Baleine blanche et carré blanc : puissances destituantes

DOI : 10.54563/revue-k.1316

Résumé

This article considers Kazimir Malevich's Suprematist Composition: White on White, painted in 1918 (Moma, New-York), in relation to Herman Melville's novel Moby-Dick, and more specifically to the white whale that constitutes its focal point. The white square and the white whale are destituting entities, one of painting, the other of literature, by their whiteness and materiality. But the destitution that they generate is a first step to access a higher dimension.

Plan

Texte

J’ai troué l’abat-jour bleu des limitations colorées, je suis sorti dans le blanc, voguez à ma suite, camarades aviateurs, dans l’abîme, j’ai établi les sémaphores du Suprématisme. […] Voguez ! L’abîme libre blanc, l’infini sont devant vous.
Kasimir Malevitch

En 1919, lorsque Malevitch écrit ces mots dans le catalogue de l’exposition « Création non-figurative et suprématisme », il se présente certes en aviateur, mais également en capitaine de vaisseau, appelant ses camarades à voguer non pas à la rencontre de la grande bleue mais de l’abîme blanc. Un capitaine de vaisseau à la recherche de l’abîme blanc… La métaphore maritime et la référence à la couleur blanche ne peuvent que faire penser à l’un des personnages principaux d’un roman majeur dans l’histoire de la littérature : le capitaine Achab dans le Moby-Dick d’Herman Melville.

L’auteur américain entame la rédaction de son livre en 1850 et le publie à Londres en octobre 1851 sous le titre The Whale. Déçu par une édition incomplète et par un titre qu’il n’avait pas choisi, Melville publie à nouveau l’ouvrage aux États-Unis un mois plus tard, sous le titre Moby-Dick or The Whale (Moby-Dick ou le Cachalot). L’ouvrage raconte l’histoire d’Ismaël, décidé à partir à la chasse à la baleine et embarquant au début du récit sur le Pequod, un baleinier commandé par le capitaine Achab. Sous son commandement, le baleinier se révèle rapidement ne plus être un navire de commerce mais le destrier du capitaine lancé à la poursuite de Moby Dick, cachalot blanc dont il a juré de se venger1.

Soixante-huit ans après, Kazimir Malevitch peint le Carré blanc sur fond blanc2, qu’il expose avec trente-huit autres œuvres qu’il appelle « suprématies » lors de l’Exposition 0.10 à Pétrograd en 1919. L’œuvre représente… « représenter » n’est pas le bon mot à utiliser ici. L’œuvre consiste en une toile recouverte d’une couche de peinture blanche, à la teinte chaude, presque ocre, sur laquelle est peint un carré également en aplat de blanc, mais celui-ci plus froid et légèrement bleuté, carré excentré sur la toile, situé sur la partie supérieure et penché vers la droite.

Outre la couleur blanche qui les caractérise et qui nous a donné l’envie de réfléchir à un rapprochement entre ces deux entités presque mythiques, Carré blanc sur fond blanc de Malevitch et le cachalot du roman de Melville ne semblent pas avoir grand-chose en commun. Une telle juxtaposition peut même paraître incongrue, mais elle nous semble ouvrir de nouvelles pistes d’analyses. Notre idée n’est pas de dire que Malevitch connaissait Melville ni Moby-Dick, encore moins de sous-entendre que le peintre russe s’est inspiré de l’auteur américain lorsqu’il pensa Carré blanc sur fond blanc et toute la série dite des Blancs sur blanc. C’est pourtant en examinant le carré blanc de Malevitch en relation avec le cachalot de Melville que nous entendons parvenir à faire affleurer leur nature et leur puissance destituantes.

1. Destituer la peinture / Destituer la littérature

En 1435, le théoricien toscan Leon Battista Alberti rédige un traité théorique sur la peinture, le De Pictura, dont l’idée majeure est de renforcer la puissance de la peinture et son action sur le spectateur. Dans le premier livre du traité, son discours porte plus particulièrement sur la représentation de l’espace pictural et il décrit, selon une métaphore bien connue mais souvent mal comprise (et mal citée), le tableau comme une fenêtre : « D’abord j’inscris sur la surface à peindre un quadrilatère à angles droits aussi grand qu’il me plait, qui est pour moi en vérité comme une fenêtre ouverte à partir de laquelle l’histoire représentée pourra être considérée […] » (Alberti, 2004 (1435), p. 83)

Cette assertion soulève en effet la question de la mimesis, puisque l’espace représenté par le tableau doit avoir des propriétés identiques à celles de l’espace du spectateur. La continuité doit être totale entre l’espace vécu par le spectateur et l’espace perçu par celui-ci. Néanmoins, cet espace n’est pas le réel, pas non plus une simple copie ou imitation servile du réel mais une construction du peintre afin d’accueillir une histoire racontée. Un tableau est donc un espace où se déploient à la fois un espace-temps, construit selon les règles de la perspective, et une narration, un récit. Ce système pictural théorisé par Leon Battista Alberti est la base de la peinture occidentale du XVe siècle au XIXe siècle, moment où il se trouve remis en cause par plusieurs artistes.

Le présent texte n’a pas vocation à être un cours d’histoire de l’art et il n’est pas notre objet de développer en détail les différents moments où le système albertien a été attaqué au XIXe siècle. À la fin des années 1910, Malevitch fait le constat d’une peinture soumise, servilement selon lui, à la nature3 mais il souligne néanmoins les différents courant qui ont tenté de s’en détacher. Pour lui, l’impressionnisme, puis le cubisme et le cubo-futurisme marquent des moments fondamentaux dans la libération de l’art pictural du modèle naturaliste sans aller jusqu’au bout du processus. L’impressionnisme, par son attention première à la lumière et à ses effets sur les couleurs4, le cubisme par la destruction des objets représentés5, le futurisme qui a interdit « de peindre les jambons féminins, de copier les portraits, [et qui] a aussi éloigné la perspective » (Malevitch, 1974, p. 38) ont tous montré une volonté de se libérer de la figuration selon les règles albertiennes. Mais ils restaient néanmoins subordonnés, de manière certes plus limitée, aux objets et à la réalité matérielle. C’est en cela que ces courants n’ont été que des étapes sur le chemin qui mène, pour Malevitch, à une peinture non-représentative en général, et au suprématisme en particulier : « Il y a création seulement là où dans les tableaux apparaît la forme qui ne prend rien de ce qui a été créé dans la nature, mais qui découle des masses picturales, sans répéter et sans modifier les formes premières des objets de la nature » (Malevitch, 1974, p. 38).

Pour Malevitch, il ne faut pas seulement mettre à mal les objets, il faut libérer la peinture « de sa dépendance envers cet impératif a priori qui l’ordonne et subordonne aux fonctions de “traduire” en images la langue immédiate du monde, du sujet, du patrimoine de l’imaginaire » (Deborgel, 1997, p. 53). Il y a une « suprématie » de la nouvelle peinture, une dimension supérieure à cette nouvelle forme de pensée, ce nouveau rapport au monde qu’elle incarne, à partir du moment où elle parvient à être libérée de son rapport à la réalité. Voilà quel est l’objectif, la mission même du suprématisme dont Malevitch énonce les principes dans son Manifeste de 1915. Malevitch reprend la critique platonicienne qui rapproche l’art de l’illusion. Il faut éloigner le plus possible la peinture des raisins de Zeuxis, du rideau de Parrhasius ou de la mouche de Giotto6. Le mot même désignant ce nouveau courant pictural, « suprématisme », qui semble avoir été inventé par l’artiste à partir du latin et d’un terme du vocabulaire religieux polonais7, porte en lui la nouvelle fonction de la peinture, non plus mimétique ou narrative, mais ontologique, une vocation à manifester non plus le monde sensible mais le monde intelligible, la réalité supra-naturelle, l’Absolu en tant que Sans-Objet8.

La production suprématiste peut être circonscrite aux trente-huit tableaux présentés le 17 décembre 1915 à la galerie d’art Dobychina à Saint-Pétersbourg lors de la « Dernière exposition futuriste de tableaux 0,10 (zéro-dix) » et aux œuvres « Blancs sur blanc » de 19179. Bien qu’elle présente une grande diversité formelle et picturale, multipliant les formes (carrés, cercles, croix), les couleurs (rouge, noir, blanc) et les combinaisons, c’est sur Carré blanc sur fond blanc, véritable icône – le mot n’est pas choisi par hasard – qu’il faut nous arrêter. Peinte en 1918 et donc présentée au public un an plus tard, cette œuvre marque le terme de la période picturale suprématiste et la série tout entière est l’aboutissement « de l’itinéraire non-figuratif absolu » (Marcadé, 1990, p. 178), une manière de ramener la pensée humaine à une forme d’infini, cette pensée qui, pendant des centaines d’années, s’est trouvée comme hypnotisée par les objets. Ce caractère indescriptible et irreprésentable est ce qui nous permet de tirer un premier fil entre la production de Malevitch et le roman d’Herman Melville.

Moby-Dick s’inscrit explicitement dans un contexte formel littéraire du XIXe siècle, à la fois roman romantique et naturaliste par endroits. Cependant, le mode de perception et l’engagement esthétique de l’auteur sont en avance sur leur temps et pourraient presque être qualifiés de postmodernes. Par l’intermédiaire de son narrateur, le jeune Ismaël, Melville propose une façon particulière de voir et de juger. Avant de s’embarquer pour son voyage, Ismaël démontre ce type de questionnement visuel lorsqu’il entre pour la première fois dans l’auberge Spouter-Inn et voit une peinture sur le mur. La description est longue mais il est nécessaire de la citer en entier pour comprendre que germe déjà, dans l’esprit de Melville et dès le milieu du XIXe siècle, le problème de la représentation :

Sur un mur était accrochée une très grande peinture à l’huile, si complètement barbouillée de fumée, si parfaitement défigurée, que, sous les rayons de lumière oblique, qui l’éclairaient inégalement, il ne fallait rien de moins qu’une étude appliquée, des visites répétées et une enquête méthodique auprès des voisins pour parvenir à comprendre tant soit peu ce qu’elle représentait. Ombres et pénombres s’étalaient, inexplicablement, en de tels amas que l’on était d’abord tenté de penser qu’un jeune artiste ambitieux, au temps des sorcières de Nouvelle-Angleterre, avait entrepris de peindre le chaos prisonnier de leurs sortilèges. […] Mais le plus intrigant, le plus déroutant, c’était, au centre du tableau, une masse noire, longue, souple, monstrueuse, une chose qui planait au-dessus de trois lignes verticales d’un bleu pale, comme suspendues dans une écume indéfinissable. Tout cela était boueux, pâteux, visqueux, et pour tout dire, de nature à faire perdre la raison à un spectateur nerveux. Pourtant il se dégageait de la toile une sorte de sublimité indéfinie, une grandeur à peine imaginable qui vous figeait presque sur place … et l’on en venait malgré soi à se jurer de découvrir la signification de cette surprenante peinture. De loin en loin, une idée brillante, mais hélas trompeuse, vous traversait l’esprit. C’est la mer Noire par une nuit de tempête … ou bien : c’est le combat surnaturel des quatre éléments primitifs … ou encore : c’est une lande batture des vents … une scène d’hiver en terre hyperboréenne … la débâcle du fleuve Temps pris dans les glaces… Mais toutes ces fantaisies ne résistaient pas longtemps à la présence de la chose monstrueuse au centre du tableau. Si l’on pouvait comprendre cela, tout le reste devenait simple. Voyons… un instant… Ne dirait-on pas vaguement, un poisson gigantesque ? Et peut-être… le grand léviathan soi-même ? (Melville, 2006, pp. 158-159)

Le tableau, peut-être autrefois figuratif, semble être plus proche ici d’une œuvre abstraite, certes non par volonté de son auteur, inconnu, mais par l’effet du temps. Melville marque ici un écart entre lui-même et Ismaël. Là où l’auteur invente une toile non-représentative, son narrateur y cherche un sens, un lien avec le monde sensible dans les formes qui la hantent. Les exemples d’identifications potentielles avancés par Ismaël, notamment « la mer Noire par une nuit de tempête », rappellent la plaisanterie visuelle d’Alphonse Allais qui invente également un monochrome blanc mais l’intitule Première communion de jeunes filles chlorotiques par un temps de neige. Il y a autant d’écart entre Melville et Ismaël qu’entre Malevitch et Allais. Les tableaux produits en mots par Melville et en couleurs par Malevitch sont au-delà du monde des objets. Ismaël et Alphonse Allais n’envisagent pas la peinture séparée du monde des objets, même celle qui ne donne pas prise à l’identification et à la description. Étonnant de constater que c’est dans un roman, dans cette toile de l’auberge Spouter-Inn, que l’on trouve peut-être la première tentative de peinture non-figurative de l’histoire de l’art, une tentative de se détacher du monde sensible, de destituer la peinture comme le fait vraiment Malevitch avec ses œuvres suprématistes. Mais si le tableau est une tentative de destituer la peinture, Melville parvient, par l’intermédiaire du cachalot Moby Dick, à destituer la littérature.

Moby Dick n’est pas un objet de pensée, il appartient au monde, peut-être blessé et blesser à son tour puisqu’on apprend rapidement que c’est lui qui a arraché la jambe manquante du capitaine Achab. Le cachalot aurait pu plaire cependant à Malevitch car, en dépit de son existence au monde, il possède une dimension irreprésentable et indescriptible, échappant donc à la littérature telle qu’elle avait été conçue jusqu’alors. Au chapitre 55 du roman intitulé « De quelques représentations monstrueuses de baleines », Ismaël affirme à son lecteur qu’il veut « peindre, aussi bien qu’on peut le faire sans toile, quelque chose comme la forme vraie de la baleine telle qu’elle apparait réellement aux yeux du baleinier » (Melville, 2006, p. 429). Avant de procéder à cette description presque idéale de la baleine, il décrit même, ce qui relève de l’exploit et presque du paradoxe, les baleines monstrueuses et mythiques. Ismaël conclut ce chapitre en affirmant néanmoins qu’au-delà des mots, le seul moyen de connaitre la baleine en tant qu’espèce animale est « de s’embarquer soi-même pour une campagne de pêche » (Melville, 2006, p. 433). Le chapitre suivant, intitulé « De quelques représentations moins inexactes de la baleine et de quelques vraies scènes de chasse », prend une tournure plus scientifique et inaugure une série de 32 chapitres consacrés à donner forme à la baleine en tant qu’espèce, mais aussi à l’environnement maritime qui s’est développé autour d’elle, ce que Howard Vincent appelle le « centre cétologique » de l’œuvre de Melville (Vincent, 1948, p. 12110). Ismaël se fait donc zoologue, cétologue11, il affirme également son ambition d’être poète dans le chapitre 33 (« Cétologie »), de « classer les éléments d’un chaos », de produire une étude systématique et exhaustive des cétacés qui ne soit pas uniquement scientifique, mais également poétique. Les baleines qui peuplent les océans ou les monstres issus de l’imagination qui étaient censés les peuples, peuvent être mis en mots et peuvent être classés scientifiquement. Cela n’est pas le cas de Moby Dick qui appartient au règne du sur-naturel et qui ne cesse d’échapper à cette tentative d’épuisement du réel baleinier pour reprendre les mots de Perec : « Il faut bien admettre que le grand léviathan, seul de toute la création, est voué à n’être jamais représenté » (Melville, 2006, p. 433).

Alors que Malevitch, par son Carré blanc sur fond blanc, a destitué la mimesis albertienne, Melville, par sa baleine blanche, destitue l’ut pictura poesis horacien. Comme le dit Lise Revol-Marzouk, le roman offre « quelques tableaux véridiques, non pas certes directement de baleine, mais bien de scènes de chasse » (Revol-Marzouk, 2015). L’autrice les qualifie de peintures d’action, nous les qualifierons de peintures d’histoire pour reprendre la classification de la hiérarchie des genres telle qu’elle a été instituée par Félibien12. Dans ces moments, Moby-Dick se fait roman d’aventure, mais son objet réel, LA baleine blanche, Moby Dick, l’obsession d’Achab et d’Ismaël, ne se laisse enfermer ni par les chasseurs ni par ces scènes de chasse. Les autres cachalots et baleines sont décrits, représentés, capturés. Moby Dick, tel le carré blanc malevitchéen, échappe à toute capture, que ce soit par les filets, les mots ou les images. Rappelons-nous ce vers du Paradis de Dante : « outrepasser l’humain ne se peut signifier par des mots (trasumanar significar per verba non si poria) » (Dante, 1992, p. 71-73). Moby Dick et Carré blanc sur fond blanc ne donnent pas prise aux moyens traditionnels de circonscrire le réel que sont la description, littéraire ou scientifique, et la représentation picturale. La couleur blanche qu’ils partagent participent à les arracher à tout système représentatif. Mais cette blancheur ne doit pas être comprise comme un vide, tout comme le cachalot et le carré ne doivent pas être pris pour des objets de l’esprit. Leur blancheur les soustrait au monde du langage mais elle est aussi, par sa matérialité, ce qui les fait être au monde.

2. Blancheur et matérialité

La couleur blanche partagée par Moby Dick et par l’œuvre de Malevitch est ce qui nous a donné envie d’entreprendre la présente étude comparée. Nous avons cependant souhaité proposer une lecture qui ne s’arrêterait pas au simple rapprochement coloré, mais il faut tout de même affronter cette couleur13 qui, entre la White Whale et le Carré blanc, les définit dès leur dénomination.

Dans son ouvrage consacré à l’œuvre de Malevitch, Jean-Claude Marcadé écrit :

La tentation serait grande de fournir pour le blanc de la série des Blancs sur blanc de Malevitch des explications psychologistes-culturelles (européennes ou extrême-orientales), ou symbolistes […]. Du Bien-Aimé blanc transparent de la Sulamite (Ct 5 : 10) au Grand Trône Blanc de l’Apocalypse (AP 20 : 11), cette couleur a certes toute une tradition mystique judéo-chrétienne. Mais, encore une fois, Malevitch s’empare d’elle pour en faire le nouveau prisme de la conscience suprématiste de l’absence de couleur. (Marcadé, 1990, p. 183)

La tentation du symbole est forte lorsqu’un spectateur fait face à un monochrome. Qu’y voir ? Face aux monochromes, blancs comme ceux de Malevitch, bleus comme ceux de Klein, les spectateurs ont souvent tendance, en l’absence de tout autre élément, à vouloir interpréter la couleur et y lire des choses extrinsèques à l’œuvre14. La pureté, la virginité, l’innocence, la sagesse, la paix, tous ces concepts ont en effet été symbolisés par la couleur blanche dont l’histoire culturelle est extrêmement riche15. Malevitch a devancé et annihilé ces lectures potentielles, mettant en avant dans ses écrits l’œuvre suprématiste comme une absence de représentation et l’incarnation d’un monde sans-objet. Melville craignait lui qu’on ne vit en Moby-Dick « une fable monstrueuse » ou en Moby Dick « une hideuse et insupportable allégorie » (Kesting, 1972, p. 26). Néanmoins, pour Ismaël, narrateur et alter-ego candide du lecteur, le blanc de Moby Dick donne nécessairement lieu à nombre de rapprochements symboliques dans le fameux chapitre 42 intitulé « La blancheur du cachalot ». Le jeune marin ne peut s’empêcher de penser le blanc de la bête à l’aune de la symbolique de cette couleur dans l’histoire et selon les différentes cultures : il cite la dimension royale ou noble de la couleur blanche pour certaines nations, la supposée prééminence raciale du blanc, certains « sentiments humains ou mainte chose touchante et noble (l’innocence de la jeune mariée, la bénignité de l’âge) » (Melville, 2006, p. 350), et continue sa liste positive, jusqu’à en arriver à des rapprochement qui cette fois dissocient le blanc des significations plaisantes. Ces exemples, tels que l’ours blanc ou le requin blanc des tropiques, portent alors « la terreur à sa plus extrême intensité » (Melville, 2006, p. 351), car ce sont des animaux rendus d’autant plus féroces « qu’ils sont revêtus de la toison de l’innocence et de l’amour céleste » (Melville, 2006, p. 351). C’est par la non-adéquation entre entités dangereuses et concepts positifs que le blanc symbolise traditionnellement que ce dernier devient objet de terreur pour le jeune narrateur.

Cependant, au-delà de ces analogies, de la peur que peut faire naitre un animal féroce blanc, le blanc en soi est aussi source de terreur par son caractère indéterminé :

Serait-ce que, par son caractère indéfini, elle nous fait pressentir la cruauté des vides immenses de l’univers, et que nous recevons ainsi l’idée de l’anéantissement comme un coup de poignard traitreusement donné, lorsque nous contemplons les blanches profondeurs de la voie lactée ? Ou bien que la blancheur étant, dans son essence, moins une couleur que l’absence visible de couleur, et en même temps le mélange de toutes – serait-ce pour ces raisons qu’un paysage sous la neige nous offre à perte de vue l’image d’un monde effacé, muet, et pourtant si riche de sens – un monde athée, dépourvu de couleur et composé de toutes, qui nous fait reculer d’effroi ? (Melville, 2006, p. 357)

On constate et l’on ressent presque l’absolue perplexité d’Ismaël devant ce blanc lorsque le recours à la symbolique ne devient plus opérant. C’est d’ailleurs là que se joue la différence entre Ismaël et Achab qui connait la véritable nature du cachalot. Lorsqu’il parle de son ennemi, jamais Achab n’en donne une lecture symbolique ou immatérielle. Au contraire, comme il l’explique au timonier Starbuck, il en connait la véritable nature – ce qui ne signifie pas qu’il en connait le sens – parce qu’il a été confronté à sa matérialité : « Comment le prisonnier pourrait-il parvenir à l’air libre sans fracasser le mur ? Le cachalot blanc est ce mur, qu’on a poussé tout contre moi » (Melville, 2006, p. 321).

Achab revient souvent sur l’imperméabilité et le caractère insondable de Moby Dick et de son épiderme blanc – par son épiderme blanc devrait-on dire – à travers la métaphore du mur qui mettrait fin au domaine du compréhensible. Les paroles du capitaine trouvent alors des échos étonnants dans certains propos postérieurs de Kandinsky, lorsqu’il parle du blanc comme d’un « mur froid à l’infini, infranchissable, indestructible » (Kandinsky, 1989, pp. 155-156), ou encore de Ludwig Wittgenstein qui, dans ses écrits de fin de vie sur les couleurs, fait lui aussi remarquer que le blanc n’est pas transparent mais qu’il possède une profonde matérialité16. De la matérialité, il en est aussi question pour Carré blanc sur fond blanc. Mur plutôt que fenêtre, il destitue la perspective albertienne (« perspective » dont l’origine vient du latin perspicere qui signifie « voir au travers »). Il n’est ici plus possible ici de voir à travers la matière picturale. Ce qu’il y a à voir ce n’est plus l’espace que pourrait ouvrir le tableau, mais la matière picturale elle-même. La toile de Malevitch est au monde par les traces des pinceaux, par ces deux masses de blanc peintes sur une surface-plan.

« Ma connaissance de l’art des icônes m’a convaincu que la chose à atteindre ne réside pas dans l’étude de l’anatomie et la perspective ou dans la reproduction de la nature telle quelle, mais dans le ressenti artistique » (Souter, 2008, p. 114). Dans son journal de 1918, Malevitch met ainsi lui-même en avant l’importance de la sensation au détriment de la représentation. C’est par le blanc que le cachalot et le carré se soustraient à la description et à la figuration, mais c’est aussi par le blanc en tant que couleur-matière qu’ils se révèlent au monde. En rompant avec toute symbolique et en en faisant des expériences purement phénoménales17, le blanc participe donc doublement à faire de ces deux entités des puissances destituantes.

3. Destitution et accession

Face à Moby Dick comme face au carré blanc, rien ne sert de chercher un sens. L’un et l’autre sont des forces radicales porteuses d’un projet politique, celui de la destitution18. Mais il n’y a rien de nihiliste chez Moby Dick ou dans le carré blanc. Leur objectif n’est pas la tabula rasa. Derrière la destitution, par la destitution devrait-on dire et si l’on accepte la destitution, se cache une forme d’accession.

Une nouvelle fois, il n’est pas de notre volonté de faire de Melville un ascendant ou une inspiration de Malevitch. Néanmoins, certains rapprochements sont plus que troublants et tendraient à témoigner que la pensée de l’auteur comme celle du peintre sont toutes deux innervées par la question d’une forme de vérité cachée. Melville et Malevitch parlent chacun d’un masque posé sur la vérité. La citation déjà évoquée où Achab comparant le cachalot à un mur doit être citée dans son ensemble, où le masque devient le mur, oscillant entre une fin des apparences, cachant une « chose impénétrable » et une fin définitive, sans rien au-delà :

Tous les objets visibles ne sont que des masques en carton-pâte, comprends-tu ? Mais dans chaque événement, dans l’action qui se fait, le geste incontestable – là, une chose inconnue mais douée de raison fait paraître le relief de ses traits sur la surface inintelligente. Si l’homme veut frapper, qu’il frappe à travers le masque ! Comment le prisonnier pourrait-il parvenir à l’air libre sans fracasser le mur ? Le cachalot blanc est ce mur, qu’on a poussé tout contre moi. Il me semble parfois qu’il n’y a rien au-delà… […] C’est cette chose insondable que je hais par-dessus tout […] Qui peut prétendre me dominer ? À la vérité on ne saurait assigner de frontières. (Melville, 2006, p. 321).

Achab énonce que sa véritable quête, inconnue de tous ses membres d’équipage, est de percer le masque, d’atteindre le sens derrière le masque ou le mur. Il y a en lui une fascination, mêlée de crainte et de haine, de sentir l’insondable mais de ne pouvoir y accéder. Dans un compte-rendu du roman, publié en juin 1941, Jean-Paul Sartre nous offre une opinion particulièrement éclairante sur le roman de Melville :

[Melville observe] l’être pur, la blancheur secrète de l’être ; il regarde à l’œil nu (...) la peau lépreuse de l’univers, le gigantesque suaire blanc qui enveloppe toutes choses. (...) Personne n’a senti plus fort que Hegel et que Melville que l’absolu est là, autour de nous, redoutable et familier, que nous pouvons le voir, blanc et poli comme un os de mouton, pour peu que nous écartions les voiles multicolores dont nous l’avons recouvert. Nous hantons l’absolu : mais personne, à ma connaissance, personne sauf Melville n’a tenté cette entreprise : retenir en soi le goût indéfinissable d’une qualité pure – de la qualité la plus pure : la blancheur – et chercher dans ce goût même le sens absolu qui le dépasse. (Sartre in Contat et Rybalka, pp. 635-63619)

Sans doute Sartre ne connaissait pas – ou n’avait plus à l’esprit – les œuvres suprématistes de Malevitch. Dans un texte datant du milieu des années 20, le peintre reprend lui aussi cette métaphore du masque cachant ce qu’il appelle « la Face authentique » :

L’homme fait inlassablement des tentatives pour révéler l’authenticité, il veut retirer le masque aux actions du monde, pour jeter un regard sur la Face authentique. […] Cet acteur du monde se dissimule, comme s’il avait peur de montrer sa face, peur que l’homme lui arrache son masque aux nombreuses faces et ne connaisse son visage authentique. (Malevitch, 1993, pp. 99-100)

Cet « acteur du monde » évoqué par Malevitch n’est nullement un dieu comme celui de la Bible20. Néanmoins Melville, via Achab, et Malevitch postulent tous deux une « force inconnue » cachée derrière les objets visibles ; et leur « muraille » respective, le cachalot et le carré, peut faire barrière mais peut aussi, pour qui répond à l’ascèse qu’elle réclame, être le lieu de manifestation de cet invisible.

Moby Dick et Carré blanc sur fond blanc seraient ainsi des expériences du sublime, cette « tranquillité mêlée d’horreur » définie pour la première fois dans son sens moderne en 1757 par le philosophe anglais Edmund Burke dans ses Recherches philosophiques sur l’origine de nos idées du sublime et du beau, et prolongé par Kant dans sa Critique de la faculté de juger en 1790. Le sublime est à la fois ce qui dépasse le pouvoir de la représentation et ce qui échappe à toute conceptualisation, ce qui fait comprendre au spectateur la possibilité d’un au-delà et fait naître en lui la crainte par l’incapacité à y accéder : « Nous nommons sublime ce qui est absolument grand, c’est-à-dire ce qui est au-delà de toute comparaison » (Kant, 2015, p. XX21). Les œuvres amenant à ressentir le sublime22 le font en entrainant pour le spectateur une perte de repère, une perte de contrôle, un débordement de la raison et une forme de désociabilisation23, autant d’effets que nous avons vus déclenchés à la fois par Moby Dick et le carré blanc. Et si pour Kant le sublime est davantage lié à la nature, c’est l’œuvre d’art, et notamment l’œuvre non-représentative, qui relève au XXe siècle du sublime. L’œuvre non-figurative consiste « à présenter qu’il y a de l’imprésentable. Faire voir qu’il y a quelque chose qu’on ne peut pas voir ni faire voir : voilà l’enjeu de la peinture moderne » (Lyotard, 1994, pp. 21-22). Voilà l’enjeu du cachalot de Melville et du carré de Malevitch, blancs et destituants.

Bibliographie

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Notes

1 À noter la différence entre Moby-Dick qui est le titre du roman et Moby Dick qui est – et sera utilisé ainsi dans le présent texte – le nom du cachalot blanc. Retour au texte

2 Kazimir Malevitch, Carré blanc sur fond blanc, 1918, huile sur toile, 79.4 x 79,4 cm, New York, Museum of Modern Art. Retour au texte

3 « Toute la peinture passée et actuelle avant le Suprématisme (sculpture, art verbal, musique) a été asservie par la forme de la nature ». (Malevitch, 1974, p. 37) Retour au texte

4 « Les impressionnistes se consacraient exclusivement à la reproduction fidèle des impressions laissées par la lumière et les couleurs. […] Ils ont montré par leur peinture et par voie scientifique comment et dans quel ordre se formait le phénomène que nous appelons nature. Ce qui fait qu’ils nous présentaient cette dernière avec tout son naturel, et toute leur œuvre picturale consistait à enregistrer la nature ». (Malevitch, 1990, p. 202) Retour au texte

5 « Le cubisme et le futurisme ont créé le tableau à partir de débris et de fragments des objets au profit des dissonances et du mouvement. L’intuition fut écrasée par l’énergie des objets et n’a pas atteint le but autonome de la peinture ». (Malevitch, 1974, p. 38) Retour au texte

6 Il s’agit de trois célèbres anecdotes bien connues de la littérature artistique où un peintre, par son talent, parvient à faire croire que tel objet peint est un objet réel. Retour au texte

7 Voir Nakov, 1996, p. 174. Retour au texte

8 Pour traduire en français le mot bespredmiestnost (le sans-objet, la non-figuration), Jean-Claude Marcadé expliquait qu’il avait opté « pour la création du syntagme “sans-objet” utilisé comme nom, adjectif, adverbe (le sans objet, le monde sans-objet, connaitre sans-objet) qui rend mieux, sans que cela soit entièrement satisfaisant, cette “essence des diversités”, ce Rien qu’est la bespredmietnost de Malevitch ». (Jean-Claude Marcadé in Malevitch, 1993, p. 101) Retour au texte

9 Malevitch lui-même explicite le champ chronologique de la production suprématiste : « Le Suprématisme est né en 1913 (phénomène plan d’ordre statique et dynamique), teint des couleurs essentiellement noire, rouge, par la suite blanche ; le suprématisme blanc est d’ailleurs apparu en 1910, lors d’une exposition (les travaux avaient été faits en 1917) ». (Kovtoune, 1978, p. 175) Retour au texte

10 Cité par Revol-Marzouk, 2015. Retour au texte

11 Une posture scientifique qui n’est pas exempte de libertés et d’erreurs. Voir Granger, 1978, p. 825. Retour au texte

12 Voir Mérot (éd.), 2003, pp. 50-51. Retour au texte

13 Le débat sur l’essence du blanc a été l’un des plus continue dans la théorie de l’art occidental. Léonard de Vinci tout comme les membres de l’académie des Beaux-Arts en France n’y voyaient pas une vraie couleur mais une sorte de réceptacle des couleurs (« ll bianco non e colore ma e inpotentia ricettiva d’ogni colore » / « Le blanc n’est pas une couleur mais le récipient neutre de toutes les couleurs », Léonard de Vinci). L’autre camp, puisant dans les théories de Philostrate, reprises par Dufresnoy ou Roger de Piles et à qui donna raison la démonstration de Newton, voyait dans le blanc une couleur, celle de la lumière non encore décomposée. (Voir Claude Guthmann, 2010 ; Saint Girons, 2007). Retour au texte

14 Un artiste comme Ryman, auteur lui aussi de monochromes blancs le mentionnent dans de nombreux entretiens. Voir Gehlawat, 2005, p. 375. Retour au texte

15 Pastoureau, 2022. Retour au texte

16 « Je regarde à travers un verre transparent : s’ensuit-il que je ne vois pas du blanc ? / Retour au texte

Non, mais je ne vois pas le verre comme blanc. Comment le comprendre ? » Wittgenstein, 1984, p. XX

17 Le philosophe français d’origine russe Alexandre Kojève souligne l’autoréférentialité de l’art suprématiste, qui ne se lit plus mais qui advient au spectateur par des perceptions sensorielles (Vallier et al., 1991, p. 7). Retour au texte

18 Pour une critique de l’objectif politique lié à la tradition mimétique de l’œuvre d’art, voir Rancière, 2008, p. 57 sq. Retour au texte

19 Jean-Paul Sartre, « Moby-Dick d’Herman Melville », 1941. Retour au texte

20 Belorgel, 1997, p. 66. Retour au texte

21 Emmanuel Kant, Critique de la Faculté de juger, section I, livre II, paragraphe 25. Retour au texte

22 « Ainsi le sublime n’est contenu en aucune chose de la nature, mais seulement en notre esprit, dans la mesure où nous pouvons devenir conscient d’être supérieur à la nature en nous ». Kant, 2015, p. XX paragraphe 28. Retour au texte

23 Voir Bourriaud, 2022, p. 16. Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Fabien Lacouture, « Baleine blanche et carré blanc : puissances destituantes », K [En ligne], 9 | 2022, mis en ligne le 01 décembre 2022, consulté le 17 février 2025. URL : http://www.peren-revues.fr/revue-k/1316

Auteur

Fabien Lacouture

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