La Ruée : une transe-histoire de la France

DOI : 10.54563/demeter.95

Abstracts

De 2009 à 2018, le Centre Chorégraphique de Rennes, renommé Musée de la danse par son directeur, le chorégraphe Boris Charmatz, a cherché à élargir le champ d’action et de réception de la danse en mélangeant les pratiques, les formes et les discours. Au fil d’expositions performées (expo zéro, 20 danseurs pour le xxe siècle, Fous de danse) actant le brouillage des frontières entre problématiques muséales et chorégraphiques, la parole – qu’elle soit pure improvisation, mise en contexte ou construction d’un dialogue – a servi d’outil réflexif permettant de situer le corps dansant, et de convertir en danse des pratiques et des discours qui ne se conforment pas à ses codes.
En novembre 2018 a eu lieu au Théâtre National de Bretagne le dernier événement organisé par le Musée de la danse : La Ruée, une performance collective basée sur le livre Histoire mondiale de la France, dirigé par Patrick Boucheron. Performeurs, danseurs ou comédiens ont envahi les espaces du théâtre et activé une date, créant une constellation d’actions simultanées, construisant un nouage singulier entre révélation de zones méconnues de l’Histoire et actualisation de leur sens au présent. Avec cette question, comment faire passer l’Histoire dans les corps, la Ruée problématise la possibilité de performer un discours et permet d’interroger le statut de la parole mise en action par le Musée de la danse durant ses neuf années d’existence.

From 2009 to 2018, the Choreographic Center of Rennes, renamed Dancing Museum by its director, the choreographer Boris Charmatz, sought to widen the field of action and reception of dance by mixing practices, forms and discourses. Over the course of performative exhibitions (expo zéro, 20 dancers for the 20th century, Fous de danse), blurring the boundaries between museum and choreographic frames, the speech – whether it be pure improvisation, contextualization or construction of a dialogue – has been used as a reflexive tool allowing to situate the dancing body, and to convert into dance practices and discourses which do not necessarily conform to its codes.
In November 2018, the last event organized by the Dance Museum took place at the Théâtre National de Bretagne: La Ruée, a collective performance based on the book France in the World: a new global History, directed by Patrick Boucheron. Performers, dancers and actors have invaded the spaces of the theater and activated a date, creating a constellation of simultaneous actions, building a unique knotting between the revelation of unknown areas of history and the updating of their meaning in the present. With this question, how to pass history into the body, La Ruée problematizes the possibility of performing a discourse and allows us to question the status of speech put into action by the Dancing Museum during its nine years of existence.

Index

Mots-clés

histoire, danse, performance, discours

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Text

On peut raconter, sur le mode de l’enquête, la manière dont le passé se fait et se défait sans cesse au travail de l’histoire. Car celle-ci ne parle pas d’elle-même, dans la transparence éthérée de l’évidence, mais à travers des intrigues de connaissances.
Patrick Boucheron, Histoire mondiale de la France.

Agiter le présent

On pénètre dans le théâtre, un théâtre : un espace historiquement connoté, doté d’une ou de plusieurs salles de représentation, munies d’une scène conçue pour présenter des spectacles de théâtre ou de danse, de gradins permettant d’accueillir un public – mais aussi de coulisses, loges, couloirs, local technique – espaces intermédiaires d’ordinaire dérobés au regard. On est au théâtre, ce théâtre – n’importe quel théâtre. Aucun spectacle n’est programmé ce soir. On ne vient pas au théâtre voir une pièce de théâtre, s’asseoir dans un fauteuil, regarder ; on ne vient pas contempler d’un point fixe le développement d’une histoire. On ne sait pas exactement ce qu’on vient regarder mais on sait déjà que ça n’aura pas lieu dans un espace-temps théâtral conventionnel. On sait que ça s’appelle La Ruée1 ; le titre convoque des images de foule, de précipitation : ruée vers l’or, cheval cabré, afflux de corps. On sait que ça s’appelle La Ruée et que c’est un événement organisé par le Musée de la danse. On sait enfin, en pénétrant dans le théâtre, qu’il y sera question d’Histoire, d’Histoire de France, d’une histoire mondiale de la France. On possède ces deux éléments – danse et histoire, sans connaître la nature exacte de leur relation ; et ce titre, La Ruée, qui induit un certain mode de déplacement, un certain degré d’implication des corps : une intensité.

On sait qu’on est au théâtre, ce théâtre, le tnb, mais on sait aussi qu’on est, simultanément, au Musée de la danse : un centre chorégraphique détourné, renommé – une institution qui s’est fait une spécialité d’envahir ou de réfléchir d’autres institutions2. En pénétrant dans La Ruée, on est donc à la fois dans un théâtre, un musée, un centre chorégraphique et un livre (Histoire mondiale de la France3, ouvrage collectif dirigé par Patrick Boucheron). Ou plutôt : dans un théâtre occupé par un centre chorégraphique devenu un musée exposant des corps récitant un livre. C’est-à-dire un emboîtement de médiums : différentes techniques de modélisation et de transmission du savoir enchâssées les unes dans les autres. Comment des dispositifs aussi hétérogènes peuvent-ils coexister, au prix de quelles distorsions ? Leur conjugaison autour d’un événement redistribue-t-elle les qualités attribuées au théâtre, à la danse, à l’Histoire ? Selon quel équilibre du discursif (propre à l’histoire), du narratif (propre au théâtre), du physique (propre à la danse) et du spectaculaire (partagé par la danse et le théâtre) ?

On franchit les portes avec ces questions, et immédiatement on est pris. Dès la montée des marches et l’arrivée dans le hall, quelque chose nous capture : pris par des voix, des mouvements, des lumières. Pris par des lumières tournantes – gyrophares de couleurs posés au sol qui évoquent la boîte de nuit et/ou l’état d’urgence. Ambiance alarme. Ambiance fête-de-fin-du-monde. Urgence des corps éclairés par intermittence : de leurs mouvements et de leur voix. Car ça parle, ils parlent, chaque corps présent dans l’espace parle, énonce, scande, crie, chante, chuchote, récite. Désorienté, on avance à tâtons ; le balayage des gyrophares dévoile un visage, un bras, un groupe de corps en train de danser et/ou de parler. On avance et on est pris de tous côtés par des faits, des dates, des morceaux de temps. On avance au sein d’une Histoire devenue folle, où les périodes et les points de vue se carambolent, projetés les uns contre les autres ; parfois un nom, un événement, une tonalité familière émergent du brouillard de l’Histoire – d'une histoire dont on se rend compte, en passant du moyen âge au xixe siècle, en sautant de la Révolution française à la Seconde Guerre mondiale, qu'on sait au fond peu de choses. Il nous manque, certes, des faits, mais plus encore, des connexions entre ces faits ; des liens nous indiquant comment ils s’organisent autour de cet ensemble que l’on appelle « la France ».

Là, c'est 1984 : en haut des marches, à l’entrée du théâtre, les membres du collectif La Horde dansent à l'unisson – gestes saccadés, mécaniques ; vêtus de survêtement colorés, ils scandent : Michel Foucault est mort. Là, c'est 1791 : dans le sas menant à l’une des salles du théâtre, Nadia Beugré, à moitié nue, parle de l'abolition de l'esclavage et des révoltes dans les Antilles. Là, c'est 1912 : seul sur une scène vide, Yves-Noël Genod, en maître de cérémonie, se livre à une méditation sur l'art moderne. Là, c'est 1948 : sur un plateau vide balisé de gyrophares de couleurs, Djino Alolo Sabin parle de la déclaration universelle des droits de l’homme en compagnie de Sidonie Duret. L’une danse, l’autre parle. Puis ils échangent, et c’est 1942, la rafle du Vel d’Hiv’. Corps et dates, échos et correspondances... des ramifications s’étendent à tout le bâtiment. Là, c'est 2003 : Marlène Saldana s'est installée dans une loge, dans un recoin du théâtre ; musique à fond, elle fume une cigarette, une perruque blonde sur la tête, tandis que défile le discours de Dominique de Villepin à la tribune de l'onu. Là, c'est 1933 : dans un couloir, Jean-Baptiste André dessine des inscriptions à la craie au sol. En équilibre sur un bras, il trace des lignes, des mots : André Malraux, la condition humaine. Là, c'est 1900 : au hasard de ses déambulations, Frank Willens, fait lire des passages du chapitre sur l’affaire Dreyfus aux personnes qu'il croise. On parcourt les couloirs, les scènes, les sas, on fait des boucles, on revient sur ses pas ; on reste 5 minutes, 10 minutes, une demi-heure ; devant Simon Tanguy, devant Vera Montero, devant Gaspard Gilbert. On passe de l’exposition universelle de 1901 à l’esclavage dans la société médiévale à la guerre de 14-18. On s’enfonce, on descend dans les profondeurs du théâtre. Là, c'est 1972 : sous les gradins, entre des rangées de poteaux métalliques, Arthur Nauzyciel évoque le coup d’état au Chili et ses répercussions sur la politique française ; ses chaussures à bout métallique claquent au sol. Là, c'est 1871, la Commune : sous la même forêt de poteaux, Bernardo Montet déambule comme dans un labyrinthe, frappant les barres de ses mains. On passe, on repasse, on se perd, on écoute. Dans une salle au sous-sol, on découvre une assemblée éphémère : ce sont les étudiants de l'école du tnb. Ils parlent, parfois tous en même temps, parfois chacun dans son coin, créant des bulles de parole, de petits îlots de temps autour desquels s’agglomèrent quelques spectateurs. On peut se rapprocher, écouter, s’allonger : les voix font comme une vague qui monte et reflue, un massage historique établissant un rapport charnel entre l’écouteur et le locuteur. Histoire lointaine, inaudible, conflictuelle... histoire ironique, balbutiante ou décapante, histoire au scalpel, à la truelle, histoire-ritournelle, toute proche, mobilisant ensemble la surface du présent et l’épaisseur du passé...

Corps versus récit

Quel rapport au discours, au mouvement et à l’histoire instaure cette nuée de corps qui parlent, éparpillés aux quatre coins d’un théâtre ? Quel est le statut des corps émetteurs : parlant d’où, transmettant quels savoirs, performant quel(s) discours ? Et comment s’établit une circulation entre ces différents médiums (histoire, danse, théâtre), ainsi qu’entre les différentes zones de l’histoire de France réunies au sein du même espace-temps ? Commençons par décrire le dispositif : à partir du chapitre d'Histoire mondiale de la France que chaque interprète avait choisi (ou s’était vu confier), il s'agissait de tisser un lien performatif avec le texte : de proposer un mode d'activation physique des mots et de l’événement dont ils rendent compte. En s'appuyant sur les spécificités du lieu, la lumière, les corps des spectateurs ; en s'appuyant sur une scansion, un certain style de danse, une certaine modulation du discours – afin de déplacer, de reconfigurer de brouiller ou d'intensifier le signal. À la manière de la communauté des « êtres-livres » du roman Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, ayant chacun appris un livre par cœur, les danseurs, danseuses, comédiens et comédiennes formaient ainsi avec leur texte une entité indissociable : un livre incarné, disséminé – une histoire de France éparpillée en une multitude de singularités mouvantes, bruissantes et parlantes.

Que produit l’opération de conversion d'un livre d’histoire en performance collective – qu'est-ce qui se perd en route, qu'est-ce qui est déplacé, transformé ou amplifié par le passage des pages aux corps ? La première caractéristique du livre transformée par ce déplacement concerne le temps, à savoir l'organisation chronologique propre à l’histoire, qui permet de traverser successivement les différentes couches du passé ; cette organisation suppose une forme d’homogénéité temporelle – un plan commun à la surface duquel les événements peuvent être analysés, comparés sans se mélanger ni se superposer. En éclatant le temps en une multitude de points qu’aucune droite ne peut réunir, La Ruée mettait en jeu un modèle simultanéiste de lecture du temps historique – une sorte de fiction leibnizo-borgésienne de la simultanéité des possibles. Le deuxième point concerne l’espace : espace du livre d’un côté, dont la structuration par pages empêche tout chevauchement ou superposition et qui reconduit implicitement le découpage chronologique ; espace du théâtre de l’autre, au sein duquel l’unité de lieu de la scène fonctionne traditionnellement comme catalyseur du caractère narratif et synthétique de l’histoire. En choisissant de quitter la scène pour investir l’ensemble du bâtiment – couloirs, halls, loges, bar, escaliers – La Ruée actait la décentralisation au cœur du projet Histoire mondiale de la France, tout en faisant se superposer les dimensions temporelles et spatiales : plus d’unité de lieu, plus d’unité de temps, mais un ensemble de corps-archipels dont les voix et les dates s’entremêlent.

Si les structures spatiales et temporelles du livre se retrouvaient bouleversées par cette dissémination, qu’en est-il du passage du texte aux corps ? Rappelons d’abord que les différents interprètes n’opéraient pas une traduction dansée du texte : le corps n’était pas le medium chargé de traiter le contenu du chapitre ou de l’illustrer, mais plutôt un point de décalage, de friction avec la voix, travaillant, elle, davantage du côté du sens. Le texte issu du livre pouvait être lu, récité en intégralité ou de manière fragmentaire – déformé, adapté, réinterprété – mais le rapport au matériau-source restait globalement préservé. L’horizon de cette conversion ne consistait donc pas en une représentation de l’histoire – la transformation d'un objet scientifique en objet esthétique – mais bien à faire entendre quelque chose de son contenu. Peut-on dire pour autant que cette performance collective se plaçait sur le même terrain que le livre, à la manière d’une version augmentée ? Si le discours porté par Boris Charmatz et Patrick Boucheron au sujet de leurs objets respectifs semblait s’accorder sur un horizon partagé (« je crois reconnaître une préoccupation commune dans nos démarches : la nécessité de faire récit de nos dispersions4 » déclare ainsi Patrick Boucheron à Boris Charmatz), il faudrait s’attarder sur la manière dont La Ruée ne cessait de déborder le livre, en se plaçant du côté de la dispersion et de la dépense et non du récit, du rassemblement, ou d’un hypothétique « vivre-ensemble ». Le médium du corps, tout en transmettant un signal par la voix, se faisait la caisse de résonance de son bruit, c’est-à-dire de ce que le travail historique ne peut traiter : la manière dont les événements que convoque l’Histoire affectent les corps – les mutilent, les violentent, les réduisent au silence. Si l’horizon du projet de Patrick Boucheron consistait à « faire récit de nos dispersions », La Ruée cherchait plutôt à exposer la dispersion qui sous-tend tout récit national, en faisant affleurer directement dans les corps la charge (politique, émotionnelle) qui sous-tend les événements que relate l’Histoire. La question, du coup, n’est pas tant de savoir ce que la performance apporterait au livre ce qu’elle y ajouterait, de quelle manière elle l’augmenterait, ou ce qu’elle rendrait possible en termes de démocratisation du savoir (en tant qu’événement gratuit, accessible à tous), mais plutôt de comprendre par quelles stratégies performatives La Ruée offrait une perception et une lecture de l’histoire radicalement différentes de ce que produit le savoir historique traditionnel. Même si le projet Histoire mondiale de la France, de par son caractère collectif, décentralisé et son accent porté sur les dates faibles cherchait à redéfinir son objet d’étude – l’Histoire de France – il n’en reste pas moins guidé par une volonté de faire récit ; à ce titre, le livre reconduit une vision du passé fondée sur un enchaînement de faits et de dates, que l’historien aurait à charge d’articuler ensemble afin de donner sens au présent. Plutôt qu’une conversion ou une traduction, il faudrait envisager La Ruée comme une tentative d’histoire expérimentale, énoncée du point de vue des corps ; une expérimentation bouleversant le rapport au temps historique et donnant consistance à l’archive la plus fragile et la plus évanescente qui soit, le corps – cette archive dont l’historien ne peut rendre compte qu’après-coup, comme fiction, mais qui constitue le nœud du Musée de la danse. Il faudrait du coup se poser la question de la traduction à l’envers, et tenter d’imaginer à quoi ressemblerait un livre d’histoire conçu sur le modèle de La Ruée – sans chronologie et parfois même sans aucune séparation entre les voix parlant simultanément.

Improviser l’Histoire

À une approche du récit national par ses événements symboliques, délimitant une entité clairement définie – la France – le collectif d’historiens et d’historiennes d’Histoire mondiale de la France répondait par une dé‑hiérarchisation des points de vue et un élargissement de la focale, trouant cette France fantasmée par des lignes de fuite portant sur ses zones d’ombre : l’histoire coloniale, la révolution, l’esclavage, le point de vue des minorités sociales, et l’ensemble des forces antagonistes, des insurrections, des luttes qui façonnent l’histoire d’un pays. Afin d’accentuer cette ligne critique et de faire transiter dans les corps ce caractère minoritaire, le Musée de la danse avait invité des danseurs, danseuses, performeurs et performeuses issus de styles, de générations et d’horizons culturels hétérogènes. Cette communauté plurielle, surexposée par l’installation lumière de Yves Godin, « Douce France », instaurant un climat marqué par l’état d’urgence, fonctionnait à la manière d’un corps social bis, reposant l’état de soulèvement du passé en miroir de celui du présent. Ce qui était donné à voir et à ressentir par cette communauté éphémère – plus encore que le contenu du livre – était la capacité de ses membres à transmettre la violence exercée sur le corps des individus et le corps social dans son ensemble. À l’image de ce débordement, le corps social est en permanence pris en tenaille entre son éclatement en une multitude de dates et d’intérêts antagonistes et sa pétrification en récit national. Si l’entreprise de Patrick Boucheron avec Histoire mondiale de la France consistait à « faire récit de nos dispersions », c’est-à-dire à tenter d’extraire un commun de la somme de ces luttes, La Ruée, dès son titre, actait une forme de dispersion des récits – avec pour horizon, non leur résolution, mais bien plutôt leur incarnation et le partage de ce qu’ils portent d’irrésolu. Si ce corps social bis performait quelque chose, c’était en même temps la simultanéité des possibles qui concourent à l’hypothèse d’un présent, et le potentiel de transformation de ce présent en train de prendre forme – la ligne de fuite d’un devenir issu de la combinaison de ses états potentiels.

En effet, si quelque chose du discours historique peut avoir une valeur performative, c’est-à-dire agissante, c’est en tant que les représentations historiques meuvent le présent et les corps qui lui donnent consistance. Toute la question – question d’historien tout autant que de performeur – est de savoir comment matérialiser conjointement cette action du passé sur le présent et la réinterprétation du passé à partir du présent : comment se signaler soi-même comme objet et sujet de l’histoire, et non comme un point d’extériorité à celle-ci ? Pour le performeur, la question est d’autant plus insistante que son action repose toujours sur le présent de la performance et non sur la pérennité de l’inscription (le livre). L’équation à laquelle étaient confrontés les interprètes de La Ruée consistait ainsi à performer le potentiel performatif contenu dans ces lignes, et à le faire en gardant ouvertes toutes les connexions ; c’est-à-dire sans jamais refermer le livre, clore le récit, figer les devenirs en train de prendre forme.

Comme l’expliquait Boris Charmatz à propos du projet Une école d’art (Avignon, 2011), l’improvisation est l’un des outils permettant de construire cette position d’objet/sujet, tout en évitant l’écueil de la représentation ou de la fictionnalisation du matériau :

[l]’improvisation permet d’aborder la contextualisation de ce qu’on est en train de faire en temps réel. En improvisant, on se situe. On peut réfléchir en direct au fait que l’action ait lieu dans tel espace, à tel moment, à la suite de telle demande. L’improvisation porte en elle-même la potentialité de son propre discours. Au fond, si on peut relier le Musée de la danse à l’improvisation, c’est paradoxalement à partir de la question de l’Histoire. En improvisant, on peut ramener des couches historiques, croiser des événements, associer différents moments, courants, idées. Au contraire de l’idée d’un pur présent, l’improvisation permet de jouer sur des temporalités multiples, d’opérer un montage historique au présent, à l’intérieur duquel le patrimoine peut faire irruption5.

Dans La Ruée, l’activation du livre en temps réel, au contact de la foule des spectateurs se ruant dans le théâtre, mettait en jeu une improvisation pensée comme mise en situation de deux forces contraires, ou de deux états du présent : un présent flottant, indéterminé, celui des spectateurs, porteurs d’une histoire singulière et d’un certain rapport à l’Histoire (de France et du monde), et un présent actualisé à chacune des rencontres avec les interprètes disséminés dans l’espace. La configuration collective de La Ruée permettait également de signaler le passé en tant que construction, constellation signifiante infiniment modulable. Au sein de cette Ruée étaient ainsi contenues une multitude d’histoires mondiales de la France en train de s’écrire – en fonction des échos, des correspondances, des chemins empruntés par les spectateurs – mettant du même coup le doigt sur la relativité d’un discours comme l’Histoire selon l’endroit d’où elle s’écrit, se lit, s’interprète, se transforme, s’élargit ou se contredit. Comme une métaphore de l’occupation de l’espace physique du tnb, la communauté bruissante et remuante de La Ruée procédait à une forme d’occupation de l’histoire de France, prenant possession de sa trame pour la déconstruire, l’improviser, la bousculer, l’intensifier. Si la préfiguration du Musée de la danse – événement de 12 heures pendant lequel toutes les performances avaient lieu au ralenti – s’appelait Étrangler le temps6, La Ruée referme ce projet sur une accélération, dont le titre pourrait être Le temps désarticulé7.

La danse comme exposant

Tentative de transformer, ou mieux, de convertir en danse un médium qui, a priori, ne se conforme pas à ses codes, prolifération de singularités et opération d’appropriation et de contamination d’un lieu : on retrouve dans La Ruée quelques-uns des principes constituants qui forment la signature du Musée de la danse, et qui balisent la plupart des événements organisés par ce Centre Chorégraphique expérimental tout au long de ses dix années d’existence. Pour comprendre le nouage discursif testé lors de cet événement, il convient de replacer La Ruée dans une série d’événements performatifs où la parole – qu’elle soit discours de spécialiste, pure improvisation, mise en contexte ou construction d’un dialogue – tient une place centrale dans le déplacement du centre de gravité de la danse ; et de voir les transformations successives opérées quant au statut et à la valeur de transmission de cette parole depuis sa création, en 2009.

Aux deux extrémités du Musée de la danse, deux événements – qui circonscrivent son appartenance à ce qu’on pourrait nommer un « champ discursif élargi » : expo zéro8 d'une part, exposition sans œuvres qui s'est très vite imposée comme le fer de lance du Musée de la danse, la réalisation de son caractère nomade, discursif et immatériel. À l'autre bout, La Ruée, qui marque, en 2018, neuf ans après son inauguration, un dernier jet sous forme de relance de son caractère expérimental. Entre les deux, de nombreux formats intermédiaires, expositions performées ayant toutes pour dénominateur commun l'usage transversal de la parole : la parole comme surface d'échange, permettant à des critiques d'art, de danse, à des architectes, des écrivains, des performeurs, des danseurs, à des commissaires d'exposition d'intervenir, ensemble ou séparément. Sessions Poster, forme déjà utilisée par Boris Charmatz lors de son projet d'école nomade Bocal (2002-2003), et réactivé à l'occasion de la collaboration du Musée de la danse avec le Festival d'Avignon ; mais aussi Brouillon, 20 danseurs pour le xxe siècle ou A dancer’s day. À travers ces exemples, on peut lire un panorama assez complet des rapports contemporains entre pratique, discours, théorie et institution, permettant de faire retour sur la place prise par le commentaire dans la praxis artistique – commentaire, ou commentaire de commentaire dont la conférence-performance constitue sans doute la formalisation la plus explicite.

Ce glissement de la danse comme forme esthétique à une danse entendue comme véhicule de discours et de pratiques hétérogènes s'élabore à partir d'un nouage entre le corps dansant, ses apprentissages, ses histoires et le flux d'informations, de matériaux contradictoires qui le traversent et l'innervent. Plutôt qu'une signature esthétique, un style, une méthode de composition ou d'apprentissage, le projet du Musée de la danse opère comme un modèle général de porosité des matériaux, des genres, des formes et des projets entre eux. Mais passage n'est pas transparence, clarté, convergence de l'information ou disparition des cadres. Placer la création au centre d'un réseau de sens plus vaste implique que quelque chose, dans la création, fasse barrage, résiste, se dérobe au sens. Plutôt qu'une collection de chorégraphies mortes ou un catalogue raisonné de gestes, le Musée de la danse cherche à accueillir ce qui, de la danse, ne passe pas dans le musée. Chacun de ses événements ou de ses projets est davantage l'occasion d'une lecture fragmentaire, d'une interprétation ouverte, emmêlée que d'un véritable savoir cohérent.

Les Sessions Poster symbolisent ce travail, en creux, de la danse avec, et en-deçà du matériau qui lui sert de support. Ce sont à l'origine des conférences performées, offrant à Bocal un premier moment de visibilité : une présentation publique opérant une coupe dans les idées et les pratiques agitées au sein de ce collectif éphémère pendant plusieurs mois. Chaque intervenant présentait ses recherches par le biais d'un support visuel (le poster), formant un « tiers » entre émetteur et récepteur de l'information. Le processus des Sessions posters a nourri l'élaboration du Musée de la danse ; et c’est influencées par les sédiments du Musée de la danse que les Sessions ont été à leur tour reprises et réinterprétées pendant le festival d’Avignon. Lors du « prototype » présenté à Rennes en 2011, le tiers du poster ne se jouait jamais au même endroit. Il s'agissait plutôt d'une variable d'ajustement, d'un réglage de distance vis-à-vis du matériau affiché et de la personne le mettant en jeu. Pour le visiteur pénétrant dans cet espace saturé (de voix, de textes, d'images), il s'agissait de réinventer son mode de relation au fil des déplacements, de trouver une manière de s'orienter dans ce flux, d'ajuster sa manière de percevoir, de regarder, d'entendre.

Et si c’était cela – appelons-le réglage de distance ou ajustement subjectif – que la danse permettait d’expérimenter, plus que le contenu « informatif » du poster ? Peut-être que l'apprentissage n'est jamais que l'apprentissage d'une manière d'apprendre, ou de se régler sur le savoir – à l’infini. Face à un contenu incomplet, troué (impossible de tout voir, de tout entendre, d'embrasser la totalité de ce qui se déroulait dans l'espace), la question se déplace de « qu’est-ce qui passe ? » (du savoir) à « qu’est-ce qu'il se passe ? » (dans notre rapport au savoir). Comment celui-ci opère (ou n’opère pas) ? Comment s’est-il transformé, comment en réinventer les coordonnées ? Au fond, on pourrait dire que les Sessions poster exposaient plus une image du savoir qu’elles n'invitaient à son partage. Pour le dire autrement : dans « partage de savoir », il faut entendre deux opérations. D’une part, le partage en tant que mode : rencontre et mise en relation de corps, de gestes, de voix, d'intonations – qui se distribuent dans l’espace de la discussion. Et d'autre part, le savoir en tant que s'actualise son image à partir de ce partage « informel ». Image du savoir comme lacune, aux prises avec les failles et les intensités du corps.

Pour reprendre Michel Foucault et son concept d’« épistémè », les Sessions poster exposent les « conditions du discours » plus qu'elles ne produisent un discours. L’épistémè n’est pas « la somme de ses connaissances, ou le style général des recherches » mais c’est « l’écart, les distances, les oppositions, les différences [...] c’est un espace de la dispersion, c’est un champ ouvert et sans doute indéfiniment descriptible de relations9 ». Entre corps et support, présence et dématérialisation des flux, forum et barnum, bricolage et technologies, société de l’information et démocratie participative, le carrefour de discours produit par ces chorégraphes, ces philosophes, ces chercheurs, ces pédagogues permet d'apercevoir un petit fragment d’épistémè : comment est-ce qu'on pense, et transmet la pensée, aujourd’hui ?

Pour une histoire des intensités

La Ruée reprend ce modèle mais en le décalant : en effet, ce n’est plus une image du savoir que cet événement restitue en creux mais plutôt sa vacance. En entrant dans la salle obscure peuplée des bribes d’histoire criées ou chuchotées par les étudiants du tnb, on est frappé, en négatif, par l’absence de cette parole. Ces corps tourmentés, ces dates, ces noms qui chargent le théâtre font signe vers un dehors ; un dehors dont l’Histoire s’est absentée. La prolifération des voix se fait sur fond d’un vide, d’une surdité – d’un refus d’entendre. La Ruée effectue en fait deux opérations parallèles vis-à-vis de son matériau discursif : elle fait entendre cette parole habituellement non-dite et matérialise son action : ou plutôt, elle matérialise la manière dont l’Histoire fonctionne, vis-à-vis du corps social, à la manière d’un inconscient, faisant constamment retour – comme répétition, acte manqué. Dans cette perspective, le récit national serait ainsi l’équivalent du conscient, en tant que récit organisé, chronologique et hiérarchisé, là où le travail historique, l’histoire au travail avec son fourmillement de traces constitue un inconscient proliférant, soumis au refoulement, aux rêves, sans cesse remis à l’ouvrage par le labeur de l’interprétation. L’inconscient agit, creuse, remodèle. Et c’est à la condition que le sujet social mette au travail ce qui le structure et l’agit qu’il peut pleinement redevenir acteur de son histoire.

On peut dire que La Ruée cherchait ainsi à réactiver les historicités dont les corps sont porteurs, à mettre leur inconscient au travail. Mais il faut prendre en compte, dans le même temps, la manière dont ces corps littéralement possédés activaient une autre image de l’Histoire, non plus en tant que discours, mais en tant que pathos. L’image de cette nuée se ruant, des mots à la bouche, mobilisait ou métaphorisait le drame de l’Histoire, son surgissement dramatique. Pris sous le feu des gyrophares, les interprètes mettaient en tension, dans leur corps et leur parole, une opération d’interprétation en même temps qu’une forme d’exorcisme. L’expressivité dont les corps, tout autant que les lumières et les voix, sont porteurs – cette intensité à laquelle le titre de l’événement fait référence – on peut la localiser dans la double logique à l’œuvre au sein du Musée de la danse dès son inauguration (Étrangler le temps, 2009) : si l’Histoire, le discours de et sur l’Histoire a irrigué l’élaboration du Musée de la danse depuis expo zéro – exposition sans trace, mais adossée à la question de l’archive – le logiciel du Musée de la danse, dirigé par le chorégraphe Boris Charmatz, est travaillé simultanément par une tendance que l’on pourrait qualifier d’expressionniste, et qui innerve La Ruée bien plus que la majorité de ses projets antérieurs : « Beaucoup de projets du Musée de la danse ont un aspect double : improvisés et discursifs. J’aime l’art conceptuel et l’improvisation. Du coup, au lieu de les séparer en posant d’une part un art maîtrisé, discursif, conscient de ses conditions de possibilité, et de l’autre une forme sauvage ou chaotique –, je préfère essayer de les confronter10. »

On peut voir dans La Ruée une dernière tentative de croisement entre l’approche conceptuelle et la « forme sauvage et chaotique » chère à Boris Charmatz – forme qu’il a d’ailleurs mise en œuvre en parallèle dans sa pièce infini, chorégraphie articulée autour d’un compte de nombres allant de l’infiniment petit à l’infiniment grand (et pour laquelle Histoire mondiale de la France a servi d’inspiration). Cette confrontation fait émerger au sein du Musée de la danse – au moment où ce projet se referme – une ligne héritée de ce que Aby Warburg nommait les « formules du Pathos ». Comme l’explique Georges Didi-Huberman dans ses notes de recherches, Aby Warburg et l’archive des intensités, au paradigme linguistique que recherche Warburg dans les représentations culturelles, il faut ajouter une approche centrée sur le corps et son expressivité : « D’où l’importance d’un second paradigme, que je nommerai chorégraphique : il eut pour charge d’interroger plus radicalement le statut de la “formule” en tant qu’elle donne existence à un “pathos”, c’est-à-dire à une atteinte physique et affective du corps humain […] C’est l’étrangeté qui prend ici le pouvoir d’intensifier un geste présent en le vouant au temps fantomal des survivances11. »

Il est ainsi symptomatique que cet événement survienne en clôture d’un projet, le Musée de la danse, qui n’a cessé d’affirmer que « le corps du danseur est le seul véritable Musée de la danse ». Mais il s’agit, pour Boris Charmatz, d’un corps sans image, à la survivance incertaine – corps-mémoire voué à la dépense, à l’épuisement et in fine à l’effacement. Au moment de basculer du côté obscur des arts vivants – du côté de l'histoire, du côté des traces – le Musée de la danse produit un événement qui interroge sa propre disparition et les conditions de possibilité de sa survivance. La Ruée, comme un cheval qui se cabre, mobilise l’Histoire (de la danse) pour rameuter l’Histoire (de France), avec en arrière-plan – ou en arrière-pensée – quelque chose qui ressemblerait aux Histoire(s) du cinéma de Jean-Luc Godard : un espace problématique, plein de lapsus, de malentendus, de frottements, brassant par un montage incessant des fragments de temps, d’images, de musiques et de textes. Dans les Histoire(s) du cinéma, la traversée d’une forme, le cinéma, rapiécée par la peinture et la photographie, permet d’articuler et d’excaver quelque chose de l’histoire (du xxe siècle). La Ruée, événement de quelques heures, dans un théâtre, à Rennes – pure dépense d’énergie, de sueur et de salive – appelle à son tour un chantier, une recherche qui déborderait la fin du Musée de la danse comme institution : la création d’une Histoire(s) de la danse qui soit en même temps histoire des voix12, généalogie des gestes, archéologie des corps, annales du discours. Faire de la danse – d’une danse élargie radicalement – quelque chose comme une « archive historique des intensités13. »

Bibliography

Charmatz Boris, Une école d’art pour le festival d’Avignon, Paris, P.O.L., Festival d’Avignon, 2011.

Boucheron Patrick, Charmatz Boris, « 3 questions de Boris Charmatz à Patrick Boucheron », livret de La Ruée, 2018.

Didi-Huberman Georges, « Aby Warburg et l’archive des intensités », Revue Études Photographiques, n° 10, novembre 2001, p. 144-168.

Farge Arlette, Essai pour une histoire des voix au dix-huitième siècle, Paris, Bayard, 2009.

Foucault Michel, « Réponse à une question », dans Dits et écrits I, Paris, Gallimard, 2001.

Georges Duby et Guy Lardreau, Dialogues, Paris, Flammarion, 1992.

Notes

1  La Ruée, événement proposé par le Musée de la danse / Boris Charmatz, le 24 novembre 2018 au Théâtre National de Bretagne. Return to text

2  Citons par exemple Une école d’art (Festival d’Avignon, 2011), If Tate modern was Musée de la danse (Tate Modern, 2015), ou Three collective gestures (MoMa, 2013). Return to text

3  Histoire mondiale de la France, éditions du Seuil, 2017, écrit par un collectif de 122 historiennes et historiens, sous la direction de Patrick Boucheron. Return to text

4  Patrick Boucheron, Boris Charmatz, « 3 questions de Patrick Boucheron à Boris Charmatz », livret de La Ruée, p. 38, 2018. Return to text

5  Boris Charmatz, entretien avec Gilles Amalvi, dans Une école d’art pour le festival d’Avignon, Paris, p.o.l., Festival d’Avignon, 2011, p. 63. Return to text

6  Étrangler le temps, préfiguration du Musée de la danse, le 27 avril 2009 au Garage (Rennes). Return to text

7  Le temps désarticulé, roman de Philip K. Dick, Calmann-Levy, 1975. Le titre est une citation de Shakespeare tirée de Hamlet : « Time is out of joint. » Return to text

8  expo zéro, conception Boris Charmatz, Le Garage, Rennes, septembre 2009. Return to text

9  Michel Foucault, « Réponse à une question », dans Dits et écrits I, Paris, Gallimard, 2001, p. 704. Return to text

10  Boris Charmatz, entretien avec Gilles Amalvi, in Une école d’art pour le festival d’Avignon, op.cit., p. 63. Return to text

11  Georges Didi-Huberman, « Aby Warburg et l’archive des intensités », Revue Études Photographiques, n° 10, novembre 2001, p. 144-168, mis en ligne le 01 octobre 2008, consulté le 11 octobre 2020. URL : http://journals.openedition.org/etudesphotographiques/268 Return to text

12  Arlette Farge, Essai pour une histoire des voix au dix-huitième siècle, Paris, Bayard, coll. Histoire, 2009. Return to text

13  Georges Didi-Huberman, « Aby Warburg et l’archive des intensités », op. cit. Return to text

References

Electronic reference

Gilles Amalvi, « La Ruée : une transe-histoire de la France », Déméter [Online], 5 | Été | 2020, Online since 01 septembre 2020, connection on 11 décembre 2024. URL : https://www.peren-revues.fr/demeter/95

Author

Gilles Amalvi

Gilles Amalvi est poète, critique de danse et créateur sonore. Il a publié Une fable humaine et AïE! BOUM aux éditions Le Quartanier. Depuis Radio-Epiméthée, version scénique et radiophonique de Une fable humaine, il se consacre à l'exploration de l'écrit par le matériau sonore. Parallèlement, il a été écrivain associé au Musée de la danse, et il écrit pour le festival d'Automne, le cnd, ainsi que pour les chorégraphes Boris Charmatz, Jérôme Bel, Maud le Pladec, Latifa Laâbissi, Anne Teresa de Keersmaeker, Ivana Müller. En tant que dramaturge, il a collaboré avec les chorégraphes Saskia Hölbling, Nasser Martin-Gousset, Emmanuelle Huynh et Pol Pi, pour qui il a réalisé la création sonore de la pièce Alexandreet de la performance Là. Il a également conçu la création sonore du projet Une Hantologie du metteur en scène Antoine Cegarra et travaille actuellement sur sa prochaine création, Cantique quantique.

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