Remises en jeux
Les représentations littéraires des jeux au Moyen Âge

Appel à contribution
Revue Bien Dire et Bien Aprandre, n°39, 2024
Numéro dirigé par Marie-Madeleine Castellani et Matthieu Marchal

Aussi en cest avènement
Juiens nous au Roy qui ne ment,
Aux bares et à l’agnelet,
A Ostés-moi de Colinet,
A Je me plaing qui me feri,
Et, dedens chambre, à l’esbahi,
Et aussi aux adeviniaus,
A l’avainne et aux reponniaus,
A l’erbelette et aux risées,
A l’estoef et aux reculées,
Au mulet, au sallir plus hault,
Et à la charette Michaut ;
Puis à la coulée belée
Qu’on fait d’une carolle lée,
Au chace lièvre, à la cluignette,
Aussi à la sotte buirette,
A la corne de buef au sel,
Et au jetter encontre un pel
Ou deniers de plonc ou pierettes.
Et se faisions fosselettes,
Là où nous bourlions aux nois ;
Qui en falloit, c’estoit anois.
De la tourpie aux amantins
M’esbatoie soirs et matins ;
Et j’ai souvent, par un busiel,
Fait voler d’aiguë un buillonciel,
Ou deux ou trois ou cinc ou quatre
Au veoir me pooie esbatre.

 
Froissart,
L’Espinette amoureuse, dans Œuvres complètes de Froissart. Poésies, éd. A. Scheler,Bruxelles, Devaux, 1870-1872, 3 vol. (t. 1, p. 87-210, v. 219-246)

Pour faire écho aux Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, le numéro 39 de Bien Dire et Bien Aprandre (2024) souhaite proposer une réflexion sur la représentation des jeux, et notamment des exercices corporels, dans la littérature française du Moyen Âge (XIIe-XVe siècles) : lyrique, chansons de geste, romans.

Que ce soit par pur divertissement (deduit, deport, esbanoiement) ou à des fins de développement physique, les hommes du Moyen Âge ont pratiqué de nombreux jeux, ce dont témoigne l’extrait mis en exergue de l’Espinette amoureuse de Froissart.

Selon une typologie bien connue ‒ souvent rappelée dans des dossiers pédagogiques qui accompagnent la visite de châteaux médiévaux ‒, on distingue plusieurs types d’activités ludiques, physiques ou intellectuelles : les jeux d’enfants (cerceau, toupie, billes, boules de neige), les jeux de précision (boules, quilles, palets), les jeux de balle (choule, jeu de paume), les jeux d’adresse et d’équilibre (échasses, patins sur glace, lancers de hache ou de couteau), les jeux d’exercices à vocation guerrière (chasse, lutte ‒ aux poings ou aux bâtons ‒, quintaine, tirs ‒ à l’arc et à l’arbalète ‒, behourt, joutes), les jeux de stratégie (tric-trac, dames, échecs), les jeux de cartes, les jeux de dé et autres jeux d’argent.

Qu’il soit public ou à caractère privé, le jeu, moment privilégié d’oisiveté et de recréation, occupe une grande place dans la société médiévale.

Il s’agira donc de s’interroger sur les représentations littéraires qui sont associées à ces différents types de jeux ; une attention toute particulière sera portée aux activités « sportives » de loisir.

Le numéro regroupera une vingtaine de contributions sur les questions principales suivantes (liste non exhaustive) :

  • le lexique associé au jeu (enquête lexicologie sur les mots du « sport » au Moyen Âge) ;

  • l’étude plus ponctuelle de l’un ou l’autre des jeux médiévaux (la choule, le jeu du papegay, le diable boiteux, Colin maillard, le Roi qui ne ment) ;

  • les différences et la complémentarité entre exercices corporels (jeux d’adresse) et jeux de stratégies (jeux de réflexion) ;

  • l’analyse des textes qui définissent les pratiques individuelles et les règles collectives (entre libre improvisation et codification) ;

  • la dimension esthétique de la représentation des exercices corporels (beauté des corps, adresse et maîtrise des gestes, des mouvements) ;

  • le rôle des exercices corporels dans l’instruction et l’éducation des jeunes enfants (apprentissage des règles et initiation aux principes de vie en société) ;

  • la caractérisation des personnages par l’évocation des jeux (discours de célébration, discours critique et dérision) ;

  • la moralisation : les jeux comme miroir de la société (on songe en particulier à Jacques de Cessoles) ;

  • la législation sur les jeux : les interdictions judiciaires (règlements et ordonnances comme celle du 3 avril 1369 du roi Charles V) en raison des troubles à la paix publique (conflits, accidents, tricheries, immoralité : paris, mises importantes, refus du hasard, perte de temps, mépris de Dieu) ;

  • les émotions liées à la pratique des jeux (plaisir et excitation, ennui ou lassitude) ;

  • la dimension spectaculaire des jeux (assistance, cérémonies) ;

  • les lieux du jeu (extérieur, arènes sportives, la taverne) ;

  • les jeux au féminin/au masculin ;

  • le rapport des textes avec les sources iconographiques médiévales montrant différents types de jeux.

Les projets d’article (entre 3000 et 5000 caractères, avec bibliographie primaire et secondaire indicative, 5-10 mots-clés, et un bref curriculum-vitae de 5-10 lignes) sont à adresser avant le 30 juin 2023 à contact-revue-bdba@univ-lille.fr

Bibliographie indicative :

  • Jeux de princes, jeux de vilains. Exposition, Paris, Bibliothèque de l’Arsenal (2009), dir. È. Netchine, Paris, Seuil/BnF, 2009 (cf. http://expositions.bnf.fr/jeux/).

  • La Règle du jeu, dir. A. Mussou et L. Tabard, Questes, 18, 2010.

  • J.-M. Mehl, Les Jeux au royaume de France, du XIIIe au début du XVIe siècle, Paris, Fayard, 1990.

  • J.-M. Mehl, Des Jeux et des hommes dans la société médiévale, Paris, Champion (Nouvelle bibliothèque du Moyen Âge, 97), 2010.

  • J. Verdon, Les Loisirs au Moyen Âge, Paris, Tallandier, 1980.Image 10000000000006F1000003A1849E583679DB11B9.jpg

Gilles de Chin, pour passer tempz, joute contre une estache
(Lille, Bibliothèque municipale, Godefroy, 50, p. 6)

Procédure d’évaluation : évaluation par double expertise.

Calendrier :

  • 30 juin 2023 : réception des projets d’article.

  • 15 octobre 2023 : notification des décisions d’acceptation ou de refus aux auteurs.

  • 1er mars 2024 : réception de la première version des articles, puis début de la double évaluation.

  • 15 juin 2024 : livraison des textes définitifs par les auteurs dont les articles ont été acceptés, après les éventuelles corrections d’ordre scientifique ou de forme.

  • Octobre 2024 : publication du numéro de la revue.

La revue Bien Dire et Bien Aprandre, fondée en 1978 et publiée par le Centre d’Études médiévales et dialectales de l’Université de Lille et l’ULR ALITHILA, n’accueille que des contributions scientifiques originales (non encore publiées ou soumises à d’autres revues).

Bien Dire et Bien Aprandre est une revue mixte. Elle était jusqu’ici diffusée en version imprimée uniquement, elle le sera aussi bientôt en version numérique, en accès libre différé (après un délai de restriction d’un an). Son site internet sera prochainement accessible.

La revue contient également une section « Miscellanées » incluant des articles originaux de Varia, qui peuvent aussi être envoyés à : contact-revue-bdba@univ-lille.fr.

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