Le colloque est accueilli par B. Meyer, vice-président (recherche et innovation) de l’UPMC, qui annonce la fusion de cette université avec Paris-Sorbonne au 1er janvier 2018 et qui deviendra Sorbonne-Université (Sciences, Lettres et Médecine). Il mentionne la COP21 et l’aspect interdisciplinaire des recherches sur le changement climatique avec l’accent sur l’IPSL, l’Institut de la transition environnementale (présence de nombreux laboratoires), l’opération « Demain le climat ! » à la Sorbonne en 2015 et le train du climat (garé à Austerlitz, en attente de crédits). Pour B. Meyer, il faut adapter nos comportements à la réalité du changement climatique. J. Jouzel remercie les nombreux organisateurs du colloque et du festival international de la météorologie, évoque la journée de la veille à l’hôtel de ville, la semaine prochaine à Turin (conférence sur les médias et la communication sur le changement climatique) et indique la présence du sénateur J. Bignon et de la mairie de Paris. Le colloque est une des activités de l’Agence Climat de Paris (A. Girault), créée il y a dix ans pour organiser la transition énergétique de Paris. Le sénateur J. Bignon de la baie de la Somme (inondations en 1990 et 2001 !) a participé au groupe de travail sur les négociations internationales sur le climat et rapporte le texte sur la biodiversité.
Le terme « adaptation » est pris au sens large, incluant aussi la réduction des émissions de GES en plus de l’adaptation au changement climatique, au sens strict1. Après la COP21 en décembre 2015, beaucoup d’entreprises, de secteurs ou de filières se sont engagés dans la lutte contre le changement climatique, ou dans une trajectoire bas-carbone (ex. : Eiffage, qui a une audience internationale, par exemple). Ce sont des entreprises mais aussi des secteurs ou des filières (forêts ou parcs nationaux, par exemple) qui se sont engagés. C’est souvent le représentant développement durable de l’entreprise qui intervient au colloque. Les tables rondes à 3 ou 4 intervenants ont laissé peu de temps à la salle, avec l’intervention régulière du groupe de jeunes « Indisciplinés », qui ne s’est pas défini ! Les interventions ont été regroupées ci-dessous par intervenant.
Pascale Braconnot (LSCE) fait le premier exposé et présente l’état des connaissances à partir du 5e rapport du GIEC (AR5, groupe I). Elle a extrait du site de la NOAA la figure 1 qui donne les anomalies de température globale moyenne de 1880 à 2016 pour le mois de février. On y voit clairement le réchauffement depuis 1987 (rouge = chaud ; bleu = froid) avec trois graphiques : toutes les observations (i), ou sur terre uniquement (ii), ou sur mer (iii). Février 2017 est le mois de février le plus chaud jamais observé ! Pour la série marine (iii), les variations temporelles se font par séquences homogènes (inertie thermique) à l’opposé de (i). Sur (ii) apparaissent les années très chaudes 2014, 2015, 2016, relativement détachées des années précédentes. Le raisonnement maintenant classique qui compare les simulations intégrant la cause externe (volcanisme, solaire) et anthropique (GES, aérosols, utilisation des terres) conduit à la prépondérance de la seconde, ce qui est illustré avec les forçages radiatifs. Elle présente une étude « Détection/Attribution » sur 6 épisodes exceptionnels chauds ou de précipitations. C’est plus clair sur les épisodes de chaleur que sur ceux de précipitations. Ainsi, la canicule tardive de l’été 2016 (septembre) est impossible sans prise en compte du changement climatique (idem pour l’été et décembre 2015). On y observe un effet sur la circulation atmosphérique qui modifie le fonctionnement du triplet « température, humidité, précipitations ».
Figure 1. Anomalies de température de surface moyenne globale pour la période (1880-2016) (source : NOAA).
Par ailleurs, les projections du GIEC prévoient des régimes de précipitations extrêmes plus intenses et plus fréquents aux latitudes moyennes et aux latitudes tropicales humides. De même, les contrastes de précipitations entre régions humides et sèches vont s’accentuer. Pour le réchauffement global en 2100, le scénario RCP 2.6 conduit à 0,3-1,7 °C, tandis que le scénario RCP 8.5 conduit à 2,6-4,8 °C. Pour l’instant on a déjà observé2 +0,6 °C !
Un aspect important pour l’adaptation est d’appréhender la vitesse du changement climatique. En référence à la thèse de Y. Chavaillaz (2016), on trouve qu’une année très chaude avec durée de retour de 50 ans deviendra dans 20 ans une année toujours très chaude mais avec 2 ans de durée de retour ! Enfin, la tendance moyenne du réchauffement qui est de 0,5 °C pour 20 ans en 2000, sera doublée en 2100 (1 °C) avec le scénario RCP 8.5 et divisée par deux (0,25 °C) avec le scénario RCP 4.5. L’exposé se termine avec le projet SECIF qui analyse les vagues de froid pour les fournisseurs de gaz et d’électricité, et calcule les nombres de jours de froid prévus avec trois indicateurs Tmin, Tmoy et percentile 10 de Tmin. Les isolignes de ces trois indicateurs sur l’Europe couvrent des zones assez différentes. En fait, il faut choisir l’indicateur qui convient le mieux à l’utilisateur.
Trois points pour conclure sur cet exposé de base mais orienté « services climatiques ». On est passé des lanceurs d’alerte à une véritable « science de l’information » sur le changement climatique. Il faut mettre en place les rouages d’explication et de communication qui permettent une bonne compréhension compte tenu des incertitudes qui sont d’origines diverses et particulièrement visibles sur les précipitations. Enfin, pour développer des services climatiques utiles, il faut d’abord connaître la sensibilité de son secteur économique au climat et pouvoir dégager les variables les plus pertinentes pour le problème étudié.
Table ronde 1. « Quelles stratégies sont déjà adoptées pour les réseaux et les infrastructures ? » : C. Dubost (SNCF) ; V. Dépoues (Institute for Climate Economics) ; V. David (Eiffage). Il y a un lien entre les deux premiers : V. Dépoues fait une thèse à la SNCF sur la région PACA.
C. Dubost (SNCF) évoque la cause météorologique des irrégularités du trafic (retard de 80 à 100 mn). Par ordre d’importance, voici les paramètres concernés : précipitations, température, vent. Plus précisément, en matière de précipitation : les inondations, la neige et la glace (givrage des caténaires et sous les motrices TGV). Il indique que tout le service météo de la SNCF a été refondu et a acquis 5 ans de données climatologiques pour des études (Météo-France). Un plan de prévention des inondations est opérationnel (très différent pour le Nord et le Sud de la France), tandis que pour la chaleur, c’est plus difficile ! Par ailleurs, sur le plan économique, la SNCF dépend du tourisme et, par exemple, transporte ses clients vers la neige l’hiver et se pose la question : que se passera-t-il s’il n’y en a plus ? Quid des stations de ski dans 20 ou 30 ans ! De son expérience, il est plus facile de travailler avec des nouvelles lignes de chemin de fer qu’avec des anciennes. Ainsi, utilise-t-on un scénario pour mieux comprendre le problème, comme une expérience exploratoire. L’entreprise SNCF est aussi dans la mitigation, avec pour objectif une transition vers un monde bas carbone : 20 % de réduction en 10 ans et plus de train à traction thermique en 2050. Pour l’adaptation : « il n’y a pas qu’une seule manière d’être adapté », voici un exemple : en cas de fortes chaleurs, les rails se modifient, imposant le ralentissement du train. Grâce à des capteurs de température au sol, on pourra mieux contrôler le ralentissement du train ! Le problème des inondations des lignes est important dans le Sud de la France, mais en Grande-Bretagne il concerne une grosse partie du réseau, qui est seulement à 1 mètre au-dessus du niveau de la mer !
Eiffage est une entreprise à caractère international, qui a construit la Ligne à Grande Vitesse Tours-Bordeaux. Un bilan carbone réalisé avec l’ADEME en 2009 a permis d’orienter l’entreprise vers des solutions bas carbone, en particulier pour l’écosystème des fournisseurs. L’entreprise possède un fonds d’arbitrage carbone en lien avec le monde financier. Elle utilise pour sa prospective trois scénarios (optimiste, pessimiste et médian), obtenus auprès des organismes de recherche pour la modique somme de 15 000 euros, et travaille souvent avec le scénario médian. On a besoin de scénarios futurs puisqu’on construit souvent pour les 50 à 100 ans à venir.
Eiffage cherche à développer une méthodologie pour construire autrement dans une architecture qui intègre la contrainte climatique (architecture bioclimatique). Des exemples sont donnés pour s’adapter aux conséquences du dérèglement climatique. Le lycée des Mauges, construit sous la réglementation thermique 2012, est un bâtiment à énergie positive, avec le plus grand puits canadien en France (débit : 30 000 m3/h). Il peut également supporter des précipitations violentes en permettant le ruissellement. L’écoquartier « Smartseille » dans le Nord de Marseille est une vitrine du développement durable d’Eiffage sur le plan immobilier et aménagement, et comporte de nombreuses innovations architecturales pour le climat méditerranéen. Autre exemple, Grenoble (2012), avec des bâtiments sur pilotis pour résister aux inondations du Drac et de l’Isère.
Table ronde 2. « Quelles stratégies déjà adoptées pour les ressources en eau et l’énergie ? » avec F. Gache (EPTB Seine Grands Lacs), C. Nahon (EDF), H. Valade (SUEZ).
Pour C. Nahon (EDF), il faut bien voir que ce sont les gens qui sont impactés au-delà des structures ! Depuis la canicule 2003, EDF a développé un véritable service climatique pour l’adaptation des infrastructures existantes et aussi pour se projeter dans le futur. Le concept de résilience est mis en œuvre. Des cellules de crise sont maintenant opérationnelles, avec des plans d’action (pour les pluies cévenoles depuis 2000) et parfois avec des mesures simples (remonter en hauteur les diesels de secours, pour qu’ils ne soient pas inondés !) La crise porte surtout sur la gestion de l’eau pour la prévision des débits des fleuves (refroidissement des centrales, alimentation des barrages…). En effet, le refroidissement avait été critique lors de la canicule 2003. Enfin, certains barrages anciens sont sensibles à la hausse du niveau des mers et à la température.
F. Gache présente l’Etablissement Public Territorial de Bassin (EPTB) Seine Grands lacs (www.seinegrandslacs.fr), qui doit réguler la Seine et ses affluents sur le domaine Paris et les trois départements de la petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne). Les quatre grands lacs réservoir (Seine, Aube, Marne et Pannecière) ont été construits suite à la sécheresse de 1921. Grâce à cette réserve, on dispose d’un milliard de mètres cubes d’eau pour le soutien d’étiage (stockage), la navigation, l’eau potable et les stations d’épuration. Les lacs permettent un écrêtement des crues et le soutien d’étiage, avec une marge de manœuvre calculée juste pour les grandes crues d’hiver. En effet, cette réserve permet de ramener le niveau maximum à 1 mètre en dessous de la cote d’alerte de la crue historique de 1910 (8,6 m).
Un travail historique est possible grâce aux archives de crues et d’étiages dont on dispose, avec la collaboration d’E. Garnier, historien du climat. On retrouve des évènements extrêmes comparables au siècle de Louis XIV. Au XIXe siècle, toutes les crues se sont produites au printemps et à l’été. Grâce à ces archives, on peut étudier les étiages qui se sont produits en 1858 après les crues de 1856. On trouve aussi que l’on a atteint deux fois dans le passé la cote 7,8 m (qui est le seuil de 1802).
Enfin, la récente crue de juin 2016 a surpris les gestionnaires : la montée de l’eau du jeudi 2 au vendredi 3 juin a été de 1,60 m au lieu des 80 cm attendus (le pic s’est produit la nuit de vendredi à samedi) ; d’autre part, le RER C a été fermé lorsque la hauteur de l’eau atteignait 4,75 m, à cause des risques d’inondation, alors que cette fermeture était prévue pour une hauteur de 5,50 m, ce qui traduit une méconnaissance de la porosité du sous-sol. Lors des débats, S. Maire (mairie de Paris) dit qu’il faut se préparer à une baisse des débits des fleuves de 30 % en 2050 qui provoquera une concurrence exacerbée des différents usages : eau potable, refroidissement des centrales, agriculture. Pour EDF, on pourrait se trouver dans une situation d’arrêt d’une centrale nucléaire dans le Sud de la France pendant 15 jours !
H. Valade (Suez) évoque la ressource en eau dans le monde et les difficultés d’accès qui croissent de façon alarmante. 40 % de la population vit sous stress hydrique, et ceci concerne l’Afrique, l’Asie mais aussi l’Europe et l’ouest des USA. Comment s’organiser pour un meilleur rendement des réseaux (fuites) ? Comment économiser l’eau face à la raréfaction de cette ressource. Il faut rendre les réseaux intelligents et ne pas réfléchir en silo au niveau de la ville (problème de l’artificialisation des sols). Il faut croiser les différentes données obtenues par ces réseaux intelligents. Ainsi à Bordeaux, on a réussi à trouver une réponse robuste par rapport aux crues d’il y a 20 ans. Il faut aussi impliquer le citoyen dans des conférences de consensus (H. Valade vient de l’IFOP).
Sophie Martinoni-Lapierre (Météo-France) présente les services climatiques pour les partenariats scientifiques et industriels, orientés essentiellement pour le secteur de l’énergie, en collaboration avec le CEA et RTE. Ils sont développés dans le cadre du programme européen Copernicus (www.climate.copernicus.eu) pour la surveillance du changement climatique et l’adaptation au changement climatique. Ce programme fait partie du programme cadre OMM sur les services climatiques (défini à la conférence de Genève en novembre 2009). Il s’agit de services européens d’information libres et gratuits, basés sur l’observation de la terre (avec une composante spatiale). Deux défis sont à surmonter pour développer ces services : la profusion de données disponibles (données de simulation, réanalyses, satellite, etc.) et la construction de ces services climatiques qui suppose une bonne connaissance des besoins, un échange avec les acteurs et l’existence de modèles d’impacts. Ils s’adressent aux décideurs politiques et aux acteurs économiques.
Ce programme se concrétise en deux projets pour la période (2016-2018) : ECEM et Clim4energy (4 = for !). ECEM évalue le mix énergétique (intégration des énergies renouvelables bas-carbone) à différents horizons temporels. Clim4energy travaille sur les six domaines suivants : la hausse du niveau des mers et les infrastructures off-shore, la prévision saisonnière de production éolienne, la praticabilité du sol et la biomasse, le potentiel hydro-électrique, le risque de pluies verglaçantes, enfin l’équilibre entre l’offre et la demande du réseau électrique. En particulier, il s’agit d’examiner si l’intermittence du vent est problématique pour satisfaire la demande avec l’énergie éolienne, si les précipitations sont suffisantes pour les barrages, plus largement étudier comment les conditions météorologiques affectent la demande en énergie (une vague de froid suscite une demande importante). Ce programme est mené avec dix modèles numériques de climat européens (EuroCordex) et deux scénarios. Pour répondre à la question de l’adéquation de l’offre et de la demande pour l’éolien et le solaire, typique d’un gestionnaire d’énergie comme RTE, le programme a défini des indicateurs à tester sur des situations extrêmes du passé. Le domaine est l’Europe et le pas peut être infra-journalier. Les premiers tests effectués sur l’hiver entier et les cinq jours les plus froids révèlent une anomalie pouvant aller jusqu’à 15 % avec le scénario majeur RCP8.5.
Pour l’indicateur thermique de la consommation électrique avec ce scénario RCP8.5, on constate une baisse significative et robuste (accord des modèles) à l’horizon 2050 pour la saison hivernale. Pour l’indicateur de la production éolienne et pour la saison hivernale également, en revanche, le changement n’est pas robuste et surtout pas significatif.
Table ronde 3. « Les nouveaux challenges », avec V. Arvidsson (Ericsson), J. Lachaze (Environnement JO Paris 2024), C. Phillips (ADEME), G. Vermot-Desroches (Schneider Electric).
J. Lachaze présente les Jeux Olympiques 2024 comme un projet compact et sobre (transports en commun, infrastructures…). Le bilan actuel est estimé à 1,56 million de tonnes équivalent CO2, qu’il faudrait diviser par deux pour satisfaire l’accord de Paris. Comme exemple de situations extrêmes à gérer, il évoque les pluies diluviennes qui ont complètement dégradé la « fan zone » lors de l’Euro 2016, avec un coût de réparation important !
Pour C. Phillips (ADEME), il faut penser l’adaptation au niveau territorial, ce qu’elle illustre en citant les deux territoires gagnants aux trophées de l’adaptation :
1) Le Parc naturel régional du Haut-Jura a défini trois espèces d’arbres pour les plantations futures (coût : 250 000 euros, financé à 50 % par le Fonds Européen Agricole de Développement de l’Économie Rurale FEADER).
2) Le parc du Vercors propose une offre touristique pour les quatre saisons face au faible enneigement.
Vingt actions territoriales d’adaptation de ce type sont présentées en fiches dans un dossier ADEME, et rédigées suivant la même grille méthodologique : En quoi cette action contribue à l’adaptation du territoire au changement climatique ? ; Carte d’identité de l’action et contexte opérationnel ; Quels bénéfices pour la collectivité ? ; Enseignements utiles pour d’autres territoires. Ces vingt fiches sont classées en trois thèmes : Aménagements, infrastructures, bâtiments (7) ; Écosystèmes et ressources naturelles (7) ; Organisation et gouvernance du territoire (6), et illustrent le développement concret de l’adaptation dans les territoires.
V. Arvidsson (Ericsson) insiste sur le rôle des réseaux Télécom pour la résilience. Il insiste sur la redondance pour pallier les dysfonctionnements des réseaux. Par ailleurs, on peut faire une reconnaissance indirecte des précipitations qui affectent les faisceaux hertziens. Enfin, on peut faire des alertes de crues grâce à des capteurs idoines mis en réseaux.
G. Vermot-Desroches (Schneider Electric) prône l’intelligence des solutions numériques pour les infrastructures d’eau et d’énergie. Il fait un historique rapide de l’évolution technologique, des moyens de communication et des ordinateurs, avec une accélération sans précédent. Le monde est de plus en plus connecté ! En 2017, il y a 6 milliards d’humains et 4 milliards de machines. En 2050, il y aura 50 milliards de machines connectées entre elles. Ceci pose un problème de consommation d’énergie et d’utilité ! Par ailleurs, la demande en énergie a une grande volatilité. Il faudrait maîtriser (voire réduire) cette demande par une gestion intelligente, pour éviter des coupures intempestives, comme on le voit dans certains pays !
Table ronde 4. « De quoi a-t-on besoin pour agir ? », avec G. Chatelus (Groupe CDC), L. Piermont (CDC Biodiversité), E. Fortin (École des Ponts ParisTech).
G. Chatelus raisonne essentiellement en financier, tandis que L. Piermont évoque les conséquences de la tempête Klaus qui a ravagé la forêt des Landes en janvier 2009. Les tempêtes de décembre 1999 puis la canicule 2003 ont imposé une réflexion sur le choix des essences futures et le type de plantations pour le renouvellement de la forêt. Pour l’adaptation au climat futur, on préfère le chêne sessile au chêne pédonculé.
E. Fortin, de l’École des Ponts, présente les cinq compétences (ou caractéristiques) qui correspondent à une logique de développement durable. Ce sont :
1) raisonnement systémique… avec une attention aux frontières ;
2) approche exploratoire plutôt que calcul économique prévisionnel ;
3) prendre conscience de la pluridimensionnalité et de l’interdisciplinarité du problème étudié ;
4) accompagner les changements dans un état transitoire permanent ;
5) définir et assumer sa sphère de responsabilité (être conscient des impacts que l’on génère).
V. Lepousez, de Carbone 4, qui pilote le débat, suggère aux participants de faire eux-mêmes le test en cinquante questions sur les enjeux du développement durable, qui figure sur le site www.sulitest.org. C’est important, par exemple, pour recruter des collaborateurs qui soient sensibles aux enjeux du développement durable.
S. Maire, haut responsable de la résilience de la ville de Paris, explique son rôle et com-ment s’applique ce concept de résilience à la ville de Paris dans un exposé de conclusion. On voit le retour de la résilience urbaine, bien illustrée par la devise de Paris « Fluctuat nec mergitur », qui date de 1853. Paris fait partie du réseau de cent villes résilientes (c’est-à-dire : inclusives, Smart Cities, Développement Durable, projets de long terme, solutions du Sud utiles au Nord…) qui ont été choisies par la fondation Rockfeller sur mille villes candidates (voir le site www.100resilientcities.org). La résilience urbaine est la capacité d’un territoire avec ses habitants, ses flux, à résister aux chocs (accident industriel, pénurie d’eau, terrorisme…). On prend la crue de 1910 comme étude de cas, puisque l’on peut étudier la réaction des habitants grâce au Petit Journal…
Les six enjeux majeurs contre lesquels il faut lutter : 1) inégalité, exclusion ; 2) inondations, ressources en eau ; 3) pollution de l’air ; 4) attentats terroristes, sécurité (ce qui menace la cohésion sociale) ; 5) gouvernance (cf. le Grand Paris) ; 6) atténuation et adaptation au changement climatique. Et la ville de Paris, avec 10 ans de Plan Climat, semble en avance !
Voici des explications et des illustrations de ces enjeux, interdépendants avec d’autres politiques. D’abord, on a observé lors de catastrophes, comme le tsunami de décembre 2011 en Asie, que le taux de mortalité est anticorrélé avec le niveau de cohésion sociale, d’après une étude faite sur 130 villes et villages côtiers japonais. Des exemples d’action : vis-à-vis du changement climatique, on végétalise les surfaces. Pour lutter contre les moustiques, porteurs de maladie, il ne faut jamais d’eau stagnante. Pour lutter contre la pollution de l’air, on évite de planter les arbres selon une disposition qui limite la ventilation (Vos et al., 2013).
Des exemples d’architecture sont évoqués. L’écoquartier Vauban (Besançon) a été conçu par un architecte qualifié en développement durable mais reste socialement discutable ! À Rotterdam, une place au cœur des immeubles a un rôle multifonctionnel : célébration de messes, concerts, bassin de rétention d’eau pluviale ; à Vejle, au Danemark, on a construit un immeuble de logements sociaux avec une digue, pour renforcer le sentiment d’appartenance communautaire. En Turquie, l’usine Toyota à Sakarya était résiliente aux tremblements de terre et a effectivement résisté au terrible évènement de 1999.
C. Blauel, adjointe à la mairie de Paris, clôt l’événement en indiquant que le conseil de Paris, au départ peu favorable à la révision du Plan climat, s’est trouvé rapidement motivé par un réchauffement tardif début septembre 2016 !