprises dans la bouche et du juge et de l’accusée, comme nous le verrons.

Lors du procès lui-même, les preuves présentées contre Florence sont non seulement plus développées dans la mise en prose que dans sa source mais aussi plus empreinte d’une coloration juridique. Le premier argument formulé par Therry et sa femme Beatrix pour condamner Florence, celui de la présomption, est identique dans les deux versions : sa culpabilité serait prouvée parce qu’elle a été trouvée au lit à côté du corps ensanglanté de leur fille, le couteau toujours dans les draps20. Mais, quand les deux rédactions soulèvent un deuxième argument, celui de la notoriété21, lorsque Therry et Beatrix interprètent rétrospectivement le fait qu’on a découvert Florence dans la forêt pendue à un arbre par ses cheveux comme signe de son mauvais caractère22 et qu’ils la traitent de pute, c’est Makaire, le vrai coupable, qui renchérit dans la mise en prose en prétendant qu’elle se faisait punir par son maquereau pour un méfait quelconque : Car bien me jugoit le cuer quant à l’arbre le trouvasmes pendue que ce avoit fait son rufyen pour aulcune juste cause23. Enfin, ce n’est que dans la version dérimée que les hommes de Therry allèguent un troisième argument, celui du flagrant délit, afin de rassurer leur maître qu’il est dans son bon droit de condamner Florence : Elle a esté prise ou fait advenu par coy elle est de droit encouppee du murdre commis par elle, dont à juste cause et raisonnable le pourrés faire ardoir24.

Résistant aux incitations de Makaire de ne plus tarder à prononcer la peine contre Florence, Therry donne à l’héroïne la possibilité de réfuter les accusations proférées contre elle, mais les deux versions se distinguent encore une fois selon qu’elles utilisent ou pas une terminologie juridique. Dans le texte-source, Therry dit tout simplement, comme par curiosité, Je voeil oïr conment se polra escuzer25, alors que, dans la mise en prose, il répète l’argument de ses hommes quant au besoin de respecter le bon déroulement de la justice : il couvient que luy oche dire l’excuzacion qu’elle voudra faire ; bien est raison que on oe ce qu’elle vouldra mettre en avant, pour ce ne se remuera droit26.

Devant ces accusations, Florence dans les deux rédactions prend soin de formuler sa défense, celle-ci étant toujours plus développée et plus technique dans la mise en prose par rapport au texte-source. Un des arguments qu’elle emploie pour se disculper – le fait qu’elle n’a pas quitté le lieu du crime puisqu’on l’a trouvée endormie à côté de la jeune fille assassinée – est presque identique dans les deux versions : se ceste euvre euisse faitte, jamais ne m’euissiez trouvee, car bien euist esté en moy de m’en fuir se le murdre euisse fait […] pour moy sauver et eschapper de mort27. Mais quand Florence insiste sur son innocence28, elle ajoute dans la mise en prose un autre argument quant au manque de raison de tuer Englentine, car elle n’éprouvait pour la jeune fille que de l’amour : oncques en cestuy fait n’euch coulppe, ne oncques ne le feys ne n’adesay pour mal faire a vostre fille que moult j’amoye29. Partant du fait, dans les deux versions, que la vraie motivation derrière le crime doit être ailleurs30, ce n’est que dans le dérimage que Florence, se rendant compte que Makaire est le vrai coupable, exprime son désir de s’en venger :

je te feroye congnoistre et jehir le fin et le commenchement du fait advenu avant que de mes mains m’eschappasses. Pour coy je requiers Dieu et la Vierge Marie sa mere que je puisse estre vengye31.

Enfin, la disculpation de Florence dans la mise en prose se distingue surtout de sa source quand l’héroïne fait appel à la conscience de Therry afin de semer le doute dans son esprit quant au bien-fondé de sa cause, soulignant les raisons légales plutôt que morales qui devraient l’obliger à la déclarer quitte de toutes les accusations contre elle. Dans le texte-source, elle dit :

[Si] vous me voilliés faire dedens un feu jetter,
Je prie Jhesucris, qui se laissa pener
En l’arbre de la crois pour nous tous raccater,
Qu’au jour dou Jugement, ou tous nous fault aler,
Vous pardoinst che fait chi, qu’il ne vous puist grever
A la glore des chieus avoir ne conquester32.

Dans le remaniement, par contre, elle précise :

Sire, se droit jugement voulés faire nullement, ne me poués encuser de la mort de vostre fille. Et se chose est que de volenté vous veuilliez user, et que dedans ce feu me veuilliez faire ardoir, je prye Nostre Seigneur que ou jour du Jugement ou tous couvient venir, vous veuille pardonner ce meffait et que vostre ame n’en soit en riens chargie par coy vous ne perdés la gloire eternele33.

Reprenant pour son propre compte certains des termes de l’argument juridique concernant la culpabilité de sang que les hommes de Therry avaient utilisé pour le convaincre de respecter la procédure, Florence associe explicitement le jugement des hommes et le jugement divin. Elle insiste donc sur le fait que Therry sera jugé selon la manière dont il l’a jugée, et que sa conscience sera très chargie s’il rend contre elle une sentence injuste. Contrairement au texte-source qui montre Florence en train de supplier Dieu de lui donner assez de forces pour subir sa mort imminente avec patience34, le remaniement réaffirme son innocence en évoquant la condamnation divine qui menacerait ceux qui l’auraient mise à mort :

Sire, je te prye que aussy vrayement que je n’ay coulppe en ce fait, dont je suis condempnee à morir, que mon ame veulles rechevoir en ta sainte glore, et tu veulles pardonner à ceulx qui ce me font faire et quy sont cause de ma mort35.

Ces arguments de nature plus explicitement juridique provoquent une réaction également juridique de la part de Therry dans la version dérimée. Alors que le passage correspondant de la source ne produit qu’une réponse purement affective dans son cœur36, dans la mise en prose, Therry s’exclame :

A vray Dieu! tu veulx et as commandé que justice et raison soit faitte et baillye à chascun selonc sa deserte. Je te pry, Sire, que tellement me veulles conseillier que je ne face chose en ce monde par coy mon ame soit blechye37.

Qualifiant les arguments de Florence d’excusacions moult raisonnablez38, Therry avoue l’impossibilité de s’assurer de la vérité de l’affaire et se voit obligé de rejeter les preuves présomptives contre elle, surtout celle du couteau trouvé dans le lit. Devant la réticence de Therry à la juger, Makaire, de plus en plus furieux, se déclare prêt à assumer lui-même la responsabilité de condamner Florence et d’accepter la culpabilité de sang. Dans le texte-source il dit, tout simplement, Je prent trestout sur moy. Or m’en donnéz le don / Je le feray ardoir pour moy et en mon non39, tandis que dans la mise en prose il ajoute des termes bien plus précis concernant les conséquences judiciaires de ses actions :

Et je en prengs ycy et devant Dieu le pechiet sur moy du mal que y pourryez avoir ne acquerir vers Nostre Seigneur ; sy en mes sur moy du tout la coulppe et la paine que à ceste cause en pourriez avoir40.

Voyant que Makaire s’acharne à la condamner, Florence s’adresse une nouvelle fois à Dieu. Pourtant, sa prière du plus grand péril qui poussera Therry à lui pardonner et qui occupe près de 70 vers de discours direct dans le texte-source41 est très écourtée dans la mise en prose qui n’en garde que la fin : Vray Dieux, je te prie et requiers humblement et que fermement ay eu tous les temps de ma vye ma vraye creance en toy aussy vraiement que je say que tu sces qu’il est ainsy. Je te prie, Sire, que tu ayes mercy de moy et que point ne me veulles oublier42. Bien que la conclusion à laquelle Therry aboutit soit la même dans les deux versions (je sçay de certain que celuy quy ne pardonne, que Dieux ne luy fera le pardon43), elle a été anticipée de manière beaucoup plus soutenue dans la mise en prose qui souligne combien la conscience de Therry quant à son droit de condamner Florence a été troublée, d’où son désir de déclarer son innocence.

Dans les trois enluminures que le Maître de Wavrin consacre au procès de Florence, la façon dont l’héroïne est représentée s’écarte notamment des normes iconographiques régissant les textes romanesques et hagiographiques de femmes persécutées qui contiennent des épisodes similaires. Faute de héros qui puisse se porter champion de la dame accusée dans un duel judiciaire, absence que Florence déplore uniquement dans la mise en prose44, manque alors toute scène comparable à celle dans La Mort le roy Artu où un Lancelot s’engage à défendre une Guenièvre, élégamment habillée et agenouillée devant un bûcher en attendant passivement le résultat du combat45. Florence n’est pas non plus dépeinte ici sur le mode d’une vierge-martyre, car celles-ci attendent en général leur sort avec une extrême résignation, qu’elles soient à moitié nues et en train d’être suppliciées, comme dans le cas de sainte Thecla46, ou bien habillées et agenouillées devant leur bourreau les yeux tournés vers le ciel, comme dans le cas des saintes Agape et Chionie47. Au contraire, Florence chez le Maître de Wavrin (Figure 1) est habillée comme un condamné, en simple chemise et dépourvue de tout vêtement qui indiquerait son statut social48 ; les autres détails visuels de l’image correspondent à la description d’elle deschausse et toute eschevelee de ses biaulx cheveux qui luy couvroyent tout le corps jusques au dessoulx de la chainture49. Pourtant, à la différence des condamnés dans les manuscrits de droit qui attendent passivement leur châtiment50, Florence fait des gestes qui se relient à la description textuelle de son éloquence et de sa résistance face à ces tourmenteurs. Alors que la rubrique de la première image de la série mentionne les piteux regrés qu’elle faisoit en attendant la mort51, Florence se tient fièrement debout, les mains jointes, son regard fixant celui de Therry, son accusateur et juge, lorsqu’elle plaide son innocence de manière très raisonnée. Dans la deuxième miniature dont la rubrique parle des actions de Therry et Beatrix (Figure 2), qui refusent de la juger de peur d’encourir le déplaisir de Dieu, et de Makaire, qui se déclare prêt à assumer cette responsabilité52, Florence reste toujours debout, écartant le haut de son corps de Makaire qui a mis ses mains sur elle afin d’usurper Therry dans sa fonction de juge ; le regard de Florence ne quitte toujours pas celui de Therry. Dans la troisième image (Figure 3), dont la rubrique décrit la longue prière que fait l’héroïne53, cette scène hautement dramatique la montre allongée par terre, le visage caché dans ses mains jointes et ses cheveux longs couvrant la plus grande partie de son corps, ces gestes traduisant avec éloquence la façon dont elle poussera Therry à compatir et à lui pardonner.

 Fig. 1

 Fig. 1

Florence plaide son innocence devant Therry dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 219v°, Cliché CNRS-IRHT

© Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé

 Fig. 2

 Fig. 2

Makaire s’acharne à condamner Florence dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 221r°, Cliché CNRS-IRHT

© Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé

 Fig. 3

 Fig. 3

Florence supplie Dieu de la sauver dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 221v°, Cliché CNRS-IRHT

© Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé)

C’est précisément le spectacle de Florence, pitoyable, mais active, digne et persuasive dans ses gestes, qui prouvent le bien-fondé de sa cause par rapport à celle de Makaire qui se voit discrédité par ses gestes de plus en plus désordonnés, contraires à ceux attendus de celui qui juge54, au fur et à mesure qu’il s’acharne à la condamner. Dans la première image (Figure 4), où Florence est tenue par un sergent d’armes, Makaire est vu tout simplement de dos, près de Therry dont le statut plus élevé est suggéré par sa robe bleue et son grand chapeau, sa position de juge légitime indiquée par sa façon résolue de mettre sa main gauche sur sa hanche. Seul le geste légèrement incliné de la tête de Makaire vers Therry fait allusion à son désir de le pousser à expédier le procès afin de mettre à mort l’accusée. Dans la deuxième image (Figure 2), quand Makaire se rend compte que Therry est de moins en moins résolu à prononcer la peine contre Florence, ses mains étendues signalant son refus de juger, le vrai coupable a illégitimement remplacé le sergent d’armes qui, dans l’image précédente, détenait Florence. Les jambes très écartées en signe de son agitation extrême, Makaire prend physiquement possession d’elle en assumant le droit de la juger. Cette façon de le représenter est à l’opposé de la norme iconographique dans les textes de droit qui séparent rigoureusement les actions de celui qui juge, l’air impassible, et celui qui exécute la sentence, le bourreau55 : ici, Makaire essaie d’abolir la distance entre ces deux rôles. Dans la troisième miniature (Figure 3), ses gestes deviennent encore plus démesurés et dévalorisants car, l’air furieux, il lève la main droite dans une dernière tentative de persuader Therry de ne pas épargner Florence. Cette tentative s’avère évidemment infructueuse, car Therry reprend en main la procédure, surveillant Florence d’un air compatissant en même temps que les gestes ouverts qu’il esquisse de ses mains indiquent toujours son refus de la juger. Bref, plus Makaire s’enrage, plus la possibilité de châtier Florence disparaît des trois images : le bûcher qui la menace devient de moins en moins visible, à demi-caché dans la dernière image par le corps de Makaire, et les bourreaux qui s’acharnaient à préparer son supplice disparaissent progressivement de la scène.

Si le procès de Florence, au niveau textuel et visuel, est donc traité dans la mise en prose bourguignonne sur un mode beaucoup plus juridique que dans le texte-source, la représentation du deuxième procès dont il est question dans les deux versions, celui des persécuteurs de l’héroïne, livre une leçon explicite sur le rapport entre le bon jugement et le bon gouvernement. Cette fois-ci, sa modification tourne à un revirement assez spectaculaire lorsque Florence devient elle-même justicière en traitant ses agresseurs soit avec miséricorde soit avec rigueur selon ce que le cas demande.

À l’abbaye de Beau-Repaire viennent solliciter l’héroïne devenue guérisseuse renommée tous les hommes grièvement malades qui l’avaient autrefois persécutée, dont les plus importants sont Milon, son beau-frère, et Makaire, le meurtier d’Englentine. Arrive aussi en même temps pour se faire guérir son fiancé, Esmeré, élu empereur de Rome pendant l’absence de Florence, qui a été blessé dans une bataille contre le roi de Pouilles et de Sicile venu s’attaquer à l’empire affaibli. Dans le texte-source, aussitôt qu’elle reconnaît ses persécuteurs, Florence refuse de les soigner avant qu’ils ne lui confessent leurs crimes : Makaire d’abord, Gombaut, un voleur qui avait trahi Florence ensuite, et Milon enfin. Après avoir écouté ses confessions, qui sont assez brièvement racontées, Florence se dévoile à Esmeré et c’est lui qui prononce la peine contre les trois criminels. Se vengeant de son propre frère, Milon, par qui tout le malheur est arrivé, Esmeré dans la version rimée condamne tous les agresseurs de Florence au bûcher, celle-ci ne jouant aucun rôle dans les jugements :

Esmerés conmanda que Milles soit menéz
Droit a unne campaingne, car la ert enbrazés,
Et Maccairez ossi et Ghombaux par daléz.
On les a trestous trois a l’estacque menéz,
Yloecques les a on et loiiés et cordéz,
Puis y mist on espines et de la laingne asséz,
Et s’en fu en maint lieu entour le feu boutéz,
Et la fu cascuns ars et en pourre ventéz.
Enssi que je vous di, furent ars li glouton
Par devant Esmeret, qui coer ot de lion
56.

Florence, une fois qu’elle a guéri Esmeré de sa blessure, rentre à Rome, l’épouse et s’éclipse désormais complètement devant lui dans le gouvernement de l’empire.

La mise en prose, en revanche, transforme radicalement et l’épisode du procès et le dénouement du récit. Les confessions des persécuteurs de Florence occupent beaucoup plus de place afin de bien montrer comment les méfaits multiples contre elle se sont enchaînés, et cette fois-ci c’est Florence, et non pas Esmeré, qui fait office de juge. Contrairement à son fiancé dans le texte-source qui refuse d’épargner son propre frère, Florence pardonne à Milon et le guérit de sa maladie par pitié de sa souffrance57. Par contre, condamnant sans hésitation les autres hommes qui n’expriment aucun remords pour le mal qu’ils lui avaient causé, elle déclare : A ! tresfaulx et desloiaulx traiteurs, pitiés est de vous avoir laissiet tant vivre, mais s’il plaist à Nostre Seigneur, vous en arés vostre deserte58. C’est encore Florence qui décide de la manière de leur supplice, Esmeré n’y étant pour rien, lorsqu’elle demande à l’abbesse de Beau-Repaire de commander qu’un grand feu soit allumé59. Et Florence d’expliciter la portée politique et juridique de cet épisode transformé dans la mise en prose en expliquant à Esmeré, quand il lui avoue que la confession de Milon l’aurait poussé à le condamner, que la miséricorde est plus importante que la vengeance, si le condamné exprime un vrai repentir60.

Mais le rôle de justicière qu’exerce Florence dans la mise en prose ne se limite pas au procès de ses propres persécuteurs parce que, à la différence du texte-source, elle continue à détenir le pouvoir aux côtés de son mari quand ils deviennent tous les deux dirigeants de Rome. En tant qu’impératrice, Florence est tout aussi responsable qu’Esmeré du bon gouvernement du pays comme le souligne le dénouement du récit, sa description de leurs bonnes actions au moyen de verbes à la troisième personne du pluriel étant digne d’un « miroir des princes »61 :

ilz vesquirent et furent toute leur vye en paix et bonne amour et regnerent leur temps […] et maintindrent tout leur temps durant leurs seignouries en paix et en bonne justice. Bien amé furent de leurs paiis voisins et moult cremus et doubtés, oncques en leur temps ne firent ne esleverent nulles maises coustumes, ains les abatirent et esleverent en leurs seignouriez des milleures62.

Sur le plan politique, Florence, en tant que bonne justicière et dirigeante d’un royaume, prouve qu’elle est la digne héritière de son père, Othon, lui-même apprécié par ses sujets comme un grant justicier en son temps63 qui avait reçu de son propre père, l’empereur Florent, des enseignements correspondant pour une grande partie aux actions accomplies par Florence dans sa façon de gouverner avec son mari64.

La série d’images consacrées par le Maître de Wavrin au procès des malfaiteurs de Florence montrent, comme dans le texte, que c’est elle qui détient le pouvoir de justicier et non pas Esmeré. Bien que celui-ci soit présent dans les deux scènes de jugement de Makaire et de Milon (Figures 4 et 5), portant couronne et représenté de taille plus grande que les autres personnages, il y est figuré en spectateur plutôt que juge. Il ne fait aucun geste de ses mains et son regard se pose non pas sur la personne qui fait sa confession devant Florence mais sur les deux autres malfaiteurs de moindre importance qui se tiennent debout sur des béquilles. En revanche, c’est Florence, habillée en religieuse qui pointe des mains vers les deux coupables dans les deux images, conversant avec les autres religieuses dans le cas de Makaire (Figure 4) et fixant le regard du coupable dans le cas de Milon (Figure 5). Au geste de supplication de celui-ci, signe de son repentir, répondent les mains étendues de Florence qui ne tardera pas à le pardonner. Ce qui ajoute à l’autorité de Florence en tant que justicière est le fait qu’elle soit complètement absente de la scène suivante qui montre le supplice des trois hommes auxquels elle a refusé de pardonner : Makaire, Gombaut et Hector, un autre agresseur dont le texte-source ne parle pas (Figure 6). Ainsi, à la différence de Makaire dans le procès de Florence qui, au niveau textuel et visuel, s’était immiscé illégitimement dans le jugement et le châtiment de l’héroïne, Florence, après avoir prononcé la peine, laisse agir le bourreau, homme affairé et partiellement déshabillé65, qui tout seul dans l’image s’occupe du bûcher sur lequel les trois condamnés trouveront la mort.

 Fig. 4

 Fig. 4

Makaire fait sa confession devant Florence à Beau-Repaire dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 245v°, Cliché CNRS-IRHT

© Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé

 Fig. 5

 Fig. 5

Milon fait sa confession devant Florence à Beau-Repaire dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 247v°, Cliché CNRS-IRHT

© Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé)

 Fig. 6

 Fig. 6

Makaire, Gombaut et Hector sont mis à mort au bûcher sur les ordres de Florence dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 249r°, Cliché CNRS-IRHT

© Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé

Après une telle valorisation de l’héroïne en tant que justicière, la dernière image du manuscrit (Figure 7), qui aurait pu correspondre à la longue description de Florence et d’Esmeré gouvernant ensemble sur l’empire romain, est quelque peu décevante. Montrer une femme, même une impératrice, comme l’égale de son mari, n’aurait-ce pas été aller un peu trop loin pour un lectorat bourguignon à cette époque ? Pas forcément. Certes, la tradition iconographique des textes narratifs ne fournissait pas de modèle : par exemple, les exemplaires des Grandes chroniques de France créés pour des mécènes à la cour de Bourgogne contiennent des scènes de couronnement du roi et de la reine mais jamais celle-ci n’est assise aux côtés de son époux en train de gouverner66. Mais, en 1453, peu avant la création du manuscrit de Chantilly (qui date de 1454), des images montrant des couples en train de gouverner paraissent dans un manuscrit des Privilèges et statuts de Gand et de Flandre (Vienne, Österreichische Nationalbibliothek, ms. 2583), texte qui fut commandité par le duc de Bourgogne, Philippe le Bon, à la suite de sa victoire sur la ville de Gand qui s’était rebellée contre lui entre 1452 et 1453. Exécutées par l’artiste surnommé le « Maître des Privilèges de Gand et de Flandre » d’après ce manuscrit, plusieurs miniatures sont consacrées aux moments les plus forts de ce texte qui passe en revue tous les privilèges et statuts accordés à cette ville et au comté de Flandre entre 1241 et 1453 : par le comte et la comtesse de Hainaut, Thomas de Savoie et Jeanne de Constantinople, en 1241 (fol. 13ro), par le comte et la comtesse de Hainaut, Ferrand de Portugal et Jeanne de Constantinople, en 1228 (fol. 130vo), et par le duc et la duchesse de Bourgogne Philippe le Hardi et Marguerite de Flandre en 1385 (fol. 200vo)67. Dans son traitement de la dernière image de Florence de Rome (Figure 7) néanmoins, le Maître de Wavrin ne semble pas s’être inscrit dans ce courant de valorisation iconographique en milieu bourguignon des femmes responsables de gouverner. Toujours est-il qu’en représentant la séparation à jamais du couple impérial, qui s’en va à Rome, et de Milon, frère d’Esmeré qui se destine à une vie d’ermite, ainsi que la séparation émouvante de Florence et des bonnes sœurs de Beau-Repaire décrite en détail dans la mise en prose mais pas dans le texte-source68, l’artiste nous rappelle l’acte miséricordieux de Florence vis-à-vis de son beau-frère, acte capital pour un bon dirigeant de pays.

Pour conclure, l’héroïne éponyme de Florence de Rome, dans le texte-source et dans la mise en prose, est un parangon de vertus traditionnellement féminines : chasteté, fidélité et patience devant la souffrance. Mais, par sa mise en vedette des aspects politiques et juridiques du texte, la version enluminée par le Maître de Wavrin nous montre également une héroïne sachant déployer la justice et se montrant hautement capable de gouverner un empire. Ainsi Florence dans la mise en prose est-elle à la fois modèle du bon prince et légitimation de la femme de pouvoir dans l’espace bourguignon69.

 Fig. 7

 Fig. 7

Florence et Esmeré s’apprêtent à quitter Beau-Repaire, en disant leurs adieux à Milon et aux bonnes sœurs dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 252r°, Cliché CNRS-IRHT

© Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé)

Notes

1 Cf. A. J. Vanderjagt, Qui sa vertu anoblist. The Concepts of « Noblesse » and « Chose Publicque » in Burgundian Political Thought (Including Fifteenth Century French Translations of Giovanni Aurispa, Buonaccorso da Montemagno, and Diego de Valera), Groningue, Jean Miélot & Co, 1981. Retour au texte

2 Cf. A. Naber, « Jean de Wavrin, un bibliophile du quinzième siècle », Revue du Nord, t. 69, 1987, p. 281-293 ; Ead., « Les manuscrits d’un bibliophile bourguignon du xve siècle, Jean de Wavrin », Revue du Nord, t. 72, 1990, p. 23-48 ; A. Marchandisse, « Jean de Wavrin, un chroniqueur entre Bourgogne et Angleterre, et ses homologues bourguignons face à la guerre des Deux Roses », dans Littérature et culture historiques à la cour de Bourgogne. Actes des rencontres internationales organisées à Dunkerque (Université du Littoral–Côte d’Opale), le jeudi 27 octobre 2005, dir. J. Devaux et A. Marchandisse, Le Moyen Âge, t. 112, 2006, p. 507-527 ; L’art du récit à la cour de Bourgogne. L’activité de Jean de Wavrin et de son atelier. Actes du colloque international organisé à l’Université Littoral Côte d’Opale, Dunkerque, 24-25 octobre 2013, éd. J. Devaux et M. Marchal, Paris, Champion, 2018 (Bibliothèque du xvsiècle, 84) ; C. T. L. Visser-Fuchs, History as Pastime. Jean de Wavrin and His Collection of Chronicles of England, Donington, Shaun Tyas, 2018. Retour au texte

3 R. Brown-Grant, Visualizing Justice in Burgundian Prose Romance : Text and Image in Manuscripts of the Wavrin Master (1450s-1460s), Turnhout, Brepols, 2020 (Burgundica, 29). Retour au texte

4 Cf. Y. Foehr-Janssens, La Veuve en majesté. Deuil et savoir au féminin dans la littérature médiévale, Genève, Droz, 2000 (Publications romanes et françaises, 226), p. 263-264 : « Cette vocation à servir de “miroir des princes” est […] perceptible à travers l’évocation des tribulations des héroïnes persécutées qui servent à dénoncer l’incurie d’un pouvoir fondé sur l’injustice ». Retour au texte

5 Cité d’après Florence de Rome, chanson d’aventure du premier quart du xiiie siècle, éd. A. Wallensköld, Paris, Firmin-Didot pour la SATF, 2 vol., 1909-1907, t. 1, 1907, p. 131-280. Retour au texte

6 Cf. Initiale (http://initiale.irht.cnrs.fr/codex/10534/4487) pour visualiser les images de ce manuscrit. Retour au texte

7 Cf. infra, la contribution de M. Marchal qui prépare par ailleurs une édition d’Othovien et Florence de Rome. Retour au texte

8 Bruxelles, KBR, ms. 10387 ; Chantilly, Musée Condé, ms. 652 ; Orléans, Bibliothèque municipale, ms. 466 ; Paris, BnF, ms. n.a.fr. 21069. Un cinquième manuscrit, Turin, Biblioteca nazionale universitaria, L-I-14, a été largement détruit. Retour au texte

9 Cf. C. C. Willard, « Patrons at the Burgundian Court : Jean V de Créquy and his Wife, Louise de la Tour », dans The Search for a Patron in the Middle Ages and the Renaissance, dir. D. G. Wilkins et R. L. Wilkins, Lewiston, Edwin Mellen Press, 1996 (Medieval and Renaissance studies, 12), p. 55-62 ; M. Gil, « Le mécénat littéraire de Jean V de Créquy, conseiller et chambellan de Philippe le Bon : exemple singulier de création et de diffusion d’œuvres nouvelles à la cour de Bourgogne », Eulalie, t. 1, 1998, p. 69-95. Retour au texte

10 Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (dorénavant Othovyen), Chantilly, Musée Condé, ms. 652, fol. 2r°. Retour au texte

11 Cf. M. Debae, « Une lignée de chevaliers bibliophiles : Jean, Philippe et Charles de Croÿ, comtes de Chimay », dans L’ordre de la Toison d’or, de Philippe le Bon à Philippe le Beau (1430–1505) : idéal ou reflet d’une société ?, dir. P. Cockshaw et Chr. Van den Bergen-Pantens, Bruxelles/Turnhout, Bibliothèque royale de Belgique/Brepols, 1996, p. 201-205. Retour au texte

12 Cf. H. Wijsman, Luxury Bound. Illustrated Manuscript Production and Noble and Princely Book Ownership in the Burgundian Netherlands (1400-1550), Turnhout, Brepols, 2010 (Burgundica, 16), p. 319. Retour au texte

13 Cf. P. Schandel, Le Maître de Wavrin et les miniaturistes lillois à l’époque de Philippe le Bon et de Charles le Téméraire, 2 vol., Thèse de doctorat, Strasbourg, Université Marc-Bloch, 1997, t. 2, p. 44-67. Cf. aussi, sur les miniatures de ce manuscrit, R. Brown-Grant, « Fraternité et chevalerie dans la version bourguignonne de Florence de Rome (Chantilly, Bibliothèque du château, ms. 652) », Tirant, t. 22, 2019, p. 119-144 ; Ead., Visualizing Justice, p. 186-229. Retour au texte

14 Dans le texte-source, la femme de Therry s’appelle Englentine et leur fille Beatrix, alors que la mise en prose les inverse. Retour au texte

15 Cf. J. Garel, « La prière du plus grand péril », dans Mélanges de langue et de littérature médiévales offerts à Pierre Le Gentil, Paris, S.E.D.E.S., 1973, p. 311-318. Retour au texte

16 D’autres histoires illustrées de femmes persécutées ne montrent que des scènes soit de guérison des malfaiteurs, soit de rescousse de l’héroïne par un personnage masculin, soit de consolation de celle-ci par la Vierge Marie : cf. N. B. Black, Medieval Narratives of Accused Queens, Gainesville, University Press of Florida, 2003, fig. 1-9, 17, 20-34. Retour au texte

17 Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 251, v. 3663-3666. Pour toutes les citations, c’est moi qui souligne en caractères gras. Retour au texte

18 Othovyen, ch. 237, fol. 218rb-218va. Retour au texte

19 Cf. Jean Bouteiller, Somme rurale, ou le grand coustumier général de practique civil et canon, Paris, Barthelemy Macé, 1603, p. 2 : [doit] avoir le juge en tous jugemens Dieu devant ses yeux, afin que plus craigne Dieu qu’homme. Retour au texte

20 Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 249, v. 3620-3630 ; Othovyen, ch. 236, fol. 217vb. Sur les différents types de preuves dans la pensée juridique médiévale, cf. M. Billoré, I. Mathieu et C. Avignon, La justice dans la France médiévale : viiie-xve siècle, Paris, Armand Colin, 2012 (Cursus. Histoire). Retour au texte

21 Cf. F. R. P. Akehurst, « Name, Reputation and Notoriety in French Customary Law », dans Fama : The Politics of Talk and Reputation in Medieval Europe, dir. T. Fenster et D. L. Smail, Ithaca/Londres, Cornell University Press, 2003, p. 75-94. Retour au texte

22 Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 250, v. 3639-3648 ; Othovyen, ch. 237, fol. 218ra. Retour au texte

23 Ibid., ch. 237, fol. 219rb. Retour au texte

24 Ibid., ch. 237, fol. 218va. Retour au texte

25 Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 254, v. 3764. Retour au texte

26 Othovyen, ch. 239, fol. 220rb. Retour au texte

27 Ibid., ch. 239, fol. 220va. Cf. Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 254, v. 3774-3779. Retour au texte

28 Ibid., v. 3775-3778. Retour au texte

29 Othovyen, ch. 237, fol. 218va. Retour au texte

30 Cf. Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 254, v. 3676-3678 et Othovyen, ch. 237, fol. 218vb. Retour au texte

31 Ibid., ch. 242, fol. 222vb. Cf. Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 261, v. 3972-3978. Retour au texte

32 Ibid., p. 254-255, v. 3783-3788. Retour au texte

33 Othovyen, ch. 239, fol. 222va. Retour au texte

34 Cf. Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 255, v. 3797-3799. Retour au texte

35 Othovyen, ch. 239, fol. 220vb. Retour au texte

36 Cf. Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 255, v. 3803-3806. Retour au texte

37 Othovyen, ch. 239, fol. 220vb-221ra. Retour au texte

38 Ibid., ch. 240, fol. 221ra. Retour au texte

39 Cf. Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 256, v. 3842-3843. Retour au texte

40 Othovyen, ch. 240, fol. 221va. Retour au texte

41 Cf. Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 257-259, v. 3858-3929. Retour au texte

42 Othovyen, ch. 241, fol. 222ra. Retour au texte

43 Ibid., ch. 241, fol. 222rb. Cf. Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 259-260, v. 3940-3941. Retour au texte

44 Ibid., ch. 237, fol. 218vb-219ra. Retour au texte

45 Cf. par exemple, Paris, BnF, Arsenal, ms. 3480, fol. 629r°, disponible sur Gallica (ark:/12148/btv1b55001676w). Cf. aussi Y. Foehr-Janssens, « The Queen on Trial : Spectacle of Innocence, Performance of Beauty », dans Textual and Visual Representations of Power and Justice in Medieval France. Manuscripts and Early Printed Books, dir. R. Brown-Grant, A. D. Hedeman et B. Ribémont, Farnham, Surrey/Burlington, Ashgate, 2015, p. 217-239. Retour au texte

46 Cf., par exemple, le Miroir historial de Jean de Vignay, traduction du Speculum historiale de Vincent de Beauvais, dans Paris, BnF, ms. fr. 50, fol. 326vo, disponible sur Gallica (ark:/12148/btv1b52506638h). Retour au texte

47 Cf. par exemple, le Miroir historial de Jean de Vignay, dans Paris, Bibliothèque de l’Arsenal, ms. 5080, fol. 236ro, disponible sur Gallica (ark:/12148/btv1b7100627v). Retour au texte

48 Cf. B. Morel, Une iconographie de la répression judiciaire : le châtiment dans l’enluminure en France du xiiie au xve siècle, Paris, Éditions du Comité des travaux historiques et scientifiques, 2007 (Archéologie et histoire de l’art, 27), p. 299. Retour au texte

49 Othovyen, ch. 238, fol. 219vb. Retour au texte

50 Cf. B. Morel, Une iconographie de la répression judiciaire, p. 298. Retour au texte

51 Othovyen, ch. 238, fol. 219va. Retour au texte

52 Ibid., ch. 240, fol. 221rb. Retour au texte

53 Ibid., ch. 240, fol. 221vb. Retour au texte

54 Cf. B. Denis-Morel, « Passing Sentence : Variations on the Figure of the Judge in French Political, Legal, and Historical Texts from the Thirteenth to the Fifteenth Century », dans Textual and Visual Representations, p. 151-170, ici p. 164 : « this action [is] indicated by an appearance of great stiffness in the judge’s body, apparently opposed to the possibility of his “inclining” toward one or other of the parties appearing before him ». Retour au texte

55 Cf. Ibid., p. 161, sur l’absence du juge dans les scènes de châtiment dans les textes de droit coutumier et la différentiation entre celui qui prononce la peine et ceux qui s’occupent du châtiment dans les manuscrits de droit civil. Retour au texte

56 Florence de Rome, éd. cit., t. 1, p. 279, v. 4524-4533. Retour au texte

57 Othovyen, ch. 273, fol. 249va. Retour au texte

58 Ibid. Retour au texte

59 Ibid., fol. 249vb. Retour au texte

60 Ibid., ch. 274, fol. 250va. Retour au texte

61 Cf. R. Brown-Grant, French Romance of the Later Middle Ages. Gender, Morality, and Desire, Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 31-36. Retour au texte

62 Othovyen, ch. 278, fol. 253ra-b. Retour au texte

63 Ibid., ch. 158, fol. 160ra. Retour au texte

64 Ibid., ch. 152, fol. 155ra-va. Cf. M. Marchal, « Les “biaux enseignemens” d’un père à son fils dans Othovyen. Un miroir de prince en miniature à la cour de Bourgogne », dans Le Texte médieval dans le processus de communication, dir. L. Evodokimova et A. Marchandisse, Paris, Classiques Garnier, 2019 (Rencontres, 416 – Civilisation médiévale, 36), p. 295-306 ; R. Brown-Grant, Visualizing Justice, p. 221-222. Retour au texte

65 Cf. B. Morel, Une iconographie de la répression judiciaire, p. 279-95, ici p. 291 : « Les bourreaux se reconnaissent […] au fait qu’ils sont moins vêtus que l’ensemble de l’assistance. Contraints de tisonner régulièrement les cendres afin que les flammes ne perdent pas de leur ardeur, les bourreaux doivent supporter une chaleur extrême ». Retour au texte

66 Cf., par exemple, Paris, Bibliothèque Mazarine, ms. 2028 : fol. 263ro (Louis VIII et Blanche de Castille), fol. 339ro (Louis X le Hutin et Clémence de Hongrie) et fol. 427vo (Charles V et Jeanne de Bourbon). Les enluminures sont consultables sur Initiale (http://initiale.irht.cnrs.fr/codex/7188/9702). Retour au texte

67 Les images mentionnées ci-dessus sont reproduites dans G. T. Clark, Made in Flanders. The Master of the Ghent Privileges and Manuscript Painting in the Southern Netherlands in the Time of Philip the Good, Turnhout, Brepols, 2000 (Ars nova), respectivement, figures 111, 114 et 119. Retour au texte

68 Othovyen, ch. 277, fol. 252rb. Retour au texte

69 Cf. Femmes de pouvoir, femmes politiques durant les derniers siècles du Moyen Âge et au cours de la première Renaissance, dir. É. Bousmar, J. Dumont, A. Marchandisse et B. Schnerb, Bruxelles, De Boeck, 2012 (Bibliothèque du Moyen Âge, 28). Retour au texte

Illustrations

  •  Fig. 1

     Fig. 1

    Florence plaide son innocence devant Therry dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 219v°, Cliché CNRS-IRHT

    © Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé

  •  Fig. 2

     Fig. 2

    Makaire s’acharne à condamner Florence dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 221r°, Cliché CNRS-IRHT

    © Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé

  •  Fig. 3

     Fig. 3

    Florence supplie Dieu de la sauver dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 221v°, Cliché CNRS-IRHT

    © Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé)

  •  Fig. 4

     Fig. 4

    Makaire fait sa confession devant Florence à Beau-Repaire dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 245v°, Cliché CNRS-IRHT

    © Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé

  •  Fig. 5

     Fig. 5

    Milon fait sa confession devant Florence à Beau-Repaire dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 247v°, Cliché CNRS-IRHT

    © Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé)

  •  Fig. 6

     Fig. 6

    Makaire, Gombaut et Hector sont mis à mort au bûcher sur les ordres de Florence dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 249r°, Cliché CNRS-IRHT

    © Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé

  •  Fig. 7

     Fig. 7

    Florence et Esmeré s’apprêtent à quitter Beau-Repaire, en disant leurs adieux à Milon et aux bonnes sœurs dans le Livre des haulx fais et vaillances de l’empereur Othovyen (Lavis d’aquarelle – Maître de Wavrin) : Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé, ms. 652, fol. 252r°, Cliché CNRS-IRHT

    © Chantilly, Bibliothèque et archives du Musée Condé)

Citer cet article

Référence papier

Rosalind Brown-Grant, « Pour une lecture politique et juridique de la mise en prose bourguignonne de Florence de Rome : les rapports texte-image dans le manuscrit Chantilly, Musée Condé, 652 », Bien Dire et Bien Aprandre, 36 | 2021, 195-214.

Référence électronique

Rosalind Brown-Grant, « Pour une lecture politique et juridique de la mise en prose bourguignonne de Florence de Rome : les rapports texte-image dans le manuscrit Chantilly, Musée Condé, 652 », Bien Dire et Bien Aprandre [En ligne], 36 | 2021, mis en ligne le 01 février 2022, consulté le 19 mai 2024. URL : http://www.peren-revues.fr/bien-dire-et-bien-aprandre/234

Auteur

Rosalind Brown-Grant

Université de Leeds

Droits d'auteur

CC-BY-NC-ND