L’exposition comme collectif

Distributivité et interopérabilité dans  « Vrais totems, faux mysticismes » 

The Exhibition as a Collective : Distributivity and Interoperability in « Vrais totems, faux mysticismes »

DOI : 10.54563/demeter.1163

Abstracts

Éparpillés au sol, les multiples ventilateurs de Fans (gisants) (O. Porry, 2020) se tordent au passage des visiteurs. Au-dessus d’eux, suspendues au plafond, les plaques imprimées et sculptées de Statues-Camions (V. Vaysse, 2020) se déplacent et prennent position dans l’espace. Les mouvements des ventilateurs attirent l’attention du spectateur tandis que les plaques s’activent, s’arrêtent et réorientent ce dernier. Ces deux œuvres conçues de façon à manifester une unité propre se déploient pourtant dans l’exposition  « Vrais totems, faux mysticismes » (Septembre 2020, Un singe en hiver, Dijon) sous forme d’un dispositif à part entière. Indépendamment l’une de l’autre, les deux installations répondent aux critères d’un type spécifique de dispositif artistique : les collectifs d’objets à comportements co-localisés et communiquants (COCO²). Chacune déploie ses propres ensembles de comportements individuels et collectifs qui circonscrivent un espace physique mais aussi un espace informationnel et invisible : un réseau sur lequel échangent leurs éléments et qui se superpose à l’espace réel. C’est dans un processus de curation qui s’articule alors autour de la rencontre de ces deux COCO² que l’exposition adopte la forme d’un système de relations effectives. Situer ces deux installations dans un même espace et la mise en place d’un réseau commun ouvre la voie à de nouvelles conditions d’expérience de l’exposition axées sur une dynamique relationnelle élargie aux deux groupes. Élaboré par les deux artistes exposés, le geste curatorial intègre ici la technique et devient programmatique. Il se co-construit avec les éléments des installations, se développe dans des boucles de rétro-action qui font converser ensemble scénographie, expressivité comportementale et transmission de données. « Vrais totems, faux mysticismes » constitue ainsi une pratique expérimentale de la curation. Elle témoigne de la possible interopérabilité des pratiques artistiques numériques et appelle à d’autres modes d’exposition et de création dans la perspective d’expériences collectives de la forme du collectif.

Scattered on the ground, the multiple fans of Fans (gisants) (O. Porry, 2020) twist as visitors pass by. Above them, the printed and sculpted plates of Statues-Camions (V. Vaysse, 2020) hang from the ceiling, moving and positioning themselves in space. The movements of the fans attract the viewer's attention while the plates activate, stop and reorient them. These two works, designed to manifest their own unity, unfold in the exhibition « Vrais totems, faux mysticismes » (September 2020, Un singe en hiver, Dijon) as a complete device. Independently of each other, the two installations meet the criteria of a specific type of artistic device: collectives of co-located and communicating behavioral objects (COCO²). Each installation deploys its own sets of individual and collective behaviors that circumscribe a physical space, but also an informational and invisible space: a network on which their elements exchange and which overlays the real space. In a curatorial process that revolves around the encounter of these two COCO², the exhibition takes the form of a system of effective relationships. Placing these two installations in the same space and setting up a common network, pave the way to new conditions for experiencing the exhibition through an extended relational dynamic between the two groups. Developed by the two exhibiting artists, the curatorial gesture integrates technique and becomes programmatic. It is co-constructed with the elements of the installations, developing in feedback loops that bring together scenography, behavioral expressiveness, and data transmission. « Vrais totems, faux mysticismes » is thus an experimental practice of curation. It testifies to the possible interoperability of digital artistic practices and calls for other modes of exhibition and creation from the perspective of collective experiences of the collective form.

Index

Mots-clés

collectifs, exposition, pratique artistique, programmation, comportements, réseau

Keywords

collectives, exhibition, artistic practice, programming, behaviors, network

Outline

Text

C’est le 10 septembre 2020 que s’ouvre l’exposition « Vrais totems, faux mysticismes » (Un Singe en hiver1, Dijon, 2020, ci-après désignée par l’acronyme VTFM). Elle présente deux installations interactives déployées sur les 70 m² de la salle d’exposition. Dirigées par des programmes informatiques, les deux œuvres intègrent des capteurs et des moteurs : leurs éléments se meuvent et se déplacent en réaction aux visiteurs de l’exposition. L’une, intitulée Fans (gisants) (Olivain Porry2, 2020), est composée de dix ventilateurs sur pieds dispersés au sol en position horizontale et connectés à autant de boîtiers noirs. L’autre, Statues-Camions (Victor Vaysse3, 2020), consiste en un ensemble de plaques colorées qui, suspendues à des rails au plafond, se déplacent de manière linéaire.

C’est Pierre-Élie Chapuis, directeur artistique du Singe en hiver, qui est à l’initiative de l’exposition et nous a invités, Olivain Porry et Victor Vaysse, à y participer. Bien que nous y soyons d’abord en tant qu’artistes plutôt que curateurs, Pierre-Élie nous a néanmoins chargés d’imaginer et de mettre en scène l’exposition dans son ensemble. Il est à noter ici que nous ne sommes pas étrangers l’un à l’autre : nos pratiques respectives, bien que différentes, s’articulent autour de thèmes similaires et font usage des mêmes outils technologiques. Malgré son apparence première de duo-show, VTFM est un dispositif à part entière réalisé à quatre mains. L’exposition présente des éléments dispersés et de leurs entrelacements émerge une entité homogène dont le public peut faire l’expérience de manière cohérente, tel un collectif dont les membres interagissent ensemble.

Ce dispositif d’exposition a été rendu possible par une curation qui, sous la forme d’un geste collectif, fait se croiser programmation informatique et expérimentations relationnelles entre objets, public et espace. Dans cet article, nous analysons le processus d’élaboration de l’exposition et le rôle joué dans celui-ci par les techniques numériques intégrées dans les œuvres exposées. Les particularités formelles des deux installations y sont aussi importantes tant elles correspondent à un type spécifique d’installations artistiques qui se donnent à voir à la façon de groupes sociaux : les « collectifs d’objets à comportements colocalisés et communiquants » (COCO²)4. La cohabitation de ces deux COCO² dans un même espace d’exposition interroge la capacité de ces œuvres robotisées à entretenir des relations effectives entre elles et à produire des expériences sensibles d’interactions collectives : de quelle manière les pratiques numériques favorisent-elles l’interopérabilité et la distributivité des œuvres en vue d’ouvrir à la création d’expériences collectives à l’échelle d’une exposition ?

Pour accéder à l’exposition, le visiteur doit monter un escalier droit qui aboutit à l’une des extrémités de la salle. L’élévation progressive qu’impose cet accès le contraint à appréhender l’exposition à partir du sol. Les ventilateurs qui jonchent le sol lui apparaissent ainsi au fur et à mesure de son avancée et il ne peut d’abord en voir que des parties. L’un d’eux est situé à la sortie de l’escalier, son pied posé à quelques mètres de la dernière marche. C’est alors une croix, formée par des segments d’aluminium blancs, que le visiteur discerne tandis qu’il se tient encore dans l’escalier. Les couleurs éclatantes des plaques de Statues-Camions sollicitent ensuite son attention et, dans un mouvement d’allers-retours continus, son regard se déplace du sol vers le plafond et inversement. Après avoir grimpé quelques marches supplémentaires, le visiteur peut constater qu’un épais tube blanc quitte l’intersection de la croix aperçue auparavant. Ce tube soutient, à son extrémité, un large disque en grillage blanc à l’intérieur duquel on peut voir, immobile, une hélice de plastique. C’est à ce moment que le ventilateur apparaît entièrement aux yeux du spectateur. Lorsqu’il arrive tout en haut de l’escalier, il peut observer la totalité des dix ventilateurs couchés au sol et qui forment ensemble l’installation Fans (gisants).

Entièrement blancs et dépourvus de marques distinctives, les ventilateurs sont dispersés dans toute la salle et étendus dans des directions variées. Leurs têtes sont penchées d’un côté et leurs pieds en forme de croix sont maintenus perpendiculaires au sol. À proximité de chacun d’eux se trouve un boîtier noir rectangulaire qui laisse apparaître, sur l’une de ses faces, la lentille convexe d’un capteur de mouvements. Chaque boîtier est traversé par un câble électrique blanc qui, depuis un ventilateur, serpente au sol et rejoint une prise électrique disposée autour de l’épais poteau de bois qui occupe le centre de l’espace d’exposition. Au-dessus des ventilateurs, les plaques de Statues-Camions demeurent inertes et leurs couleurs laissent apparaître des formes difficiles à distinguer. Ces grandes plaques de polyuréthane aux contours bruts servent de support à des images accidentées : des représentations fragmentées de camions aux couleurs vives dont les éléments s’entrechoquent dans des formes de collages. Elles sont suspendues à des rails noirs, et leurs couleurs flamboyantes contrastent avec la sobriété des appareils au sol. Les plaques ont une taille imposante mais sont suffisamment réduites pour permettre aux visiteurs de les contourner, d’observer leurs deux faces et d’apprécier les images qui les recouvrent. Sans toucher le sol, elles obstruent la vision des visiteurs et les incitent à effectuer des déplacements erratiques. Enfin, la dispersion des ventilateurs et la disposition des câbles au sol tracent aussi des voies de déambulation.

Figure 1

Figure 1

Vue de l’exposition « Vrais totems, faux mysticismes », depuis l’escalier d’accès. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Ensemble, les deux installations invitent le public à explorer l’espace. Lorsqu’un visiteur s’avance à l’intérieur de l’exposition, l’un des ventilateurs, situé à l’autre bout de la salle, commence à s’agiter. Son hélice se met à tourner, son corps remue avec effort et son pied tourne lentement sur le côté. L’attention du spectateur est alors attirée par cet appareil en mouvement et il peut constater que la rotation du pied est laborieuse et hésitante. L’action s’accomplit néanmoins et la croix tourne, se maintient sur une de ses branches, puis descend de l’autre côté pour frapper brutalement le sol dans un bruit sec et métallique avant de repartir dans l’autre sens. Tout au long de la visite, plusieurs ventilateurs situés à différents endroits de l’espace s’activent. Ils répètent la même chorégraphie désynchronisée, se tordent, tapent le sol et vrombissent. C’est alors que les plaques colorées s’animent à leur tour et avancent dans un bruit rauque de moteur électrique. Bien que leurs rails soient orientés dans des directions diverses, elles semblent évoluer vers une même zone, un point invisible au spectateur et dont l’existence ne se manifeste qu’à travers les déplacements coordonnés des plaques qui, parfois, se placent devant lui et bloquent son passage.

Figure 2

Figure 2

Vue de l’exposition « Vrais totems, faux mysticismes ». Les éléments sont dispersés les uns à côté des autres. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

L’attention du spectateur est constamment sollicitée par les appareils au sol qui l’encouragent à explorer l’espace dans différentes directions, tandis que les plaques l’obligent à reconsidérer son itinéraire et à trouver de nouveaux passages pour atteindre les ventilateurs. Mais les mouvements des plaques interfèrent également avec ces derniers et déclenchent, elles aussi, l’activation de certains d’entre eux. Après un court moment, les plaques cessent leur course dans un mouvement de tangage. Une d’elles se trouve alors positionnée dans le flux d’air produit par l’un des ventilateurs actifs, se met à tourner sur elle-même à la façon d’un mobile et ses deux faces deviennent alors visibles depuis un même point de vue. Une telle situation d’interaction entre une plaque et un ventilateur constitue un indicateur puissant de la cohabitation des deux installations au sein de l’exposition. C’est l’entièreté de celle-ci qui semble réagir à la manière dont le spectateur se déplace. Au fur et à mesure que les éléments s’activent les uns après les autres, les bruits métalliques des ventilateurs de Fans (gisants) se multiplient, s’ajoutant aux ronflements des moteurs des Statues-Camions. Le visiteur se retrouve alors immergé dans une cacophonie qui participe de l’homogénéité de l’ensemble que forment les deux installations. Les manifestations concrètes entre les éléments des deux installations s’accompagnent aussi d’interactions symboliques. De nouveaux sens émergent des mouvements et recompositions opérés par les objets, de leurs relations mutuelles, des bruits qu’ils produisent et de la réorganisation de l’espace.

Figure 3

Figure 3

Les plaques de Statues-Camions se déplacent au-dessus de Fans (gisants). Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Les images présentées par les plaques s’entremêlent avec les mouvements des ventilateurs au sol. Les représentations fragmentées des camions se mêlent à celles des gisants électriques, et le vent créé par ces derniers rencontre les mouvements des camions. Dans cette exposition qui se présente comme un système, qui évolue dans des boucles de rétroaction, le visiteur occupe une place privilégiée : il est partie prenante du système, non pas en tant qu’opérateur, mais en tant que rouage de celui-ci. Il se trouve plongé dans une forme de collectif où chacun interagit avec l’ensemble. L’activation séquentielle des éléments, ainsi que leurs interactions les uns avec les autres, témoigne de leur capacité à se manifester de manière autonome. Ils démontrent une forte agentivité5, se donnent à voir comme des agents actifs capables de prendre des décisions, de réagir de manière autonome à des stimuli externes et d’interagir les uns avec les autres. Ils rentrent, de ce fait, dans une catégorie analytique spécifique : celle des objets à comportements6.

Ce concept désigne des artefacts actifs qui ne sont ni zoomorphes ni anthropomorphes mais qui, à travers leurs manifestations actives, suggèrent des formes d’expressivité interprétables comme des états émotionnels internes. Il convient de comprendre ici la notion de comportement comme le résultat d’une projection mentale de l’observateur. En déployant des mouvements dans leur environnement, ces objets invitent le public à percevoir la manifestation croisée d’une intentionnalité et d’une personnalité pouvant être interprétée comme l’expression d’un état émotionnel7. Ainsi, un comportement est défini comme une réponse active à des changements d’état internes ou à des événements extrinsèques. Issu de la recherche en design, le concept d’objets à comportements trouve un écho considérable dans les pratiques artistiques, notamment lorsque celles-ci utilisent des techniques robotiques et des processus d’interaction. De par leur capacité de mouvement et de réaction, ils sont généralement à l’initiative des interactions avec leurs utilisateurs et renversent ainsi l’unilatéralité traditionnelle de la relation entre l’utilisateur et l’objet, entre le spectateur et l’œuvre. Que les actions d’un objet à comportements soient spontanées ou répondent à des stimuli externes, elles s’inscrivent aussi toujours dans un contexte qui influence la perception d’un observateur. Cette dimension systémique de l’objet à comportements le soumet à un régime de relations entre objet, environnement et public qui témoigne de son intégration dans un paradigme cybernétique, un modèle de création artistique et de réception esthétique où l’attention ne se porte plus uniquement sur l’objet lui-même, mais sur le système dans lequel il s’inscrit, un passage de « l’orienté objet » à « l’orienté système8 ».

Si un objet à comportements isolé entretient une relation avec son espace, cette caractéristique se double, dans un groupe d’objets à comportements, de liens d’interdépendance9. Un groupe d’objets à comportements relève alors d’une forme de collectif tant il constitue une réunion d’agents actifs à l’intérieur de laquelle se déploient de multiples modalités d’interaction dont les manifestations modulent la perception globale qu’en a un observateur. Dans VTFM un comportement collectif émerge des interactions entre les objets. Plus que la seule somme de ses parties, VTFM est une exposition-dispositif qui répond aux critères des collectifs d’objets à comportements colocalisés et communicants (COCOCOCO ou COCO²). Ce type d’installation se caractérise par l’émergence, via la réunion dans un même espace de plusieurs objets à comportements, de formes collectives, complexes et dynamiques, perceptibles par un observateur comme des groupes sociaux plus ou moins précis à travers des interactions manifestes entre les éléments. De la foule à l’escouade en passant par l’orchestre ou la tribu, les COCO² se montrent comme des communautés d’objets à comportements et se définissent par les relations dont témoignent les éléments à travers le déploiement de leurs activités dans le temps et l’espace. Si Fans (gisants) et Statues-Camions sont deux COCO², les deux œuvres ont été conçues de manière à manifester leur propre unité. Elles ont été réalisées séparément, et c’est par un processus de curation qui intègre scénographie, programmation informatique et interactions comportementales que VTFM a pu être élaborée comme un système de relations, un collectif d’objets à comportements à l’échelle de l’exposition.

Statues-Camions

Les plaques de l’installation Statues-Camions évoquent des fragments d’une construction ancienne. À travers leurs formes brutes, elles se donnent à voir comme des morceaux d’histoire prélevés lors d’expéditions archéologiques mystérieuses. Le titre de l’installation fait référence aux « statues-menhirs » que l’on peut admirer au Musée Fenaille de Rodez en France. Ces figures anthropomorphes du IIIe millénaire avant notre ère sont parmi les plus anciennes représentations connues de la figure humaine et constituent des témoignages importants d’un imaginaire collectif de l’époque10. Inspirés par ces mégalithes, les fragments qui composent Statues-Camions s’inscrivent, eux, dans une histoire contemporaine dont les figures ne sont plus anthropomorphiques. C’est d’abord l’éclat des encres chimiques colorées qui se présente au regard d’un spectateur. Lorsqu’il s’approche d’une de ces plaques, c’est la nature artificielle du polyuréthane dont est faite la sculpture qui apparaît avec le plus d’évidence à travers les stries, marques et autres éraflures qui entaillent les images imprimées. Si celles-ci semblent en premier lieu constituer des compositions abstraites, des représentations figuratives claires se dessinent rapidement. Portières, pneus, pare brises et phares se révèlent ainsi de ces ensembles polychromes pour former le sujet central des sculptures qui agissent, dès lors, à la façon de tableaux.

L’installation est née d’un désir de confrontation des mythologies et d’une réflexion sur l’image et son pouvoir narratif dans nos sociétés contemporaines. Mais c’est aussi un travail sur l’espace qui a motivé sa réalisation. Avec ses multiples plaques, Statues-Camions a été conçue pour structurer un espace, immerger le visiteur dans un espace parsemé d’indices d’une émergence de mythologies contemporaines autour de la figure du camion coloré. Les éléments de Statues-Camions entourent le visiteur dans ces représentations et dessinent un imaginaire collectif artificialisé où les figures anthropomorphiques se sont transformées en machines reluisantes.

Figure 4

Figure 4

Les plaques de Statues-Camions sont à la fois des sculptures et des tableaux. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

À l’exploration des relations entre image, espace et symbolique s’ajoute une dimension humoristique qui n’est pas étrangère à un discours critique. Si les camions se déplacent linéairement le long des routes, les plaques de Statues-Camions bougent de manière similaire et selon la position des spectateurs situés à proximité. Elles sont montées sur des glissières et sont motorisées de façon à pouvoir effectuer des allers-retours dans l’espace. Au bout de chaque rail, un boîtier contient ainsi un ensemble de composants électroniques, dont une caméra de petite taille pour permettre la détection du public autour de chaque plaque. Interconnectées sur un réseau Wi-Fi, les sculptures échangent des informations en temps réel via le protocole de communication Message Queuing Telemetry Transport (MQTT) et coordonnent ainsi leurs déplacements. Capables de réagir les uns aux autres, les éléments de l’installation se meuvent seuls ou à plusieurs, dans une direction ou une autre. L’ensemble propose une expérience dynamique dans laquelle les objets réagissent au passage du public et modifient le chemin de celui-ci dans l’exposition.

Fans (gisants)

La réalisation de Fans (gisants) trouve sa genèse dans la volonté d’engager une réflexion sur les rapports socio-culturels qu’entretiennent objets du quotidien et humanité. Le ventilateur électrique monté sur pied est intéressant à étudier dans une perspective artistique car il est largement ancré dans l’imaginaire collectif mondialisé. Dès le début du XXe siècle, il accompagne la généralisation de l’électricité dans les foyers11 d’après-guerre et véhicule aujourd’hui des représentations presque universelles. Dans le cadre de Fans (gisants), l’action d’étendre le ventilateur au sol fait émerger des représentations nouvelles : ce choix simple, mais inhabituel, perturbe l’appréhension d’un observateur. C’est aussi un jeu de mots en anglais qui a motivé en partie l’élaboration de l’installation. Le terme anglais pour ventilateur,  fan, désigne également une attitude, celle d’un admirateur, généralement d’un groupe de musique. Ce double sens qui permet de caractériser à la fois un objet et un individu adoptant la position de « spectateur », ouvre, dans un contexte artistique, un champ de lectures nouvelles pour le public.

Dans la pratique, c’est une économie du geste qui a guidé la conception et la réalisation de l’installation. Si de très légères modifications structurelles permettent la transformation rapide d’un ventilateur en un objet à comportements évocateur, ce sont les interactions entre une dizaine de ces appareils qui se sont trouvées au centre du travail d’atelier. L’activité des objets dans l’installation est systématisée selon les déplacements des visiteurs grâce à des dispositifs électroniques intégrés dans des boîtiers noirs. La réalisation de ces circuits, qui contrôlent l’activation, l’extinction et l’échange de données entre les ventilateurs, a occupé une place prépondérante dans le travail d’atelier et ce n’est qu’au cours du montage de l’exposition que les dix ventilateurs ont été collectés et branchés chacun à un boîtier. Pour détecter le passage des spectateurs et estimer leur position dans l’espace, chaque boîtier intègre un détecteur de mouvements. Dispersés dans l’espace, ces capteurs permettent au dispositif global de détecter et situer la présence de spectateurs dans l’installation. Enfin, ce sont des relais électromécaniques, des interrupteurs programmables, qui contrôlent l’activité des ventilateurs. Les dispositifs électroniques contenus dans les boîtes noires sont connectés les uns aux autres par un réseau Wi-Fi et programmés de manière à synchroniser l’activation du capteur d’un boîtier avec l’activation du relais d’un autre boîtier à travers le protocole de communication MQTT. Par l’activation, au passage d’un visiteur, d’un appareil éloigné de lui, l’installation mobilise l’attention du public et l’encourage à explorer l’espace pour saisir les modalités d’interaction dont il fait l’expérience.

Figure 5

Figure 5

Les ventilateurs de Fans (gisants) sont reliés à des boîtiers noirs connectés les uns aux autres pour gérer collectivement l’activation des appareils. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Si, dans cette installation, il est important que les ventilateurs soient identiques, le modèle précis importe peu. Cependant, chaque modèle a ses particularités techniques et celles-ci influent sur les manifestations actives des appareils lorsqu’ils sont posés au sol. Ainsi, l’appareil employé lors des expérimentations en atelier faisait osciller sa tête. À l’inverse, les ventilateurs utilisés lors de l’exposition tordent leurs corps tandis que leurs pieds frappent le sol. La rotation lente du pied produit un effet similaire à la rotation de la tête sur le sol : un mouvement qui apparaît pénible et évoque une situation de souffrance. L’installation a été élaborée à la fois comme un réseau et une expérimentation des relations effectives et symboliques entre les objets eux-mêmes et avec l’espace d’exposition. Construite en tenant compte des contraintes techniques spécifiques aux appareils acquis pour l’exposition, elle s’apparente, dans sa globalité, à un cimetière d’objets issus d’une production industrielle et gémissant autour de son public.

« Vrais totems, faux mysticismes »

Dans la proposition initiale de Pierre-Élie Chapuis, l’exposition VTFM avait pour objectif de réunir deux travaux distincts qui abordent la place des objets techniques dans l’imaginaire collectif contemporain. Le titre même de l’exposition, « Vrais totems, faux mysticismes », évoque un rapport fétichiste de l’humanité aux objets techniques, et les deux installations présentées participent d’un discours critique sur l’impact socio-culturel des technologies. Nous avons été invités à réaliser l’exposition d’abord en tant qu’artistes mais celle-ci s’est trouvée être l’occasion d’une expérimentation artistique au-delà de nos pratiques personnelles. En tant qu’auteurs des installations et, à ce moment-là, curateurs de l’exposition, le montage nous a offert l’opportunité de travailler ensemble, de « faire collectif », sans pour autant unifier nos pratiques et nos discours propres, de créer une forme dynamique, relationnelle et conversationnelle à l’échelle de l’exposition. À travers de nombreux échanges, nous avons identifié des points communs entre les deux installations sur un plan symbolique aussi bien que technique et ceux-ci ont ouvert la voie à un geste curatorial fort visant à assurer une cohérence globale des éléments dans l’espace.

Les deux installations partagent des spécificités communes qui se sont révélées essentielles dans la conception de l’exposition. Constituées d’objets à comportements interconnectés les uns aux autres et distribués dans un espace circonscrit, Fans (gisants) et Statues-Camions répondent indépendamment l’une de l’autre aux caractéristiques des COCO². Elles se distinguent d’abord par la multiplicité des éléments qui les composent. Modulaires, elles offrent une grande flexibilité dans leur agencement spatial, ce qui leur permet de s’adapter au lieu d’exposition et d’adopter différentes configurations, telles que des groupes compacts, des alignements ou une dissémination aléatoire. Dans leur conception initiale, les deux installations étaient destinées à être dispersées dans l’espace et délimiter chacune un territoire à l’intérieur de l’exposition. Cette zone tangible, créée par la disposition des éléments, s’ajoute à la zone virtuelle, informationnelle, du réseau déployé par chaque installation et qui se manifeste à travers les comportements dans l’espace et le temps. Dans son ouvrage Le cercle invisible, Emanuele Quinz décrit comment, face à des installations interactives et génératives, l’expérience du spectateur devient relationnelle12 : sujet du dispositif, le visiteur est situé, perçoit et agit au sein de l’œuvre à partir de sa position, tandis que son attention, dirigée vers un processus, se déploie dans des formes de conversations. Les éléments des COCO², en tant qu’agents actifs, autonomes et distribués, s’avèrent pareillement situés et sont ainsi objets et sujets de leurs propres installations.

Dans cette perspective, le processus de curation de VTFM repose sur la rencontre des deux COCO² et la superposition des différents espaces qu’ils dessinent. La dispersion des éléments, l’entrelacement de leurs territoires physiques, a constitué la première étape de construction d’un dispositif global. Elle se voit prolongée par la superposition des réseaux des deux installations. De leurs interactions dans un seul espace informationnel, invisible, des modalités relationnelles effectives et un rapport commun à l’espace émergent à l’échelle de l’exposition.

À cette étape, c’est une approche technique, informatique et programmatique qui guide l’élaboration de l’exposition. Statues-Camions et Fans (gisants) déploient chacune un réseau sans fil et un même protocole de communication : MQTT. Elles sont interopérables et peuvent interagir selon une norme commune. C’est grâce à l’écriture d’un logiciel spécifique que nous avons reliés les différents éléments des deux installations. Après avoir connecté tous les microcontrôleurs des installations sur un même réseau Wi-Fi, nous avons programmé la gestion des échanges de données entre eux. Le protocole MQTT impose qu’un programme spécifique, désigné par le terme de broker, centralise et distribue les données au sein du réseau13. C’est un broker spécifique à l’exposition qui y joue le rôle d’aiguilleur et permet de faire interagir les éléments entre eux. Travail d’écriture, son élaboration revêt une importance capitale dans le geste curatorial tant il conditionne les relations entre les objets, l’espace et le public.

Figure 6

Figure 6

Schéma de l’architecture des échanges via le protocole MQTT. Le broker fait le lien entre toutes les clients du réseau.

Il est à noter ici que l’écriture du code s’est faite dans le même temps que l’agencement des éléments dans l’espace. Le rapport spatial et les échanges de données sont intrinsèquement liés dans le processus de curation. L’interopérabilité des deux installations, rendue possible par l’utilisation commune du protocole MQTT, permet d’établir des interactions sans avoir à modifier les comportements des éléments. Leurs manifestations actives originales sont ainsi restées inchangées, mais c’est dans l’activation de ces comportements les uns par rapport aux autres dans le temps et dans l’espace que nous avons pu élaborer un nouveau COCO² à l’échelle de l’exposition.

Lors du montage, nous avons remarqué que le sol était composé de dalles régulières formant un quadrillage. Celui-ci nous a permis de positionner précisément les boîtiers noirs de Fans (gisants) pour localiser l’activation des capteurs. Cette information permet de repérer la position spatiale des visiteurs et de guider les déplacements des plaques. Grâce au broker, les plaques sont dirigées vers le public afin de se rapprocher de celui-ci et les caméras initiales de Statues-Camions sont alors obsolètes : initialement, les plaques réagissent aux présences dans une zone limitée autour d’elles mais l’utilisation des capteurs élargit cette zone à tout l’espace et permet de situer les interactions à une échelle collective. Disséminés, ils créent une représentation de la totalité de l’espace, à laquelle les sculptures réagissent ensemble.

Figure 7

Figure 7

Les boîtiers noirs contenant les capteurs de Fans (gisants) sont agencés et orientés selon le quadrillage naturel du sol. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

À travers un algorithme de triangulation qui détermine la zone où se situe le plus grand nombre de spectateurs, les sculptures se déplacent et interagissent avec les ventilateurs en traversant les flux d’air et en activant les capteurs. S’opèrent alors des allers-retours entre les éléments, les capteurs dirigent les mouvements des plaques qui, elles-mêmes, déclenchent l’activation des ventilateurs et imposent la participation du public à ce jeu de va-et-vient. L’ensemble du dispositif constitué par l’environnement, le public et les éléments prend ainsi la forme d’un système. De celui-ci émergent de nouvelles configurations d’expériences sensibles et les boucles d’interactions se donnent à voir comme des modalités relationnelles. C’est toute l’exposition qui se voit modelée par ses propres acteurs et se manifeste comme un COCO² à travers la mise en œuvre de comportements collectifs émergeants14.

Le processus curatorial, soumis à un mouvement de rétroaction permanent, est dirigé vers l’émergence d’une forme dynamique plutôt que vers sa stabilisation. Il impose de considérer la façon dont les éléments réagissent collectivement à des paramètres programmés, mais aussi aux phénomènes qui apparaissent dans l’environnement. Les échanges de données à l’intérieur du dispositif de l’exposition ont ainsi conduit à des reconfigurations successives des paramètres du broker et de l’agencement des éléments, leurs positions, leurs orientations et leurs espacements les uns par rapport aux autres. Dans la construction de l’exposition, il a été essentiel de faire l’expérience du collectif pour en moduler les modalités, reconstruire celui-ci à travers des itérations entre programmation informatique, manifestations comportementales, agencement spatial et expérience sensible. La curation de l’exposition est ainsi un moment d’atelier. Elle intègre la technique informatique aux côtés du montage pour élaborer des représentations symboliques dynamiques. Manipulant des objets à comportements, elle est aussi un geste collectif expérimental qui se co-construit non pas autour des humains, mais bien dans les échanges entre ces derniers, les objets et l’environnement.

Conclusion

En tant que COCO², Statues-Camions et Fans (gisants) incarnent des processus d’interactions dans des manifestations distribuées dans le temps comme dans l’espace. Leur rencontre dans le contexte d’une exposition fait, à elle seule, apparaître les contours d’un nouveau COCO² à l’échelle de l’exposition. Dispersés, agencés les uns par rapport aux autres, les éléments des deux installations sont déjà en relation et dessinent l’espace. À l’occasion de VTFM, c’est cependant leurs spécificités techniques et technologiques communes qui ont autorisé une exploration approfondie de cette forme collective étendue et ouvert la voie à des expérimentations curatoriales et artistiques dans ce sens. Dans un geste collectif de production du collectif, le montage de VTFM témoigne de la souplesse formelle qu’offre la distributivité des COCO² mais aussi de l’interopérabilité des pratiques artistiques numériques et des techniques qu’elles mobilisent.

Figure 8

Figure 8

Vue de l’exposition « Vrais totems, faux mysticismes ». L’agencement des éléments est constamment reconfiguré par leurs manifestations actives. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

VTFM s’inscrit dans une tradition curatoriale qui, depuis l’exposition « First papers of Surrealism » (Whitelaw Reid Mansion, New York, États-Unis, 1942), encourage l’interaction du public15. Dans VTFM, ce sont les installations qui initient les interactions avec le spectateur. Ce dernier est engagé, malgré lui, dans des boucles d’interactions, devient un élément de l’installation et, ce faisant, le sujet de l’exposition. Son comportement d’observateur est modulé par les interactions que lui imposent les éléments des installations et il est, dès lors, soumis au regard des autres spectateurs tant il fait partie intégrante du dispositif de l’exposition. Inscrit dans des allers-retours constants de l’extérieur à l’intérieur des œuvres et inversement, le statut du spectateur est instable et exige de ce dernier une attention particulière, dynamique sur un plan physique aussi bien qu’intellectuel. Au-delà des interactions entre spectateurs et œuvres, des expositions plus récentes ont mis en scène des interactions manifestes entre les éléments exposés eux-mêmes. C’est le cas de « L’ennemi de mon ennemi » (Palais de Tokyo, Paris, 2018)16, une exposition de Neil Beloufa curatée par Guillaume Désange. Dans celle-ci, des robots déplaçaient les éléments exposés pour proposer des interprétations constamment renouvelées. Le spectateur ne pouvait pas interférer avec les systèmes automatiques alors à l’œuvre : il était invité à réaliser une lecture subjective, mais néanmoins suggérée, des relations entre les éléments qui lui étaient présentés. En tant que proposition curatoriale, VTFM se situe dans la continuité de « First papers of Surrealism » mais aussi de « L’ennemi de mon ennemi » : le public ne dirige pas l’exécution des processus techniques, mais sa seule présence participe à la manifestation active des œuvres et à la reconfiguration de l’exposition, sans qu’il ait les moyens de contrôler les modalités de celle-ci.

Dans nos installations respectives, nous témoignons tous deux d’un rapport aux technologies numériques qui relève du bricolage et de l’appropriation technique. En tant que norme standardisée dont l’application est libre et partagée par un grand nombre d’amateurs, le protocole MQTT est ici représentatif de la compatibilité des pratiques artistiques numériques lorsqu’elles partagent les mêmes outils. Dans le cadre de VTFM, les normes technologiques agissent dans la curation de l’exposition comme un support à l’élaboration de la forme collective. Par l’intégration, commune aux deux installations, du protocole MQTT, les éléments robotisés deviennent interopérables et peuvent intégrer les conversations des uns et des autres. Comme en témoigne VTFM, curater une forme de collectif revient à organiser des relations symboliques et effectives entre de multiples agents, eux-mêmes déjà organisés au sein d’installations. Une telle démarche relève d’une pratique artistique numérique et impose de penser l’exposition dans sa condition post-numérique. Ainsi le processus de curation y est à la fois pratique et technique. La modularité et l’expressivité des COCO² situent déjà les conditions d’une forme collective et l’interopérabilité technique des machines qu’offre le protocole MQTT signe l’intégration, dans le processus de curation, de la programmation informatique. Celle-ci bouleverse le rapport à l’espace du geste de curation qui se voit projeté dans l’écriture et l’exécution du broker.

Enfin, l’agentivité des éléments force à l’itération et déplace l’autorité dans le processus de curation. Les objets à comportements prennent part à l’élaboration de l’exposition tant leurs manifestations influent sur nos décisions d’artistes et de curateurs, sur l’apparition de représentations symboliques et la définition des conditions d’émergence de la forme collective. La conception comme la réalisation de VTFM ont été un enchevêtrement de négociations avec la technique et ses manifestations, des formes de collaborations entre artistes, espace et objets à comportements. En ce sens, elle témoigne de la nécessité d’une approche collective du travail de production de la forme de collectif. VTFM fait aussi la démonstration d’une condition post-numérique de la curation17. Elle est en effet un geste artistique, un geste technique et un geste distribué dont les concepts et pratiques relèvent du système et de l’information. À travers l’expérience du collectif qu’elle propose, ce sont les formes spécifiques aux COCO² qui, avec les pratiques artistiques numériques, appellent à expérimenter des modalités de curation dans la perspective d’expériences empiriques des formes de collectif.

1 Un Singe en Hiver est un espace hybride situé à Dijon. Il s’agit à la fois d’une brasserie artisanale et d’une structure associative dédiée à la

2 Olivain Porry est artiste et docteur associé au laboratoire SACRe-EnsadLab. Son travail de recherche ainsi que sa pratique artistique se développent

3 Artiste et doctorant au sein du programme RADIAN de l’université de Caen-Cherbourg, Victor Vaysse développe une pratique de la sculpture qui s’

4 Développé plus loin dans le texte, le concept de collectif d’objets à comportements colocalisés et communiquants, ou COCO², décrit des groupements

5 Simon Penny, « Agents as artworks and agent design as artistic practice », Human Cognition and Social Agent Technology, Kerstin Dauthenhahn (ed.)

6 Samuel Bianchini, Rémy Bourganel, Emanuele Quinz, Florent Levillain, Elisabetta Zibetti, « (Mis)behavioral Objects, Empowerment of Users vs

7 Florent Levillain et Elisabetta Zibetti. « Behavioral Objects : The Rise of the Evocative Machines », Journal of Human-Robot Interaction 6,no 1

8 Amandine Bajou, Samuel Bianchini, Alexandre Saunier, « Du comportement des objets au comportement entre les objets », Inter, Art Actuel, n° 125

9 Florent Levillain, Elisabetta Zibetti, Sébastien Lefort, « Interacting with non-anthropomorphic robotic artworks and interpreting their behaviour »

10 Pour en savoir plus sur les « statues-menhirs » voir Jacques Cauvin, Naissance des divinités, naissance de l’agriculture. CNRS, 2013.

11 « Fan History » Fan Collectors. URL : https://www.fancollectors.org/fanhistory.htm [consulté le 14 février 2023],

12 Emanuele Quinz, Le cercle invisible : environnements, systèmes, dispositifs, Paris, Les Presses du réel, 2017, p. 234.

13 OASIS. MQTT Version 5.0., URL : https://docs.oasis-open.org/mqtt/mqtt/v5.0/mqtt-v5.0.html [consulté le 14 février 2023]

14 Olivain Porry, Samuel Bianchini, Florent Levillain, « COCOCOCO. Faire œuvre avec des collectifs d’objets à comportements colocalisés et

15 Cf. André Breton, Marcel Duchamp, First Papers of Surrealism, cat. exp., André Breton (ed.), (Coordinating Council of French Relief Societies, Inc.

16 « L’ennemi de mon ennemi – A project by Neil Beloufa »,URL : https://palaisdetokyo.com/en/exposition/lennemi-de-mon-ennemi/ [consulté le 29 mai

17 Pauline Gourlet, Thierry Fournier, Emil Sennewald, « Recherche par l’exposition et condition post-numérique ». Proteus-Cahiers des théories de l’

Bibliography

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Simon Penny, « Agents as artworks and agent design as artistic practice », Human Cognition and Social Agent Technology, Kerstin Dauthenhahn (ed.), Amsterdam, John Benjamins, 2000, p. 395-414.

Notes

1 Un Singe en Hiver est un espace hybride situé à Dijon. Il s’agit à la fois d’une brasserie artisanale et d’une structure associative dédiée à la création artistique, cinématographique et musicale. La direction artistique d’Un Singe en Hiver se concentre tout particulièrement sur l’accompagnement, la production et la diffusion de pratiques artistiques numériques, interactives et immersives.

2 Olivain Porry est artiste et docteur associé au laboratoire SACRe-EnsadLab. Son travail de recherche ainsi que sa pratique artistique se développent autour de réflexions sur les réseaux de communication informatiques modernes et leur impact sur les pratiques de création et de réception. Ses installations artistiques se concentrent en particulier sur les relations entre les éléments non-vivants, ainsi qu’entre ces éléments et leur public, et impliquent l’interaction de diverses machines et robots.

3 Artiste et doctorant au sein du programme RADIAN de l’université de Caen-Cherbourg, Victor Vaysse développe une pratique de la sculpture qui s’accompagne d’une réflexion sur l’image et son statut dans les sociétés occidentales contemporaines. Les techniques numériques occupent une place importante dans ses productions tant elle lui permettent d’élaborer des installations dynamiques où se mêlent mouvement et génération d’images.

4 Développé plus loin dans le texte, le concept de collectif d’objets à comportements colocalisés et communiquants, ou COCO², décrit des groupements organisés de robots non-anthropomorphes et non-zoomorphes dans un contexte d’installation artistique. Il se concentre sur la description des modalités d’interactions, à la fois effectives et symboliques, dans des groupes de robots excluant la participation directe et unilatérale des individus humains. Cf. Olivain Porry. Des communautés de machines, Thèse de doctorat, SACRe, EnsadLab, Université PSL, Paris, 2022.

5 Simon Penny, « Agents as artworks and agent design as artistic practice », Human Cognition and Social Agent Technology, Kerstin Dauthenhahn (ed.), Amsterdam, John Benjamins, 2000, p. 395-414.

6 Samuel Bianchini, Rémy Bourganel, Emanuele Quinz, Florent Levillain, Elisabetta Zibetti, « (Mis)behavioral Objects, Empowerment of Users vs Empowerment of Objects », Empowering Users through Design, David Bihanic (ed.), Cham, Éd. Springer, 2015.

7 Florent Levillain et Elisabetta Zibetti. « Behavioral Objects : The Rise of the Evocative Machines », Journal of Human-Robot Interaction 6, no 1, 2017, p. 1-17.

8 Amandine Bajou, Samuel Bianchini, Alexandre Saunier, « Du comportement des objets au comportement entre les objets », Inter, Art Actuel, n° 125, 2017, p. 24-29.

9 Florent Levillain, Elisabetta Zibetti, Sébastien Lefort, « Interacting with non-anthropomorphic robotic artworks and interpreting their behaviour », International Journal of Social Robotics, n° 9.1, 2017, p. 141-161.

10 Pour en savoir plus sur les « statues-menhirs » voir Jacques Cauvin, Naissance des divinités, naissance de l’agriculture. CNRS, 2013.

11 « Fan History » Fan Collectors. URL : https://www.fancollectors.org/fanhistory.htm [consulté le 14 février 2023],

12 Emanuele Quinz, Le cercle invisible : environnements, systèmes, dispositifs, Paris, Les Presses du réel, 2017, p. 234.

13 OASIS. MQTT Version 5.0., URL : https://docs.oasis-open.org/mqtt/mqtt/v5.0/mqtt-v5.0.html [consulté le 14 février 2023]

14 Olivain Porry, Samuel Bianchini, Florent Levillain, « COCOCOCO. Faire œuvre avec des collectifs d’objets à comportements colocalisés et communicants », Corps connectés. Figures, fragments, discours, Armen Khatchatourov, Olaf Avenati, Pierre-Antoine Chardel et Isabelle Queval (dir.), Paris, Presses des Mines/ESAD, 2022, p. 24-37.

15 Cf. André Breton, Marcel Duchamp, First Papers of Surrealism, cat. exp., André Breton (ed.), (Coordinating Council of French Relief Societies, Inc., New York, 1942).

16 « L’ennemi de mon ennemi – A project by Neil Beloufa »,URL : https://palaisdetokyo.com/en/exposition/lennemi-de-mon-ennemi/ [consulté le 29 mai 2023].

17 Pauline Gourlet, Thierry Fournier, Emil Sennewald, « Recherche par l’exposition et condition post-numérique ». Proteus-Cahiers des théories de l’art, n° 10, 2016, p. 40-47.

Illustrations

Figure 1

Figure 1

Vue de l’exposition « Vrais totems, faux mysticismes », depuis l’escalier d’accès. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Figure 2

Figure 2

Vue de l’exposition « Vrais totems, faux mysticismes ». Les éléments sont dispersés les uns à côté des autres. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Figure 3

Figure 3

Les plaques de Statues-Camions se déplacent au-dessus de Fans (gisants). Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Figure 4

Figure 4

Les plaques de Statues-Camions sont à la fois des sculptures et des tableaux. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Figure 5

Figure 5

Les ventilateurs de Fans (gisants) sont reliés à des boîtiers noirs connectés les uns aux autres pour gérer collectivement l’activation des appareils. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Figure 6

Figure 6

Schéma de l’architecture des échanges via le protocole MQTT. Le broker fait le lien entre toutes les clients du réseau.

Figure 7

Figure 7

Les boîtiers noirs contenant les capteurs de Fans (gisants) sont agencés et orientés selon le quadrillage naturel du sol. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

Figure 8

Figure 8

Vue de l’exposition « Vrais totems, faux mysticismes ». L’agencement des éléments est constamment reconfiguré par leurs manifestations actives. Un Singe en hiver, Dijon, France, 2020.

Photo : V. Vaysse & O. Porry

References

Electronic reference

Olivain Porry and Victor Vaysse, « L’exposition comme collectif », Déméter [Online], 10 | Été | 2023, Online since 01 octobre 2023, connection on 04 octobre 2024. URL : https://www.peren-revues.fr/demeter/1163

Authors

Olivain Porry

Olivain Porry est artiste, docteur en recherche-création du laboratoire SACRe (EnsadLab, Université PSL) et diplômé d'un DNSEP de l'École des Beaux-Arts de Nantes. Son travail se concentre sur les conditions de l'émergence, dans une expérience esthétique, de modalités relationnelles entre public, dispositif artistique et environnement. Sa thèse intitulée Des communautés de machines et menée au sein du laboratoire EnsadLab, s’intéresse à la notion de collectif dans les installations artistiques constituées d'objets robotisés et s'attache à la définition d'outils conceptuels et pratiques pour engager des formes de négociation et de collaboration entre auteur et dispositif artistique.

Victor Vaysse

Victor Vaysse est né en 1989, diplômé de Beaux-Arts de Paris en 2015 et ancien élève du Fresnoy (promotion Manoel de Oliveira, 2015-2017). Il intègre en 2020 le programme RADIAN, doctorat de recherche et création de l’université Caen-Cherbourg. Les questionnements qui traversent sa pratique sont liés à l’enregistrement, à la matérialité et à la réception de l’image. Son travail est alimenté par la pratique de la photographie qu’il a progressivement mise en question, interrogeant le statut même de l’image, de sa production à sa mise en espace. Petit à petit, une pratique transdisciplinaire a vu le jour, qui s’est déployée à partir de son questionnement de photographe et qui se cristallise tant dans des sculptures, dans des images imprimées, que dans des installations numériques.

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