« Les bruits de ce bal sont arrivés à New York »

Une typologie de la présence du monde anglo-saxon dans l’œuvre de Marguerite Duras

DOI : 10.54563/cahiers-duras.111

Abstracts

L'œuvre de Duras est traversée par la présence polymorphe du monde anglo-saxon, dont cette étude propose une typologie non exhaustive, en insistant sur trois aspects : le rôle du monde anglo-saxon dans la caractérisation des lieux et des personnages et dans la création d'un univers fictionnel ; l'influence de l'art anglo-américain sur l'œuvre de Duras, notamment à travers les jeux d'intertextualité ; et la présence de la langue anglaise, qui inscrit le monde anglo-saxon jusque dans la langue de Duras. Ces éléments participent pleinement de l'étrangeté durassienne, faite de métissage et d'hybridité.

This study proposes a non-exhaustive typology of the polymorphous presence of the Anglo-Saxon world in Duras's works, by focusing on three main aspects: the role of the Anglo-Saxon world in the characterisation of places and characters and creation of a fictional world; the influence of the Anglo-American art on Duras's work, especially through intertextuality; and the presence of the English language, that inscribes the Anglo-Saxon world in Duras' language itself. These elements contribute fully to the strangeness of Duras's work, made of « métissage » and hybridity.

Outline

Text

Le nom de Marguerite Duras n’est pas spontanément associé au monde anglo-saxon, compris comme un ensemble de pays de langue anglaise influencés par la culture britannique du fait de la colonisation1. Pourtant, la présence du monde anglo-saxon (surtout anglo-américain) dans son œuvre est considérable et prend plusieurs formes. On notera d’ailleurs que la présence britannique comprend l’Inde coloniale, représentée dans les romans et films du cycle indien2 de Duras.

Cette présence polymorphe du monde anglo-saxon apporte un éclairage nouveau pour aborder la création durassienne. Il s’agira de s’interroger sur la place qu’occupe le monde anglo-saxon chez Duras et sur ce que cette présence révèle en termes de poétique, d’esthétique, voire de politique et d’éthique.

Cet article propose un parcours dans l’œuvre afin de révéler, sans prétention à l’exhaustivité, la présence diffuse et hétéroclite du monde anglo-saxon chez Duras. Un survol des titres des œuvres de Duras suffit à révéler cette présence, qui se confirme et gagne en importance lorsque l’on se prête à une étude des personnages et des lieux. S’intéresser à la présence du monde anglo-saxon chez Duras, c’est aussi prendre la mesure du dialogue de l’auteure et de la cinéaste avec l’art anglophone, principalement la littérature et le cinéma américains qui ont informé sa création artistique. Enfin, en étudiant la présence de l’anglais dans certains de ses écrits, nous verrons que le travail de Duras sur la langue anglaise inscrit son œuvre du côté d’un « métissage linguistique »3 et culturel. En ce sens, la présence du monde anglo-saxon dans l’œuvre de Duras participe pleinement de l’élaboration d’une œuvre métisse et hybride.

Les titres

Les titres de certains textes de Duras sont révélateurs de la présence diffuse et hétéroclite du monde anglo-saxon dans son œuvre. Parmi ces titres, on peut distinguer deux catégories : les titres en français qui comportent un référent anglo-saxon (le plus souvent un personnage anglophone) et les titres en anglais.

L’Amante anglaise et « La mort du jeune aviateur anglais » font tous deux explicitement référence à un personnage anglais (qu’il soit inspiré d’une personne réelle ou non). « La mort du jeune aviateur anglais », deuxième texte du recueil Écrire paru en 1993, est un hommage à celui dont le nom gravé sur la tombe indique qu’il s’appelait W. J. Cliffe. Pour autant, l’hommage dépasse le contexte historique (le Débarquement) et géographique (le cadre normand où se trouve la tombe) précis de la mort de l’aviateur car Duras fait un parallèle entre ce jeune inconnu mort à la fin de la Seconde Guerre mondiale et le petit frère jeté dans une fosse commune pendant la guerre du Japon, ce qui permet la mise en regard de deux réalités géographiques et historiques très éloignées et en même temps si proches.

En 1967, Duras reprend sous forme de roman un fait divers de 1949 qui avait inspiré la pièce de 1960 intitulée Les Viaducs de la Seine-et-Oise. Le roman ainsi que son adaptation au théâtre l’année suivante s’intitulent désormais L’Amante anglaise : la reprise de ce texte s’accompagne d’une anglicisation du titre (le toponyme français fait place à un référent anglais) qui en augmente le caractère énigmatique. En effet, si le titre originel renvoyait à un lieu clé de l’intrigue, l’endroit d’où les restes du corps de Marie-Thérèse ont été dispersés, le nouveau titre semble incarner le mystère qui demeure malgré les aveux de Claire, mystère que les variantes homophoniques du titre au sein de l’œuvre (« la menthe anglaise », « l’amante en glaise »4) font résonner. En ce sens, le nouveau titre participe pleinement de la démarche de Duras dans cette œuvre, qui vise à rendre le texte opaque, instable du point de vue du genre mais aussi du sens.

Certains livres de Duras se caractérisent par la présence de la langue anglaise dans le titre : c’est le cas d’Outside, des pièces Yes, peut-être et Savannah Bay et du Navire Night.

Le titre du deuxième recueil de textes journalistiques de Duras, paru en 1993, Le Monde extérieur : Outside 2, semble reprendre quasiment à l’identique le titre du premier recueil journalistique, Outside, papiers d’un jour, publié en 1980 ; le titre français serait une simple traduction du titre anglais et les deux seraient équivalents. Mais dans sa notice consacrée à Outside dans le Dictionnaire Marguerite Duras, Anaïs Frantz explique qu’il ne faut pas négliger « le choix évident et délibéré d’un vocable anglais »5 et la notion de marginalité (outsider) sous-jacente au titre de 1980 – ce qui montre que le choix de la langue anglaise apporte ici un surcroît de sens. Dans l’avant-propos, Duras reprend ce mot anglais du titre6, qui surprend dans le texte en français et pousse le lecteur à s’y arrêter.

Les titres de deux œuvres interpellent par le mélange des langues anglaise et française : Le Navire Night et Yes, peut-être. Dans le récit et le film de 1979, l’hybridité linguistique du titre et l’effet d’étrangeté qu’elle produit semblent annoncer et refléter l’étrangeté d’une œuvre tout aussi hybride et inassimilable. Yes, peut-être, pièce créée en 1968, fait résonner l’adverbe anglais du titre, abondamment repris par les locutrices de la pièce. Il ne faut pas y voir un signe d’enthousiasme et d’engouement pour le monde anglophone mais plutôt une marque d’ironie mordante car la pièce est une véritable charge contre la guerre du Vietnam et la politique états-unienne, qui a valu à l’auteure des reproches face à son engagement et à son anti-américanisme trop marqués. L’hybridité linguistique s’accompagne d’une ambivalence générique dans la facture même des œuvres mais, aussi d’une ambivalence axiologique dans le regard que Duras porte sur le monde anglo-saxon et plus précisément sur la politique états-unienne.

Le titre anglais de la pièce Savannah Bay, écrite en 1982 et créée en 1983, renvoie à un toponyme mais aussi au prénom d’un personnage féminin, Savannah. Bernard Alazet parle d’un « nom improbable, associé comme toujours chez Duras à un lieu, Savannah Bay, “ville du Siam” »7. Ce nom à consonance anglophone laisse deviner la contamination du monde indochinois par le monde anglo-saxon.

Enfin, le titre India Song (« texte théâtre film » de 1973 et film de 1975) fait doublement référence au monde anglo-saxon, à travers l’anglais du titre et le toponyme qui convoque l’histoire coloniale du Royaume-Uni. Ce titre met en valeur la coprésence du monde asiatique et du monde anglo-saxon qui renvoie à la réalité coloniale, réinvestie et travestie dans la pièce par l’imaginaire durassien.

Les titres suffisent à révéler la présence du monde anglo-saxon dans les œuvres. Ils indiquent souvent la présence de personnages et de lieux anglo-saxons.

Les personnages

De nombreux personnages anglophones peuplent l’œuvre de Duras.

L’origine anglo-saxonne des personnages relève parfois du fantasme, comme c’est le cas pour Anna, l’héroïne du Marin de Gibraltar présentée comme une Américaine.

L’œuvre de Duras se caractérise surtout par la présence de personnages d’Anglais, que l’on repère à la consonance anglophone de leurs patronymes. La nombreuse population anglaise aux Indes, représentée dans Le Vice-consul (1966),renvoie à la réalité coloniale. Parmi les colons britanniques, on compte les amants anglais d’Anne-Marie Stretter. Quatre personnages de premier plan sont Anglais : Peter Morgan, Charles Rossett, George Crawn et Michael Richard, alias Michael Richardson dans Le Ravissement de Lol V. Stein (1964). Les personnages anglais composent le personnel romanesque aux côtés des personnages indiens ou indochinois, comme la mendiante et la foule indifférenciée des lépreux, et des autres Européens (Français de l’ambassade de France, Anne-Marie Stretter d’origine vénitienne), le tout constituant un ensemble éclectique.

Un autre roman peuplé de personnages anglais est Emily L. (1987), qui met en scène Emily L. et le Captain, mais aussi le gardien de l’île de Wight. Duras fait du personnage éponyme, inspiré par la poétesse américaine Emily Dickinson, une Anglaise, comme pour la rapprocher de l’univers anglo-normand de l’auteure qui écrit le livre à Trouville-sur-Mer, en Normandie.

Ces personnages anglophones évoluent dans des univers plus ou moins cohérents dont les caractéristiques évoquent le monde anglo-saxon.

Les lieux

Les lieux anglo-saxons sont de deux types : les lieux explicitement constitués comme anglo-saxons et ceux dont la consonance anglophone de leur toponyme ou les caractéristiques évoquent plus ou moins le monde anglo-saxon.

Dans la première catégorie se trouvent les lieux anglais et l’Inde coloniale.

Emily L. se caractérise par un personnel romanesque en grande partie anglais qui évolue dans un cadre spatial anglais. D’abord imprécise, la géographie des lieux anglais de l’intrigue, est finalement dotée de contours précis, comme celle des lieux français : les noms de lieux se succèdent (île de Wight, maison de Southampton, Newport) et permettent de dessiner une région géographique cohérente, ce qui est loin d’être toujours le cas chez Duras.

L’Angleterre est aussi présente de manière indirecte à travers l’Inde coloniale, principalement dans Le Vice-consul,qui se déroule principalement à Calcutta, bien qu’il s’agisse d’une Inde de fantaisie. On note le pluriel colonial à « Indes » qui semble inclure l’Indochine (traversée par la mendiante) et brouille les frontières entre l’Inde britannique et l’Indochine : le début du roman suit la marche de la mendiante à travers l’Indochine jusqu’à l’univers anglo-saxon de la colonie où le lecteur découvre l’ambassade de France. L’Inde coloniale est le cadre d’un ensemble d’œuvres regroupées sous le terme de « cycle indien ». Mais certaines s’éloignent de cet univers colonial.

Le cadre spatial du premier roman du cycle, Le Ravissement de Lol V. Stein, échappe à toute tentative de localisation géographique précise. Pour autant, certains éléments (à commencer par les toponymes U. Bridge et S. Tahla/Thala) poussent à situer les lieux dans un univers anglo-saxon, mais qui diffère des Indes britanniques du Vice-Consul. C’est ainsi que Madeleine Borgomano montre comment S. Tahla évoque la Floride, tout en rappelant que Duras, elle, situe rétrospectivement la ville en « “Angleterre” » ou « sur les plages de l’Atlantique »8. La première version, théâtrale, de l’œuvre, situait explicitement l’action dans une « petite ville anglaise »9.

Plusieurs éléments placent Le Ravissement de Lol V. Stein sous le signe de la culture anglo-saxonne.

Tout d’abord la genèse du roman, qui voit le jour après deux essais non aboutis. « La première tentative est celle d’une pièce de théâtre, commandée par Peter Brook »10, comme le rappelle Florence de Chalonge. Puis « Duras entreprend sur le même sujet, à la demande du producteur Barney Rosset, l’écriture d’un scénario pour la télévision américaine »11. Le projet est donc né de la collaboration infructueuse avec des personnalités anglo-saxonnes. Enfin, la dédicace du roman, « Pour Sonia », renvoie à l’Anglaise Sonia Orwell, la femme de l’écrivain. Le roman qui inaugure le cycle indien entretient donc de nombreux liens avec le monde anglo-saxon, à l’exception paradoxale de l’Inde coloniale, à laquelle le roman ne fait que de rares allusions.

La présence du monde anglo-saxon se devine à travers un survol des titres et se révèle structurante en ce qu’elle contribue à caractériser le cadre spatial et les personnages de nombreuses œuvres. Mais le monde anglo-saxon est aussi présent à travers les rapports qu’a entretenus Duras avec l’art anglo-américain et plus spécifiquement le cinéma et la littérature américaine.

Le cinéma américain

L’entrée en cinéma de Duras a marqué le début d’un dialogue ininterrompu entre la jeune cinéaste et le cinéma américain ; pour autant, le regard que porte Duras sur ce cinéma est ambivalent, comme on le voit à la fois à travers ses écrits sur le cinéma et à travers ses collaborations infructueuses avec des cinéastes américains.

Dans Les Yeux verts (rééd. 1987), un recueil qui rassemble plusieurs écrits de Duras sur le cinéma, initialement parus dans les Cahiers du cinéma (nos 312-313, juin 1980), le texte « Woody Allen Chaplin » traduit l’ambivalence de Duras, puisqu’elle y célèbre un cinéaste américain au détriment d’un autre : elle oppose à l’« humour très régional »12 d’Allen l’humour universel de Chaplin. Elle explique son admiration pour Chaplin en faisant de lui une figure de l’errance qui incarne les migrations du peuple juif, un artiste errant qui habite l’espace comme nul autre13. La fascination de Duras pour Chaplin s’exprime dans un autre texte du recueil qui lui est dédié, « Chaplin, oui »14.

Dans le même recueil, un texte est consacré à La Nuit du chasseur (1955) de Charles Laughton dont Duras fait une lecture personnelle, qui s’éloigne de la critique cinématographique15 et se rapproche même à certains moments d’une réécriture, dans laquelle Duras décrit des enfants qui « descendent le Nil, le Mékong »16. Elle mêle ainsi aux questions de cinéma des thèmes qui lui sont chers. Dans les deux textes, le regard qu’elle porte sur le cinéma américain est révélateur de sa vision de l’art.

Duras n’a pas seulement écrit sur le cinéma américain, elle a aussi travaillé avec des cinéastes anglo-américains. Elle a ainsi co-écrit avec Gérard Jarlot le scénario du film Moderato cantabile, réalisé par l’homme de théâtre et cinéaste anglais Peter Brook en 1960, mais elle juge le film avec sévérité.

Ses échanges avec les cinéastes américains sont restés le plus souvent à l’état de projet, ce qui s’explique par son rejet du cinéma commercial, avec lequel la cinéaste déclare être en rupture dans les lettres qu’elle a adressées à des producteurs, l’un canadien et l’autre américain, qui sont retranscrites dans Le Monde extérieur (1993). Elle ne participe donc pas aux adaptations de ses films (Le Marin de Gibraltar de Tony Richardson ou The Lover [L’Amant] tourné en anglais par Jean-Jacques Annaud). On compte aussi plusieurs projets inaboutis : l’écrivaine américaine Anaïs Nin demande à Duras d’écrire le scénario de l’adaptation de son roman Une espionne dans la maison de l’amour (1954), mais Duras propose en fait une réécriture de son roman qui déçoit Nin ; Joseph Losey veut adapter Le Ravissement de Lol V. Stein en 1965, mais le projet est abandonné en 196717.

Duras porte donc un regard ambigu sur le cinéma américain, dont elle prend considérablement ses distances dans ses propres films.

La littérature anglo-américaine

Le rapport de Duras à la littérature américaine n’est pas frappé de cette ambivalence, mais s’apparente au contraire à un hommage continu et sans réserve. Duras a d’ailleurs revendiqué son goût pour la littérature américaine dans de nombreux entretiens et (para)textes. La littérature américaine a exercé une influence remarquable sur la production durassienne18 qui a donné lieu à de nombreuses études. L’intérêt de Duras pour la littérature anglo-américaine se lit à deux niveaux, outre les lectures qu’elle mentionne dans certains textes19 : à travers ses adaptations théâtrales d’œuvres anglo-américaines et les nombreuses références à cette littérature qui émaillent ses œuvres.

Duras a porté au théâtre plusieurs textes d’auteurs anglo-saxons, à commencer par deux nouvelles de Henry James, un auteur auquel Duras vouait une grande admiration. Elle a ainsi adapté Les Papiers d’Aspern en 1961 et La Bête dans la Jungle en 1962, nouvelles dans lesquelles, comme le montre Bernard Alazet, « on retrouve les situations romanesques que privilégie Duras : des personnages qui, par le dialogue, tentent de poser des mots sur ce qui leur échappe, selon le modèle jamesien de “l’image dans le tapis”, mais échouent à trouver le mot juste »20. Selon B. Alazet, si, à première vue, l’adaptation des Papiers d’Aspern consistait surtout en une traduction en collaboration avec Robert Antelme, les modifications, les ajours et coupures témoignent d’une volonté de réécriture.

Duras a aussi adapté et traduit Home, une pièce de 1970 du dramaturge anglais David Storey, adaptation qui a donné lieu à une première représentation en 1972. La pièce se déroule dans le climat clos et étouffant d’une maison de santé, ce qui n’est pas sans rappeler les propos de Duras concernant sa rencontre (supposée) avec celle qui a inspiré le personnage de Lol V. Stein.

Duras a également traduit The Miracle Worker, la pièce de William Gibson, elle-même inspirée des mémoires d’Helen Keller. Il existe deux versions de l’adaptation, une de 1961 et une 1963, mises en scène par François Maistre. Duras a traduit et adapté des œuvres anglo-saxonnes, ce qui révèle sa très bonne maîtrise de la langue anglaise et laisse deviner son goût pour la littérature anglo-américaine. Elle a aussi collaboré avec Peter Brook, metteur en scène, acteur, réalisateur et théoricien du théâtre, notamment autour des projets initiaux du Ravissement de Lol V. Stein. On peut imaginer que la théorie de l’espace vide de Brook a trouvé une résonance chez l’auteure dont l’œuvre met souvent en scène un dépeuplement progressif de l’espace comme de l’intrigue.

L’étude de l’intertextualité dans les écrits de Duras montre l’influence de la littérature américaine sur son œuvre dès le début de sa carrière, comme sur celle de nombreux auteurs français des années 1950. Dans l’Europe d’après-guerre, cette littérature représente à un nouvel « âge du roman » inspirant, rappelle Yan Hamel21. Encore une fois, les titres des textes de Duras révèle la présence du monde anglo-saxon et ses enjeux. Johan Faerber relève une première catégorie de titres qui concerne l’entrée en écriture, des Impudents (1943) jusqu’au Square (1955) et montre que ces titres témoignent d’une « manière presque américaine ». Il ajoute que des titres comme Le Marin de Gibraltar ou Les Petits Chevaux de Tarquinia, en apparence thématiques, témoignent de cette manière « presque américaine où, sous l’influence des lectures d’Ernest Hemingway, Duras érige en titre l’image la plus puissante du récit. Mais à la différence d’Hemingway, chacune de ces images est vide. Les titres sont l’histoire non de cette image mais de l’absence de cette image. Le marin n’y est pas, pas plus que le barrage. En ce sens, chacun de ces titres fonctionne comme une métaphore trouée »22. Dès les premières œuvres, on constate que Duras s’inspire de la manière américaine tout en l’adaptant à sa propre poétique du vide.

Duras fait une lecture assidue d’Hemingway, dont elle retient en particulier « la perspective behavioriste, qu’il emploie dans ses narrations dès les années 1920 »23 et son refus de l’introspection. Ce procédé narratif caractérise surtout Le Marin de Gibraltar (1952), notamment à travers « les abondantes conversations sans finalité apparente qui ponctuent le voyage des personnages »24, conversations qu’on retrouve dans Les Petits Chevaux de Tarquinia (1953), « roman en grande partie porté par les échanges d’intellectuels désœuvrés, où affleurent des conflits jamais approfondis »25. Le roman de 1952 renvoie par ailleurs implicitement aux textes d’Hemingway à plusieurs reprises26, et met en scène un personnage qui veut écrire un « roman américain »27, ce qui en fait une sorte de double de l’auteure. Mais comme le souligne Cécile Hanania, « cette manière américaine est aussi celle de la narration durassienne »28. On comprend l’attrait de Duras pour la technique behavioriste qui permet un détachement et une distance vis-à-vis de l’intrigue et des personnages qu’elle n’a cessé de rechercher tout au long de son œuvre.

La lecture de la littérature américaine s’est révélée déterminante, parce qu’elle a permis à Duras de s’approprier certaines de ses techniques et d’en revisiter certains thèmes. Duras a reconnu l’influence de la littérature américaine qu’elle cantonne à ses premières œuvres29 ; Emily L. montre que la présence de la littérature américaine demeure, mais d’une autre manière. Un parcours semble se dessiner, depuis les œuvres de jeunesse marquées par l’influence de la littérature américaine à des œuvres qui rendent hommage à la littérature américaine. Emily L. est peut-être le livre de Duras où l’intertextualité, sous la forme de références à la littérature américaine, occupe la place la plus importante.

Le roman est saturé de références explicites et implicites à des auteurs anglo-saxons. Parmi les références explicites, on compte celles à la poétesse américaine Emily Dickinson et à Henry James. Bien qu’Emily Dickinson ne soit jamais nommée, la véritable auteure du poème d’Emily L. est aisément reconnaissable. De nombreux passages du poème, traduits du texte original, « A Certain Slant of Light », reviennent dans le roman. La présence de ce poème de l’auteure américaine, transformée en un personnage anglais, a donné lieu à une véritable opération intertextuelle30. Emily L. présente un cas particulier dans la production durassienne au sens où la matière du roman naît en partie du texte d’un autre auteur, en l’occurrence du poème d’une écrivaine américaine. Cette présence massive d’un autre texte ne trouve pas d’équivalent dans la production durassienne. Par un jeu de traduction, de glose et de réécriture, le poème se déploie jusqu’à occuper l’espace du roman.

Dans le roman se trouve la seule référence explicite à Henry James dans la production durassienne31, comme le remarquent A. Saemmer et S. Patrice32.

On compte aussi plusieurs références implicites à Henry James, à Ernest Hemingway et à Tennesse Williams. La référence à Henry James, et plus particulièrement aux deux nouvelles adaptées par Duras, est sensible notamment à travers le thème du manuscrit brûlé et de l’amour impossible. A. Saemmer et S. Patrice relèvent par ailleurs une proximité stylistique avec l’écriture de James dans la lettre qu’écrit Emily L. au gardien33. Le lien entre Emily L. et l’œuvre de Henry James, notamment sa nouvelle Les Papiers d’Aspern serait donc à la fois thématique et stylistique. Carol Murphy, elle, lit Emily L. comme une réécriture partielle de La Bête dans la jungle tandis qu’Edda Melon fait du dernier roman inachevé d’Hemingway, Le Jardin d’Éden (1986), un hypotexte d’Emily L.34. La référence à Hemingway est appuyée par les propos de Duras qui parle d’un « couple à la Hemingway » à propos du Captain et d’Emily L.35. On relève enfin une référence implicite à La Nuit de l’iguane de Tennessee Williams, adaptée au cinéma par John Huston, à travers le surnom d’Emily L.36 et la condition du poète. Il est en effet significatif que dans la pièce de Tennessee Williams, l’iguane attaché soit comparé au poète qui ne parvient pas à terminer son poème.

La présence du monde anglo-saxon dans l’œuvre de Duras passe massivement par ces références à la littérature américaine qui sont tissées au texte. L’intertexte américain qui peut apporter des éléments de dépaysement, s’accompagne souvent d’un dépaysement de la langue à travers la présence de l’anglais dans le texte.

L’anglais dans le texte

L’influence de la littérature et de la culture anglo-saxonne va jusqu’à l’adoption de la langue anglaise et de sa syntaxe dans certains textes, ce qui constitue un indice du métissage linguistique et culturel qui se joue dans la création durassienne.

Duras se plaît souvent à disséminer des mots anglais dans ses textes en français, que l’on pense, entre autres exemples et en plus des titres déjà étudiés, au titre en anglais d’un article du Monde extérieur (« Mothers ») ou à des expressions récurrentes (les « brothers and sisters » dans La Pluie d’été). Mais certaines œuvres se caractérisent par un métissage de la langue, non pas seulement du français avec le vietnamien comme l’a montré C. Bouthors-Paillart, mais aussi avec l’anglais.

Ce phénomène est très frappant dans Emily L. Le poème d’Emily Dickinson est au cœur du roman et la présence de l’anglais dans le texte semble découler de la langue d’origine du poème. Emily L., bien qu’Anglaise et non Américaine comme la véritable auteure du poème, s’exprime aussi en anglais, ainsi que le Captain, dont la dénomination même vise à le définir avant tout par sa fonction et son origine, ou en tout cas par la langue qu’il parle. La narratrice et son ami surprennent la conversation d’Emily et du Captain au bar de la Marine et le texte français est troué de mots et même de phrases en anglais37, un procédé auquel Duras tenait38. Plus encore, la syntaxe française semble se calquer sur l’anglaise, ce qui donne lieu à des tournures étranges (« Et lui, le Captain, il ne pensait jamais que telle ou telle chose était le cas d’en vouloir à quiconque, jamais »39, tournure qui rappelle la structure anglaise « be worth + ing ») et à un usage inhabituel des prépositions (« Cette fois-là, le Captain avait dit au père son inquiétude et sa souffrance à partir des poésies »40, locution prépositionnelle qui semble calquée sur la préposition anglaise « from »).

Sandrine Vaudrey-Luigi relève le même phénomène dans d’autres œuvres de la même période. Elle souligne ainsi que dans Les Yeux bleus cheveux noirs (1986) et L’Amant de la Chine du Nord (1991), Duras fait un usage inhabituel des infinitifs qui rappelle la syntaxe anglaise : « les infinitifs sont employés étrangement et rappellent parfois des constructions anglaises, que ce soit avec le verbe faire (« Un désir très fort, sans mémoire, fait les amants se prendre encore », ACN, 222) ou avec le schéma pour + pronom + verbe à l’infinitif qui permet d’éviter toute forme de subordination (« Elle écarte les jambes pour lui se placer dans leur creux », YBCN, 56) »41.

La présence du monde anglo-saxon est ainsi visible jusque dans la langue elle-même et devient un trait stylistique de l’écriture de Duras. La langue anglaise vient imposer ses constructions au français, le dotant d’un caractère d’étrangeté qui définit une œuvre marquée par l’hybridité et le métissage linguistique et culturel.

Au terme de ce parcours rapide pour dégager les formes que revêt la présence du monde anglo-saxon chez Duras, on peut conclure que cette présence ne se limite pas aux éléments d’un décor ou à la caractérisation de certains personnages et lieux, mais qu’elle participe d’une œuvre métisse et hybride, au carrefour de plusieurs mondes.

Cette présence du monde anglo-saxon dans les œuvres apporte un effet d’étrangeté que recherche Duras car cette étrangeté est au cœur d’une poétique de l’hybridité et du métissage.

Nous nous en sommes tenus au monde anglo-saxon dans un sens strict, mais cette présence serait encore plus écrasante si l’on prenait en compte le monde anglo-normand présent notamment dans le cycle atlantique. C’est un élargissement auquel invite Emily L., qui propose un dialogue entre la narratrice et le personnage éponyme, l’une sur la côte normande, l’autre sur la côte anglaise ; les deux paraissant se refléter l’une l’autre de part et d’autre de ce miroir déformant qu’est la Manche.

Une étude de la réception de Duras dans le monde anglophone montrerait à n’en pas douter que l’intérêt de l’auteure et cinéaste pour le monde anglo-saxon était réciproque ; c’est ce que laissent penser non seulement les adaptations cinématographiques de ses films mais aussi les propos de l’auteure elle-même sur la réception de son œuvre littéraire aux États-Unis42. C’est ainsi qu’elle écrit, à propos du Ravissement de Lol V. Stein : « Maintenant, ce bal, les bruits de ce bal sont arrivés à New York. Maintenant Lol V. Stein est en tête des personnages de mes livres. C’est curieux quand même. C’est elle qui “se vend” le mieux. Ma petite folle »43.

Notes

1 Marguerite Duras, « Le bloc noir », La Vie matérielle, Paris, POL, 1987, p. 34. Return to text

2 Cycle composé de quatre livres, Le Ravissement de Lol V. Stein (1964), Le Vice-consul (1966), L’Amour (1971), India Song (1973) et de trois films, La Femme du Gange, India Song et Son nom de Venise dans Calcutta désert, diffusés en 1974, 1975 et 1976 ; La Femme du Gange est publiée en 1973 avec des commentaires qui enrichissent le scénario. Return to text

3 Catherine Bouthors-Paillart, Duras la métisse : métissage fantasmatique et linguistique dans l’œuvre de Marguerite Duras, Genève, Droz, « Histoire des idées et critique littéraire », 2002 (nous reprenons les analyses développées par C. Bouthors-Paillart en les appliquant non plus au vietnamien mais à l’anglais). Return to text

4 Marguerite Duras, L’Amante anglaise, Œuvres complètes (désormais abrégé en OC suivi de la numérotation du tome et de la date de parution), éd. par Gilles Philippe, t. II, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2011, p. 707, p. 726. Return to text

5 Anaïs Frantz, « Outside », Dictionnaire Marguerite Duras, dir. par Bernard Alazet & Christiane Blot-Labarrère, Paris, Champion, « Dictionnaires & références », 2020, p. 454. Return to text

6 Marguerite Duras, « De temps en temps j’écrivais pour le dehors, quand le dehors me submergeait, quand il y avait des choses qui me rendaient folle, outside, dans la rue » (Outside : papiers d’un jour [1981], Paris, POL, 1984, p. 7). Return to text

7 Bernard Alazet, « Savannah Bay », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 575. Return to text

8 Madeleine Borgomano, Le Ravissement de Lol V. Stein de Marguerite Duras, Paris, Gallimard, « Foliothèque », 1997, p. 63. Return to text

9 Marguerite Duras, « Projet théâtral pour Peter Brook [entre 1960 et 1962] », « Autour du Ravissement de Lol V. Stein », OC II, p. 389. Return to text

10 Florence de Chalonge, « Le Ravissement de Lol V. Stein », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 525. Return to text

11 Loc. cit. Return to text

12 « Un humour très régional, méticuleusement mis au point, beaucoup moins vaste – immensément moins – que celui de Chaplin » (Marguerite Duras, « Woody Allen Chaplin », Les Yeux verts, OC III, p. 669). Return to text

13 « L’errance de Chaplin est sans limites géographiques. […] Chaplin traîne avec lui un continent juif européen. C’est-à-dire que, partout où il est, c’est un étranger » (ibid., p. 669-670). Return to text

14 Ibid., p. 693. Return to text

15 À part à quelques moments, où elle résume l’intrigue ou analyse les personnages : « Je remarque que tous les gens de La Nuit du chasseur, les enfants, les parents, l’assassin, la vieille dame sont des prototypes parfaits du bestiaire cinématographique américain » (« La nuit du chasseur », Les Yeux verts, OC III, p. 711). Return to text

16 Loc. cit. Return to text

17 Voir André Z. Labarrère, « Scénarios inaboutis », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 579-583. Return to text

18 Quoi qu’elle ait pu dire de son écriture « sans référence aucune » : voir à ce sujet l’article « Intertextualité » de Maud Fourton (Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 313-316). Return to text

19 Lecture de Virginia Woolf que Duras mentionne par exemple dans « La maison » (Marguerite Duras, La Vie matérielle, op. cit., p. 60). Return to text

20 Bernard Alazet, « James, Henry (1843-1914) », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 318. Return to text

21 Yan Hamel, « Le romancier américain : de Paul Morand à Roger Nimier », Fabula : colloques, « Les écrivains théoriciens de la littérature (1920-1945) », [en ligne], disponible sur URL : http://www.fabula.org/colloques/document1837.php, consulté le 30 nov. 2020. Return to text

22 Johan Faerber, « Titres », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 627. Return to text

23 « Ce langage romanesque objectif bannit toute introspection pour ne rapporter que ce qui est observable, comportements et dialogues, laissant ainsi dans l’ombre les motivations profondes des personnages » (Cécile Hanania, « Hemingway, Ernest », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 281, à propos de la technique behavioriste). Return to text

24 Loc. cit. Return to text

25 Loc. cit. Return to text

26 « La description de l’Afrique est mâtinée d’allusions aux récits de l’auteur américain, “vertes savanes de l’Ouellé” (MG, 349), et autres “pentes vierges du Kilimandjaro” (MG, 408), rappelant Les Vertes Collines d’Afrique (Green Hills of Africa, 1935) et Les Neiges du Kilimandjaro (The Snows of Kilimandjaro, 1936) » (Cécile Hanania, « Le Marin de Gibraltar », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 361 [les références au Marin de Gibraltar sont ici à rapporter à l’éd. Folio de 1977]). Return to text

27 Marguerite Duras, Le Marin de Gibraltar, Paris, Gallimard, 1952, p. 204. Return to text

28 Cécile Hanania, « Hemingway, Ernest », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 281. Return to text

29 « Les premiers romans de Marguerite Duras ont été abondamment rapprochés d’une littérature américaine alors en vogue, dont elle reconnaît a posteriori l’attrait : “Le roman américain a exercé sur moi une grande influence qu’on retrouve dans la première partie de mes œuvres” (Paris-Théâtre, [no 198, 1963, [p.] 35]) [proclame Duras] » (loc. cit.). Return to text

30 « Dans une célèbre interview [Le Magazine littéraire, no 278, juin 1990] Marguerite Duras explique à Henri Godard qu’il avait fallu, pour mettre en mouvement l’histoire d’Emily L., “opérer” le livre et insérer l’“intertexte” poétique d’Emily Dickinson » (Alexandra Saemmer, « Traces de lecture, réécritures, adaptations », in Les Lectures de Marguerite Duras, dir. par Alexandra Saemmer et Stéphane Patrice, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2004, p. 7). Return to text

31 Marguerite Duras, Emily L., Paris, Minuit, 1987, p. 138 : « – La connaissance de l’histoire, vous la posséderez comme les héros de Henry James, quand elle sera terminée ». Return to text

32 « Il n’est pas indifférent que cette allusion unique se trouve dans Emily L., texte que Duras déclarait aimer tout particulièrement. Ce roman, construit sur une série de réduplications en miroir, se présente en outre comme le centre d’une toile d’araignée ou, si l’on préfère, d’un réseau intratextuel où presque toute l’œuvre durassienne se trouve prise et reprise dans une sorte de vertige de répétition » (Madeleine Borgomano, « Henry James chez Duras ou l’image dans le tapis », in Les Lectures de Marguerite Duras, op. cit., p. 87). Return to text

33 « Dans cette lettre, Emily s’exprime en terme très jamesiens : “Je voulais vous dire […] qu’il fallait toujours garder en soi la place d’une attente, on ne sait jamais, de l’attente d’un amour, d’un amour sans encore personne peut-être” » (ibid., p. 91). Return to text

34 Voir Carol Murphy, « Spectres de Duras : affect, écriture, lecture en mouvement », in Marguerite Duras, dir. par Bernard Alazet & Christiane Blot-Labarrère, Paris, L’Herne, « Cahiers de l’Herne », no 86, 2005, p. 122-123 ; Edda Melon, « La biblioteca di Marguerite Duras », Duras mon amour : saggi italiani su Marguerite Duras, dir. par Edda Melon et Ermanno Pea, t. 2, Turin, Lindau, 2001, p. 219-230. Return to text

35 « Je parlais de Hemingway, parce que c’était un couple sorti de Hemingway, peut-être d’En avoir ou pas ou de Le Soleil se lève aussi » (Marguerite Duras, « Quillebeuf : extrait d’un entretien avec Jérôme Beaujour [18 sept. 1986] », « Autour d’Emily L. », OC IV, 2014, p. 469). Return to text

36 « Ainsi, aux jeux intertextuels entre les deux Emily, James Williams superpose une relation avec le film La Nuit de l’iguane, de John Huston, un cinéaste très admiré par Duras (on se souvient qu’Emily L. est surnommée, de façon insistante, “la petite iguane”) » (Madeleine Borgomano, « Henry James chez Duras ou l’image dans le tapis », art. cit., p. 87). Return to text

37 « Il avait dit que c’était la marée qui changeait. The turn of the tide… et que la mer devait être merveilleuse comme elle l’était certains jours d’été. The sea must be marvellously calm. As it is sometimes in summer » (Marguerite Duras, Emily L., op. cit., p. 18). Return to text

38 « Cet anglais que j’introduis, voyez, cet anglais parlé, comme ça un peu à la sauvette – je l’introduis un peu à la sauvette, ce sont des petites bribes –, j’y tiens énormément. Il y a un critique qui a dit qu’il adorait ça, je ne sais pas comment il a dit, cet anglais “perlé” qui de temps en temps est entendu dans le silence des bistrots » (Marguerite Duras, « Entretiens avec Luce Perrot [janv.-mars 1988] », « Autour d’Emily L. », OC IV, p. 478). Return to text

39 Marguerite Duras, Emily L., op. cit., p. 23 (nous soulignons). Return to text

40 Ibid., p. 79 (nous soulignons). Return to text

41 Sandrine Vaudrey-Luigi, « Style », Dictionnaire Marguerite Duras, op. cit., p. 603 (le renvoi à L’Amant de la Chine du Nord se rapporte à l’édition Folio de 2014 ; celui aux Yeux bleus cheveux noirs à l’édition « Double » de Minuit [2014]). Return to text

42 « Les Anglo-saxons semblent s’être intéressés très tôt à l’écriture durassienne, prise comme sujet d’étude de nombreux universitaires américains ou britanniques. […] Duras avait coutume de dire qu’elle tirait ses revenus de ses ventes et traductions à l’étranger tandis que le public français boudait ses œuvres » (Yves Clavaron, Inde et Indochine : E. M. Forster et M. Duras au miroir de l’Asie, Paris, Champion, « Bibliothèque de littérature générale et comparée », 2001, p. 10). Return to text

43 Marguerite Duras, La Vie matérielle, op. cit., p. 34. Return to text

References

Electronic reference

Anne Rouffanche, « “Les bruits de ce bal sont arrivés à New York” : Une typologie de la présence du monde anglo-saxon dans l’œuvre de Marguerite Duras », Cahiers Marguerite Duras, [online], 1 – 2021, Online since 01 janvier 2021, connection on 19 septembre 2024. URL : http://www.peren-revues.fr/cahiersmargueriteduras/111

Author

Anne Rouffanche

Université de Lille
ULR 1061 – ALITHILA
(Analyses littéraires et Histoire de la langue)
F-59000 Lille (France)
anne.rouffanche@hotmail.fr