La SGN a vécu en 1968 deux « révolutions », d’abord celle du début de l’année avec le déménagement physique de son siège au Laboratoire des Sciences de la Terre, à la Cité Scientifique de Lille à Annappes, maintenant Villeneuve d’Ascq. Elle suivait en cela la Faculté des Sciences de Lille qui ne s’appelait pas encore Université des Sciences et Techniques de Lille (Lille 1), redevenue depuis 2018 Université de Lille, Faculté des Sciences [et Technologies]. Le Laboratoire des Sciences de la Terre est, quant à lui, devenu UFR des Sciences de la Terre puis Département des Sciences de la Terre. « O tempora, o mores, » disaient les Anciens, soit « Quelle époque ! Quels mœurs ! », une expression venue d’une œuvre de Cicéron, pour exprimer leur « indignation - parfois ironique - de celui qui l’utilise, vis-à-vis des mœurs de son époque. » (Wikipédia, 2018a). En effet, pourquoi donc changer de nom à chaque changement de statut administratif ou de contenu ? L’une des conséquences de cette cascade temporelle de noms pour l’Université de Lille, depuis au moins les années 1960, est le fait que celle-ci est très-peu visible dans les palmarès universitaires internationaux, comme, par exemple, le Times Higher Education World University Ranking, le « classement mondial des universités QS » et le « classement académique des universités mondiales par l’université Jiao Tong de Shanghai » (Wikipédia, 2018b). La seconde « révolution » fut celle du printemps 1968 à laquelle Lille 1 n’échappa pas (Baillot, 2018). Mais ceci est une autre histoire qui vous sera contée dans le prochain tome des Annales.
Le Conseil d’administration élu à l’Assemblée générale du 10 janvier 1968 était le suivant :
Président : M. André DALINVAL
Premier Vice-Président : M. Jean PROUVOST
Vice-Présidents : MM. Alexis BOUROZ et Gérard WATERLOT
Secrétaire : M. Jacques PAQUET
Secrétaire-adjoint : M. Jean-Pierre LAVEINE
Trésorier : M. L’Abbé Gilbert TIEGHEM
Déléguée aux Publications : Mme Paule M. CORSIN
Archiviste-Bibliothécaire : M. Georges COURTY
Conseillers : MM. Paul CELET, Paul CORSIN, Pierre DOLLE, Antoine BONTE, Mme Simone DEFRETIN et Melle Denise BRICE
A la séance ordinaire du 7 février, dans son discours de transmission de la présidence, Mme Defretin, présidente sortante, notait le grand nombre de membres décédés dans le courant de l’année écoulée. L’évocation du décès de Pierre Pruvost, Membre de l’Institut et membre fondateur de la SGN, l’émut particulièrement ainsi que, supposé-je, l’ensemble de l’assemblée. C’est depuis cette réunion au rez-de-chaussée du bâtiment SN5 du campus Cité Scientifique qui logeait et loge encore le laboratoire (département) des Sciences de la Terre que la salle de réunion s’appelle « Salle Pruvost » (Defretin, 1968). Mme Defretin notait par ailleurs que « 25 nouveaux membres ont été élus, 17 communications orales et 7 communications écrites ont été présentées. » (ibid.). Au cours de cette séance, une certaine tradition fut respectée. Un géologue praticien, M. André Dalinval, ingénieur-géologue aux Houillères du Nord – Pas-de-Calais, succédait à une universitaire, Mme Defretin. Cette tradition a duré environ 110 ans des années 1870 aux années 1980, période à partir de laquelle un laisser-aller certain s’installa à la Société jusqu’à ce que quelques membres chevronnés la reprennent en main au milieu des années 2000 (Blieck & De Baere, 2014).
En ce qui concerne le contenu scientifique de ce tome LXXXVIII, disons qu’il est classique et met en avant les résultats des recherches des géologues lillois et de quelques chercheurs extérieurs sur le Carbonifère (paléo-palynologie, paléobotanique), le Silurien et le Dévonien (micropaléontologie, paléozoologie, stratigraphie, tectonique), le Jurassique (paléontologie, Boulonnais, Côte d’Or), le Quaternaire (géomorphologie, sédimentologie, paléontologie) et l’hydrogéologie de la région. Il s’intéresse aussi aux autres massifs paléozoïques de France (Massif armoricain, Lorraine) et de Belgique (Ardenne) ainsi qu’aux chaînes alpines périméditerranéennes (Pyrénées, Grèce, Yougoslavie, Albanie). En cela, ce tome des Annales entre dans ce que nous avons appelé la « Période dinaro-hellénique » de la SGN (Blieck & De Baere, 2014, fig. 10). Notons qu’à la fin du fascicule quatre de ce tome figure une publicité pour l’ouvrage « EVOLUTION DES VERTEBRES », paru en 1966 aux Editions du C. N. R. S. dans sa collection « Colloques internationaux du C. N. R. S. - Problèmes actuels de Paléontologie ». Ces colloques dédiés aux vertébrés étaient le résultat d’une certaine prédominance de l’école française de paléontologie des vertébrés de l’époque, emmenée par le Prof. Jean-Pierre Lehman du Muséum national d’Histoire naturelle à Paris (MNHN). Un autre de ces colloques eut lieu, également au MNHN, en 1972 lorsque votre serviteur, arrivant de l’Université de Lille et de l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud, venait tout juste de débarquer au MNHN pour y faire, sous la direction de Daniel Goujet, son D. E. A. de paléontologie des vertébrés et de paléontologie humaine délivré par l’Université Pierre-et-Marie Curie – Paris 6. Etre un jeune chercheur et se trouver d’un coup plongé au milieu de chercheurs de renommée internationale, dans un établissement prestigieux comme le MNHN, est une manne qui ne se présente pas tous les jours. Il fallait être présent au bon moment avec les bonnes personnes, ce qui n’est en aucune manière le fruit du hasard, mais résulte d’un concours d’éléments contingents : milieux familial et social, formation universitaire, encadrement, conseils éclairés, volontarisme… J’ai donné une idée succincte de ce que fut ma vie au MNHN en ces temps pas si lointains dans un petit article de la revue Les Amis du Muséum national d’Histoire naturelle (Blieck, 2005).