Les métamorphoses de la Sibylle au xiiesiècle

DOI : 10.54563/bdba.953

p. 11-24

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Comme on le sait depuis l’ouvrage fameux de Jean Seznec1, le Moyen Âge a interprété très librement, et parfois de manière assez désinvolte, les figures mythologiques que lui avait léguées l’Antiquité gréco-latine. La Sibylle ne fait pas exception à la règle. En effet, à côté de textes où elle apparaît sous un jour assez proche de son modèle antique, du Livre de Sibile de Philippe de Thaon dans la première moitié du xiie siècle au Chemin de longue étude de Christine de Pizan au tout début du xve, on trouve un certain nombre d’œuvres qui la métamorphosent d’une manière a priori déconcertante en faisant d’elle une séductrice perverse voire érotomane, telle cette « enchanteresse Sebile » qui tient compagnie à Morgane dans plusieurs romans arthuriens du xiiie siècle et qui transforme à tel point la figure antique qu’on peut se demander s’il n’y a pas là, sous-jacente, une intention parodique2. La chose est bien connue, d’autant que le passage de la prophétesse antique à la fée médiévale a été étudié voici près de quarante ans par William Kinter et Joseph Keller dans un ouvrage qui constitue un très utile point de départ3. Toutefois, si le phénomène est connu, les conditions de son apparition n’ont pas encore été pleinement élucidées, car Kinter et Keller passent assez vite sur le xiie siècle, c’est-à-dire sur cette époque charnière qui a vu se développer la production poétique en langue romane et où le processus de transformation a donc toutes les chances de s’être mis en place.

Dans le cadre limité de cette communication, nous ne pouvons prétendre à une étude exhaustive. Mais nous voudrions tenter d’ouvrir quelques pistes en analysant plusieurs personnages féminins qui apparaissent dans les textes du xiie siècle sous le nom de Sibile ou de Sebile, pour voir si certains des traits qui les caractérisent n’établissent pas une relation souterraine, mais déchiffrable, entre eux et la prophétesse antique, tout en modifiant assez considérablement l’image traditionnelle de cette dernière. Bien sûr, quelques précautions méthodologiques s’imposent, car le prénom Sibylle, très répandu au Moyen Âge, ne peut impliquer à lui seul l’existence de cette relation. Ainsi la « reine Sebile » qui apparaît à la fin du xiie siècle dans la chanson de geste Macaire comme épouse persécutée de l’empereur Charlemagne ne semble a priori avoir aucun lien avec la Sibylle antique. Kinter et Keller pensent même que le prénom qu’elle porte avait à l’origine une forme germanique (quelque chose comme Sieghilde) et que seul le passage d’une langue à l’autre a pu établir une trompeuse homonymie4. Néanmoins, dans un certain nombre de cas, comme nous allons le voir, à la présence du prénom viennent s’ajouter suffisamment d’indices pour qu’on puisse supposer que la mise en scène du personnage joue consciemment, fût-ce de façon détournée ou ludique, avec le souvenir d’une prophétesse païenne dont ainsi, peu à peu, se modifie ou se déforme l’image5.

À côté de la Quatrième Eglogue de Virgile qui a fait voir en elle une prophétesse du Christ, et du Sermo de symbolo attribué à saint Augustin qui fait d’elle l’auteur du poème sur les Quinze signes (Judicii signum), donc une annonciatrice du Jugement Dernier6, l’image poético-religieuse de la Sibylle a été transmise au xiie siècle par deux textes latins très lus à cette époque : l’Enéide de Virgile, avec la catabase d’Enée au livre VI, et les Métamorphoses d’Ovide, avec la rencontre d’Enée et de la Sibylle au livre XIV. Or ces deux textes ont en commun de faire de la Sibylle à la fois un corps et une voix, une parole et une représentation, pour reprendre le titre d’un colloque tenu à l’Université de Rennes en octobre 2001.

Chez Virgile en effet la volonté de mettre en scène de la manière la plus spectaculaire possible la voix d’Apollon, dont la Sibylle n’est que le vecteur, amène une description très étudiée de l’« antre énorme » (ingens antrum) pourvu de « cent portes d’où s’élancent autant de voix, réponses de la Sibylle » (totidem voces, responsa Sibyllae)7. Mais en même temps la possession divine dont la prophétesse est l’objet attire forcément l’attention sur les convulsions d’un corps malmené par l’étreinte du dieu, « tâchant de secouer de sa poitrine le dieu puissant » (magnum si pectore possit/excussisse deum) ; le verbe bacchatur (« s’agiter, se débattre »), avec son allusion transparente à Bacchus, introduit même une note discrètement érotique8. Chez Ovide, qui cherche clairement à se démarquer de son prédécesseur et à innover, le récit de la prophétie et de la catabase est très rapidement expédié, mais la Sibylle se laisse ensuite aller à quelques confidences sur un mode plus intimiste en rappelant à Enée qu’elle fut jadis une belle jeune fille aimée du dieu Apollon, qui « brûlait de [la] séduire par des présents » (praecorrumpere donis / me cupit)9. Ce Phébus présenté comme un « amant » (Phoebo amanti, v. 133) intensifie la note érotique tout juste esquissée par Virgile. Mais en même temps la suite de l’histoire de la Sibylle finit par réduire cette dernière à une voix, puisqu’elle explique à Enée qu’ayant demandé à Phébus la faveur de vivre mille ans sans demander en même temps une jeunesse éternelle, la vieillesse est en train de la consumer si bien qu’elle finira par devenir invisible quant à son corps, mais reconnaissable encore à sa voix : nullique videnda, voce tamen noscar10. Entre voix prophétique et corps envahissant, ou séduisant, la Sibylle cherche sa place, et les premiers textes poétiques romans du xiie siècle vont, semble-t-il, exploiter cette binarité.

On la retrouve en effet dans le Livre de Sibile de Philippe de Thaon, écrit vers 114011. Dans ce texte de vulgarisation savante qui traduit une prose latine, la tradition antique de la Sibylle ou plutôt des Sibylles est dûment rappelée en introduction. Les 90 premiers vers énumèrent en effet « dis sibiles/gentils dames nobiles/ki orent en lur vie/espirit de prophecie […]. « Sibile » erent nomees/e sages apelees/tutes femmes savantes/ki erent devinantes12 ». Très vite toutefois l’auteur concentre son attention sur la dixième Sibylle, la Sibylle Tiburtine, en insistant sur sa célébrité : « iceste fu reïne/seinte chose devine ;/ iceste a meinte gent/dist lur avenement./Ceste dist prophecie/del fiz seinte Marie/e al rei Salomun/prist el desputeisun./A Rome fu mandee/pur sa grant renomee13 ». Cette Sibylle n’est donc pas la Sibylle de Cumes, celle d’Ovide et de Virgile. Elle n’en est pas moins une prophétesse, puisqu’elle a annoncé la venue du Christ et va expliquer aux sénateurs Romains le songe des neuf soleils, qui incarnent neuf âges successifs de l’humanité ; son explication se clôt d’ailleurs, dans la meilleure tradition pseudo-augustinienne, sur un rappel des signes du Jugement Dernier. La Sibylle de Philippe de Thaon est en fait le fruit d’un intéressant syncrétisme qui combine en un seul personnage diverses traditions. Elle est même assimilée à la reine de Saba, celle qui rendit visite à Salomon et le « prist el desputeisun », c’est-à-dire engagea un débat avec lui. Cette confusion s’explique par l’intervention souterraine de la Sibylle hébraïque, dénommée Sabbé ou Sabethé ou Sambethé et donc confondue sur la base d’un rapprochement phonique, au moins dès le ixe siècle, avec la reine de Saba14.

C’est là ce qui explique que la prophétesse antique soit gratifiée du titre de reine, un titre qui, associé au nom de Sibile, revient avec insistance et ponctue comme un leitmotiv toutes ses prophéties : « dunc [lur] respunt Sibille/la roïne nobille », « aprés ceo dist Sibille/la roïne nobille »15. C’est peut-être aussi pour cette raison que la Sibylle est belle, ce qu’elle n’était pas en principe dans la tradition antique. Virgile l’appelle « la prêtresse chargée d’ans » (longaeva sacerdos)16, et Ovide lui fait dire qu’elle a déjà vécu sept siècles, ce qui fait d’elle l’incarnation de « la triste vieillesse » (aegra senectus)17. Chez Philippe de Thaon au contraire, les Romains sont éblouis par sa beauté : « et come vint Sibille/a Rome, la nobile,/ li Romain s’esmenerent/de la beauté qu’il virent/kar la reïne ert mut/halegrë en sun vult/e de cler voiement/e bel parlout e gent/e de tute beauté/out le cors aürné/e umblement parlout/e mut se humiliout/e cil qui l’escotou[en]t/en li se delitouent18 ». On voit qu’ici la séduction du corps est étroitement associée à la séduction de la parole et de la voix, comme l’atteste l’entrelacement des références au « parler » (« parlout », répété deux fois), associé au « delit » qu’il procure, et au « vult » (« visage ») ou au « cors ». En témoigne aussi l’équivocité d’adjectifs comme « cler » ou « halegrë », dont Josiane Haffen souligne bien l’ambiguïté, puisque « cler » peut renvoyer à la limpidité du regard comme à la clairvoyance de la prophétesse, et que « halegrë » peut qualifier un visage soit agréable soit souriant19. La beauté corporelle est donc étroitement unie aux dons spirituels. Elle n’en existe pas moins aussi pour elle-même, puisque dans leur première adresse à la Sibylle les Romains insistent surtout sur cette beauté : « mestre dame regine/seinte chose divine/certes, en nostre éé/femme de ta beauté/unkes mes ne veïmes/ne parler n’en oïmes20 ».

Là aussi se met donc en place un riche syncrétisme dont les textes postérieurs sauront tirer parti – mais en dissociant ce que Philippe de Thaon avait associé. On peut en effet, semble-t-il, distinguer deux groupes : celui où la Sibylle, avant tout prophétesse, évolue vers la femme savante et celui où la séduction tend à prendre la première place, le don de prophétie étant alors atténué ou gommé.

Dans le premier groupe, il faut distinguer les textes où apparaît clairement la Sibylle de ceux où apparaît simplement un personnage du nom de Sibylle, que certains éléments peuvent tout de même rattacher à l’antiquité. La première catégorie rassemble trois romans, le Brut, l’Eneas et le Dolopathos, et une chanson de geste, Mainet.

Dans le Roman de Brut, achevé en 1155, la Sibylle n’apparaît pas en personne. Elle est seulement citée par Hoel, roi d’Armorique et neveu d’Arthur, dans un discours où il encourage son oncle à se lancer dans toute une série de conquêtes, en Bourgogne, en France et en Lombardie, en invoquant des prophéties qui semblent faire de lui, après Belin et Constantin, le troisième roi des Bretons destiné à dominer Rome : « mambre toi que Sebile dist/es profecies qu’ele escrist :/ troi baron de Bretaigne istroient/qui Rome a force conquerroient./Dui de cez sont ja trespassé/qui de Rome ont seignor esté :/ li premiers de cez fu Belins/et li seconz fu Costantins. Tu es li tierz qui Rome avras/et Rome a force conquerras ;/ an toi sera la profecie/que Sebile dist asovie21 ». À la suite de Geoffroy de Monmouth, la Sibylle prophétesse, qui encadre de son nom le rappel de sa prophétie, est ici utilisée comme argument d’autorité : c’est sa voix, relayée par l’« escrit » puis par une autre voix, qui l’emporte absolument. Il en va de même dans le Dolopathos, rédigé vers 1220 par un certain Herbert à partir du roman en prose latine composé par Jean de Haute-Seille entre 1884 et 1212, puisque la Sibylle, associée à Virgile, est utilisée comme argument d’autorité par un saint homme qui cherche à convertir au christianisme le païen Lucimien, roi de Sicile : « bien ais oiit de la roïne/Sebille, ke fut saraizine./Augustus li rois la mandait/consoil li quist et demandait/des synators, ki tant l’amoient/ke deu de lui faire voloient […]. Cebille ne lou vot loueir/et bien li mostrait par raison/k’Il est et vrais Deus et vrais hons :/ « descendroit Deus del ciel an terre/et vanroit son puple requere ». […]/ Et Virgile, ki vos aprist,/ or penceiz a ceu k’il an dist !/ Asseiz an parlait propemant/et bien et beil et saigement ;/ il dist ke novelle ligniee/estoit jai de ciel anvoieie22 ». On voit passer ici, très nettement, le souvenir de la Quatrième Eglogue et même celui de la Sibylle de Philippe de Thaon, puisque la Sibylle d’Herbert est elle aussi qualifiée de « roïne », ce qui l’assimile implicitement à la reine de Saba et peut donc expliquer, dans une démarche syncrétique qui confond tous les paganismes, l’épithète « saraizine » qui lui est ensuite accolée. Définie comme païenne, la Sibylle n’en est pas moins présentée comme une prophétesse du Christ. Sa parole, citée au style direct, constitue donc un argument bien propre à convaincre le païen Lucimien : la vérité de Dieu s’impose même aux païens.

Dans ces deux textes la Sibylle, simplement mentionnée, n’est que prophétesse. Il n’en va pas de même dans l’Eneas, composé vers 1160, qui lui redonne son statut de personnage à part entière et qui, tout en lui conservant son don de prophétie, nécessaire au bon déroulement de la narration, lui prête des connaissances beaucoup plus étendues. « Sibilla » y est en effet appelée « devineresse », «profetiseresse » et « sage prestresse »23. Mais Anchise ajoute à ces qualificatifs la description de compétences qui couvrent pratiquement tous les domaines du savoir : « el set quant qu’est et qu’est a estre/de deviner ne sai son mestre,/ del soloil set et de la lune/et des estoilles de chascune,/ de nigremance, de fusique/de restorique et de musique/de dialetique et gramaire24 ». Elle est même experte en incantations, puisqu’elle parvient à endormir Cerbère en disant « entre ses danz tot belement/un charme et un anchantemant25 ». La voix reste première, mais ne se fait plus le vecteur de la parole d’Apollon, ou d’une quelconque inspiration divine : la Sibylle conquiert en quelque sorte son autonomie. Et une harmonie s’instaure entre ses connaissances et son physique, mais suivant une logique inverse de celle qu’on a pu observer chez Philippe de Thaon. Dans l’Eneas en effet, on le sait, la Sibylle est dépeinte comme une créature vieille et laide, « tote chenue, eschevelee,/ la face […] tote palie/et la char noire et froncie26 ». Seule est remarquable l’intensité de son regard effrayant, de ses « ielz […] parfont » où semble se concentrer l’étendue de son inquiétant savoir : « peors prenoit de son regart/feme sanblot de male part27 ». La chanson de geste Mainet, composée selon Jacques Horrent dans la seconde moitié du xiie siècle, semble se souvenir de cette inflexion nouvelle donnée au personnage de la Sibylle dans l’Eneas lorsqu’elle compare la prophétesse, réputée avant tout pour ses connaissances astrologiques, à la jeune sarrasine Galienne, fille de Galafre, le roi de Tolède, et amie de Charlemagne qui finira par l’épouser après sa conversion au christianisme : « Orionde Galie od le cors avenant », en effet, « plus sot des estoiles, de la lune luisant/que Othes ne Sebile qui s’en penerent tant28 ».

Ce glissement de la prophétesse vers la femme savante peut nous amener à nous interroger sur deux personnages féminins qui portent le nom de Sibylle et qui apparaissent l’un dans le Protheselaüs de Hue de Rotelande, l’autre dans le Conte de Floire et Blancheflor. Dans le Protheselaüs, sans doute écrit vers 1185-1190, on voit en effet apparaître une païenne nommée Sibil(l)e qui possède des connaissances médicales hors du commun grâce auxquelles elle va sauver le héros, blessé par une lance empoisonnée. Cette femme est présentée comme la tante de Mélandre, un jeune seigneur qui va devenir l’ami du héros, et elle est païenne comme tous les personnages mis en scène dans le roman, censé se dérouler dans l’antiquité grecque puisque Protheselaüs est le fils d’Ipomédon, l’un des combattants du Roman de Thèbes. L’épisode où elle figure est démarqué de l’histoire de Tristan : le héros, atteint d’une blessure incurable, s’embarque dans un bateau livré au hasard des flots et arrive dans une terre inconnue où il rencontre d’abord Mélandre, puis sa tante Sibylle. Cette dernière n’est jamais rapprochée explicitement de la prophétesse antique. Mais c’est incontestablement une femme très savante, puisque son neveu la présente en ces termes : « n’a el mund dame ne meschine/que tant sace de medecine/cum la dame de cest castel », et la révélation de son prénom suit de très près l’éloge de son savoir : « e ceste dame cum ad nun ?/ – Sibile, amis, l’apele l’um29 ». Dans l’épisode démarqué du schéma tristanien, elle reprend bien sûr le rôle tenu par la mère d’Yseut, mais on peut se demander si le narrateur ne joue pas aussi avec le souvenir de la Sibylle antique, d’autant que la tante de Mélandre est définie comme une femme à la parole « sage » (« Sibile parla cume sage », v. 2435) et que le texte revient de manière insistante sur son savoir et ses compétences, qui parviennent d’ailleurs à guérir le héros : « Sibille sot mult de mescines », « Sibile mult de plaies sot/en son grant sen ben se fiot30 ». Elle n’est en outre pas mariée, ce qui peut renvoyer implicitement à la chasteté bien connue de la prophétesse aimée en vain par Phébus.

Une autre tante Sibylle, plus discrète, peut alors retenir notre attention : c’est celle qui apparaît dans le Conte de Floire et Blancheflor. Ce conte est daté de 1150 environ par son éditeur, Jean-Luc Leclanche, mais cette date est sujette à discussion, car une allusion assez claire donne à penser qu’il a pu connaître l’Eneas. La tante Sibylle dont il est ici question est celle du héros, et c’est une païenne puisque Floire et ses parents sont païens. Ces derniers lui confient d’ailleurs la mission de faire oublier à leur fils la chrétienne Blancheflor, dont il est éperduement amoureux pour avoir été élevé avec elle dès son enfance, et cela sur la suggestion de la mère de Floire, sœur de Sibylle : « Sire, fait ele, envoions Floire/nostre fil, aprendre a Montoire./ Lie en ert molt dame Sebile,/ ma suer, quist dame de la vile./Des qu’ele l’ocoison savra,/ s’el puet, oblïer li fera/la crestiiene Blanceflor/par le confort d’une autre amor31 ». Là encore aucun rapprochement explicite n’est fait avec la prophétesse antique. Mais outre que Sibylle apparaît, à travers le rôle qui lui est donné, comme un agent militant du paganisme, c’est une femme liée au monde de l’étude puisque c’est en emmenant Floire à l’école pour lui faire rencontrer d’autres jeunes filles qu’elle espère le détourner de Blancheflor : « aprendre l’en maine Sebile/o les puceles de la vile,/ savoir se il l’oublieroit/et en l’escole autre ameroit32 ». Enfin elle est mariée au duc Joras, seigneur de Montoire, mais on ne lui prête aucune descendance, ce qui la rend très disponible pour accueillir son neveu33 mais la confine, comme chez Hue de Rotelande, dans son statut de tante, un statut qui, par l’âge qu’il suppose et l’absence de maternité qu’il implique, semble connoter l’idée de chasteté.

À partir de ces deux personnages discrètement apparentés, on peut donc risquer l’hypothèse que le nom de Sibylle est volontiers attribué, dans les romans qui se souviennent des romans d’antiquité, aux païennes d’un certain âge et d’un grand savoir qui jouent un rôle non négligeable mais secondaire dans la narration, sur la base d’un jeu conscient mené avec le souvenir de la Sibylle antique. Ce serait là une première métamorphose de cette dernière. Mais il en est une autre, beaucoup plus audacieuse, qui va la faire basculer du côté de l’érotisme, et elle se profile déjà dans Mainet où, nous l’avons vu, la jeune sarrasine Galienne, comparée pour ses connaissances astrologiques à la Sibylle, n’en est pas moins remarquable par son « cors avenant », son corps séduisant.

Ce corps séduisant qui caractérise Galienne se retrouve en effet, dans le Roman de toute chevalerie de Thomas de Kent, sans doute composé entre 1175 et 1185, à propos d’une reine de Saba dont il est fait brièvement mention et qui se prénomme Sibylle. A priori il n’y a rien là que de très traditionnel, puisque dès le ixe siècle, comme le rappelle Josiane Haffen dans son chapitre sur la Sibylle hébraïque, « Georges Monachos écrivait dans sa Chronique que la reine de Saba était appelée sibylle par les Grecs34 ». Mais ce qui est intéressant, c’est de voir le portrait que Thomas de Kent brosse de cette reine dont il fait une séductrice, et une séductrice dangereuse et perverse qui essaie de détourner Salomon de son Dieu. Au cours d’une description du monde, Thomas aborde en Ethiopie « Saba la cité, dont Sibyle fu royne », et écrit : « illuec est Saba, une cité vaillant ;/ Sibile en fu royne k’en alout querant/desqu’en Jerusalem le sage governant/qe fist le temple Dieu par le soverein comant. […] Ele desceut Salomon par beauté e par semblant ;/ contre sa ley pecha pur li cum mescreant./Ses sens ne ses engins ne ly furent garant35 ». Si la « beauté » de Sibylle, la reine de Saba, rappelle celle de la « reine Sibylle » de Philippe de Thaon, l’effet qu’elle produit est donc radicalement différent : alors que la beauté de la prophétesse apparaissait comme la forme visible de la beauté d’une âme, ou d’une voix, éclairées par Dieu, la beauté de la païenne qu’est la reine de Saba est une séduction maléfique qui vise à détourner de Dieu et à se faire conduire comme un « mescreant ». Loin d’être la détentrice et la révélatrice d’un « sens », d’une sagesse cachée, la reine Sibylle de Thomas de Kent travaille au contraire à ôter aux hommes pieux ce « sens » qui s’avère impuissant à les protéger et privilégie le « semblant ».

Or l’image qui est ici donnée de la reine de Saba n’est guère conforme à ce qu’on lit dans la Bible. D’après le texte de la Vulgate, cette reine, venue éprouver la sagesse de Salomon par des énigmes, avait fini par se déclarer complètement convaincue et avait chanté les louanges du roi et de son Dieu. L’entrevue s’était achevée sur des échanges de riches présents, la somptuosité des dons faits par la reine étant tout particulièrement mise en valeur36. La reine de Saba apparaît donc dans la Bible comme une souveraine richissime en quête de sagesse, ce qui donne d’elle une image plutôt positive. La chanson de geste des Chétifs se fait fugitivement l’écho de cette tradition lorsque, au cours d’un repas partagé par le roi Soudan et quelques invités de haute lignée dont Corbaran, le roi vante la richesse de sa table et notamment une « rice nef d’or » qui « plus vaut de .II. cités » et que « Sebile la roïne ot en sa garde assés37 ». L’excès de richesse et de luxe aurait-il été perçu comme une invite à l’érotisme ? Ce qu’on peut supposer en fait dans le roman de Thomas, c’est l’intervention d’un autre modèle, celui de la belle païenne, de la belle sarrasine présente, nous l’avons vu, dans Mainet, dont la trop grande beauté, la trop grande richesse et peut-être les connaissances inquiétantes peuvent mener les hommes à leur perte. Ainsi s’expliquent peut-être certaines dérives postérieures de la Sibylle. Cette interférence probable de son personnage avec celui de la belle sarrasine, grâce à la médiation de la reine de Saba, nous amène en tout cas à aborder un dernier texte, la Chanson des Saisnes de Jean Bodel, où une reine païenne prénommée Sibylle joue un rôle assez important puisqu’elle est l’amie de Baudouin, l’un des neveux de Charlemagne.

Composée selon Annette Brasseur entre 1180 et 1210, la Chanson des Saisnes se situe comme le Dolopathos à la frontière du xiie et du xiiie siècle38. Mais la Sibylle qui y figure n’a à première vue guère de ressemblances avec la prophétesse antique puisque c’est une reine saxonne, épouse de Guiteclin, roi des Saxons, mais amoureuse du jeune Baudouin qu’elle rejoint pendant la guerre à de multiples reprises grâce à de nombreux stratagèmes et qu’elle finira d’ailleurs par épouser après la mort de Guiteclin, tué au combat, et après s’être convertie au christianisme. Une fois Baudouin décédé à son tour, elle fait une fin édifiante en se retirant dans un monastère. Dans cette chanson de geste truffée d’éléments romanesques, elle joue donc bien le rôle déjà traditionnel de la belle sarrasine éprise d’un guerrier chrétien, inventant mille ruses pour le rejoindre et finissant par se convertir par amour pour lui. Annette Brasseur a notamment attiré l’attention sur les similitudes de situation qu’on peut relever sur ce point entre la Chanson des Saisnes et le Siège de Barbastre, deux œuvres à peu près contemporaines : comme Sibylle, la païenne Malatrie est une princesse sarrasine qui se convertit par amour pour Girart, qu’elle épouse à la fin de la chanson, et divers épisodes qu’on trouve aussi dans la Chanson des Saisnes (amour de loin fondé sur une réputation, rencontres au bord d’une rivière, dialogues courtois) ponctuent les étapes de cette passion39. Dans le cas de Sibylle, toutefois, un élément original vient tout de même rappeler en filigrane le souvenir de la prophétesse dont la belle sarrasine porte le nom : il s’agit de paroles à valeur prémonitoire prononcées par la reine devant Hélissent, une jeune captive française devenue sa confidente :

« Helissent, dist Sebile, laissiez vostre raison !
Une chose i esgart selonc m’entencïon,
C’or venront Hurepois, Angevin et Breton,
Ja contre aus n’avront Saisne duree ne foison,
Adont en verrés faire mout grant ocisïon.
Charles venra ça outre a coite d’esperon
Et conquerra Sassoigne, s’iert de sa regïon,
Et vous donra Coloigne et Berart a baron,
Et moi menra an France a Rains ou a Loon ;
La serai baptisie et guerpirai Mahon,
Son neveu me donra, ne li quier autre don.40 »

Bien sûr, Sibylle imagine ici un avenir conforme à ses désirs secrets, comme le lui fait du reste remarquer Hélissent. Il n’empêche que, comme le souligne Annette Brasseur, « toute la trame de la chanson se dessine dans [s]es paroles prémonitoires41 », qui semblent donc bien témoigner de ses « dons de divination42 ». L’allusion est indirecte, voire ludique ; elle n’en atteste pas moins le maintien d’un lien conscient entre la prophétesse antique et la reine des Saxons.

Nous pouvons alors être plus attentifs aux divers éléments qui, dans les deux portraits de cette dernière, sont susceptibles de renvoyer soit à la reine de Saba, soit à la Sibylle en personne. Le premier de ces deux portraits, qui doit beaucoup aux arts poétiques du temps, présente toutefois l’originalité de combiner des notations relatives à la beauté à d’autres notations qui renvoient plutôt à l’intelligence et à la sagesse – « chose rare à l’époque », commente Annette Brasseur43 – comme en témoignent les quelques vers sur lesquels il s’ouvre :

« Cele ot a non Sebile, qui puis fu bien creans,
Bele estoit a mesure et sage et entendans,
Ainc fenme de biauté ne fu a li samblans.44 »

Bien que le narrateur s’attarde complaisamment, dans ces vers et dans ceux qui suivent, sur la beauté topique de son héroïne et sur l’érotisme discret qui en émane (par ex. quand il est question de sa « bouche savereuse », v. 123/ v. 118), tout se passe donc ici comme si la mention du nom de Sebile entraînait avec elle des références obligées à la sagesse et à l’entendement. La chose est encore plus marquée dans le deuxième portrait, moins tributaire des traditions poétiques. L’accent y est encore mis sur la beauté incomparable de la séductrice, mais on y trouve aussi plusieurs notations sur la richesse des vêtements qui peuvent faire penser à la reine de Saba, et l’une au moins de ces notations semble renvoyer à un pouvoir thaumaturgique :

« Ele avoit robe entire d’une pourpre sanguine
Estincelee d’or et forree d’ermine,
Biaus crins par ses espaules, dont la colors ert fine,
Un cercle ot en son chief, qui porte medecine,
Car les pierres en valent d’argent plaine une mine,
Gent cors et avenant, et large la poitrine,
Les iex vairs et rïans et la bouche rosine ;
Onques nus hom ne vit plus gente Sarrazine.45 »

Les pierres qui ornent la couronne de « Sebile la roÿne » (v. 1580/v. 1509) possèdent donc une vertu curative, ce qui peut rappeler les connaissances médicales de la tante Sibylle du Protheselaüs. Mieux, le portrait s’achève sur un éloge qui souligne une nouvelle fois la sagesse et les qualités d’oratrice de la jeune femme ; comme celle de la Sibylle, sa parole est juste et pleine de sens :

« Et do sens naist en li et tuiaus et racine,
Car ele ert bien parlans et de sage doctrine.46 »

Certes on peut soupçonner ici une part de jeu, car l’intelligence de la reine et ses capacités à convaincre lui permettent surtout de tromper son mari pour mieux rejoindre Baudouin47. Annette Brasseur n’en note pas moins en conclusion qu’« un tel portrait est exceptionnel dans la littérature épique », notamment en raison de l’« aura de mystère [qui] enveloppe cette personnalité énigmatique48 ». On peut penser que le nom qu’elle porte, et qui cristallise sur lui des potentialités diverses, n’y est pas étranger.

Dès le xiie siècle, on le voit, des tendances syncrétiques sont à l’œuvre, soit dans les textes qui se réfèrent explicitement à la Sibylle antique, comme le Livre de Sibile de Philippe de Thaon, soit dans d’autres textes – notamment des romans et des chansons de geste – où des personnages prénommés Sibylle, sans être rattachés clairement à celle dont ils portent le nom, semblent avoir conservé telle ou telle de ses particularités initiales. On voit ainsi se produire des rencontres et des collusions fécondes qui peu à peu métamorphosent en profondeur le personnage hérité de la tradition gréco-latine, la rencontre la plus prometteuse nous paraissant être celle qui le met en contact avec le personnage de la belle sarrasine, sans doute sur la base d’une parenté alors profondément ressentie entre tous les paganismes. Car ce qui est frappant dans les romans en prose du xiiie siècle qui mettront ensuite en scène l’enchanteresse Sebile, ou des reines païennes nommées Sibylle, c’est une disparition presque totale de la voix au profit du corps, un corps encombrant ou vorace qui impose sa présence avec une force remarquable49. Or c’est au xiie siècle que ce corps commence à exister et à se façonner peu à peu, de la beauté toute spirituelle prêtée à la prophétesse antique par Philippe de Thaon à l’érotisme discret mais puissant dégagé par Sibylle, la reine des Saxons, dans la Chanson des Saisnes, en passant par la séduction maléfique donnée par Thomas de Kent à la reine de Saba. On voit ainsi apparaître les prémices de cette autonomie qui va libérer la Sibylle de toute parole divine, païenne ou chrétienne, pour lui permettre de mener une existence à part entière mais qui – revers de la médaille ? – va lui enlever sa qualité de vecteur du sacré, et donc sa respectabilité, pour lui donner une personnalité beaucoup plus sulfureuse.

Notes

1 J. Seznec, La survivance des dieux antiques, Londres, Warburg Institute, 1940 et Paris, Flammarion (coll. « Champs »), 1980 et 1993. Return to text

2 Voir notre article « La Sibylle séductrice dans les romans en prose du xiiie siècle : une Sibylle parodique ? , dans La Sibylle, parole et représentation, Presses Universitaires de Rennes (coll. « Interférences »), 2004, p. 197-209. Return to text

3 William L. Kinter et Joseph R. Keller, The Sibyl : Prophetess of Antiquity and Medieval Fay, Philadelphie, 1968. Return to text

4 Op. cit., p. 26. Return to text

5 Les textes que nous allons aborder ont été répertoriés et analysés dans le cadre d’un mémoire de master 2 soutenu en juin 2005 par Aurélie Tardif, à qui nous rendons donc la part qui lui revient dans ce travail. Return to text

6 Voir là-dessus W. L. Kinter et J. R. Keller, op. cit., p. 21-22 et p. 38-40, ainsi que J. Haffen, Contribution à l’étude de la Sibylle médiévale, Paris, Les Belles Lettres, 1984, p. 21-27. Return to text

7 Virgile, Enéide, éd. et trad. J. Perret, Paris, Les Belles Lettres, 1978, t. II, L. VI, v. 42-44. Return to text

8 Ibid., v. 77-79. Return to text

9 Ovide, Métamorphoses, éd. et trad. G. Lafaye, Paris, Les Belles Lettres, 1972, t. III, L. XIV, v. 132-135. Return to text

10 Ibid., v. 152-153. Return to text

11 Conservé dans un seul manuscrit du xiiie siècle, Le Livre de Sibile a été édité par H. Shields (Londres, Anglo-norman Text Society, 1979), édité et traduit par J. Haffen, op. cit., p. 102-179. Return to text

12 Le Livre de Sibile, v. 1-14. Sur la tradition des Sibylles gréco-latines et notamment les dix Sibylles de Varron, transmises au Moyen Âge par Lactance puis par Isidore de Séville, voir J. Haffen, op. cit., p. 13-20. Return to text

13 Le Livre de Sibile, v. 65-74. Return to text

14 Voir H. Shields, éd. cit., p. 7 et J. Haffen, op. cit., p. 37-43. Return to text

15 Le Livre de Sibile, v. 163-164 et 287-288. Voir aussi les v. 331-332, 721-722, 1101-1102, 1207-1208. Return to text

16 Virgile, Enéide, op. cit., L. VI, v. 321. Return to text

17 Ovide, Métamorphoses, op. cit., L. XIV, v. 143. Return to text

18 Le Livre de Sibile, v. 131-144. Return to text

19 J. Haffen, op. cit., p. 183. Return to text

20 Le Livre de Sibile, v. 149-154. Notons que la beauté de la prophétesse est déjà soulignée dans le texte en prose latine que « translate » Philippe de Thaon – un texte dont le noyau remonte au ive siècle –, puisqu’il y est question de sa nimiam pulcritudinem et qu’elle y est dite venusto vultu, aspectu decoro, heloquens in verbis (voir H. Shields, éd. cit., p. 94). Return to text

21 Wace, La partie arthurienne du Roman de Brut, éd. I.D.O. Arnold et M. M. Pelan, Paris, Klincksieck, 1962, v. 2379-2390. Return to text

22 Herbert, Le Roman de Dolopathos, éd. J. L. Leclanche, Paris, Champion, CFMA, 1997 (3 vol.), t. II, v. 12533-12558. Le renvoi à la Quatrième Eglogue est encore plus net chez Jean de Haute-Seille (ibid., t. III, p. 541). Return to text

23 Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, Paris, Champion, CFMA, 1925 et 1929 (2 vol.,), t. I, v. 2201-2202 et 2257-2258. De « Sibilla » (v. 2258) à « Sebilla » (v. 2289) puis à « Sebille » (v. 2472 et 2536), l’Eneas offre par ailleurs les étapes successives de la francisation du nom antique. Return to text

24 Ibid., v. 2203-2209. Return to text

25 Ibid., v. 2599-2600. Return to text

26 Ibid., v. 2268-2270. Return to text

27 Ibid., v. 2292 et v. 2271-2272. Voir là-dessus H. Cazes, « La Sibylle dans l’Eneas : de l’épopée au roman », dans Autour du roman. Etudes présentées à N. Cazauran, Paris, Presses de l’ENS, 1990, p. 11-48. Return to text

28 Mainet, éd. G. Paris, dans Romania, t. 4, 1875, p. 305-337, fragment IV, v. 44-46 (p. 329). G. Paris, lui, faisait remonter Mainet jusqu’à la première moitié du xiie siècle (art. cit., p. 306-307). Voir J. Horrent, Les versions françaises et étrangères des Enfances de Charlemagne, Bruxelles, 1979, p. 5. Return to text

29 Hue de Rotelande, Protheselaüs, éd. A. J. Holden, Londres, Anglo-norman Text Society, 1991 (3 vol.), t. I, v. 2333-2335 et 2349-2350. Return to text

30 Ibid., v. 2417-2418 et 2423-2424. Return to text

31 Robert d’Orbigny, Le conte de Floire et Blanchefleur, éd. et trad. J. L. Leclanche, Paris, Champion (« Champion Classiques »), 2003, v. 323-330. D’après l’éditeur, Montoire doit désigner Montoro, une ville importante de l’Andalousie. Return to text

32 Ibid., v. 365-368. Return to text

33 Cf le v. 361 : « et s’ante li a fait grant joie ». Return to text

34 J. Haffen, op. cit., p. 37. Return to text

35 Thomas de Kent, Le Roman d’Alexandre ou roman de toute chevalerie, éd. B. Foster et I. Short, trad. C. Gaullier-Bougassas et L. Harf-Lancner, Paris, Champion (« Champion Classiques »), 2003, v. 6778-6787. Return to text

36 Biblia sacra juxta vulgatam versionem, Stuttgart, 1969, t. I, Liber Malachim, 10, 1-13 (p. 475-476). Return to text

37 Les Chétifs, éd. G. M. Myers (The Old French Crusade Cycle, vol. 5), Alabama, 1981, v. 1288-1290. Return to text

38 A. Brasseur, Etude linguistique et littéraire de la Chanson des Saisnes de Jehan Bodel, Genève, Droz, 1990, p. 270-271. Return to text

39 A. Brasseur, op. cit., p. 222. B. Guidot, l’éditeur du Siège de Barbastre (Paris, Champion, CFMA, 2000), après avoir rappelé que tous les critiques « s’accordent sur une période qui va du dernier tiers du xiie siècle au premier tiers du siècle suivant », tend pour sa part à « pencher pour une date qui se situerait au début du xiiie siècle » (p. 41). Return to text

40 Jehan Bodel, La Chanson des Saisnes, éd. A. Brasseur, Genève, Droz, 1989 (2 vol.), t. I, v. 2514-2524 (rédaction AR ; cf les v. 2257-2266 de la rédaction LT). Return to text

41 A. Brasseur, op. cit., p. 201. Return to text

42 Jehan Bodel, La Chanson des Saisnes, éd. cit., t. II, p. 769 et 789. Return to text

43 Ibid., t. II, p. 722. Return to text

44 Ibid., t. I, v. 116-118 (rédaction AR ; cf les v. 112-114 de la rédaction LT). Return to text

45 Ibid., t. I, v. 1582-1589 (rédaction AR ; cf les v. 1511-1515 de la rédaction LT). Return to text

46 Ibid., t. I, v. 1592-1593 (rédaction AR ; cf le v. 1518 de la rédaction LT. Dans cette deuxième rédaction, on le voit, le portrait de Sibylle est abrégé ; les notations essentielles n’en sont pas moins conservées). Return to text

47 Comme lorsqu’elle suggère à Guiteclin d’installer sa tente et celles de ses suivantes au bord de la Rune pour attirer les Français qui pourront ainsi, dit-elle, être plus facilement capturés par les Saxons (A. Brasseur, op. cit., p. 178). Return to text

48 Jehan Bodel, La Chanson des Saisnes, éd. cit., t. II, p. 769. Return to text

49 Nous pensons notamment à la reine Sebile du Livre d’Artus, amoureuse folle de Sagremor, qui reprend le personnage de la belle païenne à travers des scènes d’un érotisme assez marqué, ainsi qu’à l’enchanteresse Sebile presque caricaturale qui intervient aux côtés de Morgane dans les Prophéties de Merlin. Voir notre article cité supra, « La Sibylle séductrice… », p. 202-206. Return to text

References

Bibliographical reference

Francine Mora-Lebrun, « Les métamorphoses de la Sibylle au xiiesiècle », Bien Dire et Bien Aprandre, 24 | 2006, 11-24.

Electronic reference

Francine Mora-Lebrun, « Les métamorphoses de la Sibylle au xiiesiècle », Bien Dire et Bien Aprandre [Online], 24 | 2006, Online since 01 mars 2022, connection on 18 mai 2024. URL : http://www.peren-revues.fr/bien-dire-et-bien-aprandre/953

Author

Francine Mora-Lebrun

Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines

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