Voici un livre de souvenirs pour toute personne qui a vécu au moins quelques années sur le territoire du bassin minier du Nord – Pas-de-Calais. Qu’il s’agisse de natifs du territoire que la fermeture de l’activité extractive a conduit à émigrer, de travailleurs immigrés appelés à renforcer le flot des mineurs (1981-1983) puis renvoyés soit chez eux soit ailleurs, ou encore de résidents que des activités autres que la mine ont amené dans les années 80 et 90 à s’installer au « pays noir », ou tout simplement enfin de résidents qui, la mine fermée, sont restés à vivre – chichement – des pensions issues de la mine et de ses emplois dérivés, tous trouveront plaisir à feuilleter ce petit ouvrage (format A5). Ils chercheront les lieux qu’ils ont fréquentés, et traqueront des souvenirs.
L’Association des Communes Minières de France a demandé à Guy Dubois, auteur et comédien patoisant, originaire de la région de Lillers, et grand défenseur du patrimoine populaire régional, de composer cet assemblage.
Les 173 communes reconnues comme minières, même si leur sous-sol a été exploité sans accueillir d’installations de surface, ou avec installations de surface sans exploitation souterraine, sont classées par ordre alphabétique. C’est simple et efficace. Chacune est évoquée par des illustrations (1 à 5), et des textes très courts (quelques phrases) qui résument des faits : ouverture et/ou fermeture de fosse, de centrale thermique (à charbon bien sûr), de cokerie, de triage ferroviaire ou de rivage. Les accidents mortels sont également évoqués, rappelant le lourd tribut humain payé à l’activité extractive. L’auteur ne cite pas ses sources : où est-il allé chercher toutes ces informations précises ? Il a peut-être consulté les dossiers de sortie de concession minière dont chaque mairie a reçu une copie pour la, ou les concession(s) la concernant. Ces documents sont publics. Il a sans doute rassemblé beaucoup de souvenirs privés, les siens et ceux de réseaux d’amis et d’associations gardant la mémoire, comme il s’en est beaucoup créé sur ce territoire.
103 communes ont été traitées en une page ; 47 en deux pages ; 14 en quatre pages. Les 9 dernières ont eu droit à cinq pages chacune : Anzin, Carvin, Denain, Hénin-Liétard, Lens, Liévin, Loos-en-Gohelle, Lourches, Oignies. Ces noms évoquent tous de grandes étapes de l’histoire du bassin minier du Nord – Pas-de-Calais.
On regrette l’absence d’une carte de l’ensemble des concessions que tout le monde ne situe pas d’emblée. Et pour chaque commune, un petit cartouche avec la silhouette de la concession et le positionnement de la commune pouvait trouver place.
Ce n’est ni un exposé historique, ni un exposé scientifique sur le charbon et son gisement. C’est vraiment un merveilleux livre de souvenirs. La qualité, faible dans l’ensemble, de l’illustration, est certainement due au fait que toutes les photos et reproductions de cartes postales doivent provenir de collections privées, de l’auteur et de ses amis. Aucun crédit n’est précisé. Mais cela donne un cachet d’authenticité très fort. Certaines photos antérieures à 1914 sont instructives, mais celle qui m’a le plus touché est celle de la Cité Quénehem à Marles-les-Mines, juste après l’accident de terril du 19 juillet 1975. Une mini-nuée ardente a balayé quelques maisons, faisant 7 morts. La notion de risque était alors moins bien connue, et les règlements moins nombreux. Mais la disparition de tels accidents est d’abord due, il faut le rappeler, à l’arrêt de l’activité charbonnière, par raison économique.
