Abstracts

La représentation d’un « style Duras », expression dans laquelle l’absence de préposition signale à la fois une forme de stabilisation et de patrimonialisation, tend à faire oublier toute la première partie de l’œuvre, des Impudents jusqu’à Moderato cantabile, le bref roman de 1958 valant comme signal d’un tournant esthétique majeur signé par le passage aux Éditions de Minuit. Par ailleurs, Duras elle-même s’est employée à travers de nombreuses déclarations à entretenir une fiction d’oubli de ses premiers livres, les trouvant « mauvais », « harmonieux » … Nous voudrions montrer qu’une lecture téléologique assumée permet non seulement de mettre au jour des variations incontestables donnant à lire l’évolution d’un style d’époque hérité de la belle langue à un « style Minuit », mais permet aussi de manière plus étonnante de voir comment la singularité stylistique de l’auteur se construit paradoxalement en partie sur la réinvention de tours déjà présents dans les premiers romans.

The representation of a “Duras style”, an expression of which the lack of preposition suggests both stabilisation and patrimonialisation, tends to overshadow her early works, from The Impudent Ones to Moderato Cantabile. The latter, a short novel published in 1958, serves as a marker of a major aesthetic turning point, underscored by its release by Éditions de Minuit. Moreover, Duras herself actively contributed to enforcing a narrative of forgetting her early works, deeming them “bad”, “harmonious”… We aim to demonstrate that embracing an explicitly teleological reading not only brings to light undeniable variations that illustrate the transition from a period style rooted in la belle langue to a “Minuit style”, but also, more surprisingly, reveals how the author’s stylistic singularity paradoxically builds, in part, upon the reinvention of techniques already present in her early novels.

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La cause semble entendue : dans les années 1940-1950, Marguerite Duras est un écrivain tâtonnant au point qu’il est souvent d’usage d’évoquer une « première Duras » correspondant de facto à un empan chronologique doublement établi. D’une part, les propres déclarations de l’autrice dessinent explicitement les contours d’une première période sur fond de reniement : « Il y a toute une période où j’ai écrit des livres, jusqu’à Moderato cantabile, que je ne reconnais pas »1. D’autre part, le passage de Gallimard aux Éditions de Minuit vaut presqu’à lui seul comme signal d’un tournant esthétique, renforçant la fiction d’oubli des premiers livres largement entretenue par Duras elle-même. Ce qui est remarquable, c’est que les deux légitimations chronologiques se superposent et dessinent en creux la place du style. En effet, la mise à l’écart de ses sept premiers livres semble liée à la fois à l’impossibilité de coucher certaines choses par écrit et à des considérations stylistiques :

Non, dans la saumure [il est questions de petits caïmans], on était tellement pauvres, on bouffait n’importe quoi, des oiseaux, des oiseaux de mer qui puaient le poisson. […] Évidemment, dans le Barrage, je voulais pas raconter tout. Je voulais que ce soit harmonieux. On m’avait dit : « Il faut que ce soit harmonieux. » C’est beaucoup plus tard que je suis passée à l’incohérence2.

De fait, le glissement des thèmes abordés par nécessité à l’« harmonieux » par injonction, puis à « l’incohérence » – semble-t-il par libération – pose la question du style de manière centrale.

L’adjectif « harmonieux » renvoie en effet ici à un imaginaire de belle langue3 et dont nous retenons qu’il s’agit d’une représentation épistylistique fondée sur l’ambition de « bien écrire », principalement avec le maintien de formes lexicales ou morphologiques qui tendent à être considérées comme désuètes vers 1950 et un travail sur l’ordre des mots dans une phrase idéalement moyenne. En d’autres termes, il s’agit du patron stylistique issu de l’autonomisation de la langue littéraire vers 1850, dont le parangon est Flaubert4. En ce sens, l’« harmonieux » permet donc de situer cette première production durassienne par rapport aux pratiques, aux normes et aux usages rédactionnels de son époque. Et que l’on convoque le style comme manière5 si chère aux classiques ou comme le « style comme pratique »6, il s’agit toujours d’une notion inscrite dans une temporalité, et non, comme certains ont peut-être encore tendance parfois à le penser, dans une essentialité. Que signifie alors une première Duras du point de vue stylistique ? L’expression, même si elle est évidemment englobante et présuppose une borne initiale et une borne finale, a le mérite d’éviter le terme de jeunesse7. Il est en effet difficile, voire problématique sur le plan biologique, de considérer que la « première Duras » correspondrait à un ensemble d’œuvres dites de jeunesse – Marguerite Duras a déjà 36 ans lorsqu’est publié Un barrage contre le Pacifique, 44 ans à la sortie du Square8. Pour autant, l’adjectif numéral ordinal ne neutralise pas une autre question liée fréquemment à celle des œuvres de jeunesse9 : celle de la maturité de l’œuvre et, partant, une perspective téléologique tend à s’imposer presque naturellement sur le plan théorique. La longévité remarquable de Duras en termes de production – plus de cinquante années – invite en effet à lire l’ensemble des livres rejetés par l’autrice comme devant conduire aux suivants, à lire Un barrage contre le Pacifique comme devant mener à L’Amant et à L’Amant de la Chine du Nord. Et ce n’est pas l’autrice qui sera allée contre cette tendance interprétative d’ensemble. Ainsi, à ces phrases célèbres de L’Amant – qui, comme dans Les Parleuses, mettent en rapport direct thématiques personnelles et style :

Ils sont morts maintenant, la mère et les deux frères. Pour les souvenirs aussi c’est trop tard. Maintenant je ne les aime plus. Je ne sais plus si je les ai aimés. Je les ai quittés. Je n’ai plus dans ma tête le parfum de sa peau ni dans mes yeux la couleur de ses yeux. Je ne me souviens plus de la voix, sauf parfois de celle de la douceur avec la fatigue du soir. Le rire, je ne l’entends plus, ni le rire, ni les cris. C’est fini, je ne me souviens plus. C’est pourquoi j’en écris si facile d’elle maintenant, si long, si étiré, elle est devenue écriture courante10.

répond cette petite phrase en apparence anodine : « Je disais, vous savez, que l’écriture courante que je cherchais depuis si longtemps, je l’ai atteinte là, maintenant j’en suis sûre »11, mais qui construit en réalité une lecture orientée vers une fin12. Il nous faudra donc composer avec ce risque d’une lecture exclusivement téléologique. Très utile pour mesurer certaines évolutions incontestables, elle doit néanmoins rester sous contrôle afin de contourner plusieurs écueils : tout d’abord, celui de voir naïvement dans la première Duras, puis dans la suite de sa production, un parcours strictement singulier alors que de nombreux écrivains de sa génération ont effectué ce trajet d’une belle langue – une langue travaillée, largement héritée du roman de la seconde moitié du xixe siècle – à une langue apparemment peu travaillée, s’inscrivant à rebours d’une norme stylistique ; ensuite, celui de considérer que les œuvres de la première Duras seraient homogènes du point vue stylistique.

À partir d’un choix de trois œuvres abordées dans une perspective chronologique assumée – Les Impudents13, premier livre publié en 1943, Un barrage contre le Pacifique14 (1950), premier livre à remporter un certain succès en librairie, et Moderato cantabile (1958)15, premier livre édité aux Éditions de Minuit – nous chercherons comment l’horizon esthétique de l’harmonieux prend forme. Dans un second temps, nous ressaisirons ces trois coupes chronologiques afin d’interroger la constitution d’une « première Duras » au regard du champ littéraire et de son propre itinéraire stylistique, faisant ainsi le trajet de la singularité du style d’auteur à de possibles styles collectifs. Nous mobiliserons plusieurs observatoires langagiers situés à des paliers textuels : du niveau le plus global avec la phrase et les différentes insertions de constituants à un niveau mésotextuel avec les appositions16 et les phénomènes de substantivation, à un niveau résolument local avec les temps passés du subjonctif.

1. Lecture chronologique : une première période sous le signe de la belle langue

1.1. La borne initiale : Les Impudents

Borne initiale, Les Impudents (1943) est de loin le livre le plus explicitement renié par Duras. Christiane Blot-Labarrère a d’ailleurs largement documenté ce rejet rappelant que Duras répétait à l’envi qu’elle trouvait Les Impudents « mauvais » et trop écrit17. De fait, ce roman de 1943 cherche manifestement à s’inscrire dans la veine du bien écrire. La norme haute est à la fois grammaticale et stylistique.

La phrase comporte ainsi, la plupart du temps, entre deux et quatre mouvements répondant à l’idéal d’équilibre et de fluidité du bien écrire, tout en témoignant d’un travail soigné des inserts. Ainsi la saturation de la première phrase par un élément autre que le sujet est-elle fréquente – généralement par un cadratif spatial ou temporel régulièrement associé d’ailleurs à la postposition du sujet (« Au fond de la salle à manger se trouvait le buffet » [I, p. 3] ; « Dans la salle à manger, traînaient des affaires en désordre, jetées sur les chaises, le pardessus de son frère, son cache-nez, son chapeau » [p. 4]). Fréquemment, le travail de la phrase présente un faisceau d’insertions (« Comme Maud traversait le pré, le deuxième train qu’elle entendait siffler depuis Semoic, passa très vite dans le brouillard » [p. 55]) avec ici un complément circonstanciel en tête de phrase, ainsi qu’une insertion entre deux constituants essentiels – une relative insérée entre le sujet grammatical et le verbe. Quand la phrase tend à s’allonger au-delà de deux propositions, le recours au point-virgule est fréquent (« Le château fort d’Ostel datait du xiiie siècle ; il dominait la région à cinquante kilomètres à la ronde et restait l’une des plus puissantes seigneuries du Haut-Quercy » [p. 22]). Or nous le savons, ce signe de ponctuation constitue, dès cette époque, un indice de norme haute et de littérarité18.

Plus localement, ce premier texte présente de très nombreuses appositions, véritable emblème stylistique de la belle langue. Nous pourrions multiplier les exemples ; retenons à ce stade, qu’il s’agit principalement d’appositions frontales d’ouverture (« Grises et mauves, parfois d’un rouge de fraise mûre, les teintes se mêlaient et s’entremêlaient pour glisser toutes ensuite dans une humide grisaille » [I, p. 145]) ou d’appositions insérées entre deux constituants phrastiques (« Il avait eu un fils, Henri, et, s’il lui vouait une secrète et grande tendresse, il avait été très vite obligé de se faire à l’idée qu’il n’était nullement payé de retour » [p. 6]). Un autre tour typique de la belle langue, l’inversion caractérisé/caractérisant dans le syntagme nominal (« la cruauté de ses propos » [p. 19] ; « la rougeur de sa gorge » [p. 123]) signe une préférence accordée au substantif tout en intégrant un tour typique de la grammaire phénoméniste. Plus localement encore et à un niveau morphologique, alors que la tendance est à la raréfaction des temps passés du subjonctif dès les années 1940-1950, où ils commencent à faire figure de « cadavre frémissant »19 et se réduisent de plus en plus à la troisième personne du singulier de être et avoir, force est de constater que ce n’est pas du tout le cas dans Les Impudents. Tout au contraire observe-t-on une certaine vitalité de ces temps observables sur des verbes variés (« Mais Mme Taneran […] se jugeait heureuse finalement qu’Uderan ne lui coutât rien » [p. 14] ; « Sans elle cependant, la famille n’eût pas existé » [p. 15]) y compris à la troisième personne du pluriel (« Il aurait dû être triste, mais en fait ne l’était pas, quoiqu’il ne répugnât pas à se faire consoler et que son air contracté, sa voix sourde et pâteuse exprimassent une pudeur qu’il croyait décent de conserver quelque temps encore » [p. 13]).

Présentés ainsi, ces observatoires langagiers semblent autant de légitimations possibles du rejet de l’autrice de ce premier roman. Ce ne furent pourtant pas les principaux arguments avancés par les critiques de l’époque ni par les exégètes qui pointèrent davantage des filiations par trop visibles ainsi que des maladresses de romancier touchant à l’organisation globale de la narration et à sa cohérence. Que pouvons-nous constater au seuil de cette production ? D’abord, les effets de belle langue sont non seulement incontestables, mais très présents sur l’ensemble du roman. D’ailleurs, au-delà des différentes configurations langagières abordées, c’est avant tout la constitution en faisceau de ces dernières qui confère globalement à ce roman certaines qualités de belle langue. Nous avons déjà évoqué la présence d’un travail sur les inserts combiné à une postposition du sujet. Nous pourrions en mentionner bien d’autres, comme dans telle phrase (« Immobile, d’une blancheur lactée, elle traversait le pays, étrangement absente, tel un courrier qui vient de loin et ne songe qu’à son but » [I, p. 28-29]) dans laquelle d’une part, le sujet est retardé par une apposition frontale d’ouverture puis par une caractérisation phénoménale, d’autre part, une seconde apposition est insérée entre la principale et la subordonnée. Pour autant Duras écrit-elle bien ? La question de la valeur, on le sait, est toujours difficile à trancher tant elle relève pour une part d’une subjectivité, pour une autre part d’un jugement engageant diverses représentations esthétiques. Nous pouvons toutefois noter à ce stade des maladresses qui contreviennent pour partie à la recherche du bien écrire : doublement du connecteur adversatif (« Mme Grand-Taneran acceptait allègrement qu’il menât une existence oisive et dangereuse mais par contre elle ne lui avait jamais pardonné de s’être marié avec une femme du monde où il évoluait » [p. 5]), présence d’un lexique prosaïque (« Entre cet horizon lointain, bourré d’usines, de faubourgs et l’appartement ouvert en plein ciel, l’air chargé d’une fine brume ressemblait, glauque et dense, à de l’eau » [p. 3]), comparaison hasardeuse (« Lorsqu’elle se retourna vers la chambre et qu’elle ferma la fenêtre le bruissement de la vallée cessa brusquement comme si elle avait fermé les vannes d’une rivière » [loc. cit.]), insertions maladroites avec un second insert de la phrase s’appariant mal avec le premier (« Ce soir, sur le meuble, la traite Tavarès à l’adresse de Jacques Grand, attendait qu’on voulût bien l’ouvrir » [p. 4]) ou apposition retardée par un connecteur (« De la sorte, imperturbable autant qu’adroite, Mme Taneran avait dirigé sa barque et gouverné la destinée de son fils » [p. 9]). Par ailleurs – en dehors des appositions sur lesquelles nous reviendrons – les pratiques rédactionnelles qui tendent au bien écrire semblent se limiter aux configurations les plus convenues. Ainsi la postposition du sujet est-elle régulièrement appelée dans des configurations quasi grammaticalisées avec l’emploi d’un adverbe ou d’une locution adverbiale (aussi, sans doute, peut-être, à peine).

Le bilan est donc mitigé sur le strict plan stylistique parce que la belle langue s’incarne dans un classicisme formel empreint de quelques maladresses. Pour autant, l’horizon esthétique reste celui de la belle langue, comme c’est encore le cas pour Un barrage contre le Pacifique publié sept ans plus tard.

1.2. La saisie intermédiaire : Un barrage contre le Pacifique

L’état des lieux est cependant plus complexe à mener dans la mesure où les différents postes d’observation retenus pour tester la présence du bien écrire ne répondent pas tous de la même manière.

Et c’est assurément au niveau de la phrase et de ses inserts que la question devient plus complexe. En effet, si nous pouvons réaffirmer la perspective « harmonieuse » d’ensemble, la tension entre des effets de belle langue et des opérations de gauchissement qui tendent au contraire vers une multiplication des maladresses est notable. Une simple comparaison entre deux unités phrastiques permet de mesurer les tensions stylistiques contradictoires :

À l’ombre d’un bananier croulant sous les fruits, le couple colonial, tout de blanc vêtu, se balançait dans des rocking-chairs tandis que des indigènes s’affairaient en souriant autour d’eux (BCP, p. 287).
En la préservant des nouveaux coups du sort et des hommes, les dix ans qu’elle avait passés, dans une complète abnégation, au piano de l’Éden-Cinéma, moyennant un très maigre salaire, l’avaient soustraite à la lutte et aux expériences fécondes de l’injustice (p. 289).

Composée de deux propositions, la première phrase est bien équilibrée et étoffée par un cadratif spatial en ouverture de phrase et par une apposition placée à la suite du sujet, retardant ainsi le verbe. La seconde phrase semble plus maladroite en raison d’une multiplication des éléments (« les dix ans qu’elle avait passés, dans une complète abnégation, au piano de l’Eden-Cinéma, moyennant un très maigre salaire ») qui retardent trop le verbe et contreviennent à la fluidité de la phrase. Par ailleurs, nous ne saurions en rester à cette analyse pour le premier exemple. Retenue ici à dessein, afin de présenter l’écart maximal observable, la phrase décrit une affiche de propagande incitant la jeune population à rejoindre les colonies20 : convoquer ainsi en une seule unité phrastique bien écrite tous les clichés de la propagande de l’époque peut également se lire comme un indice d’ironie quant à l’inscription de la belle langue dans la prose. Rare sur l’ensemble du roman, une telle phrase nous invite évidemment à une forme de vigilance sur les marques de belle langue.

Pour autant, les autres observatoires mobilisés pour décrire Les Impudents sont présents et semblent convoqués sans réserve aucune. Ainsi, les appositions restent très nombreuses et semblent même plus travaillées que dans le roman de 1943. En effet, si elles étaient majoritairement situées en tête de phrase dans Les Impudents, leur point d’insertion est nettement plus varié dans Un barrage contre le Pacifique, puisqu’elles sont non seulement observables en tête de phrase (« Toujours aussi patient, M. Jo se désintéressait de la marche du crabe » [BCP, p. 310]), mais qu’elles prennent place également au cœur de la phrase (« et il les regardait passer, bringuebalants, cornants et tonitruants, dans le silence » [p. 422]). Parfois même le point d’insertion se situe entre le sujet grammatical et le verbe pour un effet maximal de belle langue (« La mère, toujours immobile, crucifiée, regardait s’accomplir le départ irrémédiable de M. Jo » [p. 368]). De même, l’inversion caractérisant/caractérisé reste bien attestée dans le roman (« le vert tendre du semis » [p. 284] ; « L’imminence du départ de Joseph » [p. 442]) – que le verbe ait subi une déflation sémantique et se rapproche d’un tour régulièrement observable chez Flaubert (« Complètement nus et enduits de safran des pieds à la tête, ils avaient la couleur et la lisseur des jeunes mangues » [p. 371]) ou que la phrase présente plusieurs substantivations (« Et tout d’un coup, la tête ballante, la bouche entrouverte, complètement en allée dans le lait du sommeil, elle flotta, légère, dans la pleine innocence » [p. 361]) associées d’ailleurs à bien d’autres tours attestant de la recherche d’une prose bien écrite.

Sur le plan morphologique, force est de constater que les temps désuets du subjonctif sont toujours employés, mais avec une différence notable. En effet, non seulement, ils n’apparaissent plus guère qu’à la troisième personne du singulier mais ils sont principalement employés avec être et avoir. Si, bien évidemment, quelques exceptions existent dans le roman de 1950, l’emploi d’un verbe au sémantisme fort reste rare. L’inscription de cet indice de belle langue est donc de plus en plus convenue et suit l’évolution non seulement de l’idiome mais celle de la langue écrite avec une variété d’emploi somme toute limitée.

L’intuition voudrait que les tours les plus typiques de la belle langue disparaissent dans Moderato cantabile, confirmant ainsi à la fois les propos de l’autrice et la rupture actée et affichée par le changement de maison d’édition.

1.3. La borne extrême : Moderato cantabile

Les toutes premières lignes du bref roman de 1958 laissent pourtant se dessiner un bilan beaucoup plus contrasté. De fait, c’est à n’en pas douter la longueur des phrases qui constitue l’indice de rupture le plus flagrant. Plus courte, réduite à une ou deux propositions, la phrase a un volume bien moindre et ne correspond plus à l’idéal observable dans les deux volumes de 1943 et 1950. Mais ce constat ne doit pas masquer que les autres configurations retenues pour notre analyse sont quant à elles bien présentes. Ainsi, et de façon il est vrai contre-intuitive – une phrase plus courte étant nécessairement moins accueillante pour de multiples expansions – les insertions entre les constituants essentiels de la phrase sont observables dès l’ouverture dans la phrase courte. Si la configuration la plus convenue, l’ouverture de la phrase par un cadratif, du type : « Le lendemain encore, Anne Desbaresdes entraîna son enfant jusqu’au port » (MC, p. 1226) est rarissime, les insertions sont en revanche fréquentes entre le sujet et le verbe (« Une femme, assise à trois mètres de là, soupira » [p. 1205] ; « L’enfant, immobile, les yeux baissés, fut seul à se souvenir que le soir venait d’éclater » [loc. cit.]). Qui plus est, la disjonction entre les constituants essentiels se fait fréquemment, comme dans ces deux exemples, au moyen d’une apposition. Cette dernière est d’ailleurs particulièrement bien représentée sur l’ensemble du roman, qu’elle se situe en tête de phrase, entre des constituants ou en fermeture (« Anne Desbaresdes fixa cet homme inconnu sans le reconnaître, comme dans le guet, une bête » [p. 1244]). De même pouvons-nous observer une persistance d’un style accordant la préférence au substantif, que ce soit avec l’inversion caractérisé/caractérisant (« l’éloignement de la nuit » [p. 1251] ; « la blondeur de cet enfant » [p. 1207] ; « le silence de l’enfant » [loc. cit.]) ou des tours plus complexes comme des phrases dans lesquelles le verbe conserve un sémantisme plein alors qu’il est suivi d’un tour substantivé (« Anne Desbaresdes feignit un étonnement exagéré » [p. 1228] ; « Dehors, dans le parc, les magnolias élaborent leur floraison funèbre dans la nuit noire du printemps naissant » [p. 1246]).

Du point de vue morphologique, les verbes aux temps passés du subjonctif restent présents. Comme dans le roman de 1950, seule la troisième personne est concernée mais contrairement aux occurrences de ce dernier, ils ont un sémantisme plein et s’inscrivent à contre-courant de l’évolution générale (« L’appartement de Mlle Giraud était suffisamment haut […] pour que le champ de ses fenêtres donnât de très loin sur la mer » [MC, p. 1233] ; « De la musique sortit, coula de ses doigts sans qu’il parût le vouloir » [p. 1237] ; « On en parlait maintenant avec le sourire, comme on l’eût fait d’un temps mensonger qui eût caché derrière sa pérennité quelque irrégularité » [p. 1252]).

Si un tel parcours chronologique fait courir le risque d’une perspective exclusivement téléologique, les occurrences examinées conduisent finalement à davantage de nuance. Certes, Moderato cantabile constitue une indéniable articulation dans le parcours durassien, mais les marques de belle langue ne sont pas pour autant absentes, certaines présentant même une élaboration dépassant la simple inscription sémiotique du bien écrire dans une langue rejetant par ailleurs ce même horizon.

2. Bilan rétrospectif

Au terme de ce parcours chronologique, prenons à présent Moderato cantabile comme curseur pour évaluer ce qui relève de l’harmonieux dans la première production durassienne, en convoquant également cette fois d’autres œuvres. Le bilan est contrasté pour nombre de caractéristiques de la belle langue et n’est pas linéaire.

2.1. La première Duras, le positionnement dans le champ littéraire et le style d’époque en 1958

Prenons de la hauteur. De nombreux exégètes ont contribué, au regard de ce que nous avons montré, à survaloriser la nouveauté – indéniable par ailleurs – de Moderato cantabile et partant, sa rupture d’avec tous les romans précédents. D’ailleurs, encore récemment, et l’introduction générale de la Pléiade (« Moderato Cantabile, qui représente sans aucun doute une rupture qui ne se réduit pas à un symbole »21) et la notice qui lui est consacrée (« une étape décisive dans l’œuvre de Marguerite Duras »22 ; « Ce roman […] semble avoir marqué une rupture dans son écriture »23 ; « une élaboration formelle qui place le livre au cœur de la modernité »)24 ont certainement contribué à stabiliser une représentation de Moderato cantabile, malgré toutes les nuances que les deux textes critiques peuvent avancer par ailleurs. Quitter Gallimard pour rejoindre les Éditions de Minuit25 fait signe et sens. Jean Vallier, dans sa biographie consacrée à Marguerite Duras, revient longuement sur ce changement de maison d’édition mettant en avant des raisons assez disparates26, à la fois d’ordre financier – les ventes de son dernier livre sont décevantes –, d’ordre politique – les Éditions de Minuit se positionnent contre la guerre d’Algérie, mais surtout d’ordre plus directement relationnel et littéraire avec les sollicitations de Jérôme Lindon et d’Alain Robbe-Grillet sur lesquelles l’autrice revient d’ailleurs dans Le Monde extérieur27. Par ailleurs, Christophe Meurée rappelle que « l’écrivain choisit de publier chez Minuit les romans qui forment les charnières de son œuvre »28. En d’autres termes, rejoindre les Éditions de Minuit, c’est rejoindre les écrivains novateurs, les écrivains qui s’inscrivent dans le champ de la littérature la plus restreinte. À suivre Mathilde Bonazzi, on comprend que deux imaginaires se superposent alors, l’un stylistique, l’autre éditorial :

L’idée d’un style-Minuit, archétype d’une langue littéraire exemplaire, circule donc dans la vie littéraire française comme un stéréotype […]. Le nom épithète « style-Minuit », dans une construction non prépositionnelle et elliptique, cristallise d’ailleurs ce stéréotype, figé autour d’un lien supposé entre style et éditeur29.

Cette superposition, fondée sur une série de glissements :

Quels sont les « principes identitaires » qui définissent le style de la maison d’édition et fondent le stéréotype d’un style-Minuit ? Ce stéréotype est construit sur quatre glissements par contiguïté métonymique, des composantes des Éditions de Minuit, à savoir le livre (ses caractéristiques matérielles), les éditeurs (leur identité), l’organisation de la maison (la structure familiale) et le catalogue (c’est-à-dire, pour l’éditeur, « ses » écrivains), au style entendu comme patron discursif et stylistique30.

construit une signature Minuit valant en ce sens comme une signature esthétique collective, précisément celle du « désécrire »31, Duras ayant choisi pour sa part d’incarner le contre-horizon de la belle langue par le gauchissement et le mal écrire32.

Ce positionnement invite les exégètes à traquer les marques de « désécrire », qui certes existent, qu’il s’agisse par exemple d’une ambiguïté sur la rection d’un verbe (« Il fit signe à la patronne de les servir à nouveau de vin » [MC, p. 1215]), d’un verbe transitif employé sans leur complément essentiel (« Elle laissa son enfant devant le porche de Mlle Giraud, rejoignit le gros de la foule devant le café, s’y faufila et atteignit le dernier rang des gens qui, le long des vitres ouvertes, immobilisés par le spectacle, voyaient » [p. 1210]) ou de pronoms maladroitement employés délexicalisant ainsi une expression figée (« Anne Desbaresdes aussi reconsidéra cet enfant de ses pieds jusqu’à sa tête mais d’une autre façon que la dame » [p. 1206]). Ce faisant, ils inscrivent le style de Duras dans un autre patron stylistique en train de se constituer et qui coïncide avec celle de l’avant-garde de son époque et tendent à faire oublier le cheminement de l’autrice, régulièrement en décalage avec les normes d’écriture.

2.2. La première Duras ou la perspective du style d’auteur

Nous l’avons montré, c’est finalement un des critères le plus intuitif, celui de la longueur de la phrase, avec le respect ou non de la phrase moyenne, qui est le moins unifié, Moderato cantabile présentant majoritairement des phrases brèves. Mais ne nous y trompons pas, les trois saisies correspondant aux trois romans retenus ne permettent pas de dire pour autant que la phrase tend à se raccourcir suivant pas à pas la chronologie. La Vie tranquille, roman de 1944, présente par exemple de nombreuses phrases courtes (« Il nous avait légèrement distancés. Le vent soufflait là-haut et le coupait de nous. Nous n’entendions plus aussi distinctement ses plaintes »33) qui nous rappellent que la généralisation masque des contre-exemples situés plus localement. Nous affirmerons donc que le roman de 1958 présente très majoritairement des phrases courtes, voire très courtes, signe de l’amorce d’un nouveau travail sur la phrase sans pour autant que ce dernier soit observable de manière homogène sur le reste de la production – certaines des phrases de L’Amant sont longues, certaines sont même très longues.

Les autres critères de belle langue se retrouvent en revanche tous dans le roman de 1958 ; ils sont même davantage travaillés pour certains que dans les deux autres romans retenus pour notre comparaison initiale. Mais c’est surtout sur les substantifs et sur l’apposition que portent les écarts par rapport à la norme stylistique – ou au style Minuit – en cours de constitution. En effet, ces deux configurations relèvent d’un travail absolument remarquable dans Moderato cantabile, qui ne saurait se réduire à une inscription sémiotique d’un bien écrire figé dans un livre présentant pour le reste des nouveautés stylistiques, mais font au contraire l’objet d’une véritable réinvention. Ainsi, l’apposition, par la condensation qu’elle permet, ne joue plus tant comme figure d’ajout que comme figure de réduction, et fait porter, au moyen seulement de quelques mots, tout un ensemble d’informations sur le segment appositif, ce qui évite d’allonger la phrase. Les deux appositions en ouverture de la phrase suivante : « Nourrie de ce vin, exceptée de la règle, manger l’exténuerait » (MC, p. 1248) rassemblent ainsi en une économie de mots remarquable l’isolement du personnage, son exclusion et les tensions lors du repas.

De la même façon, la substantivation du style par l’inversion de l’ordre caractérisé/caractérisant n’est pas rejetée dans Moderato cantabile, alors qu’avec cette configuration, la référence à la belle langue s’impose d’elle-même, parce que ce tour emblématique de la grammaire phénoméniste « restera le signal même de la langue littéraire tout au long du xxe siècle »34. Mais à nouveau, il ne vaut pas tant comme signal, relevant alors d’un fonctionnement sémiotique, que comme réinvention. En d’autres termes, la resémantisation du tour intègre le projet esthétique de l’autrice en 1958. Dans une telle phrase : « La lune est levée et avec elle voici le commencement de la nuit tardive et froide » (MC, p. 1250), la substantivation permet de neutraliser tout point de vue individuel en ne plaçant pas un personnage comme sujet de conscience, tout en maintenant à la surface les éléments de perception35. En ce sens, ce tour sert la remise en cause du projet subjectiviste qui est certainement le cœur de la nouveauté de Moderato cantabile36.

Par ailleurs, nous observons également dans ce même volume des tours plus nettement archaïsants et qui disparaîtront dans la suite de l’œuvre durassienne, avec par exemple le déplacement d’un adjectif sur le terme substantivé donnant à lire une forme d’hypallage qui rappelle la langue du xviie siècle (« dans le douloureux sourire d’un enfantement sans fin » [MC, p. 1209] ; « le désordre réel et blond de ses cheveux » [p. 1252]). S’il semble difficile d’interpréter de tels tours en 1958, ils pourront prendre place plus tard dans une lecture montrant comment des tours localement non congruents peuvent se lire comme une tendance à la baroquisation de la prose.

En prenant le parti d’étudier chronologiquement ce qui relève de l’harmonieux dans la première Duras – à l’exclusion de toute autre perspective, écartant délibérément tous les tours caractéristiques de la représentation la plus répandue du « style Duras » – nous avions pris un double risque : celui de n’appréhender que des tours qui se trouvent conservés jusqu’à la fin de la production durassienne, certes dans des proportions variées, mais avec le souci de stabiliser un faisceau de configurations qui, soit par leur quasi disparition au fil des années, soit par leur maintien, s’inscrivent malgré tout dans une lecture téléologique de l’ensemble de l’œuvre. La réinvention de certaines configurations dans Moderato cantabile est en ce sens doublement intéressante. Elle souligne, à rebours des idées les plus répandues, que si Moderato cantabile marque une rupture, c’est non seulement par les nouveautés esthétiques qu’il contient, mais également par la resémantisation de certaines configurations qui neutralisent un classicisme formel. C’est, selon nous, un des tours de force durassiens : moins visible que le raccourcissement de la phrase ou la mise à distance des techniques romanesques héritées du xixe siècle, la réinvention de tours typiques de la belle langue permet de faire le pont entre style singulier et style d’époque.

Notes

1 Marguerite Duras, Les Parleuses [1974], Œuvres complètes, t. III, éd par Gilles Philippe, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2014, p. 8. Return to text

2 Ibid., p. 97. Return to text

3 L’imaginaire de la belle langue a été largement présenté dans les travaux de Gilles Philippe. On pourra se reporter notamment aux articles suivants : « Purisme linguistique et purisme stylistique », Le Français moderne, no 1, « Nouveaux regards sur le purisme », dir. par Laurence Rosier, 2008, p. 14-21 ; « “Langue littéraire” et “langue classique” : archaïsme stylistique et imaginaire linguistique au xxe siècle », in Stylistique de l’archaïsme, dir. par Laure Himy-Piéri & Stéphane Macé, Bordeaux, Presses universitaires, de Bordeaux, 2010, p. 189-204 ; ainsi qu’au collectif que Gilles Philippe a codirigé avec Julien Piat : La Langue littéraire : une histoire de la prose en France de Gustave Flaubert à Claude Simon, Paris, Fayard, 2009. Return to text

4 Voir à ce sujet, Gilles Philippe, « Registres, appareils formels et patrons », in Les Registres : enjeux stylistiques et visées pragmatiques, éd. par Lucie Gaudin-Bordes & Geneviève Salvan, Louvain-la-Neuve, Academia-Bruylant, 2008, p. 27-37. Return to text

5 Voir à ce sujet, Gérard Dessons, L’Art et la manière : art, littérature, langage, Paris, Honoré Champion, « Bibliothèque de LGC », 2004. Return to text

6 Laurent Jenny, « Du style comme pratique », Littératures, no 118, « Nathalie Sarraute », dir. par Françoise Asso, 2000, p. 98-117, [en ligne], URL : https://www.fabula.org/ressources/atelier/?Du_style_comme_pratique, consulté le 13 janv. 2025. Return to text

7 Même si elle en remplit l’une des caractéristiques. En effet, comme le rappelle Isabelle Daunais : « On peut d’abord se pencher sur les conditions qui rendent possible la désignation même d’une œuvre dite de “jeunesse”. Parmi ces conditions, celle qui vient le plus spontanément à l’esprit et qu’atteste d’ailleurs le lieu privilégié de leur édition que sont, pour un auteur, ses “œuvres complètes”, est la longévité : pour avoir une œuvre de jeunesse, il faut aussi avoir une œuvre tardive, au long cours, c’est-à-dire échelonnée dans le temps » (Isabelle Daunais, « Une frontière entre les âges de l’œuvre : la maturité comme valeur », Colloques Fabula, « Le négatif de l’écriture : enquêtes sur le pouvoir de décréer », dir. par Jean-Louis Jeannelle & François Vanoosthuyse, nov. 2020, [en ligne], DOI : https://doi.org/10.58282/colloques.6813, consulté le 13 janv. 2025). Return to text

8 Sur ce point, voir Ilaria Vidotto, « Un état “juvénile” de l’écriture : l’exemple d’Albert Camus et de Marguerite Duras », L’Information grammaticale, no 175, oct. 2022, p. 48-55. Return to text

9 Isabelle Daunais rappelle ainsi qu’« [u]ne autre condition que doit remplir une œuvre de jeunesse pour être perçue comme telle est d’ailleurs d’offrir les signes de l’immaturité. Les notices, préfaces et introductions qui accompagnent dans la Bibliothèque de la Pléiade la publication d’œuvres ou d’écrits de jeunesse insistent fortement sur ces signes, les termes revenant le plus souvent pour décrire ces œuvres étant ceux de maladresse, d’inachèvement, de spontanéité, de discontinuité » (art. cit.). Return to text

10 Marguerite Duras, L’Amant [1984], Œuvres complètes, t. III, éd par Gilles Philippe, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2014, p. 1470 (désormais noté A). Return to text

11 Marguerite Duras, « L’inconnue de la rue Catinat », Le Nouvel Observateur, 28 sept. 1984, p. 93. Return to text

12 D’ailleurs, du point de vue lexical le verbe atteindre et l’adverbe de lieu marquent bien une borne supposant elle-même un commencement. Return to text

13 Marguerite Duras, Les Impudents, [1943], Œuvres complètes, t. I, éd. par Gilles Philippe, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2011 (désormais noté I). Return to text

14 Marguerite Duras, Un barrage contre le Pacifique [1950], Œuvres complètes, t. I, op. cit. (désormais noté BCP). Return to text

15 Marguerite Duras, Moderato cantabile [1958], Œuvres complètes, t. I, op. cit. (désormais noté MC). Return to text

16 Nous retenons la définition de l’apposition proposée par Franck Neveu : « une construction dynamique complexe articulant nécessairement deux constituants : un segment support et un segment apport » reliés dans un rapport d’incidence et de prédication seconde (Franck Neveu, Études sur l’apposition : aspects du détachement nominal et adjectival en français contemporain, dans un corpus de textes de Jean-Paul Sartre, Paris, Champion, 1998, p. 67). Return to text

17 Voir Christiane Blot-Labarrère, « Notice [des Impudents] », in Marguerite Duras, Œuvres complètes, t. I, op. cit., p. 1408. Return to text

18 Voir à ce sujet Jacques Dürrenmatt, « Grandeur et décadence du point-virgule », Langue française, no 4, « Ponctuation(s) et architecturation du discours à l’écrit », dir. par Michel Favriaud, 2011, p. 37-52, [en ligne], https://doi.org/10.3917/lf.172.0037, consulté le 13 janv. 2025. Return to text

19 L’expression est empruntée à Gilles Magniont, « Le subjonctif imparfait entre dérision et sacré », in Stylistique de l’archaïsme, op. cit., p. 296. Return to text

20 Voir : « Fille de paysans, elle avait été si bonne écolière que ses parents l’avaient laissée aller jusqu’au brevet supérieur. Après quoi, elle avait été pendant deux ans institutrice dans un village du Nord de la France. On était alors en 1899. Certains dimanches, à la mairie, elle rêvait devant les affiches de propagande coloniale. “Engagez-vous dans l’armée coloniale”, “Jeunes, allez aux colonies, la fortune vous y attend” » (BCP, p. 287). Return to text

21 Gilles Philippe, « Marguerite Duras : un nouvel art de la prose », in Marguerite Duras, Œuvres complètes, t. I, op. cit., p. xii. Return to text

22 Brigitte Ferrato-Combe, « Notice [de Moderato cantabile] », in Marguerite Duras, Œuvres complètes, t. I, op. cit., p. 1554. Return to text

23 Loc. cit. Return to text

24 Ibid., p. 1559. Return to text

25 On pourra se reporter à ce sujet à Christophe Meurée, « Un style prophétique : d’un imaginaire présidant aux Éditions de Minuit », in Existe-t-il un style Minuit ?, dir. par Michel Bertrand, Karine Germoni, Annick Jauer, Presses universitaires de Provence, 2014, p. 47-63, [en ligne], DOI : https://doi.org/10.4000/books.pup.8886, consulté le 15 janv. 2025. Return to text

26 Jean Vallier, C’était Marguerite Duras, t. II : 1946-1996, Paris, Fayard, 2010, p. 283-290. Return to text

27 Marguerite Duras, Le Monde extérieur, Œuvres complètes, t. IV, éd. par Gilles Philippe, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2014, p. 933-934. Return to text

28 Christophe Meurée, « Un style prophétique », art. cit., p. 53. Return to text

29 Mathilde Bonazzi, « Le style-Minuit : vers la genèse d’un stéréotype », in Existe-t-il un style Minuit ?, op. cit., p. 26, [en ligne], DOI : https://books.openedition.org/pup/8866, consulté le 22 janv. 2025. Return to text

30 Loc. cit. Return to text

31 Nous nous permettons de renvoyer à notre ouvrage : Sandrine Vaudrey-Luigi, La Langue romanesque de Marguerite Duras : « une liberté souvenante », Paris, Garnier, « Investigations stylistiques », 2013. Return to text

32 Voir à ce sujet, Joël July, « Duras, Gallimard ou Minuit ? », in Existe-t-il un style Minuit ?, op. cit., p. 103-112, [en ligne], DOI : https://books.openedition.org/pup/8931, consulté le 22 janv. 2025. Return to text

33 Marguerite Duras, La Vie tranquille [1944], Œuvres complètes, t. I, op. cit., p. 158. Return to text

34 Sur ce point, voir Gilles Philippe, « La langue littéraire, le phénomène et la pensée », in La Langue littéraire, op. cit., p. 98. Return to text

35 On pourra se reporter à ce sujet à Gilles Philippe, « Sur Moderato cantabile et Détruire dit-elle : personnages sans point de vue, points de vue sans personnage », Revue des lettres modernes, série Duras no 4, « Le Personnage : miroitements du sujet », dir. par Florence de Chalonge, 2010, p. 77-89. Return to text

36 Voir à ce sujet, Gilles Philippe, Pourquoi le style change-t-il ?, Bruxelles, Les Impressions Nouvelles, p. 89-120 ; Gilles Philippe, « Marguerite Duras : un nouvel art de la prose », art. cit., p. xiii. Return to text

References

Electronic reference

Sandrine Vaudrey-Luigi, « Une première Duras ? », Cahiers Marguerite Duras, [online], 4 – 2024, Online since 26 mars 2025, connection on 21 avril 2025. URL : http://www.peren-revues.fr/cahiersmargueriteduras/878

Author

Sandrine Vaudrey-Luigi

Université de Bourgogne, CPTC
sandrine.vaudrey-luigi@u-bourgogne.fr